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Joseph Malègue
Description de l'image Joseph Malègue circa 1933.JPG.
Nom de naissance Joseph Malègue
Naissance
La Tour-d'Auvergne
Décès (à 64 ans)
Nantes
Auteur
Langue d’écriture français
Genres
roman, essais théologiques

Joseph Malègue, né le à La Tour-d'Auvergne, mort à Nantes le , est un écrivain français.

Il appartient à la petite-bourgeoisie rurale, liée aux élites catholiques en déclin (La Fin des notables de Daniel Halévy), évincées après 1870 par la bourgeoisie républicaine.

Ce monde est perturbé par la loi de séparation des Églises et de l'État de 1905, puis par la crise moderniste, malaise catholique en matière d'historicité des évangiles qui persiste aujourd'hui.

Or, les études de Malègue à Paris le mettent longuement au contact des grands acteurs et intelligences (de tous bords) de ces deux très grands troubles. Pour Hervé Serry, c'est par ceux-ci que la « renaissance littéraire catholique » d'après 1920 s'explique même si les écrivains « renaissants » n'en saisissent pas le sens.

Au contraire, l'immense culture des formations — philosophique, théologique, sociologique, littéraire, économique, juridique — d'un Malègue polyglotte le prépare à comprendre ce qu'ils appréhendent mal intellectuellement (le modernisme), ou sociologiquement (le déclin des notables catholiques).

Son premier roman Augustin ou Le Maître est là paru en 1933 (entamé dès 1912) le consacre comme un « grand de la littérature» tardivement, mais Émile Goichot (en 1988), le considère comme « le » roman du modernisme[1]

La trilogie qui doit lui succéder, Pierres noires : Les Classes moyennes du Salut, raconte l'autre grande crise catholique avec la même lucidité. Elle aurait dû former une vaste fresque de 3 000 pages avec Augustin ou Le Maître est là. Mais la veille même de l'entrée des Allemands dans Nantes en juin 1940, on trouve à Malègue un cancer incurable. Malgré son acharnement les six mois qui lui restent à vivre, il ne peut l'achever. Ce roman posthume largement entamé est publié en 1958.

Dans Augustin ou Le Maître est là, roman « philosophique » et de la mort de Dieu (Lebrec), qui dit aussi la beauté des femmes, la splendeur des paysages, les sons, couleurs, odeurs, la pensée jaillit du récit concret pour marquer durablement ses lecteurs jusqu'au XXI e siècle avec des gens comme André Manaranche ou le Pape François[note 1]. Geneviève Mosseray y découvre en 1996, enfoui et fondu dans l'intrigue, le jeu de la pensée de Blondel, jamais aperçu auparavant.

Tous les critiques comparent Malègue à Marcel Proust à cause de l'abondance de ce qu'il enregistre, ensuite disséqué longuement et finement, surtout dans Pierres noires : beauté des femmes encore, mais aussi revers de fortunes, mariages malheureux, suicides illustrant la fin des notables après 1870.

Mystique et amoureux de l'intelligence (y compris dans ses nombreux essais et nouvelles , Malègue cherche par des formules audacieuses, comme « ce que le Christ ajoute à Dieu » à penser et écrire l'histoire. Par de nouveaux concepts aussi, comme « classes moyennes du Salut » (dont le pape parle souvent, en partie erronément).

W.Marceau (en 1987) compare sa pensée à celle d'Henri Bergson. En 2002, Alain Bladuche-Delage dans La Croix, cite un critique de 1933, admiratif de Malègue qui le décrit cependant comme « démodé ». Bladuche explique, tout aussi élogieusement, que Malègue le demeure aujourd'hui. Ambroise-Marie Carré le trouvait inoubliable en 2003.

La Civiltà Cattolica (août 2010), place Malègue au même rang que Mauriac, Claudel, Maritain, Mounier. Yves Chevrel en 2013, affirme qu'il aborde les crises religieuses de l'époque « avec la plus grande ampleur ».


Biographie modifier

Milieu social et familial modifier

 
Plaque commémorative, inaugurée le 1er juillet 1956 par Jacques Bardoux

Le père de Malègue, François Malègue, né en 1825, fils de menuisier. Le notaire de Besse-en-Chandesse, frappé par son intelligence, le prend à son service à ses 15 ans et François devient clerc de notaire. Trente ans plus tard, en 1870, il a assez économisé pour racheter l'étude de La Tour-d'Auvergne et devenir lui-même notaire.

En 1875, à 50 ans, il épouse Anne Mouret âgée de 22 ans. Joseph est leur premier enfant qui sera suivi d'un garçon et trois filles.

François Malègue a des traits du père de Jean-Paul Vaton dans Pierres noires : Les Classes moyennes du Salut : forte autorité, volonté d'ascension sociale. Il lui ressemble en ce qu'il se différencie des notables tout en en demeurant proche, notamment par ses convictions religieuses, certes discrètement manifestées (il a à l'égard des rites chrétiens familiaux, la même réserve que le père d'Augustin dans Augustin ou Le Maître est là).

Durant leurs vacances à Besse, les Malègue sont reçus par des notables (comme les Vaton), les Tissier-Aubergier « dont la fortune était grande et l'un des membres maître des requêtes à Paris[2]. »

 
La maison natale, place Joseph Malègue à La Tour-d'Auvergne

François abandonne son étude pour devenir juge de paix à Saint-Bonnet-le-Château. Lorsqu’est promulguée la loi de séparation des Églises et de l'État en 1905, il refuse de jouer le rôle qu'il lui est imparti en tant que juge dans les procédures d'expulsion des couvents. Il est révoqué[3]. Lebrec écrit qu'il reprend la pratique religieuse en 1914 et meurt en 1917.

Pierres noires est pour Claude Barthe la recréation par Malègue de l'univers de son enfance et de sa jeunesse « une saisissante fresque historique de l'installation de la République [...] : laïcisation des instituteurs, changement de mains de la fortune et du pouvoir qui passe d'une classe de notables [...] à une nouvelle classe dirigeante[4]. »

Le Dictionnaire de spiritualité décrit l'enfance de Malègue comme typique d'une « existence chrétienne, aux racines rurales et bourgeoises, ébranlée par la séparation des Églises et de l'État »[5].

Ce milieu est celui des écrivains du « renouveau catholique » dont Hervé Serry souligne le discours « empli de la vision d'un monde idéal qui s'engloutirait dans les progrès de la démocratie et du capitalisme[6]. » Ce n'est pas celui de Malègue, même si l'enracinement social est similaire.

Une enfance heureuse, des études d'abord médiocres modifier

Chaque année les Malègue vont en vacances à Besse, (à 30 km de là), vacances non sans analogie avec celles du début d' Augustin ou Le Maître est là (dans le roman, on va au Cantal).

Ils se retrouvent dans la maison de leurs aïeux, grande demeure jouxtant le beffroi de la localité, prennent parfois la route pour la ferme du Bois noir (de la sœur aînée de la mère de Malègue), sur la commune d' Égliseneuve-d'Entraigues, près du Lac Chauvet entre Besse et Condat-en-Feniers (localité du Cantal), qui inspire celle du « Grand domaine » dans Augustin selon Lebrec.

 
Les Monts du Cantal vus de Saint-Illide

Selon Lebrec Malègue parsème ses romans de tels souvenirs. Pour Henri Lemaître, l'écrivain ancre en ces paysages et « leurs relations profondes avec les êtres », les éléments « d'une exceptionnelle synthèse de réalisme, de symbolisme et de spiritualité », l'enracinement barrésien n'excluant pas du tout « la quête d'un christianisme retrouvé dans sa pureté[7]. »

De six à dix ans, le futur romancier fréquente l'école communale de La Tour aux fenêtres d'une grandeur surhumaine donnant d'un côté sur la cour et de l'autre sur le potager[8]. Jean Lebrec et Elizabeth Michaël, les deux biographes de Malègue pensent qu'il s'y est ennuyé beaucoup et n'y a guère réussi. C'est un enfant taciturne et renfermé même s'il peut être un boute-en-train en famille.

À dix ans, en 1886, il entre à l'internat du Lycée Blaise-Pascal de Clermont-Ferrand. De la Sixième à la Seconde comprise, Malègue élève médiocre, redouble deux classes, découvre l'horreur des cours de récréation et des promenades de quatre heures le dimanche derrière les deux têtes de file, garçons infatigables. Et le tambour des fins de classe et de récréation : tout était trop brutal pour, pense Lebrec, « cet enfant réservé ».

La dernière année à Clermont-Ferrand, Malègue se lie d'amitié avec Jean-Baptiste-Alexis Chambon qui entrera bientôt aux Missions étrangères de Paris et deviendra archevêque de Yokohama. Les deux amis se retrouvent lors de leurs études supérieures à Paris et aux retours du missionnaire en France[9]. Lebrec voit en cette figure celle qui correspond à Félicien Bernier, futur missionnaire lui aussi et ami de Vaton dans Pierres noires.

De grands succès puis la maladie et les échecs qui le marqueront pour la vie modifier

 
Affiche de la Belle Époque vantant les cures à La Bourboule (Sim)

Sur le conseil d'un avocat de Besse, François Malègue met alors son fils (il va avoir 17 ans), chez les Eudistes à Saint-Jean de Versailles, où il entre en octobre 1893. Il s'y épanouit. Il est reçu à la première partie du baccalauréat en juillet 1894. En 1895 à la deuxième partie, la philosophie, avec la mention Très-Bien.

En octobre 1895, François Malègue demande au directeur du collège Stanislas de l'inscrire en Rhétorique supérieure en vue de la préparation au concours d'entrée à l'École normale supérieure. Malègue fait la connaissance avec Le Sillon de Marc Sangnier, pour lequel il a un certain temps quelque sympathie[10].

En 1896, au Concours général, il obtient un premier accessit en composition française qu'il reçoit des mains du ministre de l'Instruction publique entouré par Félix Ravaisson, Ferdinand Brunetière et celui qui prononce le discours d'usage, Paul Desjardins, esprit préoccupé de liberté d'opinion et de dialogue entre croyants et incroyants, futur organisateur des Décades de Pontigny auquel il invite Malègue après la parution d' Augustn où son action est évoquée. L'année suivante, il termine une licence ès lettres.

À la fin de cette année scolaire 1896-1897, il contracte une grave pleurésie et ne peut se présenter aux épreuves : « toute la vie de Malègue sera marquée des conséquences de cette malencontreuse pleurésie, à la veille du concours[11]. » Les deux années scolaires suivantes, il doit interrompre ses études pour se soigner et faire deux saisons à La Bourboule.

La revanche sur la vie dans la littérature modifier

 
Montagne Sainte-Geneviève

Alors qu'il va avoir vingt-trois ans, Malègue recommence une Première supérieure au lycée Henri-IV pour réaliser son rêve d'entrer à l'École normale. Il y fait la connaissance de Jacques Chevalier, Henri Focillon, Jérôme Carcopino, Robert Hertz (qui inspire le personnage de Bruhl dansAugustin que Jacques Chevalier décrit comme suit : « juif, socialiste, sociologue de l'école de Durkheim mais très supérieur à son maître, animé d'une foi profonde dans le messianisme de l'humanité, nature généreuse qui fut tué à Verdun dans la Grande guerre[12]). »

Malègue évoque ces amitiés de jeunesse dans Prières sur la montagne Sainte-Geneviève : « Je revois vos vêtements abstraits, vos petits vestons froids, et le regard idéaliste que vous jetiez sur le monde, ô mes amis d'autrefois[13]! »

Trois séquelles de la pleurésie vont le marquer à vie : maux de tête, graves insomnies, nervosité accentuée. Il a Victor Delbos comme professeur jusqu'à la fin de l'année[14]. En raison de sa mauvaise santé, il échoue deux fois au concours d'entrée à l'École normale supérieure, en 1900 et en 1901.

Robert Pitrou écrit peu après sa mort que Malègue était « l'homme le moins fait au monde pour notre système de concours[15]. » Pour Hervé de Talhouët, Malègue faisait mauvaise impression aux examens oraux, car peu rapide, allant jusqu'au bout d'un sujet, avec une très mauvaise voix, l'incapacité de « faire la lèche »[16].

Pour Malègue l'échec demeure une plaie dont ses parents et amis voyaient qu'elle restait à vif. C'est à cet échec selon Jean Lebrec - « revanche de l'art sur la vie » écrit-il - que nous devons la création du personnage d'Augustin Méridier, « garçon doué de tous les dons de l'esprit et auréolé de toutes les réussites[17]. »

Poursuite d'autres études : influence du Père Pouget et de Jacques Chevalier modifier

En 1902, il acquiert le certificat d'études physiques, chimiques et naturelles préparatoire à la médecine[18]. Puis entame des études juridiques de 1904 à 1911, tout en exerçant des fonctions de précepteur dans la riche aristocratie des Talhouët-Roy qui lui confient le jeune Hervé[19]. Il le prépare à son examen de rhétorique, de philosophie, obtient en 1910 une licence de géographie en suivant avec lui les cours de Charles Vélain, à qui il doit « le don d'interpréter les paysages »[20]

Proche de Jacques Chevalier, Malègue l'est aussi du père Pouget, de son vrai nom Guillaume Pouget. Gonzague Truc décrit l'influence de ce religieux sur Jacques Chevalier à qui celui-ci doit l'approfondissement d'une foi « où l'on voit l'intelligence féconder les dogmes[21]. » Pour Jean Lebrec qui cite Gonzague Truc, c'est la même influence qu'a le père sur Malègue[22]. Le héros d' Augustin verra sa foi détruite par la critique moderniste des Évangiles. Il adoptera ensuite, sans pour autant revenir à la foi, la méfiance du Père Pouget à l'égard des a priori positivistes de certaine critique comme celle d' Alfred Loisy, a priori en contradiction avec l'idéal de cette critique de balayer tout a priori.

Lors de la condamnation du modernisme, la plupart des catholiques se détournent du bergsonisme, « à l'exception de certains d'entre eux proches de Maurice Blondel » note Hervé Serry[23]. Parmi ceux-ci, Jacques Chevalier, le meilleur ami de Malègue, ami fidèle aussi de Bergson jusqu'au-delà de la mort. Hervé Serry relate la polémique qui, après la Grande guerre, oppose Chevalier à Jacques Maritain en avril 1920 : dans le numéro de ce mois de la revue Les Lettres, Chevalier critique le thomisme « avec ardeur »), à mars 1922[24]. Pour Véronique Auzépy-Chavagnac, dans son livre sur Jean de Fabrègues, préfacé par René Rémond, Jacques Chevalier constitue, dans le monde catholique des années 1920, un véritable groupe situé entre Jacques Maritain et Blondel[25].

Une thèse primée : Le travail casuel [occasionnel] dans les ports anglais modifier

 
Thèse de doctorat sur les dockers anglais publiée en 1913 et primée en 1914.

Il obtient le doctorat en droit : sa thèse de juin 1913 est publiée la même année. Durant un séjour londonien pour cette thèse, il écrit La Pauvreté, dont le héros s'appelle Augustin Méridier, première esquisse d'Augustin ou Le Maître est là (dont le héros s'appelle ainsi)[22].

Charles Gide a inauguré en 1898 un cours d'économie sociale à la Faculté de droit de Paris et dirige le travail de Malègue qui adopte les méthodes de Charles Rist[26]. Fondateur du mouvement coopératif français, théoricien de l'économie sociale, président du mouvement du christianisme social, Gide est le fondateur de l’École de Nîmes et dreyfusard. Il enseignera au Collège de France de 1923 à 1928.

Le choix d'étudier les dockers anglais s'explique, dit Lebrec, citant Malègue, par le fait que le travail casuel « s'y présente plus qu'ailleurs avec netteté et ampleur » de sorte qu'« il peut aussi fournir un point de vue commode pour que les conclusions en soient étendues mutatis mutandis aux autres cas du travail occasionnel[27]. »

Malègue enquête à Londres, Liverpool, York, constate qu'il y a « plus de travailleurs existants que de travailleurs nécessaires[28]. » Il en déduit, dit Lebrec, que ce phénomène s'explique par les « réserves particulières de travailleurs casuels dont chaque employeur veut s'assurer[29], » fournies par une main d'œuvre fragilisée (âge, déclassement, mauvais parcours professionnels et qualifications etc.).

 
Charles Gide (1847-1932), professeur d'Économie sociale à la Faculté de droit de Paris dirige le travail de Malègue qui lui vaut d'obtenir un prix de thèse.

En principe les salaires des dockers sont élevés, mais la surabondance de l'offre par des travailleurs non qualifiés les amène à accepter de ne travailler que deux ou trois jours par semaine et pour bien moins.

Cette rencontre entre de « hauts salaires » et d'« humbles exigences », permet de définir la main d'œuvre inorganisée par rapport celle qui l'est : « une offre inorganisée de main d'œuvre est supérieure à l'offre nécessaire de la quantité de fois que le salaire limite que le travailleur est préparé à subir est contenu dans son salaire théorique[28]. »

Un tel type de travail engendre pauvreté, surpeuplement des logements, promiscuité, manque d'hygiène, mais aussi chez les femmes, à cause des variations des revenus et du travail selon les journées, une tendance « à vivre au jour le jour et à laisser aller les choses[30], » à se priver des qualités nécessaires à la gestion d'une économie domestique.

Faire pallier par l'État le chômage de tels travailleurs en les employant à des travaux d'intérêt public a comme conséquence, selon Lebrec qui cite Malègue « au point de vue des patrons [...] de rendre leur travail plus casuel encore, en les déchargeant plus complètement d'entretenir leur main d'oeuvre quand ils n'en en ont pas besoin et en la leur rendant dès qu'ils les redemandent [ L'Etat...] a créé comme une prime à la casualité[31]. »

Pour Malègue, toujours cité par Lebrec, vu la quantité de travail à distribuer à des travailleurs en surnombre, la solution serait de la répartir non pas de telle manière que chaque travailleur en ait une part moyenne égale sur l'année mais que ce soit « toujours les mêmes qui aient le travail et que ces favorisés soient assez peu nombreux pour être employés le plus grand nombre de jours possible », les autres travailleurs étant replacés ou rééduqués[26].

Cette thèse décrit les taudis sans hygiène où tout se fait dans la même pièce jusqu'à l'accouchement des enfants[32]. Henri Vénard[33], y voit l'origine de sa passion pour l'étude scientifique des faits sociaux en vue du « relèvement des misérables[34]. »

Pour Benoît Neiss, dans Pierres noires: Les classes moyennes du Salut, Malègue utilise ce savoir de sociologue pour analyser un monde rural catholique dont l'industrialisation mine les fondements[35].

Il y enregistre ce discours dont parle Hervé Serry, « empli de la vision d'un monde idéal qui s'engloutirait dans les progrès de la démocratie et du capitalisme[6]: » ce discours s'exprime pathétiquement tout au long du dernier chapitre de « Les Hommes couleurs du temps », le premier Livre de la trilogie.

La Première Guerre mondiale modifier

 
Le train des blessés (1915)

À près de 37 ans, prête serment d'avocat le 20 octobre 1913 devant la première chambre de la cour d'appel de Paris : c'est sa première vraie profession mais il ne remplit guère, comme stagiaire, que le rôle d'avocat commis d'office. Le 27 juillet 1914 il est informé par la Faculté de droit que sa thèse est primée. Sept jours plus tard l'Allemagne déclare la guerre à la France.

Le 1er août 1914, il quitte Paris avec son frère pour Issoire où celui-ci devait rejoindre son régiment. Malègue voulait absolument servir. Mais l'Armée, qui l'avait réformé en 1899, « continua de le laisser en disponibilité[36]. »

Il assure un service d'infirmier bénévole à l'hôpital d'Issoire jusqu'à la fin août 1915. Le médecin aide-major de l'hôpital estime dans un rapport qu'il possède les connaissances nécessaires « pour offrir un concours efficace lors des interventions chirurgicales[37]. »

Le 26 août 1915, il est incorporé au 105e régiment d'Infanterie et affecté aux fonctions de secrétaire à l'état-major des 1re et 2e subdivisions de la 13e région. En mai 1916, il est au contrôle postal de Pontarlier, la Commission de réforme de Besançon le maintenant dans le service auxiliaire.

Il part pour Londres le 3 mars 1917 comme attaché à la Commission internationale du ravitaillement, délégué du Commissariat des transports maritimes. C'est là qu'il se lie au général de la Panouse, attaché à l'ambassade France et à Paul Cambon.

Elizabeth Michaël estime qu'à cette époque il est le précepteur des enfants du général Vicomte Louis de la Panouse, soit jusqu'en 1919. Le 12 avril 1919, il reçoit son titre de congé illimité de démobilisation, à son adresse parisienne, 4 rue du Puits-de-l'Ermite »[38]. Il fait plusieurs allers et retours Paris-Londres.

Nouveaux échecs: comme avocat, à l'agrégation de droit modifier

Claude Barthe remarque qu'en devenant avocat, Malègue rentre dans une « profession pour laquelle il est aussi mal doué que possible ». L'un de ses professeurs de droit, M. Rist, le pousse à préparer l'agrégation de droit (octobre 1919). Il travaille comme un forcené, présente le début de l'épreuve le 4 octobre 1920, mais le premier examinateur l'interrompt rapidement et lui signifie que le volume insuffisant de sa voix le rend inapte[39].

Désemparé il retourne, le 16 janvier 1921 à Londres chez son ami le général de la Panouse qui lui propose un emploi de correspondant à Londres pour l'Écho de Paris, mais en raison de son sommeil toujours difficile, Malègue ne peut accepter ce travail : « il dut connaître alors des mois d'angoisse, puisqu'à quarante-cinq ans il se trouvait sans situation »[40].

Professeur à l'École normale pour instituteurs de Savenay modifier

 
Eugène Laermans, Un soir de grève (1893)

Les Talhouët-Roy font appel au député Henri de La Ferronnays influent politiquement dans cette région[40] et en février 1922, il obtient un poste de professeur dans une école normale d'instituteurs à Savenay[41].

Il y demeure de 1922 à 1927[40]. Il défend dans ses cours l'importance des syndicats et des grèves, y voyant une « une haute réalisation de morale ouvrière » nécessaire à l'ouvrier pour « l'intérêt de sa classe[42]. » Lebrec montre que Malègue, ancien de l'ACJF, prenait des positions sociales avancées sous l'impulsion d'Henri Bazire dès 1905 : réglementation collective du contrat de travail, limitation de la durée du temps de travail, assurances ouvrières obligatoires. Il aurait puisé l'élan intérieur qui le fait rédiger sa thèse de doctorat sur les dockers anglais « dans les cercles de l'ACJF[43]. »

En sociologie religieuse, dans la tradition du thomisme, de Pascal ou Kant, il défend l'indépendance de la religion et de la science, volonté qu'on retrouve dans Augustin. L'esprit scientifique doit reconnaître l'autonomie du religieux et, de son côté, l'esprit religieux reconnaître « comme le voulait Pascal l'entière autonomie de l'esprit humain dans la tâche de la recherche des causes secondaires[44]. »

Il observe dans cet établissement, témoigne un de ses anciens élèves, G. Roger, « toujours avec rigueur et apparemment sans effort, le contrat de neutralité qui était notre charte à tous[45]. » Roger ajoute que Malègue y était respecté et « entouré de la part de ses collègues d'une déférence très ostensible, dont les élèves prenaient exemple[46], » alors que l'on connaissait son engagement chrétien.

G.Roger regrette à cet égard que François Mauriac (dont il cite le Journal Tome I), ait considéré ce type d'écoles comme des « forceries[47]de la Troisième République », chose qu'il dément ayant dû en visiter beaucoup d'autres du fait de sa profession[48].

