Équilibre chimique

Résultat de deux réactions chimiques simultanées dont les effets s'annulent mutuellement.

Équilibre chimique
Notions de base
Réaction chimique Équation bilan :

espèce chimique.
Stœchiométrie Coefficients stœchiométriques :
  • des réactifs :  ;
  • des produits :  ;
  • des inertes : .
Avancement de réaction
quantité du constituant .
Affinité chimique
potentiel chimique.
Deuxième principe de la thermodynamique Condition d'évolution spontanée :

à l'équilibre.
Réaction à pression et température constantes
Enthalpie libre
Enthalpie libre de réaction :
Constante d'équilibre État standard :
Quotient de réaction
activité chimique.
Progression de la réaction Déplacement des réactifs vers les produits :
, ,
Régression de la réaction Déplacement des produits vers les réactifs :
, ,
Condition d'équilibre Loi d'action de masse :
,
Condition de stabilité strictement.
Déplacement d'un équilibre chimique
Principe de modération de Le Chatelier « Lorsque les modifications extérieures apportées à un système physico-chimique en équilibre provoquent une évolution vers un nouvel état d'équilibre, l'évolution s'oppose aux perturbations qui l'ont engendrée et en modère l'effet. »
Ce principe n'est vrai que pour les paramètres intensifs conditionnant l'équilibre. Il existe des contre-exemples pour les paramètres extensifs.
Augmentation de la température À pression ou volume constant, déplacement dans le sens endothermique (loi de van 't Hoff).
Augmentation de la pression À température constante, déplacement dans le sens d'une diminution du volume, de la quantité totale de constituants (loi de Le Chatelier).
Augmentation du volume À température constante, déplacement dans le sens d'une augmentation de la pression, de la quantité totale de constituants.
Ajout d'un réactif ou d'un produit À pression et température constantes, pour les solutions idéales, déplacement dans le sens qui diminue la fraction molaire du constituant.
À volume et température constants, pour les mélanges de gaz parfaits, déplacement dans le sens qui diminue la quantité du constituant.
Ajout d'un inerte À pression et température constantes, pour les solutions idéales, déplacement dans le sens d'une augmentation de la quantité totale de constituants.
À volume et température constants, pour les mélanges de gaz parfaits, absence de conséquence.
Emploi d'un catalyseur L'équilibre est atteint plus vite, mais il n'est pas déplacé.
Équilibres chimiques simultanés
Couplage chimique Une réaction endergonique qui, seule, ne pourrait être spontanée, peut être provoquée par couplage avec une réaction exergonique simultanée.

Un équilibre chimique est le résultat de deux réactions chimiques simultanées dont les effets s'annulent mutuellement.

Une réaction telle que la combustion du propane avec l'oxygène, qui s'arrête lorsque l'un des réactifs est totalement épuisé, est qualifiée de réaction totale, complète ou irréversible. À contrario, une réaction comme l'estérification, aboutissant à un mélange stable dans le temps de réactifs et de produits, sans disparition totale de l'une des espèces chimiques, est qualifiée de réaction partielle, incomplète, réversible ou inversible[a] : ce type de réaction aboutit à un équilibre chimique. Au cours d'un processus de transformation chimique deux réactions peuvent s'opposer, l'une consommant des réactifs, l'autre consommant les produits de la première réaction pour recréer les réactifs initiaux. Une réaction est totale lorsqu'elle l'emporte sur sa réaction antagoniste. Un équilibre chimique apparaît lorsque la première réaction consomme les réactifs aussi vite que la seconde les recrée.

Une modification des conditions opératoires d'un équilibre chimique (modification de la pression ou de la température, ajout ou extraction de l'un des constituants du mélange réactionnel, etc.) peut favoriser l'une ou l'autre réaction. Ceci implique un déplacement de l'équilibre, c'est-à-dire l'obtention d'un nouvel état d'équilibre à une composition différente de celle de l'équilibre initial, mais contenant toujours les mêmes espèces. Un retour aux conditions opératoires initiales induit un retour à l'équilibre initial. Dans certains cas, la modification des conditions opératoires peut conduire à une rupture d'équilibre, c'est-à-dire l'obtention d'une réaction totale avec disparition de l'une des espèces.

Une réaction chimique se déplace spontanément dans le sens dicté par le deuxième principe de la thermodynamique. Une réaction qui diminue l'entropie ne peut par conséquent se produire seule, mais elle peut être provoquée. Dans un milieu réactionnel qui augmente globalement l'entropie, en présence d'autres réactions, un couplage chimique peut permettre d'obtenir une réaction qui serait impossible seule.

Historique

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La notion d'équilibre chimique est évoquée pour la première fois en 1803 par le chimiste français Claude-Louis Berthollet, à la suite de ses observations sur les rives du lac Natron lors de la campagne d'Égypte. Avant lui les réactions chimiques étaient supposées être toujours totales. Berthollet est le premier à observer et étudier un mélange de réactifs et de produits (en l'occurrence un mélange de carbonate et chlorure de calcium et de sodium) dont l'équilibre se déplace tantôt dans un sens tantôt dans l'autre, selon les conditions de température et de composition. Il en déduit que les réactions chimiques sont régies par des forces opposées, mais ne peut préciser la nature de celles-ci[1],[2],[3].

Il faut attendre la deuxième moitié du XIXe siècle pour que des progrès significatifs soient faits dans la compréhension des réactions et équilibres chimiques. En 1858 le physicien allemand Gustav Kirchhoff énonce sa relation liant la variation de la chaleur d'une réaction chimique à la différence des capacités calorifiques des produits et des réactifs. En 1865 les chimistes norvégiens Cato Guldberg et Peter Waage, en s'inspirant des propositions de Berthollet, montrent expérimentalement qu'il existe une relation entre les concentrations des espèces présentes à l'équilibre en solution. La constante d'équilibre qu'ils définissent est appelée « constante de Guldberg et Waage » ou constante de la loi d'action de masse. Un premier formalisme mathématique des équilibres chimiques est développé par le chimiste néerlandais Jacobus van 't Hoff. La relation portant son nom donne la variation de la constante d'équilibre en fonction de la chaleur de réaction[3].

