Grand Palais (Paris)

monument et salle d'exposition parisienne

Le Grand Palais ou Grand Palais des Beaux-Arts est un monument parisien situé en bordure des Champs-Élysées, face au Petit Palais, dont il est séparé par l'avenue Winston-Churchill, dans le 8e arrondissement. Ses 77 000 m2 abritent régulièrement salons et expositions.

Grand Palais
Le Grand Palais en 2022.
Informations générales
Nom local
Grand PalaisVoir et modifier les données sur Wikidata
Type
Lieu pour des événements (d), palais des congrèsVoir et modifier les données sur Wikidata
Ouverture
Président
Surface
77 000 m2 dont 13 500 m2 pour la nef
Visiteurs par an
2 millions par an
Site web
Bâtiment
Architecte
Protection
Localisation
Pays
Commune
Adresse
Coordonnées
Carte

Historique

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Le Grand Palais pendant la Première Guerre mondiale.
 
Verrière du Grand Palais, restaurée en 2004.

Le « Grand Palais des Beaux-Arts » est édifié à Paris à partir de 1897, pour l'exposition universelle prévue du 15 avril au [1], en lieu et place du vaste mais inconfortable palais de l'Industrie de 1855. « Monument consacré par la République à la gloire de l’art français », comme l'indique le fronton de l’aile ouest (palais d'Antin), sa vocation originelle consiste à accueillir les grandes manifestations artistiques officielles de la capitale.

Dans les années 1960, Le Corbusier souhaite la démolition du Grand Palais pour y implanter à la place le musée d'Art du XXe siècle dont André Malraux lui a confié la réalisation. La mort de l'architecte, le , met fin au projet[2].

Par arrêté du , la nef est classée au titre des monuments historiques. Un nouvel arrêté du , protège le Grand Palais dans sa totalité.

Le concours d'idées

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L'établissement d'un programme est rédigé et l'organisation d'un concours d'idées entre architectes est décidée par arrêté du . Contrairement à ce qui avait été prévu pour le palais du Trocadéro ou encore l'opéra Garnier, il n'est pas envisagé que la compétition soit internationale. Le concours ne s'adresse, ici, qu'aux seuls architectes de nationalité française.

Les architectes lauréats

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Après une suite d'épreuves très disputées, de péripéties et un âpre débat au sein des représentants des autorités, de la presse et du grand public, les architectes Henri Deglane, Albert Louvet, Albert-Félix-Théophile Thomas et Charles Girault ne peuvent être départagés et sont choisis pour réaliser une synthèse de leurs propositions respectives et faire œuvre commune.

Partie principale du Grand Palais

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Henri Deglane est chargé des nefs nord et sud de la grande nef et de sa partie transversale dénommée « paddock », des façades et décors qui l'entourent et plus particulièrement de l'entrée principale et des péristyles situés de part et d'autre, sur la nouvelle « avenue Alexandre-III », actuelle avenue Winston-Churchill.

Partie intermédiaire

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Albert Louvet, auteur du plan, se voit confier la responsabilité d'édifier la partie centrale dont le Salon d'honneur et, en coordination avec Deglane, le grand escalier d'honneur et le décor peint et sculpté du mur de fond de la nef transversale.

Partie postérieure

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Albert Thomas doit mener à bien la construction de l'aile ouest, dite palais d'Antin et des élévations correspondantes sur l'avenue d'Antin (future « avenue Victor-Emmanuel-III », aujourd'hui avenue Franklin-D.-Roosevelt).

Coordination d'ensemble

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Charles Girault est désigné pour la mise au point définitive des plans et la coordination générale des travaux. Il doit assurer, en même temps, la maîtrise d'œuvre du Petit Palais (actuel musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris) dont il est le concepteur.

Le constructeur est l'entreprise Daydé & Pillé.

Analyse du projet définitif

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L'axe républicain

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Avant l'Exposition universelle de 1900, l'amorce d'une longue perspective est déjà marquée par le Dôme, l'Église des soldats, l'hôtel et l'esplanade des Invalides. Mais, de l'autre côté de la Seine, le regard bute de façon malheureuse sur une des façades latérales du palais des Arts et de l'Industrie. Longeant l'avenue des Champs-Élysées, cette imposante construction est, de plus, aperçue de biais.