Le Comité de vigilance de l'archevêché de Paris dénonce en 1929 les « dangers » de ces cours de sociologie dans les Écoles normales primaires (dont Léon Émery dit, sachant que Malègue y a enseigné, qu'elles sont les « séminaires de la nouvelle orthodoxie »[49]laïque et républicaine) : un intervenant à la Semaine des écrivains catholiques français de cette année-là regrette qu'une liaison régulière entre « l'épiscopat et le corps des écrivains catholiques » n'ait pas permis une mobilisation efficiente contre ces programmes[50].

Mais Malègue semble bien n'a de contacts qu'indirects avec ce renouveau catholique dans les lettres dont il suit les efforts de loin[51]. Pour être publié, il ne compte que sur son ami Jacques Chevalier ou des concours littéraires. C'est le hasard qui va le conduire chez Spes pour l'édition d' Augustin (un ami commun avec le secrétaire de Spes).

Son mariage avec Yvonne Pouzin. Persistance du sentiment de désespoir et d'échec modifier

 
Couverture identique à la 1re  éd. : elle abrège le prénom de l'auteur, d'où des confusions. Cet éditeur est jugé « peu reluisant » par Henri Pourrat

Elizabeth Michaël raconte que le professeur de l'École normale de Savenay séduit le Cercle catholique d'universitaires de Nantes par son engagement religieux. La fondatrice de ce cercle, Marthe Homéry présente Yvonne Pouzin à Malègue[52], de huit ans sa cadette. Selon les Annales de Nantes et du pays nantais cette rencontre est à l'origine de « l'amour exclusif que se vouent pendant dix-huit ans ces deux êtres dont la modestie cachait les caractères exceptionnels »[53]. Yvonne Pouzin est la fille d'un industriel fabricant de pâtes de Nantes, et la première femme de France à devenir Médecin des hôpitaux, après la publication de sa thèse de doctorat[54]. Elle participe au premier Congrès des femmes phtisiologues organisé à New York vers les années 1920. Le 29 août 1923, l'épouse.

Celle-ci, plus consciente encore de la valeur de son mari après quelques mois de vie commune, le presse de donner forme à son œuvre ébauchée[55]. Elle prépare ainsi « l'accouchement d’Augustin[56],[57]. »

Paroles de désespoir modifier

Malègue quitte l'enseignement à Savenay en 1927 sur le conseil de son épouse. L'année d'avant, il confie à son ami Jacques Chevalier à Cérilly : « Il y a quelque chose de cassé en moi[58]. » En 1928, une fièvre typhoïde le met à deux doigts de la mort.

Il se plaint dans ses Carnets rouges, au moment de la démission de Savenay, « d'être un homme qui a manqué ses réalisations, raté sa carrière et sa vie, - tombé dans Savenay après avoirs désiré normalement l'École de Rome. »

L'année d'un des échecs répétés qu'il rencontre pour faire publier ce qu'il écrit, le 31 décembre 1929, il note : « Cinq heures du matin. Lever après une nuit blanche sous l'étreinte d'absence de situation... Le soir même retombé dans l'ennui et le désespoir. »

Si, après sa démission à Savenay, son épouse lui assure la sécurité matéreille, la chose lui pèse : « La pauvreté? Faire mon histoire. Type de pauvreté de dominicain : rien d'essentiel n'est refusé; mais n'a l'initiative d'aucune dépense, et une restriction morale absolue[59]. »

Malègue achève en 1929 un bref roman de 213 pages dactylographiées intitulé Pierres noires (très différent du roman inachevé qui reprend ce titre et ajoute Les Classes moyennes du Salut). Il le fait parvenir au journal Le Temps qui organise chaque année un concours littéraire : le texte primé paraissait en feuilleton dans le journal. Le manuscrit de Malègue n'est pas retenu.

Quant à Augustin, bien que daté Londres 1921, Leysin 1929, Malègue n'en remet le manuscrit à Jacques Chevalier que le 2 juillet 1930 qui doit contacter Plon (maison qui édite ses propres livres).

Échecs auprès des éditeurs modifier

 
Lettre où Malègue s'informe par son ami H.Vénard présent à Paris, des conditions de la publication d' Augustin à compte d'auteur que proposerait Spes dont Vénard connaissait le secrétaire A.Michelin[note 2].

Il y effectue encore de nombreuses retouches et ce n'est que le 29 octobre 1931 qu'il est présenté chez Plon. Maurice Bourdel et Gabriel Marcel le refusent. Pierre Moreau pense que c'est en raison de l'influence très forte d'un membre de l'Action française.

Daniel-Rops en informe Malègue sans citer nommément la personne. Comme Pierre Moreau ajoute que cette personne n'est citée que deux fois dans l'ouvrage de Lebrec, on comprend qu'il s'agit de Gonzague Truc dont Rops dit que « très influent et très catégorique[60] », il emporte la décision défavorable. En 1932, nouvel envoi de Pierres noires (la première version très différente de celle de 1958) à un concours littéraire cette fois organisé par le Cercle littéraire français qui, comme Le Temps, imprimait le texte primé.

C'est un nouvel échec. La même année, en février, le secrétaire des éditions Spes, Alfred Michelin, envisage de publier Augustin. Une dernière démarche chez Plon n'aboutit pas plus que les précédentes. Spes accepte le 18 février 1932, mais Malègue sait déjà qu'il ne sera publié qu'à à compte d'auteur pour (3000 exemplaires)[61].

La lettre de Malègue du 14 février 1932 (partiellement reproduite ci-contre) envoyée à son ami, Henri Vénard, lui-même ami de Michelin à qui il avait parlé d' Augustin, nous apprend que cette formule avait déjà été évoquée avec Plon.

Les délais de publication (un an et demi), étaient longs. Vénard, instruit par Michelin, parle, pour Spes, d'une sortie du roman en octobre 1932.

Paul Droulers, pour la période où il situe son ouvrage (1919-1946), constate que parmi tous les livres édités par Spes : « La seule œuvre qui eut un écho dans le grand public, le beau roman de Malègue Augustin ou Le Maître est là (1933), faillit être écartée par le comité de lecture comme d'un médiocre intérêt[62]! »

Henri Pourrat dans une lettre à Alexandre Vialatte regrette, que son livre La Cité perdue (Spes, Paris, 1935) ait été publié dans cette maison d'édition. Il craint « qu'on ne le juge sur la firme - Spes ce n'est pas très reluisant à part l' Augustin de Malègue. L'as-tu lu? -[63]... »

Six ans d'une brillante carrière littéraire, un cancer puis la mort modifier

Malègue, forcé d'accepter les exigences de Spes, note, le soir même : « Le dégoût et le désespoirs sont venus seulement deux ou trois heures après la culbute de mes résistances[64]. » Dès avril de cette année, Malègue réécrit Pierres noires.

Augustin sort le 23 février 1933. Le Journal-Neuilly le mentionne le lendemain, Vérité marocaine en rend compte le 10 mars. L'Action française, le 11 mai, assez négativement dans un article de Gonzague Truc (il trouve la question du modernisme dépassée). Pendant quatre mois, la presse ignore le livre.

Augustin reçoit alors le prix de littérature spiritualiste le 18 juin, succès biaisé, selon Claude Barthe, car il a pour effet de l'empêcher d'obtenir le Fémina. En outre, ce prix spiritualiste, selon Hervé Serry, attribué aux œuvres exemptes de « toutes sensations vulgaires » est financé par « par un réseau mondain et aristocratique », d'où (selon Barrès), « aucun écrivain n'est sorti vivant » ce qui amène Mauriac à le fuir dès 1911, sentant que lié à ce milieu il perd toute crédibilité[65].

 
Institut catholique de Paris. Malègue y est invité à parler de son roman en 1934

Malgré tout, Malègue - « vieux débutant »[66] - va être considéré « comme un grand de la littérature » : André Bellessort dans Je suis partout[67], Franc-Nohain dans L'Écho de Paris'[68], Jacques Madaule dans le Bulletin Joseph Lotte[69], considèrent le roman comme un véritable événement. On le compare à Marcel Proust dans La Vie du 26 août 1933, Les Nouvelles littéraires du 9 décembre 1933, ou encore dans La Revue catholique d'Alsace en janvier 1934.

L'une des reconnaissances les plus éclatantes de Malègue, quand on songe au refus de Plon de l'éditer et aux réticences de Spes l'a fait, c'est la lettre de Gaston Gallimard fin 1933 : « J'ai lu votre grand livre Augustin ou Le Maître est là. Je le trouve remarquable et je tiens à ce que vous sachiez que j'aurais été très fier d'en être l'éditeur. Je vous serais très reconnaissant de me tenir au courant de vos projets afin d'éditer vos prochains livres si vous n'êtes pas lié par contrat[70]. »

Léopold Levaux le juge supérieur à Proust[71], ainsi qu'à Bernanos et Mauriac[72]. Fernand Vandérem, juif incroyant, ne tarit pas d'éloges à son égard dans Le Figaro du 17 juin 1933 et revient sur ce livre à deux reprises dans Candide, le 29 juin et le 13 juillet.

Une critique protestante de Suisse romande prend pour titre Mieux qu'un livre[73]. Un quotidien norvégien prédit que Malègue sera un des noms les plus illustres de la littérature française du siècle[74].

Jean Lebrec établit la bibliographie de plus de 150 recensions de l'ouvrage dans les quotidiens et les hebdomadaires en France, Belgique, Pays-Bas, Suisse, Italie, Allemagne, Royaume-Uni, Irlande, Roumanie, Pologne, au Brésil et au Québec, ou encore en Tunisie et au Maroc , cela de 1933 à 1936.

 
Mauriac sur Augustin et Le Maître est là « Toute l'histoire de la foi et de sa reconquête est de premier ordre[75].

Le succès d' Augustin fait connaître Malègue dans toute la France et à l'étranger et des propositions de traduction du roman émanent d'Italie, d'Allemagne et d'Angleterre.

Malègue donne des conférences en France (à l'Institut catholique de Paris, au Séminaire Saint-Sulpice), en Belgique (à l' université de Louvain et au Saulchoir), aux Pays-Bas (à l'Université de Nimègue), en Suisse (à l'Université de Fribourg et à celle de Neufchâtel). Il collabore à diverses revues religieuses d'un grand prestige comme La Vie intellectuelle, Temps Présent, La Vie spirituelle, rédige plusieurs essais théologiques ou spirituels, tout en poursuivant la rédaction de Pierres noires. Les classes moyennes du Salut.

Au printemps de 1940, les médecins lui découvrent un cancer à l'estomac et il apprend en juin qu'il est condamné. Les Allemands entrent à Nantes le 19 juin. Il tente, en vain, d'achever Pierres noires dans l'édition de laquelle (en 1958) paraît son Plan d'une prière pour l'acceptation de la mort. Le 15 septembre encore, il écrit à Jacques Chevalier que le premier tome est achevé, mais à revoir et paraîtra isolé si du moins il dispose encore de quelques mois[76].

Pour Moeller, l'ensemble de cette trilogie devait compter 1 800 pages[77]. Bien vite Malègue ne peut plus taper ses textes et confie ses dernières tentatives de rédaction à un dictaphone. Le 29 décembre, il veut encore travailler mais ne le peut. Il meurt le 30 au matin. Quelques jours avant sa mort il confie à sa famille que son nouveau livre sera plus beau qu’Augustin ou Le Maître est là « à cause de la figure du saint[78]. »

Le « malheureux » (dit Claude Barthe), qui avait déjà reçu le Prix de littérature spiritualiste de la poétesse mondaine Claire Virenque voit la malchance le poursuivre par-delà la mort. Le soir de sa mort, son ami Chevalier, secrétaire d'État à l'Instruction publique (du 14 décembre 1940 au 24 février 1941, qui le demeurera très peu de temps), lui rend un vibrant hommage à la Radio de Vichy[79].


Un romancier catholique très différent de ses pairs modifier

 
Pie X réorganise le pouvoir dans l'Église en excluant le clergé des débats intellectuels, ouvrant par là un espace où pourront s'exprimer des écrivains catholiques laïcs moins « dangereux » dans les questions de doctrine vu les limites de leur formation dans ces questions.

Une originalité de Malègue selon Levaux, c'est que « la bagatelle, l'obsession sexuelle » est absente et que la sainteté n'y fait pas « gris, pas accablé, tiré, tiraillé[80]. » Pour Agathe Chepy Augustin est un roman de la conversion différent de ceux de Paul Bourget et Ernest Renan (versions médiocres de la conversion spirituelle, selon elle), ou de Francis Jammes, Jacques Rivière, Ernest Psichari qui rendent compte de leurs cheminements intérieurs[81].

Mais la différence essentielle soulignée depuis 1933 est ailleurs.

En 1938, dans la préface à son Anthologie de la renaissance catholique, Paul Claudel félicite Louis Chaigne d'avoir édité le livre qu'a rendu possible l'aboutissement d'un mouvement qu'il désigne du même nom que l'anthologie[82]. Cette renaissance est pressentie dès la la fin du XIXe et Hervé Serry en donne de nombreux exemples[83].

Or, selon Serry, c'est la crise moderniste et le déclin de la bourgeoise catholique après 1870 qui modifient radicalement le rapport des forces dans le champ littéraire et dans le champ religieux au point de rendre possible cette renaissance. Malègue s'inscrit sociologiquement et historiquement dans ce cadre. Mais il se différencie des autres écrivains catholiques, pour plusieurs raisons.

Contrairement à ceux-ci, il est très compétent dans le domaine de la philosophie, de la théologie ainsi que de la sociologie. C'est ce qui explique la place inhabituelle de la réflexion intellectuelle dans ses romans par rapport aux autres romans catholiques. Du fait de ces compétences, il est à même de comprendre en profondeur la crise moderniste (dans Augustin), crise que les écrivains en question appréhendent mal ou pas du tout, même si elle explique leur succès.

Pour les mêmes raisons, il est en mesure d'analyser rationnellement le déclin de la bourgeoisie catholique (dans Pierres noires), avec la distance du sociologue, même si elle peut l'affecter. Et c'est l'un des phénomènes qui sociologiquement et historiquement explique la percée littéraire catholique.

Ceci dit, Joris Eeckhout tient à le préciser, il suffit d'un minimum de culture pour comprendre Malègue et admirer « la maîtrise avec laquelle est psychologiquement disséqué l'un des plus pénibles conflits intérieurs dans lequel puisse être impliqué un être humain »[note 3].

Place inhabituelle de l'intelligence modifier

 
Statue de la foi d'Innoncentio Spinazzi qui se trouve sur la page de couverture de Pénombres

« J. Malègue managed to treat the problem of belief more intellectually than Bernanos and Mauriac. » dira un jour un commentateur américain[84]. Victor Brombert écrit à propos d’Augustin ou Le Maître est là que Malègue ne se contente pas de parler de la crise religieuse d'un intellectuel mais qu'il pose le problème religieux en termes intellectuels ou encore qu'il analyse patiemment la vie d'un homme au tempérament religieux dans un contexte intellectuel et d'un point de vue intellectuel , mais qu'il il réussit à le faire « sans rien perdre du point de vue de l'intensité dramatique ou psychologique »[85]

Brombert estime que les intellectuels et le drame de l'intelligence apparaissent d'habitude sous un autre éclairage dans le roman catholique à cette époque. Il cite à cet égard l'abbé Cénabre du Bernanos de L'Imposture disant à l'abbé Chevance : « L'univers intellectuel est une solitude claire et glacée... Oui, l'intelligence peut tout traverser, ainsi que la lumière l'épaisseur du cristal, mais elle est incapable de toucher, ni d'étreindre. Elle est une contemplation stérile[86]. »

Avec Malègue, selon le critique américain, on est dans un tout autre climat romanesque, inhabituel chez un romancier catholique de cette période. Les intellectuels qui sont également philosophes (ou théologiens), en ont immédiatement conscience : Paul Doncoeur analyse favorablement le roman dans Étvdes, 1934 n° t. CCXVIII. Henri Bergson l'admire. Maurice Blondel a une longue correspondance avec Malègue.

Parmi les publications de Malègue on trouve aussi un essai théologique comme Pénombres publié chez Spes en 1939 qui obtient l’imprimatur du diocèse de Paris. Jean Daniélou considère cette étude sur la foi (le premier chapitre de Pénombres) comme « l'une des meilleures qui soient du problème de la foi sous ses aspects actuels[87]. »

Roger Aubert salue l'auteur du titre de laïc théologien dans sa thèse de maîtrise en théologie à l'UCL, Le Problème de l'acte de foi[88].

Aubert cite en particulier la deuxième partie de l'ouvrage Vertu de foi et péché d'incroyance tandis que Charles Moeller, autre théologien louvaniste, considère que l'ouvrage contient des chapitres remarquables et, écrit-il, « spécialement le premier » intitulé Ce que le Christ ajoute à Dieu[89]. Malègue y a exploré la question de la mystique en lien avec l'Incarnation.

Enjeux bien compris de la crise moderniste modifier

 
Paul Claudel en 1927. Dès la parution d' Augustin, Claudel dit à Malègue son admiration, mais qu'il ne comprend pas que la foi du héros du roman soit troublée par l'exégèse moderniste ou moderne, dont il ne voit ni la portée, ni l'intérêt.

Pour Hervé Serry, dans Naissance de l'intellectuel catholique, les travaux menés par des clercs et des laïcs au début du XXe siècle, démontrent les impasses de certaines interprétations traditionnelles des textes religieux, notamment ceux d'Alfred Loisy. Ils sont accomplis aussi à partir de normes scientifiques et donc d'une « autorité légitimatrice extérieure » à l'Église : c'est la Crise moderniste.

Elle se conclut par la condamnation sans appel du modernisme à travers l'encyclique Pascendi de Pie X en 1907 et la réorganisation du clergé autour d'une obéissance entière au pape, avec comme conséquence que le voilà exclu des débats intellectuels, ce qui a pour effet de « libérer un espace d'intervention pour les écrivains catholiques[90] » laïcs.

Pour Serry, ces écrivains catholiques laïcs présentent l'intérêt, pour le contrôle ecclésiastique, par rapport à d'autres fractions du champ intellectuel, comme les philosophes, d'être « dotés d'un faible pouvoir critique à l'égard de la doctrine et donc peu susceptibles de remettre en cause le magistère[90]. »

Malègue, lui-même philosophe (et théologien laïc), met justement en scène dans son premier roman la crise qui, après 1907, libère l'espace d'intervention des écrivains catholiques dans le champ intellectuel défini par Serry. Mais il a aussi la capacité de penser cette crise complexe sans cesser d'être romancier.

D'un point de vue littéraire, l'art de Malègue est de parvenir à insérer différentes pensées (qu'il connaît bien comme philosophe et théologien), au cœur de ses écrits, sans pour autant qu'elles ne dictent leur schéma à l'intrigue au point que les personnages ne soient plus que des porte-parole de thèses. La plupart des critiques lui reconnaissent cet art.

Pierre Colin souligne à quel point Malègue a pris « la mesure du phénomène » moderniste. Dans sa très longue étude du modernisme du point de vue philosophique, il fait du cas fictif d'Augustin Méridier rapproché du cas réel de Prosper Alfaric, l'une des clés de la crise, non pas chez les protagonistes de celle-ci, mais dans le public qui la subit.

Certes, Augustin est un laïc et Alfaric un prêtre qui quittera l'Église, ce qui est très différent. Mais tous deux subissent le « le contre-coup » du modernisme. Les objections qui leur font perdre la foi « sont pour une part philosophiques et pour une part exégétiques ».

Mais le plus grave c'est, toujours selon P.Colin, « le non-dit de l'époque » qui fait que le milieu catholique peut s'avérer sourd à leurs difficultés (surtout pour Alfaric), et ne distingue pas ce qui est « questions fortes » et « abandon de la croyance catholique[91]. »

Émile Goichot estime même que Malègue est « le » romancier du modernisme intellectuel. Mais sa critique porte sur autre chose que l'art ou le talent littéraires de Malègue. Elle s'en prend à la solution que le héros de Malègue trouve à ses difficultés.

Pour Goichot, elle ne tient pas dans la mesure où sur toutes ces questions, Malègue estime que, en ordre d'importance, bien avant la critique des textes ou l'investigation historique, l'essentiel ce sont les postulats de chacun au départ (voire les a priori). Il y a deux possibilités selon lui : soit ces postulats sont hermétiquement fermés à ne serait-ce que la possibilité du surnaturel qu'évoquent les textes soit ils y sont ouverts. Ne serait-ce qu'à sa possibilité.

Aux yeux de Goichot, l'importance déterminante des préalables tend à minimiser le rôle de la critique. La critique ne produit que des données brutes dont les postulats aménagent le sens.

Mais pour Malègue ou Blondel, il est impossible de saisir les faits indépendamment de toute interprétation car, si c'était le cas, « on n'atteindrait ainsi que des abstractions, non la réalité effective d'une vie d'homme, laquelle fait toujours l'objet d'une compréhension interprétative[92]. » Ce que Pierre Colin rapproche aussi de la distinction opérée par Wilhelm Dilthey entre « expliquer » (l'enchaînement déterministe des faits) et « comprendre » (le sens que les acteurs de l'histoire où ils sont impliqués donnent à celle-ci)[92].

Jean Lebrec signale l'influence d'Antonio Fogazzaro sur Malègue avec son roman Le Saint[93] (publié en novembre 1905 en Italie mais mis à l'index dès le début d'avril 1906). Le roman met en présence de nombreux personnages soucieux de renouveler le catholicisme sous l'inspiration d'un saint : des modernistes de diverses tendances. Or ce saint au début de sa vocation a la vision « sous ses paupières »[94]des paroles de Marthe à Marie rapportées par l'évangile de Jean (chapitre 11, verset 28), lors de l'épisode connu sous le nom Résurrection de Lazare, peu avant celle-ci (que l'écrivain italien cite en latin) : « Magister adest et vocat te » [« Le Maître est là et il t'appelle »]. Cette citation est répétée dans la suite du récit à de très nombreuses reprises

Controverses modifier

Critique et foi, à ses yeux, dès lors, ne communiquent plus, le conflit est impossible entre elles, ce qui empêche que soient articulées de manière cohérente « la critique [...] la haute culture profane [...] et la foi, pur acquiescement du cœur[95]. » Cette mise en cause est un peu celle de Loisy ou d'Henri Clouard, mais ni celle de Paul Doncœur ou Charles Moeller ni, plus près de nous, celle de Geneviève Mosseray. 

Pour Goichot, cet écartèlement entre foi et critique, chez cet auteur fort lu par les élites intellectuelles catholiques après la crise moderniste, renvoie à l'univers démembré qu'est devenu l'Église et, sans le vouloir, annonce la crise globale du Christianisme dans les dernières décennies du siècle passé. La renaissance catholique en littérature, Goichot la compare pour le monde catholique à la période de rémission qui souvent précède les maladies mortelles quelque temps avant le décès.

Le talent littéraire de Malègue n'est donc en général pas contesté. Mais aux yeux de certains il est insuffisant. On vient de le voir avec Goichot. Certains pensent aussi qu'il est inutile.

À l'opposé de cette position de Goichot, en effet, Paul Claudel dans le premier contact avec Malègue à propos d' Augustin, début juin 1933, lui confie malgré son admiration globale : « Les angoisses de votre héros sont pour moi, je l'avoue, bien difficiles à comprendre[96]. »

Malègue lui répond qu'il peut éventuellement admettre que le modernisme soit sans importance si la foi peut tout surmonter, mais estime que quelqu'un comme Augustin ne pouvait s'en contenter. Claudel lui redit ne pas comprendre l'importance attachée à ces questions : même les travaux exégétiques du Père Lagrange ne sont pas supérieurs à ce qu'il nomme les aliborons d'Outre-Rhin (l'exégèse allemande).