En 1884 le chimiste français Henry Le Chatelier, toujours sur base d'expérimentations, énonce son « principe de modération », dit « principe de Le Chatelier », selon lequel un équilibre s'oppose aux changements extérieurs qui tentent de le modifier[3]. Il existe cependant des cas dans lesquels ce principe n'est pas vérifié, notamment pour l'ajout ou l'extraction d'une espèce du mélange réactionnel[4],[5]. Ce principe est également appelé « principe de Le Chatelier-Braun », du nom du physicien allemand Ferdinand Braun qui en donna en 1887 une première démonstration mathématique[6].

Les bases théoriques de la chimie physique sont posées par le physicien américain Willard Gibbs entre 1875 et 1878. Gibbs introduit les fonctions enthalpie libre et potentiel chimique [3]. En 1922 le physicien belge Théophile de Donder définit l'avancement de réaction et l'affinité chimique . Il relie ainsi l'évolution des réactions chimiques au deuxième principe de la thermodynamique et donne la condition d'évolution spontanée de toute réaction chimique[7],[8]. En 1923 le physicien américain Gilbert Lewis introduit l'activité chimique [9]. Ce formalisme mathématique permet en 1950 aux physiciens belges Ilya Prigogine et Raymond Defay[b] de démontrer rigoureusement les relations et principes formulés par leurs prédécesseurs[10].

Notions de base

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Principe de Berthelot, principe de Matignon

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Une réaction chimique est favorisée ou défavorisée par divers facteurs tels que la pression, la température, l'énergie apportée au mélange réactionnel. L'étude des réactions chimiques et des équilibres a conduit, dans la seconde moitié du XIXe siècle, à l'énoncé des deux principes empiriques suivants[11],[12],[13] :

« Principe de Berthelot - Facteur énergie.
Un système laissé à lui-même tend à évoluer de manière à libérer le plus de chaleur. »

Autrement dit, une réaction est favorisée si elle est exothermique, elle est défavorisée si elle est endothermique. Les réactions exothermiques ayant une très forte chaleur de réaction (enthalpie standard de réaction ), comme les réactions de combustion, sont souvent totales.

« Principe de Matignon - Facteur désordre.
Une réaction chimique évolue dans le sens de l'augmentation du nombre de ses molécules. »

Les réactions augmentant la quantité de matière dans le mélange réactionnel sont favorisées : la réaction de combustion d'un alcane avec l'oxygène est favorisée, car le nombre de moles de produits est supérieur à celui des réactifs ; en outre elle est exothermique, elle est donc doublement favorisée ce qui la rend totale. Le principe de Matignon est en accord avec le deuxième principe de la thermodynamique : les réactions dont l'entropie standard de réaction est positive sont favorisées, or une augmentation du nombre de moles d'un système thermodynamique à la suite d'une réaction correspond à une augmentation de l'entropie. Les réactions produisant un gaz à partir d'un solide ou d'un liquide sont donc également favorisées, car l'entropie d'un gaz est plus élevée que celle d'une phase condensée[c].

Lorsque ces deux principes, qui en eux-mêmes n'ont qu'un intérêt historique, entrent en concurrence au sein d'une même réaction, il apparaît un équilibre. Leur combinaison, qui fut effectuée par Gibbs et Duhem[d], conduit à l'étude de l'enthalpie libre standard de réaction , définie par :

Enthalpie libre standard de réaction :

avec la température à laquelle est effectuée la réaction. Ainsi[11],[12],[13],[14] :

  • lorsque et sont de signes opposés, les deux principes sont simultanément favorables ou défavorables :
    • si et , soit , selon les deux principes tous les facteurs sont défavorables : la réaction est impossible ;
    • si et , soit , selon les deux principes tous les facteurs sont favorables : la réaction est totale ;
  • lorsque et sont de même signe, les deux principes s'opposent, peut être positive ou négative : la réaction conduit à un équilibre d'autant plus déplacé que est éloignée de 0 :
    • si la réaction est peu favorisée, l'équilibre contiendra majoritairement des réactifs, peu consommés ;
    • si la réaction est favorisée, l'équilibre contiendra majoritairement des produits, les réactifs étant en grande partie consommés.

Le tableau suivant récapitule l'influence des deux facteurs sur la réaction[11],[12],[13],[14].

Classement des réactions chimiques.
Facteurs influant
sur la réaction
Principe de Matignon
Augmentation du désordre

favorable
Diminution du désordre

défavorable
Principe
de Berthelot
Réaction exothermique

favorable
Réaction
totale
Équilibre
exothermique
Réaction endothermique

défavorable
Équilibre
endothermique
Réaction
impossible

En toute rigueur cependant, une réaction telle que et n'est pas impossible. Elle ne peut pas être spontanée, c'est-à-dire avoir lieu seule, car elle diminue l'entropie, ce qui est contraire au deuxième principe de la thermodynamique. Néanmoins elle peut être provoquée : cette réaction pourrait par exemple avoir lieu par couplage chimique avec une autre réaction, de telle sorte que l'entropie globale créée par ces deux réactions soit positive, en accord avec le deuxième principe[15] (voir le chapitre Équilibres chimiques simultanés).

D'autre part, si l'un des facteurs et est significativement plus important que l'autre, une réaction à priori équilibrée peut être en réalité totale ou impossible. C'est le cas de la combustion du monoxyde de carbone CO en dioxyde de carbone CO2 en présence d'oxygène O2 :

Cette réaction est exothermique et diminue le nombre de ses molécules : elle est donc favorisée selon Berthelot et défavorisée selon Matignon, elle devrait être équilibrée. Cependant sa très forte exothermicité ( = −67,6 kcal/mol = −282,8 kJ/mol) la rend totale jusqu'à environ 1 000 °C[12].