Lors de la période de préparation des modalités du concours et, en particulier, du dessin des gabarits définissant l'emplacement précis de chaque bâtiment devant succéder à l'ancien palais, l'intention est d'inscrire ce projet dans une réalisation urbanistique plus large.

Il est ainsi prévu de prolonger l'axe des Invalides jusqu'au palais de l'Élysée et d'offrir, par là-même, une ossature à la future grande exposition.

L'axe républicain est né, tracé auquel se doivent d'obéir l'organisation et l'implantation des pavillons étrangers et à thème installés sur l'esplanade des Invalides comme l'ensemble formé par le Grand Palais, le Petit Palais devant lui faire face, de l'autre côté de l'avenue nouvelle ainsi créée, et le pont Alexandre-III lancé, en cette occasion, au-dessus du fleuve.

Cet axe, qui perdurera au-delà des festivités de 1900, constitue encore aujourd'hui la dernière réalisation d'envergure dans l'urbanisme parisien.

L'architecture

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Le vaisseau principal, d'une longueur de près de 240 mètres, est constitué d'un espace imposant surmonté d'une large verrière. La voûte en berceau légèrement surbaissée des nefs nord et sud et de la nef transversale (paddock), la coupole sur pendentifs et le dôme pèsent environ 8 500 tonnes d'acier, de fer et de verre. Le poids total de métal utilisé atteint 9 057 tonnes (contre 12 000 pour la gare d'Orsay et 7 300 pour la structure de la tour Eiffel)[3]. Le sommet de cet ensemble culmine à une altitude de 45 mètres.

 
Verrière à l'endroit de la coupole et des pendentifs.
 
Les dômes situés à l'arrière du bâtiment.

La colonnade de Deglane, inspirée de celle de Claude Perrault au Louvre, dissimule prudemment, comme à la gare d'Orsay édifiée par Victor Laloux pour la même exposition, la splendide innovation de la structure métallique.

Ce type de bâtiment marque l'aboutissement de l'éclectisme, propre au « style Beaux-Arts ». Le Grand Palais constitue, à lui seul, un résumé des goûts de la « Belle Époque », mais marque en même temps la fin d'une certaine conception de l'architecture où le maître d'œuvre, à la fois artiste et technicien, occupe un rôle prépondérant.

L'ouvrage est l'un des derniers jalons d'une époque antérieure à l'ère de la fée électricité. Il témoigne de ce moment des grandes structures transparentes, héritières du Crystal Palace de Londres conçu par Joseph Paxton en 1851, où l'apport en lumière naturelle est encore indispensable à tout grand rassemblement humain.

À l'origine, la construction et son fonctionnement interne sont organisés selon un axe est-ouest. La communication entre la grande nef et les autres parties du palais (salon d'honneur, aile centrale et palais d'Antin) se fait par un ample escalier de fer d'inspiration classique teintée d'Art nouveau. En 1937, le Palais de la découverte, exposition temporaire pour l'Exposition internationale, occupe l'espace du palais d'Antin (partie ouest du Grand Palais). Cette exposition attire 2 millions de visiteurs et conquiert ainsi le droit de rester dans le Grand Palais à partir de 1940. Une porte mure alors le passage entre le grand escalier d'honneur et le palais d'Antin, en rupture avec le schéma de circulation est/ouest originel. L'établissement public du Grand Palais prévoit dans son plan d'action 2008-2010 de rouvrir ce passage. Les visiteurs peuvent désormais accéder directement de la nef au palais d'Antin. De même, le salon d'honneur est rénové et redevient le cœur du Grand Palais[4].

 
Façade principale conçue par Henri Deglane.
Les sculptures
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Georges Récipon, L’Harmonie triomphant de la Discorde, quadrige, côté Seine.
 
Georges Récipon, L'Immortalité devançant le Temps, côté Champs-Élysées.
Les mosaïques
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  • Intérieurement, les pavements du hall elliptique sont en mosaïque de grès cérame. On trouve un vaste motif floral en symétrie centrale, constitué de tesselles aux couleurs peu soutenues (beige, marron et vert), mais se détachant bien sur un fond blanc. Ces mosaïques ont été réalisées par la Société Simons et Cie selon des cartons de Louis Hista[réf. nécessaire].
  • Les frises extérieures, situées sous le péristyle de Deglane (façade sur l'avenue Winston-Churchill), se composent d'une longue bande aux vives couleurs rehaussées d'or utilisant la technique traditionnelle de la mosaïque.