Le jugement de Gonzague Truc dans le quotidien L'Action française du 11 mai ressemble à celui de Claudel. Le critique regrette que le roman soit trop long, que la recherche du talent tue le talent, qu'il y soit question d'Harnack. Il relate que les doutes d'Augustin « s'apparentent encore au doute renanien et s'autorisent d'arguments d'ordre historique ou philologique », alors que, conclut-il, « nous avons appris la frivolité de telles objections[97]. »

Le problème d'une certaine érudition du lecteur comme préalable à la compréhension de tels romans est posée par Yves Chevrel. En général, on ne nie pas que Malègue ait introduit à cette crise moderniste avec talent. Ou comme le dit Geneviève Mosseray (ou Goichot d'une autre façon), qu'il a montré que la crise moderniste bien que relativement difficile à définir est aussi une crise qui exemplifie la difficulté de croire en général, les rapports entre la foi et la raison. Question centrale, elle aussi peu abordée par ses pairs.

Blondel réagit d'une manière différente. Il aurait souhaité, lui, à l'opposé de la réaction de Claudel (ou de G.Truc), que le retour à la foi chez Augustin, certes sous l'action de la grâce, ne se fonde que sur le simple usage des « lumières naturelles » et notamment par l'argumentaire que lui-même propose : Augustin l'esquisse pour une bonne part mais ne conclut tout à fait dans le même sens que Blondel qu'après avoir retrouvé Dieu. Geneviève Mosseray montrera que Malègue était aussi blondélien que Blondel.

Par ses liens avec Chevalier (le seul à l'aider à trouver un éditeur et qui n'y réussit pas à cause de l'Action française, le seul à être partie prenante de l'action d'une revue comme Les Lettres en vue de la fondation d'une littérature catholique mais qui se heurte à un Jacques Maritain bien plus influent), Malègue se situe dans la minorité catholique qui reste liée à Bergson et Blondel après la condamnation du modernisme.

Compétent sans doute pour traiter de cette crise, il rencontre chez ses pairs des gens qui, n'en mesurant pas l'importance, peuvent ne pas comprendre son roman. Malègue multiplie les efforts pour en dégager le sens dans des conférences. L'ajout à l'édition de 1947 d' Augustin d'un appendice posthume correspond à ce même désir de mise au point.

Analyse lucide du déclin des élites catholiques modifier

 
Dessin conspirationniste antisémite et antimaçonnique, montrant la France catholique conduite par les Juifs et les francs-maçons (Achille Lemot pour Le Pèlerin, n° du 31 août 1902).

Les écrivains du renouveau catholique sont des héritiers en déclin des notables de la monarchie ou de l'Empire, du même bord confessionnel ou, à l'instar de Malègue, qui en sont proches. Ils sont « issus de lignées familiales prestigieuses ou ayant évolué à proximité de ce type de famille »[98].

Leur trajectoire sociale s'explique aussi par l'effroi avec lequel ils constatent (comme le dit H.Serry) « l'envahissement des nouveaux enrichis du commerce et de l'industrie[99]. » Malègue les décrit pareillement « effrayés par ces foules nouvelles d'une grosseur informe, en voyage vers la souveraineté, débordant de leurs anciens et si simples berceaux[100]. »

L'un de ces écrivains, Robert Vallery-Radot, avait commencé, dans les premiers mois de 1919, un roman du même type que Pierres noires où se profile le monde finissant des notables catholiques remplacés par d'autres qui ne le sont plus.

Quelques années plus tard, Malègue, dans Pierres noires, imagine un Peyrenère-le-Vieil (appelé aussi Ville haute), espace de la classe en déclin face au Peyrenère-d'En-Bas (dont le nom a été calqué sur l'appellation officieuse du vieux Peyrenère), espace de la classe en ascension.

La première, réunie dans la maison d'un notable de l'ancien monde observe, désenchantée, d'une maison juchée au sommet du premier Peyrenère, la « montée » (en tous les sens du terme), de la future classe dominante depuis le Peyrenère du « bas » (dans le chapitre VI, le dernier du Premier livre de Pierres noires).

Selon Jacques Madaule, ce que constate ici Malègue, c'est le poids des déterminismes : « Certaines conditions étant données, les effets en découlent inéluctablement[101]. »

Les familles des notables de Peyrenère, quoi qu'elles fassent, n'échapperont pas à la décadence. Elles sont condamnées par le progrès technique et l'évolution d'une classe sociale en ascension, qui se réfère à la République et à la laïcité. C'est dans cet ordre déterministe que la vieille maison Guyot-Chaudezolles sera revendue à la mairie et deviendra une école publique. Que le comte de Brugnes se ruine au jeu et se suicide, condamnant son épouse et sa fille au déclassement et sa propriété aux démolisseurs.

Barthe écrit qu'il n'existe pas d'autre « description socio-littéraire plus impressionnante, presque cinématographique, que celle que fait Pierres noires de la vie quotidienne de la grande bourgeoise provinciale peu après la fin du Second Empire[4]. »

Contrairement à Robert Vallery-Radot, Malègue, selon Madaule, considère qu'ainsi va le monde sans se désoler de ce qui meurt ni bouder ce qui naît.

Plusieurs écrivains catholiques, en se mettant par leur plume au service d'une Église en difficultés, font coïncider leur déclin personnel avec celui de l'institution ecclésiastique qui se vit elle-même « comme une « forteresse assiégée » », tout cela, selon Hervé Serry, pour rendre « vivable » le déclassement réel ou imaginaire qu'ils subissent ou subiraient[102].

En Malègue, « le sociologue sait bien que les arbres des Brugnes sont voués à la hache du bûcheron. Tout ceci [...] n'importe pas au salut[103]. » Il ne regrette nullement que la propriété du Comte de Brugnes, rachetée par un représentant de la nouvelle bourgeoisie, subisse ce sort.

Il peut en donner l'impression, comme poète, parce que derrière tout ce qui disparaît il y a une épaisseur de temps, alors que les nouveaux venus sont sans passé défini.

Mais c'est seulement le poète qui est nostalgique en Malègue qui, écrit Madaule, « pleure les grandeurs délicieusement fanées et qui s'enivre tant qu'il le peut encore respirer, de leur parfum subtil et vieillot », car « le rôle des poètes [est ...] de pleurer ce qui passe et en même temps de l'immortaliser sur un autre registre, qui est celui de l'art[103]. »

Pour le sociologue et le penseur, ceci importe peu, car c'est le salut qui est, poursuit Madaule, « la seule affaire sérieuse. »

Bien que d'ordre intellectuel la crise moderniste, comme l'écrit Pierre Colin, interfère avec la dramatisation du conflit entre les catholiques français et la République. Dans un climat de laïcisme et d'anticléricalisme, il est difficile à l'Église d'accepter à l'intérieur même de la communauté ecclésiale et pour examiner les textes sacrés, l'usage « de méthodes et d'idées empruntées à ceux que l'Église considère comme ses ennemis » (soit les méthodes même de la critique des textes)[104].

Malègue, sociologue et philosophe à travers le pur récit romanesque modifier

Malègue ne fait qu'utiliser des matériaux qui sont à sa disposition comme philosophe et sociologue, comme lui ou d'autres le font d'autres aspects de l'expérience plus commune. Il ne plaque pas ces pensées sur les intrigues romanesques. Intrigues et pensées s'appellent.

Maurice Blondel dans la mise en abyme d' Augustin ou Le Maître est là par Augustin lui-même modifier

Geneviève Mosseray montre que la façon dont Malègue présente la crise moderniste s'accorde avec la pensée de Blondel sans enlever au roman la qualité distinctive de tout roman d'être peuplé d'êtres de chair et de sang, non d'allégories. L'art de Malègue est d'introduire Blondel au cœur du désespoir du héros qui, lorsqu'il sait qu'il va mourir, résume sarcastiquement sa vie.

Ce résumé est aussi, en quelques lignes, la mise en abyme des 800 pages du roman : Augustin fait ironiquement de sa vie un récit édifiant en trois actes et quatre tableaux: foi du héros (Acte I) ; perte de cette foi à cause de la critique (Acte II, tableau I) ; remise en cause de la critique (Acte II, tableau II) [jusqu'ici pas d'ironie] ; foi retrouvée et mariage avec Anne de Préfailles [il sait alors l'avoir perdue à jamais, c'est dit avec amertume], célébré par son ancien aumônier à Normale [ironie et amertume à leur comble].

Cette mise en abyme née du désespoir correspond aussi aux positions engendrées par la Crise moderniste selon Blondel : raidissement intransigeant autour du dogme au mépris de la critique ; position diamétralement opposée de mépris du dogme ; le fait de penser (position de Blondel) que ni l'histoire, ni le dogme ne suffisent à la connaissance du Christ, car il y faut aussi la tradition vivante des croyants - expérience, recherche intellectuelle, piété, amour - depuis la résurrection.

Augustin se situe au départ (Acte I) comme tous les catholiques d'alors. Puis (comme bien des intellectuels), il est ébranlé par la critique et perd la foi (Acte II, tableau I). Sans la retrouver, il observe en logicien que la critique viole ses propres principes : se voulant sans a priori, elle en nourrit un contre le surnaturel (Acte II, tableau II). L'Acte III, c'est sa conversion (improbable au moment de la mise en abyme désespérée).

La sœur d'Augustin devinant son désir fait venir à son chevet de mourant son meilleur ami, Largilier, avec qui il a souvent partagé sa passion pour l'énigme philosophique des mystiques et des saints. Ceux-ci procèdent de la tradition vivante à la Blondel comme Largilier lui-même aux yeux d'un Augustin - certes défiant, car Largilier est prêtre. Mais cette tradition vivante l'atteint intellectuellement en plein cœur.

Blondel est incorporé à la chair de l'intrigue d'une autre façon encore.

Quand Augustin, devenu professeur, parle de son ancien maître Victor Delbos dans la partie VI du roman « Canticum canticorum » (le « Cantique des cantiques »), les termes qu'il utilise pour en faire l'éloge sont « étonnamment proches » de la notice nécrologique que Blondel - ami intime de Delbos - lui consacre dans l' Annuaire des Anciens de l'École Normale Supérieure[38]. 63 ans après la sortie d' Augustin, le lien structurel profond entre Blondel et Malègue est ainsi établi pour la première fois.

Malègue qui l'a travaillé beaucoup l'avait avoué à Blondel[105], mais Lebrec qui le signale n'en tire pas les conclusions qui s'imposaient selon Geneviève Mosseray.

Bergson en un dialogue révélateur de l'intrigue amoureuse d' Augustin ou Le Maître est là modifier

 
Henri Bergson par J.E. Blanche en 1891

C’est l’été. Augustin Méridier, Anne de Préfailles (qu'il aime et à qui il n’ose se déclarer), sa tante Élisabeth de Préfailles observent à la surface d’un étang, les rides en formes de lignes brisées qu’y produisent les moustiques. Les deux femmes demandent à Augustin si cela n’est pas d’un certain charme. Augustin va évoquer en fait l'Essai sur les données immédiates de la conscience.

Henri Bergson y écrit que le vrai charme appartient aux mouvements en formes de courbes, typiques des mouvements vers l'humain. Comme la danse qu'il cite expressément dans L'Essai en soulignant que celle-ci a en outre des évolutions qui semblent répondre aux désirs de ceux qui les contemplent, d'une sympathie virtuelle d'un « mouvement possible vers nous[note 4]. »

Considération de philosophie pure en laquelle il se retranche pour conserver sa réserve à l'égard d'Anne, mais il a beau camper sur cette position, il glisse de ce qu'il vient de dire à une autre considération sur la beauté humaine de même esprit bergsonien qui souligne la gratuité liée au Beau : « Toute beauté humaine est une offrande de bonheur qui ne s’adresse à personne en particulier bien qu’elle soit recueillie par ceux que le hasard place en face d’elle. »

Ce dérapage d'Augustin (non par rapport à la logique de son petit exposé , mais par rapport à la résolution qu'il a de ne rien livrer de son sentiment à Anne), le trouble comme pourraient le troubler les maladresses ou incidents plus habituels qui surviennent chez les amoureux. L'écrivain se sert ici de la conception philosophique de la beauté d'un personnage de la même façon qu'il se servirait de matériaux de l'expérience plus commune.

Bergson et Durkheim, clé de Pierres noires s'écartant moins du genre romanesque modifier

 
Les règles de la méthode sociologique

Malègue, lecteur d'Émile Durkheim sait depuis 1903 que, pour ce sociologue, la société est à l'origine de la morale et de la religion[106]. Et que Durkheim est convaincu du « nécessaire dépérissement [de la religion] dans la société moderne[107]. »

Mais, comme le fait remarquer W. Marceau[108], le Bergson des Deux Sources, que Malègue lira après sa parution en 1932, affirme que cette religion est la religion « statique », cette morale est la morale « close ». Cette morale « close », c'est la pression qu'exerce la société sur les individus[109].

Le dernier grand livre de Bergson - qui est aussi une relecture de la notion de religion chez Durkheim - apparaît comme l'épine dorsale de Pierres Noires, qui en tire, à l'estime de Lebrec, « sa haute signification spirituelle et sa rare originalité parmi les romans de la recherche religieuse en ce siècle »[110]

La religion statique, par la fonction fabulatrice, crée des fictions aidant à supporter la perspective de la mort[111]soutenant aussi le bon fonctionnement des institutions en toute société « à des fins de cohésion et de clôture[112]. »

En revanche, l'expérience mystique rompt avec elles et rend possible la religion « dynamique »[112]. Marceau, Lebrec, Jacques Chevalier montrent que ces notions sont le cœur du roman inachevé de Malègue Pierres noires : Les classes moyennes du Salut, qui confronte ces « classes moyennes » (religion statique, morale close) à la religion dynamique représentée par un personnage déjà important dans les pages publiées, Félicien Bernier, qui devait devenir le personnage central de la trilogie d'après le plan auquel l'écrivain travaille jusqu'à sa mort[113].

Malègue le confronte aux autres personnages.Mais ni Vaton, ni ces autres personnages n'ont conscience au départ de leurs positions (classes moyennes ou saint).

Ils n'échangent à ce sujet que de façon abstraite et dans des conversations mondaines, jamais de façon aussi dramatique et impliquée comme dans La Révolution. Même pas Félicien et J-P Vaton malgré des rapports amicaux très profonds[114]. Vaton, le narrateur du Premier livre, devine, lui, que Bernier est un saint. Il représente les classes moyennes du Salut dans l'intrigue. Entre les Saints qui donnent tout à Dieu et au prochain et les mondains qui ne se soucient aucunement du spirituel, il y a ces classes moyennes voulant toujours des compromis entre l'appel à tout donner et leur attachement à leur propre bonheur terrestre.

Malègue - « Malègue-Vaton » écrit Jacques Madaule[115] - se considérait comme un de ces « médiocres dont il voulait écrire la chronique[116]. », et a voulu en être le psychologue et le sociologue en un sens ici, bergsonien, d'un Bergson tirant parti de la sociologie de Durkheim pour bâtir à partir d'elle la théorie qui distingue religion statique et religion dynamique dont l'opposition traverse la totalité de Pierres noires.

Bernier les aurait sauvés et entraînés dans sa sainteté, hors de la morale close et hors de la religion statique à travers une solidarité mystique.

Jean Lebrec écrit à propos de ce roman posthume que si Augustin est un roman pascalien dans la ligne des Pensées, Pierres noires est un roman bergsonnien qui vise à mettre en relief ce que dit Bergson du mystique qui ouvre la voie indiquant aux hommes « d'où vient et où va la vie. ».

Il ajoute aussi que contrairement à Augustin il n'y a jamais ici de « phrase de philosophe », s'écartant des exigences du genre romanesque. Le second roman se différencie fort d' Augustin et son originalité est d'être un long récit d'allure intimiste « qui permet à tout de s'assourdir dans le silence et la grisaille de la vie provinciale[117]. » Enfin, si Augustin se veut une réponse à la crise moderniste, il est difficile de trouver dans Pierres noires selon Jacques Madaule, une quelconque condamnation de la séparation des lois de 1905 sur la séparation de l'Église et de l'État (consécration de la décadence des notables catholiques), la nostalgie de Malègue étant seulement celle du temps perdu.

Aristote, Pascal, Boutroux, Durkheim, Bergson, Blondel, James et Kant liés entre eux et aux deux romans modifier

Quand Augustin rencontre Mgr Herzog au début de « Canticum canticorum », il a déjà marqué ses distances à l'égard de la critique biblique qui lui semble violer ses propres principes et estime que c'est un tort de considérer les témoignages obscurs comme des témoignages inverses[118].

Finalité chez Aristote et Boutroux. Les trois ordres chez Pascal et Blondel. L'expérience religieuse chez James modifier

 
Aristote sur une fresque murale à Rome : la thèse d'Augustin porte sur l'idée de finalité chez ce philosophe.

Il cite Blaise Pascal sur les obscurités et les clartés de l'écriture qui s'entraînent l'une l'autre du côté que choisit le « cœur » (au sens que l'auteur des Pensées donne au mot et que Malègue rapproche des postulats kantiens, ajoutant que Pascal en a une vision plus large), et à partir de quoi Augustin reviendra à la foi.

Lors de l'examen que présente Anne quelques semaines auparavant (et qui le voit foudroyé par sa beauté, même s'il n'en laisse rien paraître), il contredit son étudiante quand elle lui parle de l'expérience religieuse chez William James. Il lui répond que des psychologues comme Pierre Janet ou Henri Delacroix ne trouvent rien de particulier en telle ou telle conscience se disant habitée par Dieu.

Anne lui rétorque alors que c'est du fait que cette science se borne à l'étude des phénomènes psychiques. Et elle raisonne par analogie : un chimiste, ignorant la vie (par hypothèse), limité lui aussi à l'ordre des phénomènes qu'il étudie, n'appréhenderait pas plus la vie que les psychologues cités n'appréhendent la mystique. Si un chimiste comprend la vie c'est parce qu'il la connaît de la même façon qu'un psychologue croyant peut percevoir Dieu dans l'âme des saints.

Or l'idée de finalité, qu'Anne présente ainsi implicitement en passant de degrés ontologiquement inférieurs du réel à d'autres degrés supérieurs du même point de vue, c'est aussi une préoccupation d'Augustin qui a fait de cette question chez Aristote, le sujet de sa thèse.

Allant cette fois dans son sens, il cite d'Émile Boutroux cette phrase qu'il juge lui-même « aristotélicienne » (Geneviève Mosseray y voit un des indices qu'Augustin réévalue à ce moment ses travaux du point de vue du christianisme)  : « Lorsque [...] l'être a atteint toute la perfection dont sa nature est capable, cette nature ne lui suffit plus. Il a acquis l'idée claire du principe supérieur dont cette nature s'inspirait sans le savoir. C'est ce nouveau principe qu'il a désormais l'ambition de développer »[119].

Augustin ajoute cependant qu'on est ici dans la métaphysique pure et hors de toute expérience, tout en ouvrant à l'étudiante la possibilité de juger que la métaphysique pourrait être à l'origine de ce saut ontologique  : elle le fait en citant le mot célèbre de Pascal : « Tu ne me chercherais pas si tu ne m'avais déjà trouvé ».

Lors d'une autre rencontre avec Anne il lui parle de Victor Delbos et du scrupule professionnel qu'il avait (il était historien de la philosophie), de tirer des conclusions métaphysiques lors de ses leçons à la Sorbonne et de celles-ci des conclusions religieuses.

Pour G.Mosseray, la discrétion de Delbos en régime de laïcité rapportée par Malègue c'est une manière de faire se refléter dans ce persinnage l'infinie distance (qui n'empêche pas qu'ils s'emboitent), entre les trois ordres des corps, des esprits et de la charité, idée qu'elle compare aux étapes successives que franchit tour à tour chez Blondel la volonté voulue (de l'individu jusqu'à l'Unique nécessaire), en raison de la présence en elle, au départ, d'une volonté voulante qui est la présence de Dieu même.

La citation de la phrase « aristotélicienne » de Boutroux lors de l'examen d'Anne de Préfailles - « Lorsque [...] l'être a atteint toute la perfection dont sa nature est capable etc. » -, est pour G.Mosseray le signe qu'Augustin a bien compris l'identité entre la démarche blondélienne et la démarche pascalienne, toutes deux structurantes de l'intrigue comme le sont aussi le charme d'Élisabeth et Anne de Préfailles, sa tendresse pour sa mère et sa sœur, l'amitié de Largilier, sa soif de penser et de raisonner, la maladie qui le tuera.

Une critique de Kant par Augustin permet de parler d'expérience religieuse au sens de Bergson dans le deuxième roman modifier

 
Noyades de Nantes en 1793 (Tableau de Joseph Aubert : 1892). Les grands bouleversements acculent à la sainteté en cassant l'enfermement dans les sociétés closes, à morale fermée et religion statique.

Sur l'expérience religieuse, Malègue revient tant dans un essai comme Pénombres que dans Pierres noires.

Déjà dans Augustin ou Le Maître est là, un autre élément mène à sa prise en compte, c'est, dans les publications d'Augustin, « une critique très profonde et très remarquée de l'interdiction kantienne d'utiliser l'idée de cause hors des intuitions empiriques. »

Le rejet de cette interdiction kantienne permet en effet de relier la réalité empirique de la vie exceptionnelle des saints à une cause qui « sort de l'invisible », et se situe au-delà des intuitions empiriques, Dieu. C'est le fil rouge de Pierres noires : Les Classes moyennes du Salut.

Malègue en parle à travers toute l'intrigue à la façon de Bergson (plus en romancier que dans Augustin selon Lebrec) : c'est un élan en mesure de casser la morale étroite de notables enfermés dans leur égoïsme ou les déterminismes religieux et autres que la sociologie de Durkheim a mis en évidence.

Les grandes ruptures - celles de la Révolution française par exemple, d'autres bouleversements, parfois plus lents comme le déclin des notables liés à la monarchie ou à l'Empire - peuvent pousser à choisir exclusivement l'amour de Dieu et du prochain, comme aussi l'approche de la mort.

Les saints, eux, le réalisent dans leur vie entière car ils échappent aux déterminismes sociologiques ou psychologiques.


Des nouvelles : L'Orage, La Pauvreté, La Révolution, Sous la meule de Dieu modifier

 
Orage et éclairs

C'est précisément une nouvelle insérée dans Pierres noires[120]et intitulée La Révolution qui, retravaillée selon Lebrec en fonction du roman, fixe le portrait sociologique des classes moyennes.

« Parquées en de grands corps aux puissantes structures » comme l'écrit Malègue, elles sont soumises au « déterminisme » de « ligatures, politiques, économiques et sociales » insiste Moeller qui cite à plusieurs reprises La Révolution[121].

Ces groupes sont tellement étroits qu'ils prennent peut-être les individus « tout entiers, les broyant dans un incroyable débordement d'égoïsme et de pharisaïsmes collectifs »[122].

La Révolution française bouleverse à ce point la société qu'elle prive les classes moyennes du Salut des appuis qu'elles trouvaient dans les « grands corps aux puissantes structures » et les accule, privée qu'elles sont de ces appuis, à ne plus compter que sur Dieu seul et à renoncer pour aller à Dieu aux « grands biens » desquels ne pouvait se passer le jeune homme riche de l'Évangile.