Enfin, si les deux facteurs et sont peu marqués, une réaction à priori totale ou impossible peut être en réalité équilibrée. C'est le cas de la synthèse de l'iodure d'hydrogène HI en présence d'iode I2 et d'hydrogène H2 :

Cette réaction est faiblement exothermique ( = −9,4 kJ/mol) et ne modifie pas le nombre de ses molécules : elle devrait être totale selon Berthelot, mais est en fait équilibrée[12].

L'enthalpie libre standard de réaction ne tient compte que de la stœchiométrie et de la température, le mélange réactionnel étant considéré dans un état standard généralement différent des conditions réelles de réaction. Une étude plus fine des réactions chimiques passe par l'utilisation de l'enthalpie libre de réaction , qui, en plus de la température et de la stœchiométrie, prend en compte la pression et la composition du mélange réactionnel, et les activités chimiques des constituants[13].

Réaction directe et réaction inverse, cinétique des réactions

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Évolution dans le temps des vitesses des réactions dans une réaction totale et dans un équilibre chimique.
Dans une réaction totale, la vitesse de la réaction directe finit par s'annuler ; la réaction inverse est inexistante. Dans un équilibre chimique les vitesses finales des réactions directe et inverse s'égalisent et sont non nulles.
Évolution dans le temps des concentrations en réactif et produit dans une réaction totale et dans un équilibre chimique.
Dans une réaction totale, un réactif limitant, c'est-à-dire un réactif introduit en défaut par rapport à la stœchiométrie, disparaît totalement. Dans un équilibre, le mélange réactionnel final contient toutes les espèces de réactifs et de produits en quantités non nulles.

Un équilibre chimique implique deux réactions simultanées :

  • une réaction dans le sens réactifs produits appelée réaction directe, il s'agit généralement de la réaction intéressante pour la synthèse d'une espèce chimique donnée ;
  • une réaction dans le sens produits réactifs appelée réaction inverse, qui s'oppose à la réaction directe.

Dans un équilibre, l'une des deux réactions obéit au principe de Berthelot et l'autre au principe de Matignon : si l'une est exothermique, l'autre augmente le désordre du système réactionnel ; en conséquence, puisque les deux réactions ont des effets inverses, la première enfreint le principe de Matignon en diminuant le désordre, et la deuxième enfreint le principe de Berthelot en étant endothermique.

Lorsqu'une réaction est équilibrée, cela signifie que la vitesse de la réaction directe est égale à la vitesse de la réaction inverse. L'état d'équilibre obtenu dans ce cas peut être qualifié d'équilibre dynamique ou stationnaire : les réactions ont toujours lieu, mais globalement leurs effets s'annulent ; par exemple la réaction directe consomme les réactifs aussi vite que la réaction inverse les recrée, d'où une composition du mélange réactionnel stable dans le temps ; ou encore la réaction endothermique absorbe totalement la chaleur dégagée par la réaction exothermique, d'où un bilan énergétique globalement nul.

Dans le cas d'un équilibre impliquant deux réactifs et et deux produits et , on note l'équilibre sous la forme :

, , et sont des espèces chimiques, , , et les coefficients stœchiométriques respectifs, nombres positifs (voir paragraphe Stœchiométrie, avancement de réaction).

Dans le cas de réactions élémentaires, c'est-à-dire s'effectuant en une seule étape, les vitesses de réaction dépendent des concentrations , , et des espèces en présence et de et les constantes respectives des vitesses des réactions directe et inverse (qui suivent la loi d'Arrhenius) selon les expressions :

  • la vitesse de la réaction directe ;
  • la vitesse de la réaction inverse.

Dans une réaction totale, la réaction inverse est inexistante, ou du moins a-t-elle une vitesse négligeable devant la vitesse de la réaction directe : . À la fin d'une réaction totale, c'est-à-dire lorsque les concentrations des réactifs et produits ne varient plus, les réactifs ont totalement disparu s'ils ont été introduits à la stœchiométrie, sinon c'est le réactif introduit en défaut, ou réactif limitant, qui a totalement disparu.

Dans un équilibre chimique, la vitesse de déplacement de l'équilibre est égale à la différence entre la vitesse de la réaction directe et la vitesse de la réaction inverse : . Les deux vitesses de réaction finissent par s'égaliser sans s'annuler : (c'est la vitesse de l'équilibre qui s'annule ). Ceci entraîne, à l'équilibre, la relation suivante, appelée loi d'action de masse :

Cette relation lie les constantes des vitesses des deux réactions aux concentrations des réactifs et des produits à l'équilibre. Le rapport ainsi obtenu est appelé constante d'équilibre. Cette relation a été établie empiriquement par Guldberg et Waage. On verra par la suite comment établir rigoureusement cette relation selon les principes de la thermodynamique. Dans un équilibre chimique aucune espèce, que ce soit un réactif ou un produit, ne disparaît totalement.

Les expressions correctes des vitesses de réaction et de la constante d'équilibre doivent faire intervenir les activités chimiques des constituants, et non leur concentration ou leur pression molaire partielle souvent utilisées par approximation.

Stœchiométrie, avancement de réaction

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Soit une réaction chimique impliquant espèces chimiques . Son équation bilan s'écrit[16] :

Réaction chimique

Dans cette écriture, les coefficients stœchiométriques sont positifs, les constituants à gauche de la flèche sont les réactifs, ceux à droite les produits. Cette équation peut être réécrite selon la convention stœchiométrique[16],[17],[18] :

Réaction chimique

en attribuant une valeur négative aux coefficients stœchiométriques des réactifs et positive à ceux des produits :

  • pour un réactif ;  ;
  • pour un produit ;  ;
  • pour un inerte.