Fractionné en quatre panneaux symbolisant l'art en dix sujets historisés à différentes époques, cet ouvrage mesure soixante-quinze mètres de long (224 m2) et du fait de sa grande hauteur (3,2 m), il est souvent peu connu. Ces mosaïques en pâte de verre colorée ont été réalisées entre 1898 et 1900 par Auguste-Maximilien Guilbert-Martin et René Martin selon des cartons de Louis Édouard Fournier, pour célébrer l'art au travers des civilisations connues, à l'occasion de l'Exposition universelle de 1900[5].

Le jeu des tesselles est animé par des opus très réguliers et souligné par des contours marqués ainsi que de subtils dégradés. On y trouve ainsi des représentations des grandes civilisations de l'Histoire telles que perçues à la fin du XIXe siècle, dont l'Égypte, la Mésopotamie, la Rome d'Auguste à la Grèce du siècle de Périclès, la Renaissance italienne et française au Moyen Âge, l'Europe industrieuse à celle des arts classique et baroque.

Les civilisations plus lointaines ne sont pas oubliées, glorifiant au passage le colonialisme occidental alors à son apogée : l'Afrique méditerranéenne et subsaharienne, l'Orient et le sous-continent indien, l'Asie du sud-est et l'Indochine avec les Khmers et les temples d'Angkor, la Cochinchine et les paysages annamites autour de la ville de Hué, l'Extrême-Orient avec des représentations de la Chine mystérieuse et du Japon (alors en vogue depuis le récent engouement des peintres impressionnistes et d'écrivains pour ce pays), des évocations des deux Amériques.

La cérémonie d'inauguration

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Grand Palais, 1900, Eugène Trutat[6].
 
Le président Émile Loubet.

L'inauguration du Grand Palais a lieu avec tout le faste propre à la IIIe République. Une plaque de l'un des frontons d'angle porte encore, gravé dans la pierre, le témoignage de l'événement.

La cérémonie se tient le , en présence d'Émile Loubet, président de la République, de Pierre Waldeck-Rousseau, alors président du Conseil et ministre de l'Intérieur et des Cultes, de Georges Leygues, ministre de l'Instruction publique et des Beaux-Arts, d'Alexandre Millerand, ministre du Commerce, de l'Industrie, des Postes et Télécommunications et, enfin, d'Alfred Picard, commissaire général de l'Exposition universelle.

Un siècle de salons et d'expositions

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Dès 1901, le Grand Palais abrite, parallèlement aux Salons artistiques, de nombreuses autres manifestations. C'est notamment pour le concours hippique, accueilli jusqu'en 1901 au palais de l'Industrie, que le Grand Palais est doté d'une nef et d'une piste sablée. D'avril 1901 à 1957, le concours hippique, avec concours d'attelages, épreuves de vitesse et sauts d'obstacles, est un moment très prisé de la vie parisienne.

À partir de 1901, d'autres salons se succèdent. Ils sont majoritairement consacrés à l'innovation et la modernité : Salon de l'automobile de 1901 à 1961, Salon de l'aviation de 1909 à 1951, Salon des arts ménagers, etc.

Les salons artistiques

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Les salons consacrés aux beaux-arts connaissent leur âge d'or pendant les trente premières années de fonctionnement du palais. Avec l'avènement du Front populaire en 1936, ces présentations, considérées par certains comme l'expression d'un art réservé à une élite bourgeoise, perdent progressivement de leur importance et voient leur surfaces réduites d'une manière considérable avec l'installation définitive du Palais de la découverte en 1937.

Après la guerre, on leur préfère les salons techniques et commerciaux, plus rentables. Les salons artistiques perdurent encore un moment avant de voir leur espace d'exposition diminuer comme peau de chagrin et d'être relégués dans des endroits moins nobles et moins visibles du Grand Palais. À partir de 1947, l'édifice perd sa fonction de palais des Beaux-Arts, ce pour quoi il a été construit.

Salons accueillis au Grand Palais :

Les salons techniques

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Affiche pour le 14e concours Lépine au Grand Palais du 28 août au 4 octobre 1910.

Ce type de manifestations se raréfie au Grand Palais à partir des années 1960. Devenu trop petit, on lui préfère le tout nouveau Palais du CNIT (à l'époque nommé Centre national des industries et techniques) ou le parc des expositions de la porte de Versailles.