La Révolution française est comme tous les grands bouleversements de l'histoire qui défont à ce point les appuis des classes moyennes du Salut qu'ils sont les grandes torches qui éclairent les hommes comme si, citation que Moeller met en exergue, « nous ne pouvions nous éclairer qu'aux incendies[123]. »

Lebrec retrouve cet engluement des âmes médiocres dans d'autres nouvelles comme La Pauvreté avec les étudiants bourgeois apportant à la Sorbonne « la dernière vague d'un lointain monde riche[124]. »

Ou encore le vieux bâtonnier de Sous la meule de Dieu (nouvelle écrite durant l'été 40), perdant son fils, prêtre et lieutenant d'une division blindée, mortellement blessé dans les derniers combats de la bataille de France[125]. Cette part personnelle qu'il prend « dans les désastres de juin 1940 », pense Lebrec, va remuer au plus profond cet homme « installé dans sa pratique chrétienne de convention. »

Le fil rouge de ces différentes nouvelles est aussi, selon Lebrec, celui de L'Orage, la toute première nouvelle écrite par Malègue en 1903. Elle fait parler deux jeunes gens « enfermés dans leur conformisme » évoquant l'histoire étrange d'un ami commun beaucoup plus âgé. L'un de ces jeunes gens raconte à l'autre la façon dont leur ami commun est mort.

Il a pris le risque de sortir trois fois le soir d'un violent orage sur son balcon pour voir de près les éclairs. Et cela en vue de saisir par l'écriture - une sorte d'« écriture automatique »[126] - « l'immensité des firmaments nouveaux » auxquels il aspire au-delà de l'existence.

À sa quatrième tentative, il meurt foudroyé[127]. Mais il ramenait chaque fois le texte de ses écrits à l'intérieur de sa maison, trois poèmes en prose par la lecture desquels la nouvelle se termine, en quelque sorte, comme le dit la dernière ligne du troisième de ces poèmes, « de l'autre côté de la vie. »

Malègue n'est cependant pas un romancier à thèse modifier

 
Jeune homme à la fenêtre : couverture de l'édition livre de poche de Jean Barois

Jean-Pierre Jossua croit qu' Augustin est le roman à thèse d'un écrivain « médiocre ». Aux grands écrivains chrétiens, à même de construire des récits vrais et vivants, il oppose Malègue et Antonio Fogazzaro avec Le Saint (autre romancier du modernisme), stigmatisant chez eux le « souci lourdement idéologique qui les distrait du travail romanesque et du travail d'écriture[128]. »

Franz Weyergans estime que le sujet lui-même du roman - la foi perdue et retrouvée - ne fait pas partie de ces événements « qui se laissent capter facilement dans la fiction romanesque » et qu'il faut pour les exprimer de manière vivante « une certaine épaisseur du réel et aussi une exploration de ce réel en profondeur. C'est pourquoi le roman est long », d'autant plus qu'il est l'histoire d'un solitaire que l'art de Malègue est parvenu à présenter autrement que comme « un isolé[129]. »

Le personnage d'Augustin est, selon son créateur, celui d'un logicien abstrait, spécialiste d'Aristote, spécialisation étrangement mêlée à son ascendance de paysan cantalien qui lui transmet une certaine ivresse de la réussite sociale, une raide assurance en lui-même, la volonté de chercher seul les solutions, faisant de lui quelqu'un de hautain.

Il éprouve comme le définit Malègue, « une sorte de sourde et hautaine satisfaction de sa souffrance intellectuelle et de sa noblesse d'âme, une obscure conscience de l'incontestable distinction morale dont elle la marque » de sorte que sa tristesse, poursuit-il, « est au fond une de ces tristesses qui n'aiment pas être consolées[130]. »

Cette « tristesse qui n'aime pas être consolée » se retrouve aussi dans la passion amoureuse muette, n'osant se déclarer au cours de longues pages qui font presque le tiers du roman (mais ne sont que quelques semaines de la vie d'Augustin) - pour la jeune et belle aristocrate, passionnée de philosophie et profondément croyante, Anne de Préfailles.

Si Augustin ou Le Maître est là se veut aussi une sorte de réponse au Jean Barois de Roger Martin du Gard, il ne se réduit pas à cette réponse. C'est surtout la mort d' Augustin que Malègue oppose à celle de Jean Barois

Claude Barthe reproche à « cet intellectuel fait romancier » de trop faire raisonner des personnages qui « pétillent d'intelligence et de finesse, cela au risque de quitter le genre romanesque[131]. » Il concède que ces conversations adoptent un rythme plein de « ramifications psychologiques. » Et ajoute aussi que le livre raconte une crise d'abord intellectuelle ce qui justifie la manière dont s'expriment souvent des personnages eux-mêmes philosophes ou théologiens[132].

Ces jugements de Barthe ne valent que pour Augustin ou Le Maître est là non pour Pierres noires dans lequel il voit une « saisissante fresque », de l'installation de la République, de la laïcisation de l'enseignement primaire, du passage de la fortune et du pouvoir dans les mains d'une autre classe sociale, fresque si bien faite à son sens qu'il se demande s'il existe ailleurs dans la littérature française « une description socio-littéraire plus impressionnannte, presque cinématographique[4] », de cette « fin des notables » qu'a décrite aussi Daniel Halévy.

Pour lui, Augustin est « un grand texte de la littérature du XXe siècle » et Pierres noires un roman inachevé « dont la qualité est peut-être encore supérieure[133]. »


Influences et intertextualités modifier

 
Cantique des cantiques au Monastère de la Vierge à Pétropolis

C'est sous l'influence de Proust que les souvenirs de lecture sont, « systématiquement » écrit Pauline Bruley, associés à des souvenirs concrets.

Par exemple : le Cantique des cantiques aux premières rencontres d'Anne par Augustin; la douleur de Christine à la mort de Bébé rapportée au Massacre des Innocents (chapitre intitulé La voix qui pleurait dans Rama) ; le Jardin des Oliviers pour certaines souffrances spirituelles d'Augustin (avec ici le paradoxe que le héros se compare avec la solitude de Jésus en ce lieu au moment où il doute de la réalité du récit évangélique[134]).

L'Ancien et le Nouveau Testament, la liturgie modifier

La même critique parle de « mise en scène de la Parole sous le texte », estimant que ce que cherche Malègue en mêlant des citations bibliques au texte du roman, c'est d'utiliser le personnage de son héros comme un « relais entre la Bible et son lecteur moderne », le roman permettant à la parole de la Bible de s'incarner à nouveau dans une situation vécue.

Agathe Chepy observe que l'auteur associe des actes humains décrits en totalité à des « versets tronqués », que le lecteur doit compléter pour la compréhension de l'intrigue en sa dimension spirituelle, ce qu'est d'ailleurs déjà le titre du roman comme l'observe P.Bruley « Le Maître est là [et Il t'appelle] »[135], (les mots entre crochets sont absents du titre).

Pour A.Chepy, « la surnature non énoncée dans le discours apparaît cependant subrepticement derrière la prose »[136] Les paraboles ou autres extraits bibliques sont détournés : seules leur signification profonde est annoncée. Notamment par les titres « Ne l'éveillez pas avant qu'elle ne veuille » qui est un verset du chapitre 2 du Cantique des cantiques (Chapitre IV de la Partie VI d' Augustin).

Il y a aussi le titre : « Si vous ne voyez des signes et des prodiges » (Jean, Chapitre IV, verset 28), qui est suivi des mots (tronqués par Malègue) (« ...vous ne croyez point » (Chapitre III de la partie VII d' Augustin) et apparaît comme une façon de décrire la foi de Christine qui ne voit pas de « prodiges » mais croit.

Ce sont ces procédés qui rendent la Parole biblique « patente et active »[136]. Cette insertion des paroles bibliques dans la trame du roman a comme effet de transformer l'écriture (analysée par les exégètes, notamment modernistes), de paroles mortes en paroles vivantes.

Yves Chevrel pointe aussi la liturgie. La Première partie d' Augustin renvoie à un office religieux puisqu'elle est intitulée Matines, la dernière intitulée « Sacrificium vespertinum » 6 (le « sacrifice du soir »), à l'Exultet chanté durant la veillée pascale (« Dans la grâce de cette nuit, accueille, Père très Saint, /le « sacrifice du soir » de cette flamme que l'Eglise t'offre par nos mains ; /permets que ce cierge pascal, consacré à ton nom, brûle sans déclin en cette nuit/et qu'il joigne sa clarté à celle des étoiles » et le dernier chapitre du roman Vita mutatur à la préface des messes de funérailles (« Vita mutatur non tollitur » : « la vie est changée elle n'est pas détruite »)[137].

Blaise Pascal modifier

 
Intérieur de l'église Saint-Étienne-du-Mont : cette église et son lien avec Port-Royal des Champs, Pascal et le jansénisme sont évoqués dans Augustin.

Pour Pauline Bruley, Malègue suit le mouvement de la rhétorique pascalienne. Il retourne les reproches positivistes faits au caractère douteux des textes sur Jésus en faisant une « contre-proposition » aux historiens. Il transforme quelque peu l'extrait des Pensées (Lafuma 270 - Brunschvicg 670) où Pascal compare la méconnaissance du Christ par les juifs et par les païens (les uns et les autres escomptant en quelque sorte un Messie glorieux)[note 5].

La comparaison chez Pascal entre juifs et païens se transforme sous la plume d'Augustin (réécrivant juste avant sa mort son article Les Paralogismes de la critique biblique en lui donnant une conclusion cette fois positive) en une comparaison entre les historiens anciens et les historiens modernes.

Les anciens attendaient un Messie en « apparat royal », mais le Christ accepte les lois économiques de la bassesse sociale qui le cache à leurs techniques terrestres.

Les modernes attendent un Messie répondant aux critères de l'« École des chartes », mais le Christ accepte de même le caractère inévitablement intechnique des témoignages de son époque, eu égard cette fois aux critères de cette École. Augustin reprend aussi cette fois texto les mots de Pascal « Ils n'ont pas cru [Pascal dit « pensé »] que ce fût lui[138]. » Enfin, toujours dans le sens de cette intertextualité, tout ceci est consigné dans des liasses, soit ce sur quoi sont écrites les Pensées.

Le jardin des oliviers est évoqué aussi lors du récit de l'appel refusé par Augustin quand, durant sa maladie d'Aurillac à 16 ans, il lit l'extrait des Pensées de Blaise Pascal intitulé Le Mystère de Jésus.

À travers le texte de Pascal, Augustin aperçoit en imagination Pascal lisant et écrivant, mais aussi, à travers une distance temporelle plus grande « une individualité douce, simple et très mystérieuse, parlant souffrant comme l'un de nous et toutefois suspecte de quelque effrayante identité avec le Très-Haut »[139]. Malègue insiste, à travers Pascal et comme lui, sur l'humanité de Jésus et Pauline Bruley de citer sa remarque selon laquelle Augustin ressemble alors à un disciple galiléen, pas nécessairement bien informé, mais « soupçonneux de quelque grand secret ».

Le roman travaille beaucoup à faire sentir l'atmosphère du jardin des oliviers quand le Christ y est arrêté : il est plein de nuit, puis rouge de torches (des gens qui viennent arrêter Jésus). L'obscurité du moment et du lieu renforce, selon P.Bruley, celui du sens. Mais c'est à ce moment-là que, dans une prosopopée mystique, le Christ qui s'adresse à Pascal s'adresse aussi à Augustin[140].

Le protocole d'énonciation, suivant la même critique, empêche que l'on puisse distinguer la voix de Jésus de celle de Pascal et de celles d'Augustin ou du narrateur. En même temps tout est fait pour donner accès à la conscience du héros, Malègue mêlant « psycho-récit, monologue intérieur et discours direct », brouillant les voix en usant de pronoms dont le référent n'est pas clair.

Laurence Plazenet repasse en revue tout l'intertexte pascalien, mais en commente plus particulièrement l'épisode lié à l'Église Saint-Étienne-du-Mont lorsque M. Méridier conduit Augustin à Paris pour l'inscrire au Lycée Henri IV. Malègue fait le lien entre l'édifice religieux, le jansénisme et Pascal avec le retour du souvenir de l'appel de Dieu à tout donner que le futur normalien a perçu (et refusé), à 16 ans[141].

Georges Bernanos, Gabriel Marcel, Novalis et l'idéalisme allemand modifier

 
Bernanos vers 1940

P.Bruley pense que le procédé littéraire, qui vient d'être décrit, a été directement inspiré à Malègue par une scène mystique semblable dans La Joie de Bernanos quand Chantal de Clergerie après avoir été, en son extase, aux côtés du Christ en son agonie, voit Judas pendu à l'olivier noir où il met fin à sa vie et puis, le remplaçant en quelque sorte, l'abbé Cénabre de L'Imposture, pour le salut duquel elle va donner sa vie.

Le dialogue Largilier/Augustin comparé à celui de la comtese et du curé d'Ambricourt modifier

Benoît Neiss pense aussi que Malègue est proche de Bernanos en raison du fait que pour lui l'essentiel est également « la présence dans la vie quotidienne de la sainteté dont il montre tranquillement la proximité actuelle[142]. »

Lors d'un colloque organisé par le Centre d'Études et de Prospective sur la science[143], il analyse la conversion d'Augustin sur son lit de mort, estimant que le travail de Malègue en ce passage est une description très longue et très fine sur les subtiles façons dont une âme est investie et dont « peu à peu elle est obligée de se rendre et jusqu'à la fin[144]. »

Augustin Méridier ressemble ici selon Neiss à la Comtesse face au Curé d'Ambricourt dans Journal d'un curé de campagne qui dit à un moment donné au prêtre que ce qui lui reste d'orgueil en elle pourrait le réduire en poussière.

Elle devra finalement, en un sens, se rendre. Ce qui rapproche les deux personnages, c'est, selon Neiss, une même révolte contre la Providence. Elle s'exprime, chez Augustin, à travers son refus de guérir : il ne peut supporter qu'après l'amour lumineux qui lui a été révélé en même temps que des promesses immenses, la maladie détruise tout.

Neiss commente les instants cruciaux du dialogue entre Largilier et Augustin à Leysin, insistant sur le fait qu'après avoir reçu en profondeur les remarques de Largilier sur l'humanité du Christ, Augustin se rapproche de la foi. Il avoue à Largilier que lorsqu'il contemplait le Mont Blanc avec Christine qui le disait une cime souveraine « pleine de Dieu », il n'était pas loin de le penser aussi.

L'une des phrases de Largilier que Neiss assure être décisive est celle où celui-ci réplique à Augustin (se disant non préparé, observant que Largilier ne propose pas « avec sérieux » le sacrement qu'il veut lui administrer) : « Ton profond désir, que ta pensée déforme, par fausse pudeur, par manque de sincérité simple dans l'aveu de tes poussées intérieures, par crainte d'un réel trop beau, eh bien! je ne dépasse rien en t'affirmant que Dieu l'agrée comme préparation. »

Depuis de longs mois avant cette scène, Augustin est déjà, selon G.Mosseray, « sur le seuil de la conversion », pour de multiples raisons : intérêt pour l'expérience religieuse d'un point de vue philosophique, réticences à l'égard des a priori de certaine critique des Évangiles, sentiment d'un lien profond (ressenti, lui, durant la scène elle-même), entre la fragilité des témoignages évangéliques, l'humanité du Christ liée à celle-ci et sa propre situation d'homme fauché en sa pleine jeunesse[145].

Enfin le retournement de la question moderniste sur l'impossible divinité du Christ en son contraire : « Loin que le Christ me soit inintelligible s'il est Dieu, c'est Dieu qui m'est étrange s'il n'est le Christ, » retournement lié à la manière aussi dont il vit à ce moment son propre destin.

À quoi l'on peut ajouter encore, comme G.Mosseray invite à le faire, la remarque de Largilier sur les « inerties », des positions adoptées de longue date (celle de la croyance ou celle de l'incroyance - le cas d'Augustin).

Pour Benoît Neiss, dans cette scène, Malègue « descend plus profondément dans l'âme individuelle que Bernanos[144]. » Il estimait déjà en 1975 où la comparaison avec la scène de Journal d'un curé de campagne est déjà esquissée que Malègue rend « sensibles, tangibles, odorants » les mouvements de l'âme d'Augustin[146].

Gabriel Marcel, l'idéalisme allemand et Novalis modifier

 
Une façon dans Augustin de transcender l'intelligence rare en France et comparable à Novalis.

Edgard Sottiaux rapproche une pièce de Gabriel Marcel - Le Monde Cassé - de l'interprétation du dialogue final entre Augustin et Largilier d'après Moeller, pour qui il y a dans ce dialogue, les trois dimensions de la foi : caractère raisonnable (Augustin voit comme inévitables les obscurités des Écritures liées à l'incarnation), caractère surnaturel (l'invitation de Largilier à se confesser), caractère libre (Augustin acceptant l'invitation de son ami).

Dans Le Monde cassé, Christianne rencontre Jacques, en tombe amoureuse, mais quand elle désire lui faire part de cet amour, le jeune homme lui annonce qu'il rentre à Solesmes. La jeune femme désespérée, se marie par convenance avec Laurent, se jette dans une vie de plaisirs superficiels, se ferme à Laurent.

Jacques meurt. Christiane écrit à la sœur de Jacques, pour qu'elle lui parle de lui. Quand vient Geneviève, Christiane lui livre le secret de sa vie fermée aux êtres. Cet aveu « détruit » sa vie factice : « C'est comme si je venais de me détruire. Ce secret, c'était encore une espèce de force, je ne l'ai plus. Ah! il vaut mieux... Laissez-moi, voulez-vous[147]? » Et c'est ici, selon Sottiaux, comme les dernières hésitations d'Augustin.

Geneviève lui apprend alors que Jacques a toujours su qu'elle l'aimait. Et, dit-elle, si Christiane vient de lui confier le secret de sa vie ratée, c'est qu'elle pressentait le message qu'elle allait lui apporter de la part du disparu. Un tel échange met les deux femmes en relation très profonde « au niveau du surnaturel[148]. »

Geneviève n'est elle-même qu'une faible personne, ce qui donne à Christiane l'intuition [caractère raisonnable de la foi selon Sottiaux] que Jacques parle à travers Geneviève.

Elle pose un acte similaire à celui de Largilier (malgré les différences, c'est le moment du surnaturel) : elle confie à Christiane qu'elle a la tentation de tuer son mari malade qui lui est une charge et lui demande de prier pour elle (alors que Christiane est incroyante). Geneviève dit à propos de Jacques : « Il vous voit en ce moment et vous le savez[149]. » Les deux femmes s'étreignent silencieusement, ce que surprend Laurent, son mari, survenant à l'improviste. Christiane se rend compte alors [liberté de la foi], qu'elle doit agir.

Elle dit à son mari qu'elle vient de recevoir « le plus beau cadeau qui lui ait jamais été fait » (soit la grâce selon Sottiaux). Les deux époux se rapprochent au cours de plusieurs réparties. À un tel point que Laurent dit à sa femme : « c'est comme si tu m'étais rendue après ta mort », celle-ci lui répondant : « Ce mot-là, je vais maintenant tâcher de le mériter[150]. »

Le critique allemand Wolfgang Grözinger estime que chez l'auteur d' Augustin, ces traits essentiels de l'esprit français comme la pensée cartésienne et l'élan vital, le sensualisme les unissant, se transcendent un peu comme chez Novalis sous la visible influence notamment de Goethe et de l'idéalisme allemand, mais « sans sacrificium intellectus [sacrifice de l'intelligence] ni étouffement des sens. Voilà, dans la littérature française contemporaine, une rare exception[note 6] »

Alfred Loisy et Daniel Halévy modifier

 
Alfred Loisy (1857-1940) lecteur attentif et très critique de Malègue

Fin décembre 1934, Jean Guitton rend visite à Alfred Loisy et lui offre un exemplaire du roman de Malègue. Loisy envoie à Guitton, à la suite de la lecture de ce livre qu'il considère comme modernisant, une lettre où il émet une série de critiques dont celle qu'Augustin est revenu à la foi sans être persuadé et selon lui, par le procédé dont on « use et abuse dans les prédications et le missions populaires », à savoir la peur de la mort[151].

Beaucoup de critiques n'interprètent pas ainsi le retour à la foi d' Augustin et Malègue a lui-même voulu montrer qu'il y avait chez Augustin toute une démarche intellectuelle complexe.

En revanche, Malègue prend au sérieux une autre critique de Loisy à savoir que « le Dieu des chrétiens est entré dans la vie de l'humanité des milliers et des milliers d'années après que les hommes avaient commencé de se multiplier sur la terre », ce qui relativise le message chrétien. La Bible n'est pas selon lui, « toute l'histoire divino-humaine de la religion » et elle n'est, humainement parlant, que « la légende mythique d'un grand mouvement religieux »[152].

Dans ses projets pour le Livre III de Pierres noires, Malègue voulait, à la manière de la nouvelle La Révolution pour le LIvre I, insérer le récit de la tentation éprouvée par un moine d'une des deux abbayes bretonnes proches des alignements de pierres de Carnac, qui s'y serait perdu et y aurait douté de l'exceptionalité du Christ.

Il aurait surmonté ce doute d'une manière qui aurait approfondi la notion de Classes moyennes du Salut, au centre du roman. En partant de l'idée qu'une « Incarnation dans le temps, car datée », ne laisse pas nécessairement hors d'elle « l'immensité de l'histoire où le Dieu des chrétiens n'était pas », dans la mesure où elle est précédée d'une « aurore d'Incarnation. » Puis, de l'idée que l'Incarnation, qui « transcende le temps », étend également la notion de classes moyennes du Salut : dans d'autres religions et cultures : « les classes extrêmes de la sainteté relèvent de la Loi de l'Incarnation objectivement »[153], l'opposition entre les Saints et les âmes moyennes s'y reproduit.

Daniel Halévy avec La Fin des notables est une autre influence. L'historien fait le constat que les notables d'avant 1870 et la République, ont peine à concevoir un ordre durable « séparé de Dieu et des disciplines de son Église[154]. » Lebrec citant Halévy [155], souligne la surprise, chez ces notables, dès 1870, de voir disparaître « le vieil et courtois usage du salut, respectueusement donné, aussitôt rendu[156]. »

Barthe admire la façon dont Malègue décrit cette classe qui s'éteint« inexorablement au milieu de ses maîtres d'hôtel et de ses jardiniers entre 1870 et 1914[4]. » Lorsqu'il est surpris du nombre de réactions que suscite son compte rendu de Pierres noires chez les lecteurs du journal Le Monde du 31 janvier 1959, R.Coiplet titre à nouveau le 7 février dans le même quotidien « L'influence de Joseph Malègue », où il signale l'intérêt qu'a pris Halévy à la lecture du roman inachevé.

Cette opinion d'Halévy permet à Léon Émery d'affirmer que personne n'avait décrit avec autant de poésie et de vérité une petite ville de province depuis Balzac, petite ville qui chez Malègue atteint « des dimensions colossales, lorsqu'elle est vue de l'intérieur et par les yeux d'un enfant[157]. »

Autres intertextes modifier

Yves Chevrel compare une série de romans liés aux controverses religieuses des années 1880 à 1940 : Robert Elsmere de Mary Augusta Ward, Le Saint d'Antonio Fogazzaro, Rome d'Émile Zola, Jean Barois de Roger Martin du Gard, L'Empreinte d'Édouard Estaunié, L'Oblat de Joris-Karl Huysmans et les regroupe en évoquant le modernisme qu'ils abordent chacun, sous le titre de la Partie V d' Augustin, « Paradise lost » titre de l'épopée chrétienne de John Milton.