Considérons, à un instant quelconque, une variation élémentaire de la quantité du réactif (). Les variations élémentaires des quantités des autres constituants sont proportionnelles à celle de selon l'équation bilan de la réaction[19] :

  • les quantités des réactifs décroissent simultanément (de même si elles croissent) ; la quantité de tout réactif () varie dans le même sens que celle de selon :
  • les quantités des produits croissent quand celles des réactifs décroissent (et inversement) ; la quantité de tout produit () varie dans le sens inverse de celle de selon :
  • quel que soit le sens de déplacement de la réaction, la quantité de tout inerte () ne varie pas :

Les rapports sont donc tous égaux à . On appelle avancement de réaction la variable telle que[16],[19] :

Avancement de réaction :

Cette variable unique lie, par la stœchiométrie de la réaction, les variations des quantités de l'ensemble des constituants du mélange réactionnel. Au début de la réaction, au temps , l'avancement de réaction est nul, . Puis, à tout instant au cours de la réaction, la quantité d'un constituant quelconque peut être calculée par intégration de la relation précédente[16] :

d'où, pour tout  :

avec :

  • la quantité du constituant à l'instant initial  ;
  • la quantité du constituant à l'instant  ;
  • l'avancement de réaction à l'instant  ; à l'instant initial, par définition, .

Pour un inerte, constituant n'intervenant pas dans la réaction (), la quantité ne varie pas au cours de la réaction : on a à tout instant.

L'avancement est une variable de composition extensive : par exemple, si l'on double la quantité de chacun des constituants, l'avancement de réaction double également. L'avancement de réaction peut indifféremment augmenter ou diminuer : le signe de donne le sens de déplacement de la réaction. Lorsque l'avancement de réaction augmente, soit  :

  • les réactifs disparaissent :  ;
  • les produits apparaissent :  ;
  • la réaction directe l'emporte sur la réaction inverse : et  ;
  • l'équilibre se déplace de la gauche (réactifs) vers la droite (produits) ;
  • la réaction progresse.

À l'inverse, lorsque l'avancement de réaction diminue, soit  :

  • les réactifs apparaissent :  ;
  • les produits disparaissent :  ;
  • la réaction directe est dominée par la réaction inverse : et  ;
  • l'équilibre se déplace de la droite (produits) vers la gauche (réactifs) ;
  • la réaction régresse.

Puisque l'avancement est nul au début de la réaction, il prend une valeur positive, , lorsque la réaction progresse et une valeur négative, , lorsque la réaction régresse.

La vitesse de déplacement de l'équilibre est égale à la dérivée de l'avancement de réaction par rapport au temps [20],[21] :

Vitesse de réaction

La vitesse de réaction est positive, , lorsque la réaction progresse (l'avancement de réaction croît) et négative, , lorsque la réaction régresse (l'avancement de réaction décroît) ; à l'équilibre . Pour tout constituant (réactif, produit ou inerte), la vitesse d'apparition est égale à[20],[21] :

Vitesse d'apparition du constituant

Comme la vitesse de réaction, la vitesse d'apparition d'un constituant peut être positive (le constituant apparait) ou négative (le constituant disparait).

Affinité chimique, condition d'évolution spontanée et condition d'équilibre

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L'affinité chimique est une fonction d'état définie à partir des potentiels chimiques [22] :

Affinité chimique :

Considérant la relation pour tout constituant :

on a la relation :

Le deuxième principe de la thermodynamique implique que l'évolution spontanée d'une réaction chimique ne peut se faire que si[23] :

Condition d'évolution spontanée :

et ne peuvent donc être que de même signe[23] :

  • une progression est associée à un signe positif : et , la réaction progresse ;
  • une régression est associée à un signe négatif : et , la réaction régresse.

Un système fermé est à l'équilibre lorsque les variables intensives qui le décrivent (température, pression et potentiels chimiques des réactifs et des produits) sont homogènes dans tout le système et restent constantes au cours du temps. L'équilibre est atteint lorsque l'affinité est nulle[23] :

Condition d'équilibre :

En termes de potentiel thermodynamique, ces relations dépendent des conditions opératoires maintenues constantes en cours de réaction :

  • pour une réaction chimique effectuée à et constantes : ,
    Condition d'évolution spontanée de tout système chimique à et constantes :
    • lorsque ne varie plus, est nulle[24], la fonction est minimale. Cela signifie que le système réactionnel est à l'équilibre :
    À l'équilibre :
  • pour une réaction chimique effectuée à et constants : ,
    • la fonction énergie libre ne peut que décroître :
    Condition d'évolution spontanée de tout système chimique à et constants :
    • lorsque ne varie plus, est nulle, la fonction est minimale. Cela signifie que le système réactionnel est à l'équilibre :
À l'équilibre :

Les relations suivantes définissent également l'affinité chimique :

Affinité chimique :

Équilibres hétérogènes, rupture d'équilibre

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Un équilibre homogène est un équilibre dans lequel l'ensemble des réactifs et des produits se situent dans la même phase ; par exemple :

  • l'équilibre du dioxyde et du trioxyde de soufre en phase gaz :  ;
  • l'autoprotolyse de l'eau en phase aqueuse :  ;
  • l'estérification en phase aqueuse : .

Un équilibre hétérogène est un équilibre dans lequel l'un au moins des réactifs ou produits se situe dans une phase différente des autres constituants du milieu réactionnel ; par exemple :

  • la précipitation ou dissolution du chlorure de sodium en phases aqueuse et solide :  ;
  • la dissolution du dioxyde de carbone en phases gaz et aqueuse :  ;
  • la réduction de l'oxyde de zinc en phases solide et gaz :  ;
  • l'équilibre des formes allotropiques du carbone diamant et graphite : , chacun des deux solides constituant une phase à lui seul ;
  • la nitration aromatique et la sulfonation aromatique faisant intervenir une phase organique liquide et une phase minérale acide liquide, les deux liquides n'étant pas miscibles.

