Eugène Laermans

peintre belge (1864-1940)
Eugène Laermans
Eugène Laermans dans son atelier.
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BruxellesVoir et modifier les données sur Wikidata
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Eugène Laermans est un peintre, aquafortiste et.dessinateur belge né le à Molenbeek-Saint-Jean et mort le à Bruxelles. Il peint par conscience sociale et dans un style expressionniste, jusqu'à ce qu'il doive s'arrêter en 1924. Il est l'une des figures les plus marquantes de l'art belge de son temps. L’artiste puise ses sujets dans le monde ouvrier et paysan qu’il dépeint avec un sens souvent pathétique et pessimiste. C’est le chantre de la vie des humbles. Dès le début de sa carrière artistique il emploie dans son oeuvre comme modèles des ouvriers et des paysans qu’il rencontre en sortant de chez lui à Molenbeek qui est, à l’époque, une banlieue ouvrière de Bruxelles. Une de ses caractéristiques consiste en la déformation de ses personnages, l’accentuation du trait qui, au fil de ses œuvres, ira vers toujours vers plus de simplification.

Biographie modifier

Jeunesse modifier

Eugène Laermans naît le à Molenbeek-Saint-Jean, dans une famille bourgeoise qui vivait dans une commune en voie d'industrialisation. Une méningite le prive à onze ans de l'ouïe et presque de la parole : le monde ne s'offre plus pour lui que par les yeux, ce qui déclenche sa vocation de peintre.

Après une première formation à l'école de dessin de Molenbeek-Saint-Jean (1876-1882), il s'inscrit en 1887 à l'Académie royale des beaux-arts de Bruxelles[1] où professe Jean-François Portaels.

Carrière modifier

Laermans bénéficie des influences de l'œuvre de Félicien Rops et, en littérature, de celle de Baudelaire. Son inspiration décadentiste le pousse à illustrer Les Fleurs du mal (le triptyque Perversité). Laermans était un excentrique, aussi pour les connaisseurs d'art. Son art engagé tranche avec l'esthétisation de l'art de la Belle Epoque. Sa préoccupation sociale a même été rejetée comme simpliste[2].

Peintre des paysans et de la misère suburbaine, Laermans n'en est pas moins un homme de son époque, soucieux de littérature, épris de modernité, attentif aux innovations. Au début des années 1890, il s'épanouit dans une voie expressive et peint une paysannerie inquiétante et caricaturale — dirent les critiques de l'époque — en s'inspirant de son environnement[3]. La représentation de la pauvreté était devenue thématique, dans les milieux artistiques de la seconde moitié du XIXe siècle[4].

L'année 1894 marque ses débuts aux Salons de la Libre Esthétique. En 1896, il illustre La Nouvelle Carthage de Georges Eekhoud, et plus précisément le chapitre Les Émigrants, qui lui inspire une œuvre puissante, un triptyque qu'il considéra comme son chef-d'œuvre.

Couronnement de son succès, il devient membre de l'Académie royale de Belgique en 1922. Deux grandes rétrospectives ont lieu de son vivant : en 1899 à la Maison d'Art à Bruxelles et en 1924 à la galerie Giroux. À partir de 1924, sa vue s'étiole et il cesse définitivement de peindre ; il dira : « Moi, je suis moralement mort depuis longtemps. Je ne suis plus Laermans, je ne sais plus produire ».

En 1925, il est élu membre de l'Académie royale de Belgique[5].

Le roi Albert Ier le nomme baron ; sa devise sera « Heureux qui sait voir ». Après 13 années passées dans l'obscurité et l'inaction, il meurt le [6].

Depuis 1940,une rue porte son nom dans sa commune natale[7].

En 1995, une exposition au centre culturel Le Botanique à Bruxelles présente une partie de son œuvre au public.

Son œuvre modifier

Laermans est connu, mais pas totalement reconnu dans l'histoire de l'art en Belgique. Par sa vie tragique, il fut considéré comme un solitaire se penchant sur le sort des humbles. Artiste engagé, peintre des pauvres, paysans misérables, émigrants, grévistes, mendiants, exilés, dans les faubourgs des villes : Un soir de grève ou le Drapeau rouge de 1893 ; Les Émigrants, triptyque de 1896, sont des tableaux représentatifs de sa révolte sociale devant la misère du prolétariat. “Les émigrants” illustre en particulier la crise du secteur agricole qui a commencé à la fin des années 1870 et atteint son apogée entre 1885 et 1895 en provoquant un important phénomène de migration (notamment vers les États-Unis) en décrivant la situation sociale de ces petits paysans et ouvriers agricoles, essentiellement flamands, dont la situation est devenue plus que misérable[8].