Pour Chevrel, c'est Malègue qui « pose la question dans sa plus grande ampleur », car pour tous ces auteurs le paradis perdu c'est celui de la foi de l'enfance liée aux pratiques liturgiques. Et qu'on a perdue.

Mais lorsqu'il discute de ces questions avec Mgr Herzog, à une époque du roman où il n'a pas encore retrouvé la foi, il insiste avec lui sur le fait que celle-ci n'est pas la vision directe de l'Éden,de sorte que l'on peut se poser la question avec Chevrel : « Le paradis n'est-il pas toujors perdu[158]? »

Pour Benoît Neiss, Malègue appartient à « l'âge d'or des grandes sommes romanesques » qui témoignent de la confiance en la vie, dans la littérature et dans les valeurs fondamentales.

Il est même selon lui « une des plus magistrales synthèses de la littérature de 1920 » qui garde le souvenir de L'Éducation sentimentale de Gustave Flaubert, du Bildungsroman des Allemands, de J-K Huysmans.

Et avec le grand roman d'idées (Barthe qualifie ainsi Augustin[159]) à la Thomas Mann (La Montagne magique est aussi un roman du sanatorium[160], Jacques Vier évoque aussi Mann dans son étude sur Malègue[161]), avec Roger Martin du Gard, Jules Romains (Lebrec compare les discussions entre Jerphanion et Jallez à l'École normale, et ceux de Largilier et Augustin[162]), Romain Rolland, Georges Duhamel. En outre, comme Lebrec avant lui[163](il fait aussi le lien entre l'héroïne d'un roman inachevé, Colombe Blanchet, et Armelle dans Pierres noires[164]), Neiss voit en Anne de Préfailles une sorte de réplique d'Yvonne de Galais d'Alain-Fournier dans Le Grand Meaulnes

Pour Neiss, Malègue, parce qu'il a réussi à assembler tant d'apports différents dans Augustin ou Le Maître est là « sans traces de couture », représente « l'un des centres de convergence du roman de son époque. »[144].

Malègue et Proust : leur incroyable surabondance des enregistrements modifier

 
Portrait de Marcel Proust (peint en 1892, Proust a 21 ans) de Jacques-Émile Blanche

La comparaison avec Proust est récurrente chez les critiques depuis 1933[165]. Mais « cette minutie, cette acuité d'analyse proustienne » chez Malègue entraîne une « subordination » à Proust qui n'est pas pertinente selon Léopold Levaux[166].

C'est l'intertexualité proustienne qui est la plus évidente chez Malègue. La notion demeurerait pertinente qu'il y ait ou non influence consciente (ni même réelle à la limite) de Proust sur Malègue. Qui le resterait s'il s'agissait simplement d'une parenté. Malègue a confié à Levaux qu'il écrivait déjà de cette façon « avant que Proust eût, en 1919 éclaté, si je puis dire, comme une bombe[167]. »

Jacques Madaule estime que Augustin ou Le Maître est là n'aurait pas été très différent si Proust n'avait jamais écrit[168]. Germain Varin penche plutôt pour l'influence de Proust[169]. Pour Claude Barthe, la comparaison avec Proust vient à l'esprit surtout pour le roman inachevé Pierres noires, mais le compliment que cela lui a valu d'être un Proust catholique dessert Malègue[170].

L'intertextualité proustienne est dans Pierres noires comme dans Augustin modifier

Barthe estime à la lecture des deux romans qu'est Autobiographique le thème de l'incipit d’Augustin, qui déploie l'analogie de du côté de chez Swann et du côté de Guermantes, en un « du côté de la préfecture de province », (la ville où enseigne le professeur Méridier) et du « côté des Planèzes » (les vacances à la ferme des cousins de madame Méridier, la ferme du Bois noir de son enfance à la limite du Cantal) : « Lorsque Augustin Méridier cherchait à démêler ses plus lointaines impressions religieuses, il les trouvait très au frais, mélangées à ses premiers souvenirs, et soigneusement classées dans deux compartiments de sa mémoire »[171].

Benoît Neiss ajoute qu'Élisabeth de Préfailles ne le cède en rien à Oriane de Guermantes ni Anne de Préfailles à Albertine ou à Gilberte Swann.

Dans Augustin ou Le Maître est là modifier

Jacques Vier choisit un bref passage d’Augustin ou Le Maître est là, révélateur de la parenté de Malègue avec Proust. Augustin Méridier, en vacances à l'appartement familial avec sa mère et sa sœur Christine, est invité, en leur présence, de manière imprécise - pour une après-midi ou pour un déjeuner - par la tante d'Anne de Préfailles (désignée dans le passage qui va suivre sous son nom d'épouse, madame Desgrés des Sablons), Anne qui sera son grand amour.

L'invitation vise donc aussi les deux femmes et Malègue analyse : « L'acuité d'Augustin, cependant fort grande, fut insuffisante à lui permettre de lire en Madame Desgrés des Sablons. L'évident intérêt de celle-ci pour lui ne s'étendait qu'avec difficulté à sa mère et sa soeur, quoiqu'elle fût préparée au sacrifice de les recevoir. Mais elle vit qu'elle ne courait aucun risque. Madame Méridier, et même Christine, qui eussent malaisément éludé le déjeuner, s'il s'était présenté, daté, précis, net de tout contexte, abordable et glissant comme une pilule, susceptible seulement d'un oui ou d'un non, que leur timidité rendait, pour des raisons différentes, presque également impossibles, reculerait devant une invitation dont elles devaient elles-mêmes fixer la date, et qu'un artifice de rédaction mondaine associait à une après-midi entière, interminable et déclassée[172]. »

 
Le sanatorium de Leysin face au Mont Blanc

Jean Lebrec met lui en exergue la minutie des analyses psychologiques chez Malègue qui fait de tout son travail d'écriture un chef-d'œuvre. Il considère l'expression de « Proust catholique » comme pertinente[173].

Malègue est, pour lui, l'un des premiers écrivains français à comprendre après Proust ou avec lui qu'il faut parler des « irradiations » du réel dans la « vie intérieure » des personnages[174]. Il a le sentiment d'entendre Proust[175] lorsque Malègue écrit : « À travers cette profonde épaisseur de temps, nos joies, nos douleurs, nos amours finissent à peu près toutes par sauter de l'actuel dans la mémoire et de celle-ci au néant[176]. »

Swan est poursuivi par l'emblème musical de son amour, Augustin le lie à Chopin et Liszt lors de ses derniers jours au sanatorium de Leysin[177]. Malègue est capable de pénétrer dans la sensibilité d'autrui « au moyen d'une très subtile sympathie exploratrice, d'une sorte de mimétisme spontané des âmes, comme Newman et Proust[178]. » C'est un écrivain familier de sa propre durée qui a le don de faire vivre celle d'autrui[179].

Dans Pierres noires : Les Classes moyennes du Salut modifier

Dans Pierres noires l'attaque est la même que chez Proust souligne Lebrec (à l'instar de Barthe pour Augustin)[180]. Il met en parallèle les premières lignes célèbres de À la recherche du temps perdu - « Longtemps, je me suis couché de bonne heure. Parfois ma bougie éteinte, mes yeux se fermaient... » - et celles du premier livre de Pierres noires dont Jean-Paul Vaton est le narrateur - « Un jour, dans les années 1890, j'acquis une notion singulière : j'appris que ces divisions du temps portaient des numéros. »

La narration est le fait de Jean-Paul Vaton, mais se combine à l'introspection du personnage-narrateur, le passé et le présent étant sans cesse liés l'un à l'autre puisque c'est tantôt le jeune Vaton qui parle ou se décrit, tantôt le même homme, beaucoup plus âgé, revivant ses « quarante ou cinquante ans de recul[181]. »

À propos du deuxième roman, Pierres noires. Les Classes moyennes du Salut, Pierre-Henri Simon note dans le Journal de Genève : « la prose de Malègue, où l'influence de Proust est évidente et presque trop constamment sensible, est d'une étoffe admirable et que l'on croyait perdue[182]Pierre de Boisdeffre, dans Combat lie le même ouvrage au premier roman  : « les deux grands livres de Joseph Malègue forment le contrepoids chrétien de l'œuvre de Proust[183]

Toujours à propos du deuxième roman, Claude Barthe écrit que dans celui-ci le style « sous la floraison proustienne des métaphores (où la plaisanterie « spongieuse et un peu mouillée » de l'instituteur s'accorde avec son autorité « volumineuse et molle» » est celui d'un scrupuleux de génie faisant dire à Jean-Paul Vaton à propos de sa mère qu'il lui conserve, enfant, « une égale amertume de mes rancunes à moi qui était des vices » et de ses rancunes à elle « qui étaient des souffrances » au point que ces deux ressentiments mutuels installent entre eux une « réciprocité amère, un don de création réciproque[184]. »

À propos de l'observation faite plus haut sur le sénateur Desgenets qui « sentait » une odeur de fleurs des champs et de fumiers de bestiaux, Jacques Madaule signale qu'il existe dans cette manière d'écrire une ambiguïté, car on ne sait si c'est le sénateur qui dégage cette odeur attribuée de manière métaphorique à ses travaux d'économie et de législations agricoles ou si c'est l'instituteur qu'il reçoit dont il sent émaner ces senteurs rurales. Pour Madaule l'audace de ces rapprochements métaphoriques, c'est tout l'art de Malègue et de Proust qui signifient à leur manière que « l'épaisseur du temps peut être traversée et que la longueur des distances peut être abolie[185]. »

Madaule précise le rapprochement avec Proust : entre l'instituteur rural qui a subi une sanction en étant déplacé et le sénateur le recevant dans sa somptueuse demeure passe une odeur de foins de même façon que la Duchesse de Guermantes ne dédaigne pas d'affecter « un accent légèrement provincial, par où elle se rattachait aux terres dont elle portait le nom et aux origines de son illustre lignée[186]. »

La comparaison avec Proust, réaffirmée, réétudiée, discutée modifier

 
Dernière page manuscrite achevant l'œuvre de Proust la veille de sa mort : Malègue ne parviendra pas à terminer sa propre fresque.

Wanda Rupolo pense qu'il « est possible de trouver [chez Malègue], des reflets de l'esthétique proustienne dans les évocations du passé ressuscité à travers des impressions sensorielles, dans l'usage habile du temps, dans une minutie soulignée de l'analyse psychologique[note 7]. »

Proust et Malègue ne se différencient pas seulement d'un point de vue religieux modifier

Mais plusieurs facteurs « différencient les deux œuvres » (« una certa distanza tra le due opere, dovuta a moltepleci fattori ») poursuit la critique italienne en ne se contenant pas d'opposer Proust et Malègue sur le plan de leurs convictions philosophiques, mais aussi sur le plan littéraire.

Pour elle, les événements chez Malègue sont « disposés suivant des séquences temporelles qui, bien qu'en opposition, sont conduites selon un fil logique » (« secondo un filo logoco »), alors que chez Proust les événements proposent « une réalité extrêmement fragmentée »(« una realità estremamente fragmentaria ») chez Proust.

Pour elle, chez Proust on a affaire à « l'histoire d'un esprit qui est à la recherche d'une vérité, la vérité de la création intellectuelle » (« è la storia di uno spirito alla ricerca di una verità che è quella della creazione intelletuale ») alors que chez Malègue ce qui compte au contraire c'est « la recherche de Dieu » (« la ricercadi dio »)[187].

Benoît Neiss ajoute d'autres éléments encore en rappelant que Malègue rivalise avec Proust sur son propre terrain : « la lenteur, l'utilisation littéraire de l'enfance, la peinture de la société aristocratique ». Il se contente de faire la différence entre les deux auteurs d'un point de vue idéologique en disant que la leçon proustienne chez Malègue est « transfigurée à la lumière de l'espérance chrétienne », ne craignant pas de rapprocher par exemple la mort de Bergotte de celle d'Augustin, malgré les différences entre les deux personnages en dépit il est vrai d'une réflexion chez Proust sur l'immortalité dont Moeller dit qu'elle est absente des pages consacrées à l'agonie d'Augustin.

Le même Mœller trouve matière à comparaison avec Proust lorsque Augustin, enfant, face à la grande forêt du Cantal éprouve le mystère des choses : les premiers troncs d'arbre « ont l'air de cligner de l'œil et de dire: « Oui…mais, derrière nous… Derrière les enfoncements qui suivent notre première obscurité rousse… et plus loin, derrière ceux-là… et derrière les autres encore… ». Augustin répète : « « les gorges, la grande forêt… la grande forêt des gorges… » pour faire chaque fois prendre à son esprit son élan vers la confidence suprême… Le secret de la grande forêt, plus gonflé du dedans, est plus près de s'ouvrir[188]

Ce que Moeller rapproche du « passage fameux de Du côté de chez Swann : le narrateur éprouve un jour, devant les arbres, l'impression que les écorces craquelées veulent lui « dire » quelque chose, qu'elles vont comme s'ouvrir pour révéler leur secret (…) Malègue décrit une impression exactement semblable lorsqu'il montre Augustin aux écoutes de ce secret qui va se révéler lorsque la forêt « s'ouvrira »»[189].» Chez l'un il y a un mystère d'ordre artistique et chez l'autre de nature religieuse.

Pour Jacques Vier l'art de Malègue trouve sa force dans la façon dont cet écrivain interprète des milieux fort divers mais admirablement cohérents, « dans la lumière qu'ils projettent sur les sursauts d'une âme en quête de son Dieu, et surtout dans le passage de l'un à l'autre. On voit comment on a pu le comparer à Proust[190]. »

Cette différence importante ne met pas en cause la parenté entre les deux écrivains modifier

En 1945, Joris Eeckhout, critique littéraire flamand, qui cite de longs passages en français de l'œuvre de Malègue écrivait : « Louis Chaigne signale à propos d' Augustin le nom de Marcel Proust, mais en faisant cette réserve que Malègue ne possédait pas ce à quoi Barrès accordait tant de prix chez Proust : « l'incroyable surabondance des enregistrements[191]». Mais celui qui lit et relit attentivement Malègue est justement frappé par cette « incroyable surabondance des enregistrements », qui ne le cède en rien à l'art de Proust.

On loue chez Proust ce que rappellent le titre célèbre « Sonate de Vinteuil »; la musique qui se joue chez Malègue est encore plus bouleversante parce qu'elle s'avère la manière dont s'exprime des âmes d'une plus grande élévation[note 8].

Dans un ouvrage paru en 2004 et consacré au phénomène littéraire tel que vécu en milieu chrétien, Cécile Vanderpelen-Diagre estime que le premier roman de Malègue reflète, dans le domaine littéraire, ce vécu chrétien telle que la formation propre aux écoles catholiques le forge.

Pour elle, cette formation doit inculquer aux jeunes gens «  une sorte de réflexe pavlovien de rejet systématique à la lecture de toute pensée impie  » et, grâce à Augustin ou Le Maître est là, on possède « une vision assez claire de ce mécanisme », car le roman de Malègue « conte l'itinéraire vers la foi d'un jeune homme en proie aux plus profondes incertitudes métaphysiques ».

Elle ajoute que lors de sa parution le roman de Malègue fut considéré comme exceptionnel justement en raison de la capacité chez Malègue à procéder aux « enregistrements » dont parle Barrès, et notamment celui « systématique de chaque mouvement et impression spirituels vécus par le héros. Malègue est qualifié à maintes reprises de « Proust chrétien »[192]. »

Elle décrit ensuite toutes les difficultés de conscience vécues par Augustin lorsqu'il lit la Vie de Jésus d'Ernest Renan, difficultés minutieusement disséquées par Malègue. Difficultés qui mènent en fait Augustin à la perte de la foi. Pour Lebrec, Malègue est un romancier de la mort de Dieu[193].

Couleurs, odeurs, sons et beauté des femmes modifier

 
Claude Monet, Soleil couchant dans la Creuse : « Certains pourpres momentanés et certains ors qu'on voit le soir [...] dépassant les extrémités de la beauté »

R.Mehl remarque que Malègue, pour faire vivre ses personnages, lie émotions, réflexions, décisions aux odeurs, nausées, parfums, couleurs. Toutes les sensations accompagnent même les mouvements les plus épurés, les plus spirituels et il « apporte une minutie laborieuse » à suggérer le rapport entre vécu interne et sens externes. La méthode n'est pas toute nouvelle, pense Mehl en 1934, mais n'a jamais été appliquée, « avec un tel scrupule, une telle exactitude[194]. »

Un prêtre qui a connu Malègue confie à Lebrec que sous le couvert d'une apparente pensée intérieure s'exprimant par un regard fixe, l'écrivain observait tout, que rien ne lui échappait : « les formes, les couleurs, les sons, les odeurs, le goût même des choses, les sensations de froid, de chaleur, les impressions de douleur, de maladie, de mort,...il percevait tout[195]. »

Quant à la beauté des femmes, qu'il s'agisse d' Augustin ou de Pierres noires, son rôle est déterminant dans la structuration des deux intrigues.

Couleurs modifier

Dans Augustin ou Le Maître est là les couleurs changent au fur et à mesure que le récit avance, en particulier le jaune, tantôt signe de vie, tantôt de mort. Wanda Rupolo le fait observer en énumérant les diverses sortes de jaune qui apparaissent : « jaune miel », « jaune brun », « gris jaune », « jaune graisseux », « jaune cru », « jaune café au lait », « blanc jaune », « jaune paille », « jaune très pâle ».

On en retrouve certaines dans Pierres noires comme le jaune pâle dans une lumière « or pâle », p. 52; le cru associé à une autre couleur : les « yeux d'un bleu cru et simple » d'un surveillant de lycée ancien militaire (p. 114); les cailloux d'une « route blanc jaune » associés aux premiers signes de la ruine puis du suicide du comte de Brugnes; d'autres comme les cheveux « jaune vert » d'une prostituée ou encore le « jaune soufre » du salon de la maison close (p. 369).

Leur succession selon la logique d'un récit ne se retrouve pas dans ce roman inachevé, comme avec l'apparition du gris et du noir dans les pages sombres de la fin d' Augustin[196], puis le triomphe du blanc, reconquête de la vie etde la foi du héros par lui-même.

Mais dans Pierres noires la signification mystique du blanc s'approfondit. L'instituteur Monsieur le Maître Genestoux, déplacé à Brissondeix peu avant sa retraite y est mort avant de l'atteindre et son corps est ramené à Peyrenère transporté dans un char à bancs équipé en traîneau, des patins remplaçant les roues et tiré par un seul cheval. Jean-Paul Vaton qui accompagne le transport de la dépouille mortelle est, écrit Lebrec, frappé par le contraste : « noir de la boue et des vêtements, magnifique blanc immaculé des neiges amoncelées et du ciel ».

Ensuite, la nuit tombe et à travers la façon dont Jean-Paul Vaton observe l'évolution de ces couleurs, pense Lebrec, les « éléments fondamentaux de l'esthétique romanesque de Malègue [se rencontrent] de la façon la plus heureuse »[197].

Jean-Paul Vaton éprouve le sentiment d'une similitude entre les couleurs vues dans la nuit pleine de neige et « une étendue jaune-sable infinie ... sous un mortel soleil de feu un sentiment de dépouillement de tout le bariolage de la terre [...] le vif sentiment d'une présence invisible : celle de Dieu au désert[198]. »

L'écurie-prison de La Révolution est l'occasion d'évoquer les « beautés terrestres et les tendresses humaines [...] toutes ces choses bonnes en soi », mais qui, dit l'abbé Le Hennin peuvent nous être demandées en holocauste par les circonstances de la vie forçant les classes moyennes du Salut à se tourner exclusivement vers Dieu.

Parmi ces choses le cousin de l'abbé Le Hennin qui est son interlocuteur dans la nouvelle énumère, mêlant le visuel et le musical, « le lieu lointain de bois » que sa fille aime à contempler. Il ajoute en songeant à ce que disait sa femme : « Certains airs de Rameau ou de l'Autrichien Mozart [...] certains pourpres momentanés et certains ors qu'on voit le soir, tout le charme qui naît des musiques et dans les lointains des grands parcs, dépassant parfois les extrémités de la beauté nous jettent dans le vertige et les larmes. Ce que Jean-Jacques Rousseau a bien remarqué[199]. »

Odeurs modifier

 
Piero della Francesca La Mort d'Adam, également le titre d'une nouvelle de Malègue La Mort d'Adam

Le parfum des roses que reçoit Augustin le jour où il apprend de Mgr Herzog que la famille d'Anne de Préfailles et Anne elle-même lui font savoir qu'une démarche de sa part serait bien accueillie hante Augustin jusqu'à sa mort. Celles que sa sœur lui apporte à sa demande et pour cette raison ont été choisies sans parfum « pour ne pas fatiguer un malade » et du coup, il s'en désintéresse.

Mais, comme le note Germain Varin, une autre réminiscence (qu'il juge également « proustienne »), se produit chez Augustin quand il va couper au jardin du buis et des branches de houx pour orner la couche mortuaire de l'enfant de sa sœur. Il remonte l'escalier conduisant à l'appartement et « un souvenir violent le déchire d'une douleur passionnée, brutale », parce qu'il a monté cet escalier treize jours plus tôt « avec [...] cette même fraîcheur d'odeurs végétales, et, sur son bras le poids des roses » offertes par Anne[200].

D'autres critiques soulignent ce rôle des odeurs parfois non plus seulement rapportés au vécu d'une personne mais aussi à d'autres éléments: habitations, fermes et leurs habitants, saisons, armoires, lycées, petites villes.

Dans la ferme du « grand domaine », le mestreval sent « une bonne odeur de fumier de bêtes »; les soirs d'été du Cantal quand les travailleurs agricoles se reposent « l'odeur d'air froid et de prairie s'humanise d'un parfum de tabac »; en été toujours, les forêts dégagent « une odeur sèche et très diluée de prairie grillée et de fleur morte »; les armoires conservent « un parfum de lavande et d'autres couleurs, sorties d'anciens sachets »; au lycée Henri IV l'air s'emplit régulièrement d'« une odeur de vaisselle et de chou-fleur »; l'été encore « de grandes fumées voyageuses, de bois ou d'herbes, en lente dérive au-dessus des prairies » traversent les petites villes[201].

Dans Pierres noires, Malègue évoque « la profonde et tragique odeur que mars réveille dans les grandes forêts »[202], ou encore, une nuit d'été, « l'épaisseur, la matérialité, des odeurs simplettes, saines, rugueuses et véhémentes, les odeurs de légumes, d'engrais, de terreau, de riches pourritures pleines de vie séparées des réalités visuelles qui les supportent d'habitude en plein jour »[203].

Dans Pierres noires, comme le note Barthe, les demeures de la classe des notables en déclin dégagent « certaines odeurs [qui] se perpétuent [...] dont on ne sait plus exactement la place ni le nom » et qui « à peine saisissables sinon par filets insubstantiels [...] s'évanouissent en ce qu'on pourrait nommer le lointain des parfums... »[204].

Il en est de même dans des nouvelles de Malègue comme La Mort d'Adam ou La Révolution : « campement d'une tribu, écurie transformée en prison [...] la vieillesse d'Adam »[205]. Dans l'écurie transformée en prison en plein été de La Révolution, la chaleur aggrave encore l'odeur du purin et les odeurs fécales qui s'échappent du demi-tonneau « entouré d'étoffes grossières suspendues à des cordes de manière à constituer un réduit », lorsque l'on doit en soulever le couvercle[206].

C'est dans cette atmosphère que l'abbé Le Hennin, expose sa vision mystique des classes moyennes du salut, vision interrompue par le Commissaire qui lui signifie que son tour est venu d'être guillotiné.