Dans le cas des équilibres hétérogènes, si l'une des phases disparait au cours de la réaction l'état obtenu en fin de réaction n'est pas un état d'équilibre chimique : il y a rupture d'équilibre[25],[26]. D'une façon générale, tout système en équilibre chimique présentant une variance faible (1 le plus souvent) présente des ruptures d'équilibre si l'opérateur impose plus de paramètres que ne le permet la variance. Par exemple, pour un équilibre de variance 1 l'opérateur peut fixer la température mais subit la concentration. Si l'opérateur impose une concentration autre que celle dictée par l'équilibre, alors le système réactionnel, à la température fixée, est hors équilibre : il y a rupture d'équilibre. Une rupture d'équilibre peut permettre d'obtenir une réaction totale, par épuisement de l'un des réactifs[27].

Réaction à pression et température constantes

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Les démonstrations qui suivent sont valables pour une réaction ayant lieu à et constantes, en se basant sur l'enthalpie libre .

Définitions

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Enthalpie libre de réaction

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L'enthalpie libre de réaction est définie par :

avec l'enthalpie libre molaire partielle ou potentiel chimique du constituant .

La différentielle de l'enthalpie libre est égale à :

d'où, à et constantes :

Cette grandeur est également notée avec l'opérateur de Lewis :

L'enthalpie libre de réaction et l'affinité chimique sont donc définies par[22],[23] :

Enthalpie libre de réaction :

et à pression et température constantes on a[23] :

À et constantes :

Enthalpie libre standard de réaction et quotient de réaction

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Le potentiel chimique de chaque constituant dans le mélange réactionnel peut être exprimé en fonction du potentiel chimique de ce constituant dans un état standard à la même température que le mélange réactionnel et de l'activité du constituant selon la relation[29] :

Potentiel chimique :

L'état standard peut être à une autre pression, une autre composition et dans un autre état que le mélange réactionnel réel, néanmoins il est obligatoirement à la même température que celui-ci.

L'expression de l'enthalpie libre de réaction est développée selon :

Les termes standards sont regroupés dans une grandeur appelée enthalpie libre standard de réaction :

Enthalpie libre standard de réaction :

Les termes correspondant aux activités sont regroupés dans le quotient de réaction[29],[30] :

Quotient de réaction :

En conséquence l'enthalpie libre de réaction s'écrit[29] :

Enthalpie libre de réaction :

Constante d'équilibre

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La constante d'équilibre , qui est toujours positive, est définie par la relation avec l'enthalpie standard de réaction[31] :

Constante d'équilibre :

La constante d'équilibre peut être déterminée expérimentalement ou calculée à partir des seules propriétés des réactifs et produits à l'état standard[31],[32],[33],[34]. Les propriétés dans l'état standard ne dépendant que de la température, la constante d'équilibre ne dépend elle-même que de la température. L'état standard est choisi à la même température que le mélange réactionnel réel (mais la pression et la composition peuvent être différentes).

L'enthalpie libre standard de réaction est liée à l'enthalpie standard de réaction et à l'entropie standard de réaction par la relation :

Lorsque et sont de même signe, peut être négative (, progression de la réaction favorisée) ou positive (, régression favorisée) : la réaction produit un équilibre d'autant plus déplacé vers la droite (vers les produits) que décroît et augmente. On retrouve ici les principes de Berthelot et Matignon selon lesquels la réaction est favorisée si et  : si tel est le cas, et , la réaction est totale. À contrario, la réaction est impossible si et , auquel cas et [35]. Il est considéré en pratique qu'une réaction est totale pour et impossible pour [36]. La température à laquelle et est appelée température d'inversion[37],[38] :

Température d'inversion :

Elle correspond à la limite à partir de laquelle la réaction directe est favorisée ou non : pour une réaction exothermique () il vaut mieux travailler à une température inférieure à , pour une réaction endothermique () il vaut mieux travailler à une température supérieure[39].

Les relations de Kirchhoff permettent d'établir une expression rigoureuse de la constante d'équilibre :

avec :

  • l'enthalpie standard de réaction à  ;
  • l'enthalpie molaire standard du constituant à  ;
  • l'entropie standard de réaction à  ;
  • l'entropie molaire standard du constituant à  ;
  • la capacité thermique isobare standard de réaction, dépendante de  ;
  • la capacité thermique isobare molaire standard du constituant , dépendante de  ;
  • la température de référence.

Sur des plages de température réduites l'enthalpie standard de réaction et l'entropie standard de réaction peuvent être considérées comme des constantes selon l'approximation d'Ellingham, ce qui revient à considérer que [40]. Aussi, en introduisant deux constantes et telles que :

on obtient[40] :

La constante d'équilibre peut être trouvée dans la littérature pour de nombreux équilibres sous la forme :

Cette expression est la plus courante, il est nécessaire de vérifier son domaine de validité en température qui est souvent assez réduit. Puisque et sont le plus souvent de même signe dans une réaction équilibrée, les constantes et sont le plus souvent de même signe.

D'autre part, la relation de Gibbs-Helmholtz permettant d'écrire, à pression constante[31] :

on obtient la relation de van 't Hoff qui définit l'évolution de la constante d'équilibre en fonction de la température[31] :

Relation de van 't Hoff :

En intégrant cette relation, en supposant que l'enthalpie standard de réaction ne varie pas avec la température, on obtient :

Si l'on connait les valeurs de la constante d'équilibre et de l'enthalpie standard de réaction à la température , il est ainsi possible de déterminer la valeur de la constante d'équilibre à la température . Sous cette forme, les deux constantes et définies précédemment valent :

  •  ;
  • .