Les salons commerciaux

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Ces expositions quittent également le Grand Palais par manque de surface disponible.

Les événements ponctuels

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Fête foraine, en janvier 2006.

Le Palais de la découverte

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Façade du palais d'Antin avant restauration.

Le Palais de la découverte de l'exposition universelle de 1937 est installé dans l'aile ouest du Grand Palais. Il est conçu à l'origine comme une présentation temporaire, mais fort de son succès, il reste finalement dans ces locaux.

Il constitue aujourd'hui une véritable institution dont la popularité ne s'est jamais démentie.

Les Galeries nationales

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Façade côté jardins (Galeries nationales), avec la fontaine Miroir d'eau, la Seine et ses affluents.

En 1964, Reynold Arnould transforme une partie de l'aile nord du Grand Palais, à la demande d'André Malraux alors ministre des Affaires culturelles, en Galeries nationales destinées à recevoir de grandes expositions temporaires. Sont ainsi présentées en 1966, une rétrospective du peintre Pablo Picasso et une importante présentation d’art africain.

De très nombreuses expositions de peintres classiques, impressionnistes (Renoir), et modernes (Zao Wou-Ki, Prassinos, Mušič, Bazaine, Manessier) sont organisées par la suite.

En décembre 2020, tous les espaces d'exposition sont fermés afin de procéder à une nouvelle rénovation avant les Jeux olympiques de Paris de 2024.

Des usages divers

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Au cours du XXe siècle, le Grand Palais est tantôt témoin des drames de l'Histoire, tantôt objet d'usages inattendus.

Au début de la Grande Guerre, le Grand Palais est utilisé comme casernement pour les troupes coloniales s'apprêtant à partir au front. Il devient rapidement hôpital de fortune pour les blessés de la Marine ne pouvant trouver de place dans les hôpitaux bondés de la capitale.

Durant la Seconde Guerre mondiale et l'occupation allemande, le Palais est réquisitionné par les Allemands pour y abriter des véhicules militaires. En août 1944, au cours des combats pour la libération de Paris, le commissariat de police attenant à la nef est bombardé par les Allemands et un incendie se déclare, sans grandes conséquences, dans une partie de l'édifice ; les pompiers sont toutefois gênés dans leur travail par le sauvetage des animaux d'un cirque qui a élu domicile sous la grande verrière. Ils doivent aussi protéger les œuvres envoyées pour une exposition par des artistes mobilisés ou prisonniers.

Jusqu'à la création de l'établissement public du Grand Palais, plusieurs institutions et services s'installent au cœur du Grand Palais :

Une scène du film Camille Claudel (1988) y est tournée.

La création de l'établissement public du Grand Palais, en 2007, a permis de rationaliser les espaces. Désormais, le Grand Palais accueille une partie de l'administration de l'établissement public de la Rmn-Grand Palais, les Galeries nationales du Grand Palais, le Palais de la découverte, le commissariat de police du 8e arrondissement et, provisoirement, des salles de répétition de la Comédie-Française.

Le , 43 chefs d'État se sont réunis sous la grande nef à l'occasion du sommet de l'Union pour la Méditerranée.

Depuis 2009, une nuit « electro » y est organisée annuellement avec de nombreux concerts. Sont déjà venus des artistes tels que Felix Da Housecat, Surkin, Laurent Garnier et Yuksek.

En octobre 2009, Prince, tombé sous le charme du Grand Palais quelques jours plus tôt lors de la fashion week, y organise deux concerts de suite ; les 11 000 places sont vendues en 77 minutes[9].

 
Le Grand Palais lors des épreuves de taekwondo des Jeux olympiques en 2024.

Durant l'été 2024, le Grand Palais accueille les compétitions d'escrime et de taekwondo dans le cadre des Jeux olympiques d'été.

Fermeture et renaissance

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Les mesures conservatoires

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Travaux sous les filets de la grande nef (2002).

L'alerte est donnée en juin 1993 après le détachement d'un élément de rivetage depuis une hauteur de près de trente-cinq mètres lors d'une exposition consacrée au design.

Le ministre de la Culture d'alors, Jacques Toubon, prend la décision de fermer « provisoirement » le lieu en novembre de la même année en raison du danger que représente la chute de nouveaux rivets sur le public.