Marcel Vuillaume et Georges Kleiber, dans un article de 2011 intitulé Sémantique des odeurs, citent également un passage d' Augustin lors du départ en vacances pour « Le Grand Domaine ». On passe par la grande forêt des Gorges du Cantal : « Parfois au milieu des terreaux et des sèves, sur la surface bien fondue de leur parfum, on percevait l’odeur granuleuse, artisane et humble de la sciure de bois »[207].

Ils notent que par métonymie, Malègue attribue ici à une odeur la propriété de sa source puisque le fait d'être granuleux (surface présentant des irrégularités de forme arrondie) ne s'applique qu'à des « entités visibles et palpables ». Sa motivation métonymique est aussi soulignée par les adjectifs « artisanale » et « humble » associés à l'odeur.

Jacques Madaule signale quelque chose d'analogue[185], quand le Sénateur Desgenets, ancien Garde des sceaux reçoit le vieil instituteur Monsieur le Maître et qu'il est précisé qu'à travers ses études d'économie et de législation agricole ainsi que « toute sa solide situation de haute bourgeoisie politique », il sentait « une mince odeur de champs et de fumier de bestiaux[208]. »

Sons modifier

 
Beffroi de Besse

C'est par métonymie aussi que dans Pierres noires Malègue attribue, cette fois à un son, la propriété de sa source. Dans le jardin d'André Plazenat, les invités observent la montée des nouvelles classes sociales de Peyrenère-d'En-Bas annonçant la « Fin des notables ». Malègue évoque alors « l'horloge du beffroi fléchissant sous les siècles » qui commence à « graillonner et [...] racler quelque chose parmi ses ressorts de fer », envoie cinq coups puis après avoir hésité dans ses « déclics rouillés » se remet à graillonner puis se rendort[209].

La place est également faite aux horloges dans Augustin : elles sonnent dans l'imprécision des nuits[210], jettent dans l'air « ces beaux sons d'or » qui volent immédiatement en éclats[210].

Des becs de gaz chantent « comme des crapauds d'une variété spéciale ». Les sons d'un jour de neige voltigent « entre le ciel et les lieues de neige sourde ».

Lorsque la mère d'Augustin et Christine ainsi que l'enfant de celle-ci meurent, que lui-même et sa sœur attendent que la mort s'en empare, des sons isolés leur parviennent « sifflet du chemin de fer, aboiements de chiens, fontaines dans les cours [...] la pendule [qui] bat dans le silence de la nuit [...] le bruit intarissable agressif de la foire »[211]

Le chapitre intitulé La Révolution dans Pierres noires est presque totalement occupé par la « relation » d'un ancêtre d'André Plazenat, grand bourgeois de Peyrenère. Il y narre les conversations avec son cousin l'abbé Le Hennin dans une écurie où des suspects, durant les premières années de la Révolution française, attendent pour la plupart leur exécution.

Jean-Paul Vaton à qui André Plazenat a confié la tâche d'établir une copie de cette relation éprouve le sentiment que ces pages pleines de confidences semblent dans le silence de la bibliothèque où il recopie le texte - « zone neutre » qui le sépare du monde - lui « parler d'un ton plus bas encore que le chuchotement : un son intérieur, une articulation désincarnée, le seul bruit de la pensée » avec les mots qu'il recopie prenant une « visibilité unique[212]. »

Lors de la conversation dramatique sur les hauteurs du Cantal entre Augustin et l'abbé Bourret qui lui annonce qu'il va quitter l'Église, « une voix de garçonnet, juste et rude,se [fait] entendre à droite de la route, du côté des maisons probables, derrière cette haie de sorbiers et de noisetiers qui ménageait un autre inconnu dans l'inconnu de la nuit »[213].

Trois critiques le relèvent : Elizabeth Michaël qui souligne que cette voix survient au milieu de « silences pesants et gênés »[214], Jean Lebrec qui situe l'incident dans « la ligne du réalisme spirituel » de Malègue[215].

Wanda Rupolo constate plutôt que ce qui frappe la sensibilité de Malègue c'est la présence d'une « note dominante qui tend à se subordonner les autres. » Elle donne un autre exemple de ce trait en se remémorant la chapelle de la Font-Sainte à la fois « solitude enclose en une autre solitude » et « morceau de silence épaissi et plus foncé ménagé dans la grande taciturnité des bois »[216].

Beauté des femmes modifier

 
Ève par Eric Gill 1929.

Robert Poulet tout en considérant le premier roman de Malègue comme une « œuvre exceptionnelle » y déplorait « la complète absence, l'absence curieuse, de toute sensualité[217]. » Lebrec estime qu'on doit plutôt parler non d'absence de sensualité mais d'allusions à celles-ci qui restent « fort discrètes[218]. »

Il cite à l'appui de cela l'aveu qu'Augustin fait à Largilier de l'émoi qui l'avait troublé quand, à sept ans, Élisabeth de Préfailles alors âgée de 18 ans, le prend maternellement dans ses bras, ce qui l'amène à lier cet émoi d'enfant à celui qu'il éprouve comme adulte devant Anne de Préfailles : « J'ai cru, mon Dieu, l'aimer presque depuis mon enfance. Bien que les émotions dont elle était le centre ne s'appliquassent pas initialement à elle[219]. »

Dans La Mort d'Adam modifier

Pour Lebrec, Anne, et Élisabeth de Préfailles dans Augustin ou encore Jacqueline de Brugnes et Armelle de Rosnoën dans Pierres noires ont une ancêtre, celle qui est appelée la « fille des hommes », dans La Mort d'Adam. Il cite les mots qu'utilisent Malègue pour la décrire quand elle arrive au clan d'Adam : « Très grande, autant que les hommes les plus hauts de la horde, beaucoup plus mince, balancée comme une longue liane et portant sur elle comme une évocation de flexibilité, elle regardait de deux yeux bleu-vert, hardis et dédaigneux. Elle agita la tête comme une jeune génisse, et la chevelure qui la gênait se trouva rejetée sur ses épaules, une grosse masse couleur de paille[220]. »

Après la mort d'Adam, elle s'enfuit du clan du premier homme avec Jaber, autre personnage du conte. Abed, qui surprend leur fuite est menacé de mort par Jaber et garde le silence sur leur départ. Il relate ensuite qu'il est resté pour observer la beauté de la fille des hommes : « je me suis caché derrière les tentes car je voulais voir combien la fille des hommes était belle, un peu plus grande que lui, longue et magnifique dans une étoffe blanche, comme une flamme dans la nuit[221]. »

Pour Lebrec, si la grâce ne manque pas à cette jeune femme, il faudra des siècles de civilisation pour aboutir à celles de Jacqueline de Brugnes dans Pierres noires ou d'Anne de Préfailles.

Dans Augustin ou Le Maître est là modifier

 
Clair de lune

Malègue décrit aussi dans Augustin la Marie-de-chez-nous ne pouvant dissimuler tout à fait son jeune corps sous ses vêtements rudimentaires dans lesquels elle est emmitouflée lors du pélerinage vers la Font-Sainte : « Quelques détails émergeaient des lainages : le dessin d'un poignet, une vue de profil subite et perdue, et toute la longue forme pure[222]. »

Augustin la revoit un peu plus loin, dans la chapelle, abîmée dans sa prière : « laissant la ligne de son corps exprimer librement, à son insu, toute sa souple et délicieuse jeunesse[223]. » Lorsqu'il la revoit dans son couvent à Paris, quelques années plus tard, elle n'est plus qu'une « forme roide et massive[224]. »

Anne de Préfailles « aux lèvres délicates et volontaires » présente un examen chez Augustin Méridier. Il retrouve en elle « la grave et merveilleuse enfant d'autrefois », qui a gagné depuis « une hauteur dans l'attrait, que sa conscience claire ne prenait certainement pas la peine d'avoir » et qui diffuse, pour ce que comporte toujours d'épreuve un examen, « la lumière bleu sombre d'admirables yeux approfondis de timidité dominée » (Augustin p. 387).

Ces deux yeux, ces deux « limpides feux bleu sombre » comme le répète plus loin Malègue, offrent à quiconque la « promesse de bonheur » qui est, selon lui le « postulat de toute beauté », mais sans le savoir, ajoute-t-il. Certes sans pour autant ignorer des dons de séduction impossibles à ignorer, mais en semblant s'en désintéresser pour d'autres qualité comme la franchise de l'accueil, le naturel des paroles, la profondeur morale (Augustin, p. 467).

Jean Lebrec qui utilise ces extraits pour décrire le beauté d'Anne relève aussi le mouvement des fins sourcils de l'élue du cœur d'Augustin quand elle attend une explication, indiquant par là qu'elle souhaite une conversation nourrie de curiosité intellectuelle « désespérément impersonnelle et calme[225]. » Léon Émery pense que le sommet de l' « envoûtement » d'Augustin, c'est la soirée musicale aux Sablons très longuement décrite[224].

À la fin de celle-ci (mais elle complote avant, brièvement, le message de son début de consentement qu'elle fera parvenir à Augustin par Mgr Herzog), Anne de Préfailles se montre moins réservée à l'égard d'Augustin, lui parle avec « une sorte de timidité heureuse tout à fait imprévue ». Lorsque, ensuite, en compagnie de son oncle Henri Desgrès, d'Élisabeth de Préfailles, de Mgr Herzog et d'Augustin, elle sort dans le parc éclairé par la lune, Anne cite un vers de Matthew Arnold : « Come to the window, sweet is the night air » [Viens à la fenêtre, délicieux est l'air nocturne], elle s'attire la réplique d'Augustin, citant un autre vers du poème d'Arnold (qui n'est pas celui qui suit immédiatement celui cité par Anne) : « Where the sea meets the moon blanch'land » [Qui unit la mer à la terre sous la lune blafarde].

Ces deux vers correspondent à la situation vécue par cet homme et cette femme presque fiancés, par les trois autres personnages avec lesquels ils partagent une grande amitié, Malègue le souligne. Mais les vers sont attribués à tort par Malègue à Shelley.

Ils disent le parc des Sablons éclairé par la lune, (ou chez Arnold la plage de Douvres « blanchie » par la même lumière). Ce poème, La Plage de Douvres, le « plus beau poème » de cet auteur selon l'ouvrage Patrimoine littéraire européen : anthologie en langue française, c'est l'expression d'une « vive sensibilité, celle d'un homme déchiré par la crise de la foi, habité par la nostalgie et la mélancolie[226]. »

Pascal Aquien, dans un recueil des poèmes d'Arnold qu'il traduit et présente, parle de cette mélancolie en citant la définition qu'en donne Julia Kristeva : « l'impression d'être déshérité d'un suprême bien innommable, de quelque chose d'irreprésentable[227]. » Ce poème, qui n'est donc pas sans rapport avec l'intrigue d' Augustin, évoque aussi la jeune épouse d'Arnold lors de leur lune de miel : « Ah! mon amour, soyons vrais/L'un pour l'autre[228]. »

Dans Pierres noires : Les classes moyennes du Salut modifier

 
Sandro Botticelli Portait d'une jeune femme

Jacqueline de Brugnes, petite fille, est déjà présente lors d'une des premières visites de Jean-Paul Vaton, le narrateur du Premier livre de Pierres noires, aux grandes maisons des notables.

La petite fille d'alors est invitée par ses parents à s'occuper de lui de sorte qu'elle s'en approche. Il voit, absorbant tout l'espace, son visage avec « la pâte fine et transparente de sa joue, près de la petite narine[229]. » Elle dépose un baiser sur sa joue et, dans son souvenir, persiste « la grande émotion timide que me donna l'effleurement de ses lèvres[230]. »

Lors d'une messe Jean-Paul Vaton éprouve ce qu'il dit lui-même être l'une des plus grandes secousses de son enfance. Il entend chanter Armelle de Rosnoën sans au départ voir qui chante exactement, car il est aux premiers rangs dans l'église. Mais il écoute « écrasé, immobile », la voix inconnue qui, raconte-t-il, « joignait au mystère de sa surnaturelle substance [...] un tremblement de caresse humaine, de souffrance, et de gracilité[231]. », ce qui lui fait soupçonner, poursuit-il « quelque chose que j'aurais appelé, si j'avais su ces mots, le pathétique secret de son cœur[232]. »

Jusqu'au bout de sa narration, Jean-Paul Vaton demeure subjugué par ces deux femmes, mais pas dans le même amour de rêverie où Augustin est subjugué par Élisabeth et Anne de Préfailles dans la mesure où il n'y a pas vraiment entre Vaton et les deux femmes le véritable partage, ne serait-ce que de camaraderie ou d'amitié, qui existe entre Augustin, Anne et Élisabeth.

Jacqueline de Brugnes, qui compte au moins autant qu'Armelle de Rosnoën dans les rêveries de Jean-Paul Vaton, pourrait être épousée par André Plazenat.

Mais son père, ruiné au jeu, se suicide. Malgré le contrat de mariage le liant à Madame de Brugnes et qui permettrait à celle-ci de ne pas rembourser tous ceux qui ont confié leur argent au comte, Jacqueline, par fierté, exige au contraire que tous ceux-ci soient dédommagés. Ce qui ne peut se faire qu'au détriment de toute la fortune de Madame de Brugnes et au prix pour Jacqueline du définitif déclassement qui lui fait perdre la perspective d'épouser André Plazenat.

À la sortie de l'église après les funérailles du comte de Brugnes, la mère d'André Plazenat dit bien haut à Jacqueline qu'elle et sa mère compteront toujours au nombre des amis intimes de sa propre famille. Ce qui est rapporté au narrateur par une religieuse ne voyant pas que la séparation de Jacqueline d'avec la grande bourgeoisie commençait pas ces mots protecteurs : la religieuse « en était dans son inconscience un témoin d'autant meilleur[233]. »

La beauté des femmes révèle aussi de manière paradoxale ce qu'a d'authentique la sainteté, inconsciente d'elle-même, de Félicien Bernier.

Lorsque celui-ci et Jean-Paul Vaton se rendent à la gare où Vaton doit prendre le train en vue de regagner le lycée, arrive la vieille voiture des Brugnes qui emporte Jacqueline et sa mère vers leur destin de déclassées. Le cocher ne peut pas descendre les bagages, mais l'athlétique Félicien y pourvoit aisément.

Jacqueline de Brugnes lui tend alors une main gantée de noir toute heureuse de le voir. Félicien la lui prend, la maintient un instant dans la sienne avec candeur et rectitude comme s'il s'agissait d'un camarade, la regarde au fond des yeux « plus profond que sa beauté », jusqu'à sa souffrance, ce que la jeune femme n'aurait accepté de personne d'autre. Il l'accompagne jusqu'à son compartiment de chemin de fer continuant à lui parler d'en bas, sur le quai où il demeure au point que les spectateurs peuvent avoir l'impression d'assister, dit Vaton, à une scène de préfiançailles.

Ceci lui fait penser, phrase soulignée par quelqu'un comme Charles Moeller[234], qu'il a devant lui « un cas particulier, un exemple extraordinaire de la tendresse des saints[235]. »

Postérité de Malègue modifier

Malègue est parfois décrit comme un écrivain oublié. Les appréciations divergent à cet égard. On peut opposer celle du Père Carré et celle d'Hubert Nyssen. Quand il est reçu à l'Académie française en 1974, le Père Carré parle de l’« inoubliable auteur d' Augustin ou Le Maître est là[236]. »

En revanche, dans ses Carnets (4 septembre 2011), Hubert Nyssen retrouve le même ouvrage dans sa bibliothèque avec le sentiment « de sortir de la poussière les vestiges d’une littérature qu’on ne lit plus[237] ».

Un auteur démodé depuis toujours mais inoublié modifier

 
Rue Joseph Malègue à Clermont-Ferrand

Alain Bladuche-Delage considère dans La Croix du 31 août 2002 que Malègue a toujours été démodé et cite un critique (« favorable », ajoute-t-il) de 1933 (dont il ne donne pas le nom), s'exclamant :« Le moyen de s'intéresser à un récit qui se déroule dans un milieu profondément intellectuel et religieux, autant dire dans la lune! ».

Et poursuit : « Augustin croit, il ne croit plus, il craint de ne plus croire ; ce ne sont que soupirs, que douleurs, que géhennes. Le lecteur se demande avec inquiétude : Ne sommes-nous pas à l'époque de la relativité généralisée, du jazz-hot et de la téhessef? ».

Ce à quoi le critique de La Croix ajoute pour 2002 : « Ne sommes-nous pas à l'époque de l'individualisme, du karaoké, du portable? », mais conclut malgré tout : « Ce roman de tête et non de faits, où le seul fait tangible sera forcément la mort, était une oeuvre forte, pour un public exigeant; qu'il soit démodé n'y change rien[238]. »

Cette appréciation de La Croix en 2002 se rapproche de celle de Jean Lebrec plaçant en 1969 Augustin dans la catégorie des œuvres « intemporelles » à l'écho « trop discret », mais d'une influence incomparable qui se mesure à la fidélité plus belle et plus « incommunicable[239]. » De celle de Gonzague Truc estimant, dans L'Action française du 11 mai 1933, que le livre de Malègue « date étrangement dans tous les sens du mot. »

Ou encore de celle d' André Thérive dans Le Temps du 12 avril 1934, qui parlait de la « gloire secrète » d' Augustin, expression que cite Lebrec en la prolongeant par les mots : « qui commençait à auréoler ce livre impopulaire[240]. »

La chose peut même se vérifier puisque lorsque le critique du quotidien Le Monde se penche en 1959[241]sur Pierres noires : Les Classes moyennes du Salut, sans mentionner Augustin, il reçoit tant de protestations de lecteurs pour cet oubli qu'il revient à deux reprises sur Malègue le mois de février suivant et sur le « souvenir étonnant » qu'il laisse. Au point de penser que ce serait là la vraie gloire littéraire.

Charles Moeller, en 1953, parle du premier roman de Malègue comme d'un roman « dont la lecture fait date dans une vie[242] », et Geneviève Mosseray en 1996 en parle comme d'un livre rare ayant profondément marqué[243].

Léon Émery, ayant convaincu un compatriote auvergnat de lire Malègue le décrit séduit par la richesse de la pensée, la mise en évidence judicieuse des problèmes sociaux et moraux d' Augustin mais « terrifié » par la nouvelle insérée dans Pierres noires et intitulée La Révolution.

Dans cette nouvelle au climat religieux semblable au Dialogue des carmélites, écrit L. Émery, cette personne trouvait quelque chose « sinon de désespéré ou de désespérant, du moins de sombrement résigné », ce qui l'amène à répondre que Malègue était mieux placé « pour nous apprendre à bien penser et à bien mourir que pour [...] vivre et combattre » de même qu'à inspirer la « la sérénité par l'émotion et la méditation[244]. »

Francesco Casnati considère dans la préface à la traduction italienne que déjà « le roman [...] avec l’effet du temps, s’envisage quasiment avec le recul que nous inspirent les classiques »[245].

Jean Guitton raconte l'intérêt de Paul VI pour ce roman dans Paul VI secret : « Un de mes amis me racontait que le livre de Malègue l'avait tellement séduit qu'il n'avait pas pu dormir de la nuit : il avait passé la nuit à le lire, c'était « notre propre histoire de l'âme qui y était racontée.»[246]. »

Un auteur toujours cité par les uns mais jugé anéanti par les autres modifier

Pour Cécile Vanderpelen-Diagre, qui travaille au Centre interdisciplinaire d'étude des religions et de la laïcité à l'Université libre de Bruxelles, Malègue est « totalement oublié[247]. » 

L'abbé traditionaliste Claude Barthe partage le même avis quand il juge à propos de Malègue qu'il ne faut même plus parler de purgatoire « mais d'anéantissement[248]. » Ces deux constats ont été publiés en 2004.

Outre l'étude de Geneviève Mosseray de 1996[249], on doit encore citer en 2006 Réalisme et vérité dans la littérature de Philippe van den Heede[250] (le livre consacré à Léopold Levaux revient souvent sur Malègue), Laurence Plazenet qui parle la même année de la visite d'Augustin à l'Église Saint-Étienne-du-Mont, quand, en compagnie de son père, il vient s'inscrire en classe préparatoire à Normale au lycée Henri-IV[251], deux colloques universitaires où Malègue est étudié parmi d'autres écrivains en 2005 et 2006[note 9]. Et rappeler les publications d'Agathe Chepy en 2002[252], du Père Carré en 2003[253], de Pauline Bruley en 2011[254] et de Yves Chevrel en 2013[255].

Geneviève Mosseray considère que le drame spirituel exposé par Malègue est toujours actuel parce qu'il met en avant des problèmes récurrents en matière de rapports entre foi et raison et, à l'appui de ses dires, cite des livres comme ceux de Eugen Drewermann ou Jacques Duquesne[256].

Un article de la revue ThéoRèmes, mis en ligne en juillet 2012, examine la validité de l'expérience religieuse en référence aux auteurs cités par Malègue comme William James ou Bergson, rapprochés par Anthony Feneuil du philosophe William Alston. Est posée, comme lors de l'examen que présente Anne de Préfailles chez Augustin, la question de son subjectivisme ou de son universalité[257].

Le Pape François, cite la réflexion de Largilier à Augustin mourant « Loin que le Christ me soit inintelliglble s'il est Dieu, c'est Dieu qui m'est étrange s'il n'est le Christ », assimilant la première partie de la formule à une position théiste et la seconde à;la position chrétienne dans un discours à l'Université del Salvador en 1995[note 10], propos repris et traduit partiellement en français par Michel Cool[258].

Il commente à nouveau cette citation en 2010 quand il est encore archevêque de Buenos Aires[note 11].

Ce pape évoque encore Malègue dans une homélie du 14 avril 2013[259], mais il s'agit cette fois du roman posthume de Malègue dont Barthe écrit en 2004 que plus personne ne connaîtrait l'existence, ceux sachant celle d' Augustin n'étant déjà pas « foule », selon lui.

En 1984, Henri Lemaître trouvait « difficilement compréhensible » la méconnaissance de Malègue par la postérité[260].

Il juge dix ans plus tard qu'il demeure l'un des romanciers « les plus fâcheusement méconnus de la première moitié du XXe siècle[261], », romancier dont le chef-d'œuvre, Augustin ou Le Maître est là est considéré par Yves Chevrel en 2013 comme « le point d'orgue » d'une série de romans européens abordant des controverses religieuses avec au centre le modernisme[262].

Revenant plusieurs semaines après la mention de Malègue par le pape, François Narville dans La Montagne du 20 mai 2013, écrit que « L’intemporel est toujours d’actualité car il ne se périme jamais » et que le Le pape François vient d’en donner l’illustration en citant Joseph Malègue « dont le questionnement religieux est toujours vivant[263]. » L'Osservatore Romano du 17 avril précédent insistait lui sur la grande culture de Malègue, sur la forte impression faite par l'écrivain sur ceux qui l'ont lu, notamment Paul VI, sur la diffusion de ses deux romans en Italie.

Œuvres modifier

Thèse modifier

Joseph Malègue, Une forme spéciale de chômage : le travail casuel dans les ports anglais, Paris, Librairie nouvelle de droit et de jurisprudence Arthur Rousseau, , 319 p.