On a donc, finalement :

En conséquence l'enthalpie libre de réaction s'écrit :

Enthalpie libre de réaction :

Enthalpie libre de réaction et équilibre

modifier

Sens de déplacement d'un équilibre, condition d'équilibre

modifier
Évolution d'un équilibre chimique à pression et température constantes selon le signe de l'enthalpie libre de réaction .
La réaction progresse lorsque . La réaction régresse lorsque . L'équilibre est atteint lorsque .

Étant donné la condition d'évolution spontanée de toute réaction et la définition de l'enthalpie libre de réaction :

on a la condition d'évolution spontanée à pression et température constantes[42] :

Condition d'évolution spontanée à et constantes :

Ainsi, à pression et température constantes, et ne peuvent être que de signes contraires[23] :

  • et , la réaction progresse : l'équilibre se déplace de la gauche vers la droite, des réactifs sont consommés et des produits apparaissent ;
  • et , la réaction régresse : l'équilibre se déplace de la droite vers la gauche, des produits sont consommés et des réactifs apparaissent.

À l'équilibre l'enthalpie libre ne varie pas, [24], d'où deux cas possibles :

  • et , la réaction pourrait avoir lieu car le potentiel de réaction est non nul, mais l'avancement de réaction ne varie pas ; les causes de ce défaut de réaction peuvent être :
    • une cinétique extrêmement lente (la vitesse de réaction ), l'équilibre est dit instable, c'est le cas de la transformation du diamant en graphite[f]. Un catalyseur permet d'augmenter la vitesse d'une réaction ; à contrario un inhibiteur la diminue ; dans les deux cas l'équilibre n'est pas déplacé pour autant (voir paragraphe Emploi d'un catalyseur) ;
    • ou l'absence d'un facteur déclenchant (énergie, étincelle, site de nucléation, circuit de pile électrique non fermé…), l'équilibre est dit métastable[g] ;
  • et , la réaction a eu lieu, le potentiel de réaction est désormais nul ; l'équilibre est dit stable ; on ne s'intéresse par la suite qu'à ce cas de figure.
À l'équilibre :

L'enthalpie libre de réaction étant liée aux enthalpie et entropie de réaction par la relation , l'état d'équilibre correspond à l'égalité , soit l'équilibre entre le facteur énergie et le facteur désordre.

Loi d'action de masse

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En considérant la définition de l'enthalpie libre de réaction et la condition d'évolution spontanée à pression et température constantes :

hors équilibre on a :

  • si alors , d'où  : la réaction progresse ;
  • si alors , d'où  : la réaction régresse.

Lorsque la fonction est minimale, le système réactionnel est à l'équilibre ; dans ces conditions . On obtient , soit la loi d'action de masse :

Loi d'action de masse : à l'équilibre.

Puisque par définition et que à l'équilibre, la loi d'action de masse est vraie quelles que soient les conditions de déroulement de la réaction (pression, volume, entropie ou température constants).

Les activités chimiques qui interviennent dans le quotient de réaction dépendent de la pression , de la température et de la composition du mélange réactionnel, c'est-à-dire des quantités des réactifs et produits de réaction, mais aussi des inertes :

.

La pression et la température , ainsi que les quantités des constituants dans le mélange réactionnel à l'instant initial (au temps ) sont des données du problème. La réaction est menée à pression et température constantes. Les quantités des constituants évoluent au cours de la réaction, hormis celles des inertes. L'équation comporte par conséquent autant d'inconnues qu'il y a de réactifs et de produits. Pour tout constituant intervenant dans la réaction, la quantité varie au cours du temps selon :

avec :

  • la quantité du constituant à l'instant initial  ;
  • la quantité du constituant à l'instant  ;
  • l'avancement de réaction à l'instant  ; rappelons qu'à l'instant initial, par définition, .

On peut donc remplacer dans l'expression des activités les par . Les pression, température et composition initiale étant données, le quotient de réaction devient alors à tout instant (y compris hors équilibre) une fonction de la seule variable avancement de réaction . L'équilibre est donc atteint pour l'avancement tel que :

À l'équilibre :

La quantité de chaque réactif et produit à l'équilibre est à postériori calculée par . L'équation n'a pas nécessairement une solution unique en . Il est entendu que sont écartées d'office les solutions mathématiques induisant des quantités de constituants négatives (rappelons toutefois que l'avancement de réaction , lui, peut être négatif). Si plusieurs solutions sont trouvées, il est nécessaire de déterminer laquelle est la bonne, ou du moins laquelle est la plus réaliste du point de vue de la thermodynamique : celle qui minimise la fonction .

Condition de stabilité d'un équilibre

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Condition de stabilité d'un équilibre chimique en fonction du signe de .
L'équilibre n'est stable que lorsque . De plus l'équilibre réel est celui pour lequel l'enthalpie libre a atteint le minimum global sur l'ensemble des valeurs possibles de l'avancement de réaction .

D'un point de vue mathématique, un minimum de est atteint si, en plus de l'annulation de sa dérivée première, sa dérivée seconde est positive strictement, soit, à l'équilibre[44],[45] :

À l'équilibre

, condition d'équilibre
, condition de stabilité

C'est à cette seconde condition seulement que l'équilibre pourra être qualifié de stable.

Il est impossible que à l'équilibre, ce qui supposerait un maximum de la fonction , et donc que a crû. Si cette solution est mathématiquement possible, elle est irréaliste du point de vue de la thermodynamique et doit donc être écartée ; mathématiquement, il s'agit d'un équilibre instable. Il est possible en revanche qu'à l'équilibre la dérivée seconde et la dérivée troisième  : l'enthalpie libre a atteint un point d'inflexion et l'équilibre est un équilibre métastable, la moindre perturbation relancera la réaction jusqu'à ce qu'elle atteigne un équilibre stable. La situation est possible du point de vue de la thermodynamique. Si les dérivées seconde et troisième de l'enthalpie libre sont nulles à l'équilibre, la stabilité de l'équilibre doit être recherchée en étudiant les dérivées d'ordre supérieur. Si la première dérivée non nulle est d'ordre impair, alors l'équilibre est métastable, quel que soit son signe[h] ; si l'ordre est pair, l'équilibre est stable si cette dérivée est positive, il est instable autrement[i]. La condition de stabilité s'écrit donc de façon plus générale[44] :

Condition de stabilité générale
À l'équilibre, il existe entier naturel non nul tel que ,
toutes les dérivées d'ordre inférieur étant nulles.

