Libération de Mont-de-Marsan

histoire des Landes
Libération de
Mont-de-Marsan
Description de cette image, également commentée ci-après
Pont de Bats (725, avenue du Corps-Franc-Pommiès à Saint-Pierre-du-Mont) supportant la ligne de Morcenx à Mont-de-Marsan, lieu des derniers combats pour la libération de Mont-de-Marsan
Informations générales
Date et
Lieu Mont-de-Marsan
Saint-Pierre-du-Mont
Issue Victoire Française
Belligérants
Drapeau de la France France Libre Drapeau de l'Allemagne nazie Reich allemand
Commandants
Drapeau de la France Léonce Dussarrat inconnu
Forces en présence
200 maquisards 300 soldats, 40 camions
Pertes
4 morts 4 morts, 9 camions capturés, 1 détruit

Seconde Guerre mondiale

Batailles

2e campagne de France


Front d'Europe de l'Ouest


Front d'Europe de l'Est


Campagnes d'Afrique, du Moyen-Orient et de Méditerranée


Bataille de l'Atlantique


Guerre du Pacifique


Guerre sino-japonaise

Coordonnées 43° 53′ 06″ nord, 0° 31′ 34″ ouest
Géolocalisation sur la carte : Landes
(Voir situation sur carte : Landes)
Libération de Mont-de-Marsan
Géolocalisation sur la carte : France
(Voir situation sur carte : France)
Libération de Mont-de-Marsan

La libération de Mont-de-Marsan ou combat du Pont de Bats est une bataille de la Seconde Guerre mondiale. Comptant parmi les affrontements de la campagne de libération de la France, elle se déroule du 20 au et aboutit à la libération de Mont-de-Marsan et de Saint-Pierre-du-Mont, et plus généralement de l'est du département des Landes.

Contexte modifier

Début du conflit modifier

La mobilisation française de 1939 est décrétée le 1er septembre et la France déclare la guerre à l'Allemagne le 3 septembre. À Mont-de-Marsan, le 14e régiment de tirailleurs sénégalais, stationné à la caserne Bosquet depuis le 15 janvier 1922, défile à travers les rues de la ville avant de partir pour le front. Le même jour commence l'évacuation de la population civile d'Alsace vers des régions plus éloignées, notamment du Sud-Ouest de la France. Les Landes deviennent ainsi la destination d'une partie de la population du Haut-Rhin. La drôle de guerre s'installe pour laisser la place à la bataille de France à partir du 10 mai 1940. Les « poussins » de l'École militaire de l'air quittent Salon-de-Provence et une partie d'entre eux se réfugie à l'aéro-club de Mont-de-Marsan (préfigurant la BA 118). Une construction provisoire en bois et charpente métallique est édifié à côté du bâtiment de la poste, au no 7, place Général-Leclerc. Elle sert de foyer du soldat français et sera réutilisée après la guerre comme siège au stade montois. Des Landais figurent au nombre des combattants morts lors de la bataille de France, certains d'entre eux sont inhumés au cimetière du Centre de Mont-de-Marsan, tel le sergent-chef Pierre Darbins, natif de la ville[1].

Après l'effondrement des armées françaises en , la demande d'armistice du maréchal Pétain, le départ à Londres du général de Gaulle, son appel du 18 Juin et la signature de l'armistice du 22 juin 1940, la ville de Mont-de-Marsan est occupée par l'armée allemande à partir du . Les Alsaciens réfugiés à Mont-de-Marsan regagnent leur région, où ils ont alors la douleur de constater que leurs maisons ont été pillées par les différentes troupes qui y ont séjourné et que leur région a été intégrée au Troisième Reich et germanisée[1].