Romans modifier

Essais modifier

  • De l'Annonciation à la Nativité, essai, Flammarion, Paris 1935
  • Le drame du romancier chrétien , conférence prononcée en 1935 (à luniversité de Mimègue, à La Haye dans le cadre des Amitiés françaises internationales, à Ruremonde sur l'invitation de l'Alliance française, à l'université de Louvain), reproduite dans Jean Lebrec, L'Art de la nouvelle selon Joseph Malègue, H. Dessain et Tolra, Paris, 1969, p. 113-119.
  • Petite suite liturgique, essai, Spes, Paris, 1938.
  • Joseph Malègue, Pénombres : glanes et approches théologiques, Paris, Spes, , 236 p., In-16, couv. ill (BNF 32411142)
  • Saint Vincent-de-Paul, Librairie de l'Arc, Paris, 1939.
  • Le Sens d' "Augustin", Spes, Paris, 1947 (reproduit en appendice posthume dans Augustin ou Le Maître est là dans la 9e édition en un volume pp. CCMXXI-CCMXLVI)

Nouvelles et contes modifier

  • L'Orage, nouvelle publiée dans la revue L'Idée nationaliste et régionaliste, avril 1903, p. 197-224 et reproduite également dans L'art de la nouvelle de Jean Lebrec, op. cit., p. 85-89.
  • La Pauvreté (manuscrit de 1912), publié dans Jean Lebrec L'art de la nouvelle selon Joseph Malègue, op. cit. p. 93-95.
  • Rêverie autour de la peine de mort (manuscrit de 1934), publié dans Jean Lebrec, op. cit., p. 99-103.
  • La Mort d'Adam (manuscrit de 1923), reproduit dans Sous la meule de Dieu et autres contes, p. 43-75, lisible en ligne
  • Notes d'urbanisme moral, publié dans La Vie intellectuelle, juillet 1934 et reproduit dans Jean Lebrec, op. cit., p. 105-109.
  • Celle que la grotte n'a pas guérie, reproduite dans Pénombres, Spes, Paris, 1939, p. 201-234.
  • Joseph Malègue, Nouvelles retrouvées, Paris, éditions H.Dessain & Tolra,

Ce volume intitulé par Jean Lebrec L'Art de la nouvelle selon Joseph Malègue contient avec ce titre de Jean Lebrec Nouvelles retrouvées les cinq nouvelles ci-dessus (sauf La Mort d'Adam) ainsi que l'essai de Malègue, Le Drame du romancier chrétien.

  • La Révolution, (manuscrit de 1929), publié dans Sous la meule de Dieu et autres contes et dans Pierres noires, p. 416-442.
  • Joseph Malègue, Sous la meule de Dieu et autres contes, Lyon, éditions du Chalet, .

Ce volume contient aussi Celle que la grotte n'a pas bénie (qui est également publiée dans Pénombres et La mort d'Adam), Sous la meule de Dieu est le dernier écrit de Malègue avant sa mort (il l'acheva en août 1940), et raconte l'histoire d'un avocat de Nantes meurtri par la mort de son fils, blessé grièvement dans les combats de juin 1940).

Distinctions modifier

Quoique l'auteur d'un seul roman de son vivant, Malègue pressenti pour obtenir le prix Fémina 1933 eut le tort (selon Claude Barthe) d'accepter un autre prix. Il obtint un prix également pour son deuxième roman, à titre posthume.

  • Prix Claire Virenque 1933 (prix de littérature spiritualiste) pour Augustin ou Le Maître est là
  • Prix littéraire 1959 de la Maison d'Auvergne à Paris, dit « prix des volcans » pour Pierres noires, le jury déclara que ce grand prix littéraire d'Auvergne était de caractère exceptionnel.
  • Clermont-Ferrand et Savenay ont donné le nom d'une de leurs rues à Malègue et il existe une Place Joseph Malègue à La Tour-d'Auvergne

Bibliographie modifier

Une bibliographie complète des études maléguiennes a été établie en 1969 par Jean Lebrec dans Joseph Malègue romancier et penseur, H.Dessain & Tolra, Paris, 1969, p. 435-456. Elle recense plusieurs centaines de sources reprenant toutefois le moindre article de presse mais pouvant omettre quelques études plus importantes qui seront marquées ici d'un double astérisque qui suit immédiatement la mention de la source indiquée. La bibliographie des études malégiuennes après 1969 doit encore être complétée.

Monographies ou études dans des ouvrages modifier

  • Léopold Levaux, Devant les œuvres et les hommes, Paris, Desclée de Brouwer, , 334 p., « Un grand romancier catholique se révèle », p. 174-182
  • Jacques Madaule, Reconnaissances II, Desclée de Brouwer, Paris, 1944 (Joseph Malègue, p. 33-54).
  • (nl) Joris Eeckhout, Litteraire profielen, XIII, Brussel, Standaard-Boekhandel, , 142 p., « Joseph Malègue », p. 58-85 (**)
  • Roger Aubert, Le problème de l'acte de foi, Walry, Louvain, 1945 (en particulier p. 631-636).
  • Yvonne Malègue-Pouzin, Joseph Malègue, Tournai, Casterman, .
  • Dom Germain Varin, Foi perdue et retrouvée. La psychologie de la perte de la foi et du retour de Dieu dans Augustin ou Le Maître est là de Joseph Malègue, Fribourg, Saint Paul, .
  • Charles Moeller, Littérature du XXe siècle et christianisme, t. II : La foi en Jésus-Christ : Sartre, Henry James, Martin du Gard, Malègue, Tournai-Paris, Casterman, , 354 p., in-8°, chap. IV (« Malègue et la pénombre de la foi »), p. 217-302
  • Elizabeth Michaël (préf. Jacques Madaule), Joseph Malègue, sa vie, son œuvre : thèse de doctorat défendue à l'Université Laval, juin 1948, Paris, Spes, , 285 p., In-16 (20 cm) (BNF 32447872)
  • Jacques Vier, Littérature à l'emporte-pièce, Paris, Éditions du Cèdre, , 197 p., « Rappel d'un chef-d'œuvre : Augustin ou Le Maître est là », p. 82‒93
  • Léon Émery, Joseph Malègue : Romancier inactuel, Lyon, Les cahiers libres, coll. « Les Cahiers libres » (no 68), , 141 p., 25 cm (BNF 32993139)
  • Francesco Casnati, Nota introduttiva, Préface à Agostino Méridier (Volume Primo), Società editrice internazionale, Torino, 1962, pp. VII-XXVII.
  • Charles Moeller, Littérature du XXe siècle et christianisme, t. II : La foi en Jésus-Christ : Sartre, Henry James, Martin du Gard, Malègue, Tournai-Paris, Casterman, , in-8° (BNF 32456210), chap. IV (« Malègue et la pénombre de la foi »), p. 275-396
  • Bruno Glanzmann, Les problèmes du roman chrétien chez Daniel-Rops: "Mort, où est ta victoire ?" et chez Joseph Malègue: "Augustin ou Le Maître est là", comparés aux romans bernanosiens, Paris, 1968. (**)
  • Jean Lebrec, Joseph Malègue : romancier et penseur (avec des documents inédits), Paris, H. Dessain et Tolra, , 464 p., In-8° 24 cm (BNF 35320607)
  • Jean Lebrec, L'Art de la nouvelle selon Joseph Malègue, Paris, H. Dessain et Tolra, .
  • Élise-Hélène Moulin, Joseph Malègue et la liturgie ; Présence de Dieu caché dans "Augustin ou Le Maître est là" [texte imprimé], Toulouse : s.n., 1972.
  • Léon Émery, Trois romanciers - Thomas Mann, Joseph Malègue, Alexandre Soljenitsyne, Les Cahiers libres, Lyon, 1973.
  • Lucienne Portier, Reflets ou présence du modernisme dans le roman, in Littérature et société. Recueil d'études en l'honneur de Bernard Guyon, DDB, Paris, 1973 (p. 281-298 : Martin du Gard, Malègue, Bernanos, Mauriac…).
  • Victor Brombert, The Intellectual Hero. Studies in the French Novel, 1880-1955, The University of Chicago Press, 1974, (ISBN 0-226-07545-1).
  • William Marceau, Henri Bergson et Joseph Malègue : la convergence de deux pensées, Saratoga, CA, Amna Libri, coll. « Stanford French and Italian studies » (no 50), , 132 p., couv. ill. ; 24 cm (ISBN 0-915838-66-4 et 978-0915838660, BNF 34948260, présentation en ligne)
  • (it) Wanda Rupolo (trad. Les traductions françaises de cet ouvrage ont été corrigées d'après celle d'André L.orsini, Malègue et la « loi de la dualité » in Le Roman français à la croisée de deux siècles, p. 115-133, Champion-Slatkine, Paris-Genève, 1989.), Stile, romanzo, religione : aspetti della narrativa francese del primo Novecento, Roma, Edizioni di storia e letteratura, coll. « Letture di pensiero e d'arte » (no 71), , 242 p., 21 cm (BNF 34948568)
  • Bruno Curatolo (textes réunis par), Geneviève Mosseray et al., Le chant de Minerve : Les écrivains et leurs lectures philosophiques, Paris, L'Harmattan, coll. « Critiques littéraires », , 204 p., 22 cm (ISBN 978-2-7384-4089-1, BNF 35806250, LCCN 96131828), « « Au feu de la critique » J. Malègue lecteur de M. Blondel »
  • Pierre Colin, L'audace et le soupçon. La crise du modernisme dans le catholicisme français (1893-1914), Paris, Desclée de Brouwer, , 523 p.
  • Ambroise-Marie Carré, Ces maîtres que Dieu m'a donnés, Cerf, Paris, 2003.
  • Claude Barthe (dir.), Les romanciers et le catholicisme, Versailles, Éditions de Paris, coll. « Les Cahiers du roseau d'or » (no 1), , 223 p., 23 cm (ISBN 978-2-85162-107-8, BNF 39161463, présentation en ligne), « Joseph Malègue et le « roman d'idées » dans la crise moderniste », p. 83‒97
  • (de) Wolfgang Grözinger, Panorama des internationalen Gegenwartsroman : gesammelte "Hochland"-Kritiken, 1952-1965, Paderborn, Ferdinand Schöningh, , p. 184
  • Philippe van den Heede, Réalisme et vérité dans la littérature, Academic Press Fribourg, Fribourg, 2006.
  • Pauline Bruley, Les écrivains face à la Bible, Paris, Éditions du Cerf, , 272 p. (ISBN 9782204091831), « Le clair-obscur de la Bible dans deux romans de la crise moderniste, « Augustin ou Le Maître est là » de Joseph Malègue et « Jean Barois » de Roger Martin du Gard », p. 83‒98
  • Yves Chevrel, Imaginaires de la Bible - Mélanges offerts à Danièle Chauvin (dir. Véronique Gély et François Lecercle), Paris, Classiques Garnier, , 354 p. (ISBN 978-2-8124-0876-2), « Romanciers de la crise moderniste. Mary A . Ward, Antonio Fogazzaro, Roger Martin du Gard, Joseph Malègue », p. 289-302

Articles de revues scientifiques, de revues d’idées ou littéraires modifier

  • Jeanne Ancelet-Hustache, « Un Proust catholique », dans Les Nouvelles littéraires, décembre 1933.
  • Jean Wahl, « Augustin ou Le Maître est là par Jean [sic] Malègue », dans La Nouvelle Revue française, janvier 1934.
  • André Molitor, « Joseph Malègue, Augustin ou Le Maître est là », dans Pax, Liège, février 1934.
  • Paul Doncœur, « L'Augustin de M. Malègue : Un témoignage », dans Étvdes, janvier 1934, pp. 95-102.
  • Jacques Madaule, « Deux témoignages », dans La Vie intellectuelle, Paris, novembre 1933 (parallèle entre La Condition humaine et Augustin ou Le Maître est là).
  • Jacques Madaule, « Âme collective et salut personnel », dans Esprit, mars 1934, pp. 157-169.
  • (en) C. C. Martindale, « Losing the Faith », dans The Month, mai 1934, pp. 408-415.
  • (it) Francesco Canati, « Il romanzo d'una crisi religiosa », dans Vita e Pensiero, novembre 1934, pp. 689-697.
  • André de Bovis, « De « Jean Barois » à « Augustin » », dans Cité nouvelle, Lyon, 25 octobre 1942, pp. 529-549.
  • Gaston Roger, « Joseph Malègue professeur », dans Revue de la Méditerranée, université d'Alger, no 2-3, 1959, pp. 171-178.
  • Jacques Madaule, « Un Proust catholique, provincial et petit bourgeois », La Table ronde, no n° 139-140,‎ , p. 93-108
  • Charles Moeller, « Le Roman posthume de Malègue : Pierres noires : Les Classes moyennes du salut », dans La Revue nouvelle, no 7, juillet 1959, pp. 15-27.
  • Pierre Moreau, « Compte rendu de : Jean Lebrec, Joseph Malègue romancier et penseur », dans Revue d'histoire littéraire de la France, vol. 71,‎ , p. 327-330 (ISSN 0035-2411, lire en ligne)
  • Benoît Neiss, « Le Drame du salut chez Joseph Malègue et François Mauriac, ou Deux conceptions du roman chrétien », Cahiers François Mauriac, no n° 2,‎ , p. 165-186
  • « Malègue parmi nous », dans Renaissance de Fleury, no 114, no spécial Joseph Malègue, juin 1980.
  • G. P. Dastuge, « À propos d'un centenaire oublié : Joseph Malègue (1876-1940) : Augustin ou Le Maître est là, vu par les médecins », dans Bulletin historique et scientifique de l'Auvergne, vol. 93, no 695, 1987, pp. 453-472.
  • Émile Goichot, « Anamorphoses : le modernisme aux miroirs du roman », Revue d'histoire et de philosophie religieuses, no vo. 68. 1988/4,‎ , p. 435-459
  • Pierre Martin-Valat, « Le Maître est là : Relire Malègue », dans Communio, juillet-août 1992.
  • Agathe Chepy, « Joseph Malègue, (1876‒1940), « Augustin ou Le Maître est là » », La Vie spirituelle, Paris, Cerf, no 743 « Autour de Timothy Radcliffe ‒ Spiritualité du gouvernement dominicain »,‎ , p. 119‒133
  • Laurence Plazenet, « Port-Royal au prisme du roman », dans Revue d'histoire littéraire de la France, vol. 106, no 4, 4, 2006, pp. 927-958.

Divers modifier

  • Paul Warlomont, La Foi dans l'œuvre de Joseph Malègue, éditions de la Cité chrétienne, Bruxelles, 1942 (recueil de textes commentés)
  • Louis Chaigne, Anthologie de la littérature spirituelle, Paris, Alsatia, 1941.
  • Alfred Loisy a confié à Jean Guitton qui lui avait fait lire le roman (et dont Loisy croyait qu'il était l'auteur) une longue critique du premier roman de Malègue dont l'essentiel est reproduit dans l'ouvrage de Jean Lebrec paru en 1969.
  • Franz Weyergans, Joseph Malègue dans Théâtre et roman contemporain. Choix de textes à l'usage des classes de première, p. 89-107 (note critique de Weyergans et long extrait d’Augustin ou Le Maître est là, Éditions universitaires, Bruxelles, 1970.
  • Article de Jean-Marc Brissaud dans Histoire de la littérature française du XXe siècle
  • Jean-Pierre Jossua, Pour une histoire religieuse de l'expérience littéraire, volume 1, Beauchesne, Paris, 1985.
  • Le Style des philosophes, Colloque organisé par Bruno Curatolo et Jacques Poirier, du 2 au 5 novembre 1995, à Besançon et Dijon (les Actes ont été intégralement publiés, Les Écrivains et leurs lectures philosophiques : Bruno Curatolo dir., L’Harmattan, 1996, 206 pages : Joseph Malègue étudié par Geneviève Mosseray).
  • ‘’La finalité dans les sciences et dans l’histoire’’ Colloque organisé par le ‘’Centre d'Études et de Prospective sur la Science (CEP)’’, à Angers, 15 et 16 octobre 2005 Benjamin Guillemaind : ‘’La subsidiarité et ses applications’’ (…) Jean-Pierre Brancourt : ‘’La finalité du pouvoir dans la monarchie française’’ Patrice Raymond : ‘’Les finances publiques’’ (…) Benoît Neiss : L'œuvre de Joseph Malègue, une littérature, médiation des plus hauts mystères.
  • ‘’Herméneutique biblique et création littéraire de la fin de l'âge classique à l'époque contemporaine’’ Colloque international sous la direction de Jean-Yves Masson (Paris IV-Sorbonne) et Sylvie Parizet (Paris X-Nanterre) 11-13 mai 2006.
  • Jean Lebrec, « Joseph Malègue (1876-1940) », dans Dictionnaire de spiritualité, t. X, p. 173-175.

Ouvrages généraux modifier

  • Hervé Serry, Naissance de l'intellectuel catholique, Paris, La Découverte, , 371 p. (ISBN 2-7071-3985-8)

Annexes modifier

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Liens externes modifier

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. « Loin que le Christ me soit inintelligible s'il est Dieu, c'est Dieu qui m'est étrange s'il n'est le Christ » dans A.Manaranche, Dieu en Europe, Paris, 2003, p. 30. Dans Rubin & Ambroguetti, El Jesuita, récent recueil de conversations publié en 2010, le Pape François cite Malègue : il se souvient de « un diálogo entre un agnóstico y un creyente del novelista francés Joseph Malègue. Es aquel en que el agnóstico decía que, para él, el problema era si Cristo no fuera Dios, mientras que para el creyente consistía en qué pasaría si Dios no se hubiera hecho Cristo » Traduction française : « un dialogue entre un agnostique et un croyant du romancier français Joseph Malègue. Dans lequel l'agnostique dit que le problème pour lui serait que le Christ ne serait pas Dieu, tandis que pour le croyant la question serait de savoir ce qui se passerait si Dieu ne s'était pas fait Christ » EL JESUITA. Conversaciones con el cardenal Jorge Bergoglio Ediciones B, Buenos Aires, 2010,p. 40. [1]
  2. « Cher ami, Si vous voulez bien parler à Michelin, voulez-vous lui demander en premier lieu, en quel laps de temps, il pourrait éditer mon bouquin (1110 pages de 28 lignes en moyenne, chacune de 60 lettres ou intervalles : évidemment 2 volumes); - et ensuite le prix auquel reviendrait à compte d'auteur, cette édition... » dans Michaël 1956, p. 63
  3. Eeckhout 1945, p. 84 : « Slechts wie wijsgerig en theologisch geschoold is, zal dit boek ten volle begrijpen en genieten. Maar, hoe hoog zal zijn bewondering dan ook niet stijgen voor deze meesterlijke ontleding van een der pijnlijkste konflikten, waarin een mensch verwikkeld kan »
  4. Dans les premières pages de l'Essai sur les données immédiates de la conscience, Bergson oppose aux lignes brisées qui n'en possède pas, la grâce qui est celle des lignes courbes : « Si la grâce préfère les courbes aux lignes brisées, c'est que la ligne courbe change de direction à tout moment, mais que chaque direction nouvelle était indiquée dans celle qui la précédait. La perception d'une facilité à se mouvoir vient donc se fondre ici dans le plaisir d'arrêter en quelque sorte la marche du temps, et de tenir l'avenir dans le présent. Un troisième élément intervient quand les mouvements gracieux obéissent à un rythme, et que la musique les accompagne. C'est que le rythme et la mesure, en nous permettant de prévoir encore mieux les mouvements de l'artiste, nous font croire cette fois que nous en sommes les maîtres. Comme nous devinons presque l'attitude qu'il va prendre, il paraît nous obéir quand il la prend en effet ; la régularité du rythme établit entre lui et nous une espèce de communication, et les retours périodiques de la mesure sont comme autant de fils invisibles au moyen desquels nous faisons jouer cette marionnette imaginaire. Même, si elle s'arrête un instant, notre main impatientée ne peut s'empêcher de se mouvoir comme pour la pousser, comme pour la replacer au sein de ce mouvement dont le rythme est devenu toute notre pensée et toute notre volonté. Il entrera donc dans le sentiment du gracieux une espèce de sympathie physique, et en analysant le charme de cette sympathie, vous verrez qu'elle vous plaît elle-même par son affinité avec la sympathie morale, dont elle vous suggère subtilement l'idée. Ce dernier élément, où les autres viennent se fondre après l'avoir en quelque sorte annoncé, explique l'irrésistible attrait de la grâce : on ne comprendrait pas le plaisir qu'elle nous cause, si elle se réduisait à une économie d'effort, comme le prétend Spencer. Mais la vérité est que nous croyons démêler dans tout ce qui est très gracieux, en outre de la légèreté qui est signe de mobilité, l'indication d'un mouvement possible vers nous, d'une sympathie virtuelle ou même naissante. C'est cette sympathie mobile, toujours sur le point de se donner, qui est l'essence même de la grâce supérieure. Ainsi les intensités croissantes du sentiment esthétique se résolvent ici en autant de sentiments divers, dont chacun, annoncé déjà par le précédent, y devient visible et l'éclipse ensuite définitivement. C'est ce progrès qualitatif que nous interprétons dans le sens d'un changement de grandeur, parce que nous aimons les choses simples, et que notre langage est mal fait pour rendre les subtilités de l'analyse psychologique. » in Henri Bergson, Essai sur les données immédiates de la conscience, Paris, PUF, 2011, p. 9-10.
  5. « Les Juifs avai(en)t vieilli dans ces pensées terrestres que Dieu aimait leur père Abraham, sa chair et ce qui en sortait, que pour cela il les avait multipliés et distingués de tous les autres peuples sans souffrir qu'ils s'y mêlassent, que quand ils languissaient dans l'Égypte il les en retira avec tous ses grands signes en leur faveur, qu'il les nourrit de la manne dans le désert, qu'il les mena dans une terre bien grasse, qu'il leur donna des rois et un temple bien bâti pour y offrir des bêtes, et, par le moyen de l'effusion de leur sang qu'ils seraient purifiés, et qu'il leur devait enfin envoyer le Messie pour les rendre maîtres de tout le monde, et il a prédit le temps de sa venue. Le monde ayant vieilli dans ces erreurs charnelles, J.-C. est venu dans le temps prédit, mais non pas dans l'éclat attendu, et ainsi ils n'ont pas pensé que ce fût lui. Après sa mort saint Paul est venu apprendre aux hommes que toutes ces choses étaient arrivées en figures, que le royaume de Dieu ne consistait pas en la chair, mais en l'esprit, que les ennemis des hommes n'étaient pas les Babyloniens, mais leurs passions, que Dieu ne se plaisait pas aux temples faits de main, mais en un cœur pur et humilié, que la circoncision du corps était inutile, mais qu'il fallait celle du cœur, que Moïse ne leur avait pas donné le pain du ciel, etc. Mais Dieu n'ayant pas voulu découvrir ces choses à ce peuple qui en était indigne et ayant voulu néanmoins les produire afin qu'elles fussent crues, il en a prédit le temps clairement et les a quelquefois exprimées clairement mais abondamment en figures afin que ceux qui aimaient les choses figurantes s'y arrêtassent et que ceux qui aimaient les figurées les y vissent. »Pascal, Pensées. Consulté le 22 mai 2013
  6. Grözinger 2004, p. 184 : « Die Hauptkomponenten französichen Wesens, Cartesisches Denken, Elan vital und ein diese beiden Pole verbindender Sensualismus transzendieren bei Malègue auf eine Novalis erinnernde Weise, ohne sacrificium intellectus und Abtötung der Sinne. Das ist in der modernen französichen Literatur ein seltener Ausnahmefall, bei dem Leibniz, Goethe und die Philosophie des deutschen Idealismus sichtbar leisteten. »
  7. Rupolo 1985, p. 73 : « è possibile rilevare dei riverberi dell'estetica proustiana nelle rievocazioni del passato risuscitato attraverso le impressioni sensoriali, nelle'abile uso del tempo, in una sottololineata minuzia dell'analisi psicologica »
  8. Eeckhout 1945, p. 73 : « Louis Chaigne vermeldt met het oog op Augustin den naam van Marcel Proust, alleen toch maar om mee te delen, dat Malègue niet bezat wat Barrès bij Proust zoo hoog op prijs stelde : « l'incroyable surabondance des enregistrements », die voor de Proustiaansche niet moet onderdoen. Men roemt bij Proust in de woorden overgeschreven « Sonate de Vinteuil »; nog aangrijpender komt ons de orchestratie voor bij Malègue, dieper-roerend omdat zij de uitdrukking blijkt van edeler zielen »
  9. ‘’La finalité dans les sciences et dans l’histoire’’ Colloque organisé par le ‘’Centre d'Études et de Prospective sur la Science (CEP)’’, à Angers, 15 et 16 octobre 2005 et l'intervention de Benoît Neiss : L'œuvre de Joseph Malègue, une littérature, médiation des plus hauts mystères d'une part et, d'autre part, ‘’Herméneutique biblique et création littéraire de la fin de l'âge classique à l'époque contemporaine’’ Colloque international sous la direction de Jean-Yves Masson (Paris IV-Sorbonne) et Sylvie Parizet (Paris X-Nanterre) 11-13 mai 2006.
  10. [2]. « Nuestra lucha contra el ateísmo, hoy se llama lucha contra el teísmo. Y también hoy es de ley aquella verdad que Malegue, en otro contexto cultural pero refiriéndose a la misma realidad, tan sabiamente había afirmado en los albores del siglo: "Lejos de serme Cristo ininteligible si es Dios, precisamente es Dios quien me resulta extraño si no es Cristo. A la luz de esta afirmación de Dios manifestado en la carne de Cristo podemos delinear la tarea formativa e investigadora en la Universidad: es un reflejo de la esperanza cristiana de afrontar la realidad con verdadero espíritu pascual. La humanidad crucificada no da lugar a inventarnos dioses ni a creernos omnipotentes; más bien es una invitación -a través del trabajo creador y el propio crecimiento- a creer y manifestar nuestra vivencia de la Resurrección, de la Vida nueva. »
  11. Il évoque Malègue dans un récent recueil de conversations publié en 2010 : il se souvient de « un diálogo entre un agnóstico y un creyente del novelista francés Joseph Malègue. Es aquel en que el agnóstico decía que, para él, el problema era si Cristo no fuera Dios, mientras que para el creyente consistía en qué pasaría si Dios no se hubiera hecho Cristo » Traduction française : « un dialogue entre un agnostique et un croyant du romancier français Joseph Malègue. Dans lequel l'agnostique dit que le problème pour lui serait que le Christ ne serait pas Dieu, tandis que pour le croyant la question serait de savoir ce qui se passerait si Dieu ne s'était pas fait Christ » EL JESUITA. Conversaciones con el cardenal Jorge Bergoglio Ediciones B, Buenos Aires, 2010,p. 40. [3]