La pose de filets accrochés sous la verrière (voir photographie ci-contre) et la convocation d'experts pour pallier cette situation ne suffisent pas pour maintenir l'ouverture au public. Seuls et après de nécessaires travaux de sécurité, les Galeries nationales et le Palais de la Découverte sont à nouveau disponibles. L'utilisation de la nef s'interrompt pendant douze années. Six années, d'abord, pendant lesquelles le ministère de la Culture et la mairie de Paris sont incapables de se mettre d'accord sur la répartition des responsabilités pour sauver le Grand Palais, qui continue donc à se dégrader. Ces tergiversations sont liées au déménagement et relogement des administrations occupant les lieux mais aussi aux montants importants nécessaires à sa restauration à son entretien. Face aux pressions d'investisseurs privés fortement intéressés par un tel emplacement en plein cœur de Paris, le bâtiment fut protégé au titre des monuments historiques en 2000[10] à l'occasion du centenaire de l'Exposition universelle de 1900, ce qui garantit sa pérennité, puis il fut ensuite trouvé un mode de gestion permettant de sécuriser les financements nécessaires[11]. Les travaux de restauration nécessiteront six années de travaux très progressifs[12].

Les pathologies rencontrées

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Des désordres se manifestent tout au long du XXe siècle et depuis le début même du chantier, dans la zone sud de la grande nef. En cours de construction, ces imprévus sont d'autant plus graves qu'il n'est pas question de repousser la date de livraison du Grand Palais.

Le comportement des maçonneries et de la charpente métallique provient de plusieurs facteurs :

  • Les fondations de l'édifice, pour partie constituées de pieux battus en chêne soutenant des massifs de pierre ou de béton de chaux, sont soumises à des variations et un abaissement progressif de la nappe phréatique. En raison de campagnes de travaux de réaménagements successives de la voirie et du quai en bordure de Seine, ce phénomène provoque un délavage puis un pourrissement des têtes de poteaux mis en contact avec l'oxygène de l'air. L'affaissement des pilotis contraint les concepteurs à augmenter d'abord le nombre des pieux pour ensuite rectifier légèrement les maçonneries et le profil de la charpente dans lesquels se répercutent les mouvements du sol. Près de trois mille quatre cents poteaux sont finalement installés, mais tous sont loin d'atteindre le « bon sol ». Cette couche géologique stable se situe, au sud, à une profondeur de quinze mètres.
  • La nature alluvionnaire du terrain et sa tendance naturelle à glisser vers le lit de la Seine.
  • Les accrochages réalisés directement sur la structure métallique, au gré de réalisations d'imposants décors ou d'expositions, tel le Salon de l'Aéronautique où ballons et avions sont parfois présentés en suspension. Cela provoque un vieillissement prématuré de plusieurs éléments métalliques.
  • L'utilisation du Grand Palais pour des présentations hippiques a pour conséquence une altération du pied de plusieurs piliers en raison de l'acidité du sol absorbant l'urine des chevaux.
  • L'emploi majeur de lamelles rivetées en acier dans la conception de la structure métallique, au lieu d'éléments en fer comme pour la tour Eiffel. Ce matériau est, à l'époque du chantier, moins souple et se dilate moins que celui fabriqué aujourd'hui (cet assemblage de plus de deux-cents mètres ne comporte aucun joint de dilatation[note 4]).
  • Les déformations de membrures et d'autres éléments dues aux tassements différentiels et ensuite au poids de la coupole du dôme.
  • Les premières fissures apparaissant, les infiltrations d'eau à travers la verrière provoquant une lente corrosion du métal.

Au cours des études précédant les récents travaux de reprise en sous-œuvre, les calculs évaluent l'affaissement des massifs de fondations de l'aile sud à près de 14 cm et une variation de hauteur, dans la partie métallique de l'ouvrage, à 7 cm. Ces valeurs, d'apparence négligeable, ont été suffisantes pour provoquer des dégâts structurels considérables.

Les premiers travaux de confortation

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Des remblaiements ou injections de matériaux de natures diverses ont commencé très tôt et se sont poursuivis à différentes périodes de la vie du monument pour combler les vides entre le niveau bas de l'édifice et celui du sol continuant à s'affaisser. En 1940, les troupes d'occupation allemandes installent véhicules et matériels divers dans la nef. S'apercevant de la fragilité des lieux, elles décident d'injecter plusieurs tonnes d'un coulis de béton dans le sous-sol, stabilisant un temps le terrain et les structures, mais alourdissant l'ensemble dans sa partie méridionale. Ainsi, les désordres iront en s'accélérant jusqu'à cette fameuse année 1993.