Occupation de Mont-de-Marsan modifier

Réquisitions

Dès son entrée en ville, l'armée du allemande réquisitionne les bâtiments suivants pour y installer ses services[1] :

Bâtiments publics et administratifs, terrains de sport, hôtels, hôpitaux, écoles et logements chez l'habitant sont réquisitionnés, comme[1] :

En juillet 1940, les réquisitions se poursuivent afin de permettre le déploiement des structures de commandement de l'armée allemande (kommandantur)[2] :

  • OrstKommandantur (centre de commandement de la ville) : 22, rue Victor-Hugo ;
  • FeldKommandantur 541 (centre de commandement du département et la partie occupée des Basses-Pyrénées) : deuxième étage du cercle des officiers (l'actuel hôtel de ville), 2, place du Général-Leclerc ;
  • StandortKommandantur (centre de commandement de la garnison) : ancienne Caisse d'Épargne (actuel hôtel de la police municipale) : 6, place du Général-Leclerc ;
  • Feldgendarmerie : 26, boulevard de la République[3] ;
  • Ausweis : service des laissez-passer dits « frontaliers » pour les Landes et les Basses-Pyrénées permettant le franchissement de la ligne de démarcation : 17, rue Augustin-Lesbazeilles ;
  • KreisKommandantur 657 (commandement de l'arrondissement de Mont-de-Marsan) : 1, avenue Sadi-Carnot ;
  • Service de la propagande : villa Paulette, 567, rue de Saint-Pierre ;
  • Douanes : maison Farbos, 135, chemin des Usines ;
  • Croix-Rouge allemande : 5, rue Henri-Duparc ;
  • Gestapo : villa les Cèdres, 165, boulevard d'Alingsås[1].

Entre septembre et octobre 1940, la commission de désarmement et la sous-commission de l'armistice s'installent à l'hôtel Planté. Des avions de chasse allemands (Messerschmitt Bf 109) de l'escadrille « Richthofen » (Jagdgeschwader 2) stationnent sur le terrain de l'aéro-club au Village Nord (340 avenue des Grands-Pins)[1].

En décembre 1940, les sociétés secrètes sont dissoutes. L'hôpital Sainte-Anne finit par être entièrement investi par l'occupant, qui laisse quinze jours au personnel hospitalier et aux patients pour quitter les lieux. Les Allemands construisent des fortifications (Blockhaus) dans le parc de l'hôpital, visibles depuis le Boulevard nord. Le parc Jean-Rameau, occupé par les Allemands, est interdit au public avant de rouvrir à compter du 21 juin 1941[1].

Ligne de démarcation

La ville est traversée à partir du 25 juin 1940 par la ligne de démarcation (zone occupée au nord et zone libre au sud), scindant également le département des Landes en deux selon un axe Roquefort, Mont-de-Marsan, Saint-Sever, Hagetmau, jusqu'à Orthez[2]. La section de la voie ferrée de la ligne de Marmande à Mont-de-Marsan, parallèle au boulevard d'Alingsås, matérialise une partie du tracé de cette ligne. Sur certaines routes secondaires situées entre la zone occupée et la zone libre, la circulation est interdite sous peine de mort. Tel est le cas du chemin vicinal dit « du Crouste » (actuelle rue de la Croix-Blanche). Les points de passage suivants, contrôlés par des sentinelles françaises et allemandes, sont créés[1] :

  • maison Mont-Alma : 2176, avenue du Président J-F-Kennedy à Saint-Pierre-du-Mont (détruite en novembre 2016) ;
  • passage à niveau : 43, avenue de Villeneuve ;
  • la gare de Mont-de-Marsan devient un point de filtrage avec contrôle d'identité obligatoire

La correspondance est réglementée entre les deux zones. Une filière d'évasion utilise clandestinement un passage sous la voie ferrée de la ligne de Marmande à Mont-de-Marsan (1, chemin de l'Évasion)[1].