Références modifier

  1. E.Goichot, Anamorphoses : le modernisme aux miroirs du roman, in Revue d'histoire et de philosophie religieuses, Vol. 68, 1998/4, p. 435-459.
  2. Lebrec 1969, p. 21
  3. Michaël 1957, p. 20
  4. a b c et d Barthe 2004, p. 90
  5. Jean Lebrec, Joseph Malègue (1876-1940 dans Dictionnaire de spiritualité Tome X, p. 173-175
  6. a et b Serry 2004, p. 9
  7. Henri Lemaître, article Malègue, in Dictionnaire Bordas de la littérature française, Bordas, Paris, 1994.
  8. Lebrec 1969, p. 24
  9. Selon une lettre de la sœur du romancier dans Lebrec 1969, p. 29
  10. Lebrec 1969, p. 39 cite à ce sujet le témoignage d'Hervé de Talhouët, qui sera l'élève de Malègue dans le cadre du préceptorat que celui-ci exerça dans cette famille.
  11. Lebrec 1969, p. 42
  12. Michaël 1957, p. 29
  13. Bulletin Joseph Lotte, Paris, décembre 1936, p. 114.
  14. Michaël 1957, p. 26
  15. La Liberté du Sud-Ouest, le 2 février 1941.
  16. Cité dans Michaël 1957, p. 33
  17. Lebrec 1969, p. 51
  18. Varin 1953, p. 11
  19. Hervé de Talhouët-Roy
  20. Lettre du comte de Talhouët du 30 décembre 1947 à l'auteure, citée dans Michaël 1957, p. 38
  21. Gonzague Truc, Histoire de la littérature catholique contemporaine, Casterman Paris, 1961, p. 29.
  22. a et b Lebrec 1969, p. 110
  23. Serry 2004, p. 77
  24. Serry 2004, p. 201-205
  25. Jean de Fabrègues et la jeune droite catholique: aux sources de la Révolution nationale, Presses universitaires du Septentrion, Lille, 2002, p. 69.
  26. a et b Lebrec 1969, p. 82
  27. Malègue 1913, p. 6.
  28. a et b Malègue 1913, p. 57
  29. Lebrec 1969, p. 80
  30. Malègue 1913, p. 156
  31. Malègue 1913, p. 225
  32. Malègue 1913, p. 171
  33. Michaël 1957, p. 47
  34. Henri Vénard, Joseph Malègue, Peintre des activités vivantes et philosophe des fins dernières, in Construire, VII, 1942, p. 130.
  35. Benoît Neiss, Malègue parmi nous, in Renaissance de Fleury, Abbaye de Fleury, juin 1980, p. 1-12, p. 9.
  36. Lebrec 1969, p. 86
  37. Lebrec 1969, p. 85
  38. a et b Lebrec 1969, p. 88
  39. Lebrec 1969, p. 49
  40. a b et c Lebrec 1969, p. 90
  41. Barthe 2004, p. 85
  42. Cours de sociologie de J. Malègue 1922-1923, p.35-36, cité dans Lebrec 1969, p. 94
  43. Lebrec 1969, p. 73
  44. Texte relevé dans le cahier de sociologie de l'ancien élève de J. Malègue M.G. Roger, cité dans Lebrec 1969, p. 95. Le contexte appellerait que le mot « secondaire » soit plutôt « seconde », dans la mesure où il est question avant cette citation de la « Cause première »
  45. G. Roger, Joseph Malègue professeur, dans Revue de la Méditerranée, p.171-180, p. 177.
  46. G.Roger, p. 177.
  47. Terre chaude où l’on force les plantes.
  48. G.Roger, p. 177.
  49. Émery 1962, p. 60
  50. Maurice Vaussard dans Les Lettres (revue de la renaissance catholique), août-septembre 1929, p. 357-369. Cité dansSerry 2004, p. 287
  51. Lebrec 1969, p. 74
  52. Lettre de Marthe Homéry du 24 octobre 1947, citée dans Michaël 1957, p. 75
  53. Christian Robin, « Joseph et Yvonne Malègue », Les Annales de Nantes et du pays nantais, no 244,‎ , p. 19-20 (lire en ligne)
  54. Michaël 1957, p. 57
  55. Lettre de Mademoiselle Homéry du 24 octobre 1947, citée dans Michaël 1957, pass
  56. Selon le chanoine Pineau, cité Michaël 1957, pass
  57. Michaël 1957, p. 54
  58. Cité par Jacques Chevalier dans sa préface Mon souvenir de Joseph Malègue au roman inachevé Pierres noires, Spes, Paris, 1958, p. IX-XXIII, p. XXII.
  59. Lebrec 1969, p. 127-128
  60. Moreau 1971, p. 328
  61. René Wintzen, Joseph Malègue, in Littérature de notre temps. Écrivains français, recueil, tome IV, Tournai-Paris, 1970, p. 141-143.
  62. Paul Droulers, Le Père Desbuquois et l'Action Populaire 1919-1946, Éditions ouvrières et Presses de l'Université Grégorienne de Rome, Paris, Rome, 1981, p. 37, note 80.
  63. Lettre d'Henri Pourrait à Alexandre Vialatte (14 mai 1935) dans Correspondance Alexandre Vialatte-Henri Pourrat Volume 5 De Paris à Persépolis, Presses universitaires Blaise Pascal, Clermont-Ferrand, 2008.
  64. Cité dans Lebrec 1969, p. 116
  65. Serry 2004, p. 89-90
  66. Émery 1962, p. 20
  67. Je suis partout 2 septembre 1933.
  68. L'Écho de Paris, 26 octobre 1933.
  69. Bulletin Joseph Lotte, 1er décembre 1933.
  70. Lettre du 23 décembre 1933 citée dans Michaël 1957, p. 70
  71. Philippe van den Heede, Réalisme et vérité dans la littérature, Academic Press Fribourg, Fribourg, 2006, p. 94.
  72. Léopold Levaux Un grand romancier catholique se révèle in Devant les œuvres et les hommes, Desclée de Brouwer, Paris, 1935, p. 176.
  73. Marie Dutoit, Mieux qu'un livre in Cahiers protestants (publié en Suisse romande), octobre-novembre 1934, p. 452-456.
  74. Gunnar Host dans Aftenposten d'Oslo du 25 mai 1935.
  75. L'Écho de Paris, 13 novembre 1933.
  76. Lettre citée dans Lebrec 1969, p. 372
  77. Moeller 1967, p. 295
  78. Lebrec 1969, p. 374
  79. Barthe 2004, p. 86
  80. Léopold Levaux, Un grand romancier catholique se révèle in Devant les œuvres et les hommes Desclée de Brouwer, Paris, 1935, pp. 174-182,p. 181
  81. Chepy 2002, p. 132
  82. Paul Claudel dans Louis Chaigne , L'Anthologie de la renaissaance catholique Alsatia, Paris, 1938.
  83. Serry 2004, p. 47-48
  84. « J. Malègue a réussi à traiter du problème de la foi plus intellectuellement que Bernanos et Mauriac » in A critical bibliography of French literature: The twentieth century edited by Douglas W. Alden and Richard A. Brooks. General subjects and principally the novel before 1940 (nos. 1-6789), Syracuse University, 1980, p. 578.
  85. Victor Brombert, The Intellectual Hero. Studies in the French Novel, 1880-1955, The University of Chicago Press, 1974,p. 113 : « Malègue deals not merely with the religious crisis of one intellectual. He poses the religious problem in intellectual terms, patiently explores a religious temperament in an intellectual context and from an intellectual point of view - and succeeds in doing so without loss of either dramatic or psychological intensity.»
  86. Georges Bernanos, L'Imposture, Plon, Paris 1927, in Le livre de poche, 1965 pp.59-60. Cité par Victor Brombert, in op. cit., p. 223.
  87. Jean Daniélou, J.Malègue : Pénombres, Glanes et approches téhologiques dans Étvdes, décembre 1939, p. 710.
  88. Éditions Warny, Louvain, 1945, p. 630 : le professeur louvaniste lui consacre plusieurs pages élogieuses (p. 630-636).
  89. Moeller 1967, p. 313
  90. a et b Serry 2004, p. 18
  91. Colin 1997, p. 38-45
  92. a et b Colin 1997, p. 408
  93. Lebrec 1969, p. 395
  94. Antonio Fogazzaro, Le Saint, Hachette, Paris, 1907, p. 73.
  95. Anamorphoses : le modernisme aux miroirs du roman dans Revue d'histoire et de philosophie religieuses, Vol 68, 1984/4, p. 435-459.
  96. Lettre du 1er juin 1933 citée dans Michaël 1957, p. 172
  97. L'Action française du 11 mai 1933, p. 4.
  98. Serry 2004, p. 64
  99. Serry 2004, p. 68
  100. Joseph Malègue, Il faut rendre à César... dans Tendances, Liège, 15 décembre 1936, cité dans Malègue-Pouzin 1947, p. 146
  101. Madaule 1959, p. 104
  102. Hervé Serry, Déclin social et revendication identitaire : la « renaissance littéraire catholique » de la première moitié du XXe siècle dans Sociétés contemporaines, 2001/4 no 44, p. 91-109.
  103. a et b Madaule 1959, p. 105
  104. Colin 1997, p. 98
  105. Lebrec 1969, p. 269
  106. dans Lebrec 1969, p. 53-54 : 24 pages de notes sur le sociologue retrouvées dans les archives de Malègue.
  107. Colin 1997, p. 354
  108. Marceau 1987, p. pass
  109. Marceau 1987, p. 20
  110. Lebrec 1969, p. 428
  111. Frédéric Worms, Le vocabulaire de Bergson, Ellipses, Paris, 2000, p. 27.
  112. a et b Frédéric Worms, op. cit., p. 57.
  113. Marceau 1987, p. pass et Lebrec 1969, p. pass
  114. Marceau 1987, p. 60
  115. Madaule 1959, p. 99
  116. Madaule 1959, p. 101
  117. Lebrec 1969, pass
  118. Mosseray1996, p. 84
  119. Malègue cité dans Mosseray 1996, p. 85
  120. Pierres noires p. 407-443.
  121. Moeller 1967, p. 285-287
  122. J.Lebrec, L'Art de la nouvelle selon Joseph Malègue dans Malègue 1969, p. 5-79, p. 34.
  123. Pierres noires, p. 434, cité dans Moeller 1967, p. 296Pierres noires,p. 434.
  124. La Pauvreté dans Malègue 1969, p. 93-95, p.93
  125. Sous la meule de Dieu dans Malègue 1965, p. p.105-154
  126. Jean Lebrec, L'Art de la nouvelle selon Joseph Malègue dans Malègue 1969, p. 60
  127. Joseph Malègue L'Orage dans Malègue 1969, p. 88
  128. Jean Pierre Jossua, Pour une histoire religieuse de l'expérience littéraire, Volume 1, Paris Beauchesne, 1985, p. 211.
  129. Franz Weyergans, Joseph Malègue dans Théâtre et roman contemporain. Choix de textes à l'usage des classes de première, pp. 89-107 (note critique de Weyergans et long extrait d’Augustin ou Le Maître est là), Éditions universitaires, Bruxelles, 1970, p. 89.
  130. Joseph Malègue, Le Sens d'Augustin, appendice posthume de la 2e édition de l'ouvrage, p. CCMXXIII-CCMXXXVI, p. CCMXXXIV
  131. Barthe 2004, p. 87
  132. Barthe 2004, p. 87-88
  133. Barthe 2004, p. 83
  134. 11e éd. p. 229.
  135. (Jean, chapitre 11, verset 28), la phrase que Marthe dit à Marie lorsque leur frère Lazarre et mort et avant que le Christ ne le réveille à la vie dans Bruley 2011, p. 96
  136. a et b Chepy 2002, p. 125
  137. Chevrel 2013, p. 297
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  140. Bruley 2011, p. 95
  141. Laurence Plazenet, « Port-Royal, au prisme du roman », dans Revue d'histoire littéraire de la France, 2006/4, p. 927-958, p. 948-951.
  142. Neiss, Fleury, p. 7.
  143. [CEP http://le-cep.org/]
  144. a b et c Benoît Neiss, L'Œuvre de Joseph Malègue : une littérature des plus hauts mystères, conférence prononcée au Colloque ‘’La finalité dans les sciences et dans l’histoire’’ organisé par le ‘’Centre d'Études et de Prospective sur la Science (CEP)’’, à Angers, les 15 et 16 octobre 2005 [CDrom http://le-cep.org/CD-DVD.html ]
  145. Mosseray 1996, p. 85
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  148. Edgard Sottiux, Gabriel Marcel. Philosophe et dramaturge, Nauwelaerts, Paris-Louvain, 1956, p.191.
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  154. Daniel Halévy, La Fin des notables, Tome I, Grasset, Paris, 1930 dans Le livre de poche, p. 138.
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  159. Barthe 2004, p. passim
  160. Lebrec 1969, p. 147
  161. « Mann a pu, sans faire sauter le cadre [du roman] y enfermer l'histoire et la métaphysique; Malègue ne peut-il le charger de théologie? » dansVier 1958, p. 184
  162. Lebrec 1969, p. 178
  163. Lebrec 1969, p. 184-200-211-213-214
  164. Lebrec 1969, p. 404
  165. Wanda Rupolo la considère comme consensuelle et cite: La Vie catholique (août 1933 : Un Proust catholique par Soulairol), Les Nouvelles littéraires (décembre 1933 : même titre par Ancelet-Hustache), La Revue catholique d'Alsace (janvier 1934 : Un rival heureux de Proust par Lorson), La Table Ronde (Jacques Madaule, juillet 1959 : Un Proust catholique, provincial et petit-bourgeois, cette dernière critique visant Pierres noires. Les Classes moyennes du Salut) dans Rupolo 1985, p. 154
  166. Léopold Levaux, J.Malègue : Augustin ou le Maître est là, notes manuscrites, p. 30-31, 1935, citées par Philippe Van den Heede, Réalisme et vérité dans la littérature, Academic Press, Fribourg, 2006, p. 93.
  167. Levaux, notes manuscrites de 1935 à propos de Malègue, citées dans Philippe Van den Heede, Réalisme et vérité dans la littérature, Academic Press, Fribourg, 2006, p. 93.
  168. J.Madaule, Joseph Malègue dans Reconnaissances, DDB, Paris, 1944, p. 33-54, p. 52.
  169. Varin 1953, p. 36. La thèse d'E.Michaël n'était pas encore publiée mais il a pu lire le témoignage de M.Talhouët dans l'ouvrage en préparation Michaël 1957, p. 44
  170. Barthe 2004, p. 89
  171. Joseph Malègue cité dans Barthe 2004, p. 84
  172. Augustin ou Le Maître est là dans Vier 1958, p. 191
  173. Lebrec 1969, p. 201-202
  174. Lebrec 1969, p. 206
  175. Lebrec 1969, p. 208
  176. Augustin ou Le Maître est là, op. cit., p. 428.
  177. J. Lebrec, op. cit., p. 209.
  178. Lebrec 1969, p. 219
  179. Lebrec 1969, p. 294
  180. Lebrec 1969, p. 408
  181. Lebrec 1969, p. 409.
  182. P-H Simon, Un grand retour de Joseph Malègue in Journal de Genève, 30-31 mai 199.
  183. À propos de Pierres noires. Le destin de Joseph Malègue in Combat, 12 février 1959.
  184. Barthe 2004, p. 86 et Pierres noires cité dans celui-ci.
  185. a et b Madaule 1959, p. 107
  186. Madaule 1959, p. 108
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  188. Augustin ou Le Maître est là, 11e éd. Spes, Paris, 1966, p. 37.
  189. Moeller 1953, p. 255
  190. Vier 1958, p. 191
  191. En français dans le texte dans Eeckhout 1945, p. 73
  192. Cécile Vanderpelen-Diagre, Écrire en Belgique sous le regard de Dieu: La littérature catholique belge dans l'entre-deux-guerres Complexe, Bruxelles, 2004, p. 207.
  193. Lebrec 1969, p. 153
  194. R. Mehl, Augustin ou Le Maître est là dans Le Semeur, février 1934, p. 275.
  195. Lebrec 1969, p. 131.
  196. Rupolo 1985, p. 3154
  197. Lebrec 1969, p. 421
  198. Pierres noires, p. 324.
  199. Pierres noires p. 424.
  200. Augustin, II, p. 365 dans Varin 1953, p. 38
  201. Extraits d' Augustin ou Le Maître est là Lebrec 1969, p. 305
  202. p. 146.
  203. Pierres noires p. 762.
  204. Pierres noires p. 205, cité dans Barthe 2004, p. 87
  205. Lebrec, art de la nouvelle, p. 70.
  206. Pierres noires, p. 423.
  207. Marcel Vuillaume et Georges Kleiber, « Sémantique des odeurs » dans Langages, 2011, no 1, Vol 181, p. ?
  208. Pierres noires, p. 219.
  209. Pierres noires p. 604.
  210. a et b Lebrec, p. 307.
  211. Lebrec 1969, p. 307
  212. Pierres noires p. 416-417 cité dans Barthe 2004, p. 86
  213. Augustin, Tome I, 258.
  214. Michaël, p. 26.
  215. Lebrec 1969, p. 308
  216. Rupolo 1985, p. 153
  217. R. Poulet, Augustin ou Le Maître est là dans Cassandre, Bruxelles, 1934.
  218. Lebrec 1969, p. 211
  219. Malègue, Augustin p. 772 cité dans Lebrec 1969, p. 211
  220. Malègue 1969, p. 51-52
  221. Malègue 1965, p. 72-73
  222. Augustin 1966, p. 201.
  223. Augustin, 1966, p. 217.
  224. a et b Émery 1962, p. 31
  225. Lebrec 1969, p. 183
  226. Patrimoine littéraire européen, 11B Renaissances nationales et conscience universelle, Deboeck université, Bruxelles, Paris, 1999, p. 193.
  227. Matthew Arnold, Éternels étrangers en ce monde Traduit de l'anglais et présenté par Pascal Aquien, La Diffréence, paris, 2012, p.18.
  228. Traduit par P.Alquien dans Éternels étrangers en ce monde : « Ah! love, let us be true/To one another »!
  229. Pierres noires, p. 81.
  230. Pierres noires, p. 88.
  231. Pierres noires, p. 148.
  232. Pierres noires, p. 151.
  233. Pierres noires, p. 587.
  234. Moeller 1967, p. 511
  235. Pierres noires, p. 613.
  236. Réception de M. le Révérend Père Carré DISCOURS PRONONCÉ DANS LA SÉANCE PUBLIQUE le jeudi 26 février 1976
  237. Carnets
  238. La Croix du 31 août 2002.
  239. Joseph Malègue, romancier inactuel, 1962, p.
  240. Lebrec 1969, p. 339
  241. Le Monde du 31 janvier 1950
  242. Moeller 1953, p. 290
  243. Mosseray 1996, p. 73
  244. Émery 1962, p. 8-10
  245. Préface à la traduction italienne de 1960 : « il romanzo ha già la patina e quasi li distacco dei classici »
  246. Jean Guitton, Paul VI secret, DDB, Paris, 1980, p. 79.
  247. Vanderpelen-Diagre, 2004, p.207.
  248. Barthe 2004, p. 73
  249. Mosseray 1996, pass
  250. Academic Press Fribourg, Fribourg, 2006.
  251. Port-Royal au prisme du roman in Revue d'histoire littéraire de la France, 2006/4. Vol. 106 pages 927-958.
  252. Joseph Malègue, (1876-1940), Augustin ou Le Maître est là in La Vie spirituelle, Cerf, Paris, 2002, p. 119-133.
  253. Carré, 2003, passim.
  254. Bruley 2011, pass
  255. Chevrel 2013, pass
  256. Mosseray 1996, p. 87
  257. Anthony Feneuil, [« Percevoir Dieu ? Henri Bergson et William P. Alston » in ThéoRèmes 2 | 2012, mis en ligne le 01 juillet 2012, consulté le 04 novembre 2012, paragraphes 16 et 17. http://theoremes.revues.org/310 ; DOI : 10.4000/theoremes.310]
  258. François, pape du nouveau monde, Salvator, Paris, 2013, p. 65. isbn 978-2-369-18002-9)
  259. [4]
  260. Article Joseph Malègue in L'Aventure littéraire du XXe siècle. Deuxième époque 1920-1960 Bordas, Paris, 1984
  261. Dictionnaire Bordas de la Littérature française, Bordas, Paris, 1994, p. 523.
  262. Chevrel 2013, p. 289
  263. François Narville « Dans une homélie, le pape François a cité les Classes moyennes du Salut, le roman d'un écrivain auvergnat» [5].