La campagne de restauration

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La maîtrise d'ouvrage

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La maîtrise d'ouvrage des travaux de restauration est assurée entre 2001 et 2007 par la Direction de l'architecture et du patrimoine (DAPA) du ministère de la Culture et de la Communication. Le mandat de maîtrise d'ouvrage est attribué à l'Établissement public de maîtrise d'ouvrage des travaux culturels (ÉMOC). Par arrêté du (pour une entrée en vigueur le ), le monument « Grand Palais » a été attribué à titre de dotation à l'établissement public du Grand Palais. Ce dernier s'est substitué à l'EMOC pour assurer les travaux du Grand Palais afin de mener à terme la restauration de ce monument historique.

Programmation du chantier

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Les travaux se sont déroulés en deux phases :

  • Première phase (novembre 2001 – août 2004) : reprise en sous-œuvre d'une partie des fondations accompagnée d'une dépose, remise en état et repose, de 2001 à 2004, des deux quadriges en cuivre repoussé et de leur armature en fer de Récipon.
  • Deuxième phase (2002 jusqu'à fin 2007) : réparation des murs et autres maçonneries fissurées, de la verrière et des couvertures déformées ou vétustes avec, depuis 2005, un ravalement des façades, une restauration de la grande frise extérieure en mosaïques et une seconde et dernière campagne de consolidations des fondations.

Le budget de ce chantier a atteint 101,36 millions d'euros (dont 72,3 pour la première phase). Le financement a été assuré grâce à l'État par l'intermédiaire du ministère de la Culture.

Quelques chiffres

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  • Les fondations :

8 900 m2 de parois moulées exécutées avec près de 6 600 m3 de béton, 2 000 colonnes de jet grouting mises en place avec environ 10 000 t de ciment.

  • La grande nef :

Longueur de 200 m, largeur de 50 m (de 100 m entre l'entrée principale et le mur de fond du paddock), hauteur de 35 m sous la charpente, 45 m de hauteur sous la coupole, 60 m jusqu'au campanile. La surface au sol atteint une superficie de 13 500 m2.

  • La charpente métallique :

Poids au-dessus de la nef : 6 000 tonnes d’acier (600 tonnes remplacées pendant la première phase des travaux) soit un total de 8 500 en comptant le Palais d'Antin. Nombre de rivets changés : environ 15 000. Surface repeinte : 110 000 m2. Poids de la nouvelle peinture : 60 tonnes pour 3 couches réalisées, soit pratiquement l'équivalent de 2 000 pots de 30 kilos.

  • Les différents vitrages :

Surface remplacée : 13 500 m2 carrés pour la grande nef (16 000 m2 avec les verrières latérales). Charge de vitrage neuf pour la nef, le paddock et les verrières proche des deux quadriges : 280 t de verre feuilleté (non compris 65 t de double vitrage pour les galeries latérales situées en périphérie). La surface totale des verrières représente 17500m² ce qui en fait la plus grande verrière d'Europe[13].

  • Les couvertures et les ouvrages de métallerie :

Linéaires remplacés : 750 m de chéneaux en plomb et 110 m en zinc, 1 200 m d'ornements en zinc estampé. Surface des terrassons en zinc : 5 200 m2.

(Source : ÉMOC).

Petite histoire du vert « Réséda »

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Avant même le commencement des premiers travaux de réhabilitation de la nef du Grand-Palais, s'est très vite posée la question du choix de la couleur à donner à la structure métallique, voire si la restitution de l'état initial était possible. Le temps ayant fait son œuvre, de nombreuses couches de peinture ont recouvert l'ensemble des éléments. La couleur visible en 2001 était proche du gris.