Il est nécessaire aussi de vérifier que le minimum atteint n'est pas un minimum local, c'est-à-dire un minimum auquel la réaction revient si elle subit de petites perturbations, mais dont la réaction s'éloigne définitivement sous des perturbations plus importantes, conduisant à un autre minimum de . L'équilibre chimique à un minimum local de est un équilibre stable, néanmoins il ne s'agit pas de celui dans lequel l'enthalpie libre est minimale dans les conditions de la réaction. L'enthalpie libre peut présenter plusieurs minimums locaux. L'équilibre chimique réel est celui pour lequel l'enthalpie libre atteint le minimum global sur l'ensemble des valeurs possibles de l'avancement de réaction [j].

Les situations d'équilibre métastable ou de minimum local ne sont que rarement observées expérimentalement, mais elles peuvent être obtenues lors de simulations numériques d'équilibres. Les dérivées première et seconde de ainsi que la possibilité d'un minimum local doivent être impérativement vérifiées pour garantir le résultat. Insistons également sur le fait que les modèles d'activité chimique ou les équations d'état utilisés dans les calculs thermodynamiques restent basés sur un certain nombre d'hypothèses pouvant conduire à des résultats numériquement corrects, mais néanmoins totalement irréalistes, surtout lorsque ces modèles sont employés en dehors de leur domaine de validité.

Pour vérifier la condition de stabilité :

la constante d'équilibre ne dépendant que de la température, d'où :

Le quotient de réaction est toujours positif par définition. Pour vérifier que à l'équilibre, il faut donc vérifier que :

Condition de stabilité de l'équilibre :

Loi d'Arrhenius

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Reprenons la convention d'écriture d'un équilibre chimique dans laquelle les coefficients stœchiométriques sont tous positifs (voir paragraphe Stœchiométrie, avancement de réaction) :

On écrit, si les deux réactions sont des réactions élémentaires :

  • la vitesse de la réaction directe :  ;
  • la vitesse de la réaction inverse :  ;

avec :

  • l'activité du constituant  ;
  • la constante de vitesse de la réaction directe exprimée selon la loi d'Arrhenius ;
  • la constante de vitesse de la réaction inverse ;
  • et étant les énergies d'activation respectives ;
  • et étant les facteurs de fréquence respectifs.

À l'équilibre, l'égalité des vitesses des deux réactions conduit à :

Noté selon la convention stœchiométrique, avec les coefficients de stœchiométrie des réactifs négatifs, le terme de droite est le quotient de réaction :

On peut en conséquence, à l'équilibre, écrire, en considérant également la loi d'action de masse établie précédemment :

d'où les relations entre loi d'Arrhenius, constante d'équilibre et enthalpie libre standard de réaction :

et finalement, pour des réactions élémentaires[46],[47],[48] :

Enthalpie standard de réaction :
Entropie standard de réaction :

Récapitulatif

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De façon générale, à l'équilibre et hors équilibre[49] :

  • à et constantes, l'évolution spontanée de la réaction est dictée par le second principe de la thermodynamique :
  • enthalpie libre de réaction :
  • potentiels chimiques :
  • enthalpie libre standard de réaction, potentiels chimiques à l'état standard et constante d'équilibre :
  • quotient de réaction et activités :

Avec les relations :

L'enthalpie libre standard de réaction , liée à la constante d'équilibre , ne permet de définir que l'équilibre du système réactionnel. Le système réactionnel hors équilibre est étudié à l'aide de l'enthalpie libre de réaction . En effet, hors équilibre on a[49] :

  • si , alors et  : la réaction progresse ;
  • si , alors et  : la réaction régresse ;

et à l'équilibre[49] :

À l'équilibre : , soit (loi d'action de masse)

La constante d'équilibre peut être :

  • calculée à partir des propriétés des réactifs et des produits dans leur état standard ;
  • calculée à l'aide des paramètres de la loi d'Arrhenius des constantes dans l'expression des vitesses des réactions directe et inverse ;
  • déterminée expérimentalement ;
  • trouvée dans la littérature pour de nombreux équilibres.

Lors d'un calcul d'équilibre, il convient également de vérifier que la solution obtenue correspond bien à un minimum de la fonction selon la condition de stabilité :

Condition de stabilité de l'équilibre : , soit

Ces inégalités sont des inégalités strictes. Si la dérivée seconde de l'enthalpie libre est négative ou nulle, l'équilibre n'est pas stable et la réaction reprendra à la moindre perturbation pour atteindre un autre équilibre plus stable.

Déplacement d'un équilibre chimique

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Principes généraux

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Principe de modération de Le Chatelier

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Soit un milieu réactionnel à l'équilibre. On modifie l'une des conditions de cet équilibre : température, pression, volume ou concentration de l'un des constituants. La réaction tend à rétablir l'équilibre, pour peu que les nouvelles conditions opératoires le permettent (pour peu que l'on ne soit pas en conditions de rupture d'équilibre). À la fin du XIXe siècle Le Chatelier (en 1884, généralisant la loi concernant la température publiée auparavant par van 't Hoff la même année) et Braun (en 1887) énoncèrent indépendamment l'un de l'autre un principe régissant ces déplacements d'équilibre[6]. Ce principe est connu sous le nom de principe de modération, principe de Le Chatelier ou principe de Le Chatelier-Braun. Il énonce que :