Vie des habitants

Pendant les années d'occupation, les habitants subissent diverses restrictions : vie au ralenti, instauration de tickets de rationnement encadrant les restrictions alimentaires et d'approvisionnement d'essence, marché noir, couvre-feu, adoption du code de la route allemand (vitesse limitée à 40 km/h dans les agglomérations et de 80 km/h en dehors, prorité donnée aux voitures allemandes), alertes aériennes, sirènes, carreaux des vitres noircis, froid dans les maisons, nécessité de produire un laisser-passer (ausweis) pour passer de la zone libre à la zone occupée et vice-versa. Pour contourner la propagande diffusée dans les médias nationaux, les Montois s'informent en écoutant clandestinement radio Andorre. Les fêtes de la Madeleine sont annulées[7]. Le dimanche après-midi, le Royal Cinéma (11 rue Maréchal-Bosquet), alors propriété de la famille Vandal, est un moyen d'échapper au quotidien. Beaucoup de films italiens et allemands sont programmés, interprétés par les vedettes internationales de l'époque : Zarah Leander, Kristina Söderbaum, Emil Jannings ou René Deltgen. Il est également fréquenté par les troupes permissionnaires allemandes en tant que soldatenkino (« cinéma pour les soldats »)[3].

Prisonniers et travaux d'aménagement modifier

Prisonniers français

Des soldats des troupes coloniales françaises sont détenus par les Allemands dans deux camps de prisonniers de guerre à Mont-de-Marsan[1] :

  • 38, avenue Robert-Caussèque ;
  • impasse des Martyrs-de-la-Résistance[1].

Un Comité d'assistance aux prisonniers de guerre français en Allemagne est mis en place (3, place Porte-Campet) et le Secours national ouvre une permanence (67, rue Augustin-Lesbazeilles)[1].

Débuts de la base aérienne

Les Allemands lancent dès 1941 la construction de la base aérienne à l'emplacement de l'ancien aéro-club des Landes, fondé par l'industriel et pilote Henri Farbos le 5 janvier 1928. Ils créent ainsi une piste de 2 000 mètres, des hangars, des ateliers de réparation et des alvéoles de stockage réparties le long de voies de circulation périphériques qui s'enfoncent dans la forêt et dont les traces sont encore visibles : sur la RD651, après l'intersection avec l'avenue du Ferron (à 100 mètres à droite) où les plaques en béton des chemins de roulement sont toujours présentes et la guérite de la sentinelle est encore en place (3240, avenue de Canenx), à 200 mètres sur la piste. Cette dispersion favorise la protection du matériel et des installations en cas de bombardement. Gérés par la société STRABAG, les travaux emploient une main-d'œuvre constituée de prisonniers français et de travailleurs requis ou volontaires. Les prisonniers de guerre sont également employés comme main-d'œuvre pour réaliser des travaux forestiers. Les Allemands construisent en outre des dépôts de carburants et de munitions à la périphérie de Mont-de-Marsan, à Uchacq-et-Parentis, Saint-Perdon, Campagne, Haut-Mauco... défendus par des systèmes de protections en béton[1].

Collaboration et résistance modifier

Culture allemande

Des cours de langue allemande sont dispensés à l’école des Arènes (rue Fernand-Tassine) à partir de 1941 et, l'année suivante, ouvre au 30, rue Léon-Gambetta le Cercle d'études allemand qui, selon la propagande, « doit permettre aux Français d'étudier et de comprendre l'Allemagne à travers ses arts, sa littérature, sa philosophie »[1].

Antisémitisme

À la suite de la loi portant statut des Juifs du 3 octobre 1940, des arrestations ont lieu en ville et dans le département. Une partie de la maison d'arrêt de Mont-de-Marsan, réquisitionnée par les Allemands, sert de lieu de détention pour les Juifs arrêtés dans la région de Mont-de-Marsan, de Roquefort à Amou, essentiellement pour tentative de franchissement de la ligne de démarcation. Les enfants de moins de 16 ans, séparés de leurs parents, sont internés à l'hôpital Lesbazeilles, comme les six enfants juifs, âgés de 2 à 11 ans, arrêtés le à la ferme du Pouy, détenu à l'hôpital puis déportés Auschwitz où ils seront assassinés[8].