Il peint ces foules sourdes et muettes qui semblent aller vers un lendemain qui sera le salut ou la mort, avec une amplitude de mouvement cinématographique, il met en scène son tableau. Les êtres en marche, sous des ciels de tempête, les traits de lumière vive, les eaux miroitantes, les maisons blanches et les palissades, sont des éléments récurrents dans sa peinture, que les hommes traversent. Dans ce pays industriel : le pays noir, où la condition de l'homme capte le regard du peintre, il témoigne des problèmes sociaux engendrés par le contexte social de son époque avec réalisme et conviction qui ne cache pas un certain idéalisme. Ses héros sont représentés seuls ou en groupes compacts, anonymes et silencieux, ou encore en famille, qu’il s’agisse d’une paysanne tenant la main de son enfant ou d’un couple de personnes âgées, le dos courbé, solidaires dans leurs épreuves. Les gestes sont marqués, les silhouettes, puissantes et les corps, lourds[9].

L’ivrogne” (1898) est une œuvre sociale de Laermans qui illustre le fléau de l’alcoolisme en plein hiver. Une famille nombreuse, occupe le premier plan. L’ivrogne, inconscient marche mécaniquement, soutenu par sa femme, longue et efflanquée, les paupières lasses et la résignation dans le regard tandis que leur petite fille, le visage vieilli, regarde ce triste spectacle. Derrière elle, sur l’autre rive, on aperçoit les cheminées d’une usine en activité. Le drame est dépeint sobrement, avec des tons de couleurs froides[10],[11]. Pendant ses années d'étudiant, il a vu un mort être traîné le long du mur blanc brillant qui entourait la maison paroissiale de Wemmel. L'homme semblait s'être noyé. Cela lui fit une impression durable. Laermans associerait en permanence le mur blanc à la misère et au désastre. Il reviendra à plusieurs reprises dans ses toiles. Le mur est devenu une figure de style pour le désespoir et l'aliénation. Même d'autres peintres adoptèrent plus tard le mur de Wemmel[2].

Avec nombre d'autres artistes belges, Laermans cherche à intégrer l'aspect social dans l'art. Il est, avec Constantin Meunier, parmi les précurseurs de l'expressionnisme flamand[1].

Distinctions modifier

Galerie modifier

Œuvres dans les collections publiques modifier

Belgique
France

Notes et références modifier

  1. a et b « Eugène Laermans », sur Larousse.
  2. a et b « Op reis met Vlaamse meesters : De meest iconische muur van Vlaanderen, na die van Geraardsbergen », sur vrt.be, VRT NWS: nieuws, (consulté le ).
  3. « Laermans - Brx 1995 », sur archivesdunord.com (consulté le ).
  4. Potter, Céline De, « « Misère au borinage ». Le travail et la pauvreté comme figures de ... », Apparence(s), IRHiS-Septentrion, no 3,‎ (ISSN 1954-3778, DOI 10.4000/apparences.1111, lire en ligne, consulté le ).
  5. « LANCZ GALLERY », sur lanczgallery.be (consulté le ).
  6. Lunssens, Martin, « Discours prononcé aux funérailles du baron Eugène Laermans, le 26 février 1940 », Bulletins de l'Académie Royale de Belgique, Persée, vol. 22, no 1,‎ , p. 25–27 (lire en ligne, consulté le ).
  7. « La rue Eugène Laermans - Molenbeek (1080 Bruxelles) », sur ebru.be (consulté le ).
  8. Witte (Els), « La Belgique politique de 1830 à nos jours. », Livre,‎ , édition Labor, 1987, p.127-130
  9. https://www.gazette-drouot.com/article/les-heros-de-laermans/40427
  10. « 13/ Arts et sciences au 19e siècle spoonconcept », sur spoonconcept, (consulté le ).
  11. « Question », sur guichetdusavoir.org (consulté le ).
  12. « Les Émigrants » sur kmska.be.

Annexes modifier

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Bibliographie modifier

Liens externes modifier