L'option de la restitution ne peut être envisagée qu'après de minutieuses études et analyses :

  • L'observation, après dépose des plaques rivetées portant le nom des entreprises ayant participé au chantier. Jamais enlevées, elles révèlent une teinte proche du vert clair.
  • L'analyse physico-chimique de prélèvements. Réalisés par le Laboratoire de recherche des monuments historiques (ou LRMH) de Champs-sur-Marne et à l'aide, entre autres procédés, de la microscopie électronique à balayage, les examens permettent de définir le nombre de campagnes de remise en peinture, les différents composants et pigments utilisés dans les diverses couches, surtout la plus ancienne et, pour terminer, l'évolution de celle-ci en présence d'une exposition prolongée aux ultraviolets.
  • La recherche du produit d'origine en fonction des premiers résultats. La chance est au rendez-vous, car le fabricant ayant fourni la peinture en 1900 a toujours pignon sur rue. Il s'agit de l'entreprise Ripolin qui possède encore des archives sur l'époque concernée. Le nuancier correspondant est vite retrouvé et l'on découvre le nom de la couleur utilisée, un vert « Réséda » dont il existe trois nuances : pâle, moyen et foncé. Les analyses précédentes correspondent sans hésitation possible à l'utilisation du « vert réséda pâle ».

Le nouveau vitrage de la verrière

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Une nouvelle ambition à partir de 2007

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L'ancien ministre de la Culture et de la Communication, Renaud Donnedieu de Vabres, a souhaité la mise en place d'une structure baptisée « établissement public du Grand Palais des Champs-Élysées »[14], plutôt que de voir confier la gestion et la programmation du lieu à des organismes privés. Depuis , l'établissement public du Grand Palais des Champs-Élysées a fusionné avec la Réunion des musées nationaux.

Le 5 février 2014, Aurélie Filippetti, ministre de la Culture, annonce que l’agence LAN (en cotraitance avec Terrell, Mathieu Lehanneur, Jean-Paul Lamoureux, Casso et Associés, Base, Franck Boutté, Michel Forgue) est lauréate du dialogue compétitif lancé pour l’aménagement du Grand Palais à Paris. Le respect du monument historique ainsi que la qualité et la modernité des aménagements envisagés ont séduit le jury, présidé par Jean-Paul Cluzel, président de la Réunion des musées nationaux-Grand Palais. En janvier 2007, le Grand Palais bénéficie du statut d'établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC). Le 9 septembre 2009, Jean-Paul Cluzel succède à Yves Saint-Geours à la présidence de l'établissement public qui poursuit 4 missions :
  1. Achever la restauration, préserver et mettre en valeur le monument,
  2. Aménager et exploiter des espaces rénovés et accueillir le public dans de meilleures conditions,
  3. Animer et promouvoir les espaces du Grand Palais dont il assure l'exploitation et y susciter toute activité, manifestation et événement dans les domaines culturels, scientifiques et économiques, de nature à accroître le rayonnement de Paris et de la France,
  4. Garantir l'équilibre financier de l'établissement.

2020-2023 : une nouvelle rénovation

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Le , la ministre de la Culture Françoise Nyssen annonce la fermeture à venir du Grand Palais, de au printemps 2023, afin de procéder à une rénovation de plus grande ampleur avant 2024, date à laquelle doivent y avoir lieu les épreuves d'escrime des Jeux olympiques d'été de 2024. Celle-ci, plusieurs fois repoussée, doit permettre outre une restauration, de réorganiser et d'augmenter ses capacités d'accueil, avec pour la nef de 11 000 personnes contre 5 600 actuellement, et les 3 700 m2 de balcons qui seraient de nouveaux accessibles, ainsi que de redéfinir les missions de la structure, en liaison avec le Palais de la découverte par la rue des Palais sur deux niveaux. Une terrasse doit être créée pour le public et accueillir les activités d'astronomie du Palais de la découverte. Les galeries doivent gagner en clarté par l'installation de plafonds verriers et passer des 3 000 m2 actuels à 3 900 m2. Son coût de 466 millions d'euros doit être financé en partie par un emprunt et par le mécénat de Chanel[15].

Pendant la période des travaux, une structure provisoire est bâtie sur le Champ-de-Mars afin d'accueillir les grands évènements[16], cette structure devant également servir pour les Jeux olympiques. Ce « Grand Palais éphémère », conçu par Jean-Michel Wilmotte et géré par GL Events, est inauguré début 2021[17].