« Principe de modération de Le Chatelier (1884)[50],[51],[52]
Lorsque les modifications extérieures apportées à un système physico-chimique en équilibre provoquent une évolution vers un nouvel état d'équilibre, l'évolution s'oppose aux perturbations qui l'ont engendrée et en modère l'effet. »

Le principe de Le Chatelier n'est cependant vrai que pour les modifications des paramètres intensifs qui conditionnent l'équilibre[6],[53] :

  • une augmentation de température déplace l'équilibre dans le sens qui absorbe de la chaleur (endothermique) et donc qui diminue la température (loi de van 't Hoff) ;
  • une augmentation de pression déplace l'équilibre dans le sens qui diminue le nombre de constituants dans le mélange et donc qui diminue la pression (loi de Le Chatelier) ;
  • l'augmentation du potentiel chimique d'un constituant (par augmentation de la quantité de ce constituant - réactif, produit, inerte) déplace l'équilibre dans le sens qui diminue ce potentiel chimique.

Une augmentation du volume, qui est un paramètre extensif, induit un déplacement dans le sens de l'augmentation du volume du milieu réactionnel, et non de sa diminution. Toutefois, le principe de Le Chatelier est respecté si l'on considère la pression de ce système, qui est diminuée par l'augmentation du volume et augmentée par la réaction[6].

Pour un équilibre dans lequel on modifie la composition par ajout ou extraction d'un constituant (réactif, produit, inerte), le principe de Le Chatelier peut ne pas être respecté si l'on considère la quantité de ce constituant, qui est un paramètre extensif. Il existe en effet des contre-exemples dans lesquels, sous certaines conditions, la réaction régresse lors d'un ajout de réactif, au lieu de progresser : la réaction augmente la quantité du réactif ajouté au lieu de la diminuer[4],[5]. Toutefois, le principe de Le Chatelier est respecté si l'on considère le potentiel chimique de ce constituant, qui est augmenté par l'ajout du constituant et diminué par la réaction[6].

Principe général d'étude du déplacement d'un équilibre chimique

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Soit un milieu réactionnel à l'équilibre. Son affinité chimique initiale est donc nulle :

équilibre initial :

On modifie l'une des conditions opératoires (par exemple la pression, la température ou la quantité de l'un des constituants). Cette condition est modifiée de et devient . Si l'on augmente , alors  ; si l'on diminue , alors .

Dans un premier temps, on considère que le milieu réactionnel est modifié en l'absence de réaction, il se trouve donc hors équilibre chimique après modification de . On considère que seule est modifiée et que les autres conditions opératoires restent constantes. L'affinité chimique varie de :

et devient :

après modification, avant réaction :

On considère ensuite que la réaction débute seulement après cette modification. Le deuxième principe de la thermodynamique induit que la réaction se déplace dans le sens tel que[54],[55] :

condition d'évolution spontanée :

On obtient la relation qui détermine le sens de déplacement de la réaction[56] :

Condition de déplacement de l'équilibre :

À constantes, on modifie la valeur de , soit . Si , l'affinité chimique est modifiée et n'est plus nulle ; le système se trouve hors équilibre et la réaction se déplace pour retrouver l'équilibre, soit . L'étude du déplacement de la réaction consiste donc :

  1. à établir, dans les conditions de l'équilibre initial, l'expression de et son signe ;
  2. à modifier la condition opératoire , ce qui revient à imposer le signe de  ;
  3. à déduire le signe de de la condition d'évolution spontanée, et donc le sens de déplacement de la réaction.

Si et sont de même signe, alors ne peut être que positif et la réaction ne peut que progresser. Inversement, s'ils sont de signes opposés alors la réaction ne peut que régresser.

Si on étudie les différentielles d'ordre supérieur. En supposant que l'affinité est fois dérivable, le développement en série de Taylor donne :

avec la différentielle d'ordre de à constantes. On étudie le premier ordre auquel à l'équilibre. On a alors :

d'où la condition de déplacement de l'équilibre :

Condition de déplacement de l'équilibre :
avec, à l'équilibre, et pour tout .

Il se peut que n'existe pas, autrement dit que quel que soit on ait  : dans ce cas l'équilibre est neutre, totalement insensible à la modification de . Par exemple, l'ajout ou l'extraction du composant de la phase hétérogène d'un équilibre n'a aucune influence sur l'équilibre. De même, un équilibre est insensible à l'ajout ou l'extraction d'un inerte à volume et température constants. Si est impair, alors le signe de dépend du signe de  : l'augmentation et la diminution de ont des conséquences inverses sur la réaction. Par exemple, l'augmentation et la diminution de la température, ou de la pression, déplacent l'équilibre dans des sens opposés. Si est pair, alors le signe de ne dépend pas du signe de  : la réaction se déplace dans le même sens quelle que soit la modification de . Par exemple, dans certaines conditions de composition et de stœchiométrie, à pression et température constantes, la réaction régresse que l'on ajoute ou extraie l'un des réactifs.

Principes généraux de déplacement de l'équilibre

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Selon les conditions opératoires, on considère le potentiel thermodynamique , fonction des variables , tel que :

Soit la variable conjuguée de  :

Variable conjuguée de  :

Note - La « variable conjuguée » s'entend ici au sens de dérivée partielle du potentiel thermodynamique par rapport à la variable , ce qui implique de tenir compte de son signe. Ainsi, au sens de l'enthalpie libre , la variable conjuguée de la pression est le volume, . Mais au sens de l'énergie libre , la variable conjuguée du volume est l'opposé de la pression, .

Le théorème de Schwarz donne :

On note la variation de due à la réaction dans les conditions constantes :

La condition de déplacement de l'équilibre devient finalement :

Condition de déplacement de l'équilibre :

On en déduit que :

Une augmentation de déplace la réaction dans le sens impliquant la diminution de sa variable conjuguée . Une diminution de déplace la réaction dans le sens impliquant l'augmentation de sa variable conjuguée .

On note la variation de