Entre la fin de l'année 1940 et la fin 1942, environ 230 Juifs sont internés à Mont-de-Marsan, dans la « section allemande » de la maison d'arrêt, la « section française » continuant quant à elle d'accueillir les détenus de droit commun condamnés par la justice française. De là, les Juifs sont transférés jusqu'en juillet 1942 vers les prisons de Bayonne ou de Dax, puis vers le camp de Mérignac à partir du 29 juillet 1942. Après l'abolition de la ligne de démarcation et l'occupation de la zone libre, le nombre de détenus diminue et ils n'y sont souvent que de passage avant leur transfert vers Bordeaux[9]. C'est notamment le cas des personnes arrêtées à Mont-de-Marsan lors de la rafle du 11 janvier 1944, qui sont conduites à la feldgendarmerie avant d'être brièvement incarcérées à la maison d'arrêt de Mont-de-Marsan, puis transférées à Bordeaux et au camp de Drancy le 12 janvier. De là a lieu leur déportation à Auschwitz le 3 février 1944 par le convoi no 67[10]. Des plaques rappellent ces évènements dans le parc Jean-Rameau, à l'école du Pouy et rue de la Ferme[1].

Collaboration

La Légion des volontaires français contre le bolchevisme, combattant sous l'uniforme allemand, s'installe en 1942 dans un local annexe du Cercle des officiers (15, rue Léon-Gambetta, à l'angle avec la place Général-Leclerc). Le 15 juillet 1944 est inauguré le siège de la Milice française qui regroupe « toutes les bonnes volontés et toutes les opinions pour cristalliser l'unité française garante du statut de la patrie… » au 33, rue Victor-Hugo (maison aujourd’hui disparue)[1].

Arrestation

Xenia Dénikine, réfugiée à Mimizan, y est arrêtée par les Allemands et internée pendant douze jours à la feldgendarmerie de Mont-de-Marsan avec les onze autres réfugiés russes que compte le département pour y être interrogés. Après avoir été relâchée, elle note dans son carnet en date du l'aide qu'elle a reçue des habitants : trompant la vigilance des gardiens allemands, des anonymes lui ont demandé à travers la grille de la cour si elle n'avait besoin de rien. Répondant qu'elle souhaitait boire de l'eau, un habitant lui en ramène une bouteille en bravant l'interdit et disparaît avant qu'elle ait eu le temps de le payer ou de le remercier[11].

Résistance

Des habitants rejoignent les Forces Françaises Libres en Angleterre, tel que l'adjudant René Darbins (né le 1er octobre 1920 à Mont-de-Marsan), qui trouve la mort aux commandes de son Spitfire le à l'âge de 21 ans lors du raid de Dieppe (voir sa sépulture au cimetière du Centre)[1]. Le , Oscar Martin, commandant des FTPF, encerclé par les Allemands, se donne la mort à Mont-de-Marsan sans livrer les secrets de la résistance. Au no 4 place Saint-Roch (site de l'actuel marché couvert), le couple Gustave et Andrée Dupeyron, garagistes engagés dans la Résistance, cache dans son appartement situé au-dessus de l'atelier des pilotes alliés, parmi lesquels le major Evan Evelynd de l'U.S. Air Force dont la forteresse volante est abattue en 1944 dans les environs d'Arjuzanx[5]. Parmi les résistants du département figurent les noms de Joseph Bordes, Renée Darriet (née et morte à Mont-de-Marsan), Jean de Laborde-Noguez, Léonce Dussarrat, Charles Lamarque-Cando ou André Soussotte. Les réseaux de résistance payent le prix fort pour leurs actions, comme en témoignent une plaque à l'école du Pouy[1].