Fin septembre 2020, le projet initial du Grand Palais, jugé trop couteux et peu adapté aux exigences écologiques et sanitaires actuelles, est abandonné au profit d'une rénovation plus modeste et plus classique[18]. Un nouveau projet de restauration voit alors le jour, mené par l'architecte en chef des monuments historiques François Chatillon. Le Grand Palais ferme en mars 2021, avec une réouverture prévue pour les Jeux olympiques pour la nef et les galeries et pour le printemps 2025 pour le reste des travaux[19].

Le coût total des travaux est estimée à près de 400 millions d'euros, ce qui en fait un projet d'envergure colossale, car la totalité du bâtiment est remis à neuf.

Durant la Fashion Week de Paris en 2024, Chanel organise encore une fois son défilé sous la verrière du Grand Palais. Défilé qui n'avait pas pu être présenté les années précédentes en raison des travaux.

Le Grand Palais est desservi à proximité par les lignes 1 et 13 à la station Champs-Élysées - Clemenceau et les lignes 1 et 9 à la station Franklin D. Roosevelt.

Galerie

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Notes et références

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  1. La chaleur excessive régnant sous la verrière du Grand Palais occasionne de sérieux et coûteux dégâts à certaines des collections de timbres exposées à l'exposition Arphila 75 (organisée au mois de juin). Les trois expositions françaises internationales de ce type qui suivent, nommées Philexfrance, ont dès lors lieu dans des lieux considérés comme plus appropriés pour l'organisation de ce type d'événement : en 1982 au CNIT, puis en 1989 et 1999 au Parc des expositions de la porte de Versailles.
  2. Expositions monographiques consacrées à un artiste (ou groupe d'artistes).
  3. Et l'artiste plasticienne Odile Soudant pour la mise en lumière.
  4. Un joint de dilatation permet à une structure exposée à des températures variées de garder sa forme prévue à l'origine. En effet, la structure en métal, soumise aux fortes chaleurs de l’été, va se distendre. Le joint de dilatation permet d'absorber ce mouvement, ce qui évite que les forces supplémentaires liées à cette dilatation soient reprises par les supports de cette structure. En cas d'absence de joint de dilatation, ce sont les supports de cette structure qui doivent eux-mêmes absorber l’effort supplémentaire, entrainant leur vieillissement prématuré ou encore des déplacements inopportuns d'éléments de fondation sur lesquels ils sont posés.

Références

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  1. L'Exposition Universelle de 1900, par Joseph Antoine Bouvard.
  2. Jean-Baptiste Michel, « Paris : ce dont rêvait Le Corbusier pour la rive droite », sur geo.fr, (consulté le ).
  3. Gilles Plum et Jean-Pierre Delagarde, Le grand palais. Un palais national populaire, Centre des monuments nationaux, , p. 95
  4. « Dévoilement des perspectives », sur www.grandpalais.fr (consulté le )
  5. Le Grand-Palais, « La mosaïque du Grand Palais 7 avril 2022 », sur grandpalais.fr, (consulté le ).
  6. Conservé au muséum de Toulouse.
  7. Voir sur grandpalais.fr.
  8. « Le Salon de l'enfance (1950-1960) », sur grandpalais.fr (consulté le )
  9. « Prince au Grand Palais... ».
  10. « Le Grand Palais », notice no PA00088877, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture
  11. Michèle Leloup, « Grand Palais, grand chantier », L'Express,‎ (lire en ligne).
  12. Anne Pons, « Le Grand Palais déboulonné », L'Express,‎ (lire en ligne).
  13. Sources : ministère de la Culture-Grand Palais[réf. incomplète]
  14. Présentation de l'établissement public, Site officiel du Grand Palais
  15. « Le Grand Palais sera fermé pour travaux de fin 2020 au printemps 2023 », lemonde.fr, 12 février 2018.
  16. « Paris : feu vert pour le Grand Palais provisoire sur le Champ-de-Mars », leparisien.fr, 2 juillet 2018.
  17. Page de présentation du projet sur le site du Grand Palais. Consulté le .
  18. Jugé « trop pharaonique », le chantier du Grand Palais abandonné, Le Monde, 27 septembre 2020.
  19. Page de présentation du projet sur le site du Grand Palais. Consulté le .

Voir aussi

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Bibliographie

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Ouvrages

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Texte juridique

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Filmographie

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  • Grand Palais, une mégastructure historique, réalisé et écrit par Julien Adam, Capa Presse -RMC Découverte, 2017

Conférence et visites virtuelles

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Articles connexes

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Liens externes

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