Destructions modifier

Œuvres d'art

Comme toutes les statues en bronze de la ville, la statue La Landaise (œuvre de plus d'une tonne de Félix Soulès, installée en 1903 face au bureau de poste) est déposée par les Allemands le 7 juin 1942[5] pour être fondue dans le cadre de la mobilisation des métaux non ferreux. C'est également le cas du buste d'Aimé Darrasse (œuvre du sculpteur Paul Roussel, exposée à l'entrée du lycée Victor-Duruy. Dans un même temps, tous les objets non utilisés en métaux non-ferreux (plomb, cuivre, alliage, étain, nickel…) doivent être amenés à l'ancienne caserne Lacaze (donjon Lacataye)[1].

Bombardement

Dès son arrivée à Mont-de-Marsan, l'armée de l'air allemande (la Luftwaffe) réquisitionne plusieurs bâtiments publics pour y prendre ses quartiers, notamment l'hôpital Sainte-Anne à partir de décembre 1940 et quelques belles demeures (villa Chantaco et villa Lacaze). Elle réquisitionne également le champ de l'aéroclub des Landes et à partir de 1941, lance les travaux d'aménagement d'une base aérienne. Sous la supervision allemande, ce sont des prisonniers de guerre coloniaux détenus dans les deux camps de Mont-de-Marsan, des requis, des volontaires français ou étrangers et des sociétés locales de travaux publics qui sont à l'œuvre. L'objectif est d'accueillir des avions de patrouille maritime venant suppléer les hydravions stationnés à l'aérodrome de Biscarrosse[12].

En octobre 1943, des Junkers Ju 290 du « Fernaufklärungsgruppe 5 » arrivent à la base aérienne qui vient d'être achevée. Ces quadrimoteurs de reconnaissance à long rayon d'action ont pour mission de patrouiller au-dessus de l'Océan Atlantique à la recherche des convois et sous-marins alliés. Devenue un enjeu stratégique, la base aérienne est bombardée le 27 mars 1944 par quarante-sept Consolidated B-24 Liberator américains, dans le cadre de la préparation du débarquement en Normandie. Cela constitue un des événements majeurs de la Seconde Guerre mondiale pour les Landes. Plus de 6000 bombes sont larguées, entraînant des dégâts collatéraux, matériels et humains[12] :

  • 13 morts et 10 blessés (soignés à l'hôpital Lesbazeilles) parmi la population civile et les militaires italiens ;
  • 6 morts parmi les Allemands : 3 militaires et 2 civils + 1 inconnu, enterrés au cimetière militaire allemand de Mont-de-Marsan datant de la Première guerre mondiale. Ils seront transférés en 1962 au cimetière allemand de Berneuil, en Charente-Maritime[1].

Le 16 août 1944, la Luftwaffe basée à Mont-de-Marsan reçoit l'autorisation de battre en retraite. Les premiers avions décollent dès le lendemain en direction de l'Allemagne tandis qu'un convoi hétéroclite de véhicules et de personnels quitte la base aérienne pour la même destination. L'évacuation complète prendra quelques jours[12].

Libération modifier

Prémices modifier

Après le débarquement allié du 6 juin 1944, les réseaux locaux de la Résistance lancent de nombreuses actions dans le but de ralentir la remontée de renforts vers le front de Normandie. Les accrochages entre les maquisards et les troupes allemandes sont réguliers. Conformément aux ordres britanniques, le réseau Léon-des-Landes mené par Léonce Dussarrat commence le sabotage systématique de tout ce qui pourrait être utile aux Allemands : voix ferrées, lignes téléphoniques, télégraphiques et ponts. Selon l'expression des résistants gersois : « Léon fait tout sauter dans les Landes[13]. » À Bordères-et-Lamensans, un attentat contre les troupes d'occupation entraîne des représailles à Grenade-sur-l'Adour le 13 juin 1944 et la déportation de 29 otages (1, place des Déportés à Grenade-sur-l'Adour).

La libération de Mont-de-Marsan s'inscrit dans le cadre des opérations de la libération du sud-ouest de la France qui comptent quatre batailles décisives : Javerlhac (Dordogne), l’Isle Jourdain (Gers), Mont-Gargan (Haute-Vienne) et Mont-de-Marsan. Dans cette zone, ce sont presque uniquement des résistants qui font face aux troupes d'occupation allemandes et non les troupes alliées anglo-américaines. D'après Dominique Lormier, 145 000 résistants des Forces françaises de l'intérieur (FFI) affrontent 190 000 soldats allemands en 1944 et 1945. Le bilan est très positif pour les résistants : 87 000 allemands sont tués, blessés ou capturés dans le Sud-Ouest[14].

20 août 1944 modifier

Devant l’avancée des résistants, les Allemands se préparent à quitter Mont-de-Marsan en faisant sauter le central téléphonique à la Poste et une une partie de la base aérienne, notamment la piste et les hangars. Ils placardent des affiches prévenant la population qu'ils bombarderaient la ville en cas d'agitation. Malgré leur fuite, ils refusent de livrer leurs stocks de vivres aux autorités françaises qui se mettent en place mais laissent la population les piller. Dans la nuit, les soldats positionnés dans la base aérienne, le lycée Victor-Duruy et aux alentours de la ville quittent leurs positions et partent vers Cère et Dax, leurs dernières positions sûres dans les Landes.

21 août 1944 modifier

Au matin du 21 août, les Allemands ont quitté la ville et sont remplacés par des maquisards, menés par Léonce Dussarrat, qui défilent dans les rues. C'est l'explosion de joie pour la population, on chante La Marseillaise, on acclame les libérateurs. Dans les environs, les combats entre résistants et troupes allemandes se poursuivent à Cère le matin du 21 août. Le résistant Gilbert Benay est fusillé contre le mur du cimetière de cette commune (283, rue du 21-Août-1944)[1].

À Mont-de-Marsan, une foule nombreuse se rassemble pour accueillir ses libérateurs devant l'hôtel de ville de l'époque (4, place Charles-de-Gaulle). Se présentant au balcon, le maire de Mont-de-Marsan Jean Larrieu[n 2], à sympathie collaborationniste, entouré de deux capitaines - un Écossais et un Américain - annonce sa démission et laisse sa place au résistant Marcel David[15].

La joie retombe vite ; vers 13 heures, des coups de feu sont tirés non loin de la ville. On dit que ce sont des détachements allemands, une colonne de quarante camions transportant 300 soldats, s’approchant depuis Tartas par la route de Bayonne[16]. Les 200 maquisards faiblement armés, encadrés par Dussarrat, Gervais, Latour et Despons se portent sur la route de Bayonne et se positionnent sur le ruisseau du Trompeur, entre Saint-Pierre-du-Mont et Saint-Perdon ; ils se placent des deux côtés de la route et mitraillent les Allemands.

Finalement, ils se replient sur un point d’appui, le pont ferroviaire de Bats[n 3] qui surplombe la route de Bayonne. Là, les allemands sont longuement stoppés. Avant de tenter une manœuvre d’encerclement des défenseurs, sur et sous le pont s'engage alors un combat au corps à corps, dans lequel sont tués le capitaine Thomas Mellows de l'armée canadienne (inhumé au cimetière du Centre), le capitaine Marc Croharé, l'adjudant-chef Jean Clapot et l'adjudant André Siot. Les maquisards doivent encore reculer ; la dernière ligne de défense est le pont de Luxey. Au moment du dernier repli, vers 20 heures, un camion allemand saute sur une mine ou explose dans la fusillade.

À partir de ce moment, la fusillade diminue d'intensité et finit à la tombée de la nuit. Les camions allemands font demi-tour vers Dax ou Tartas vers 22 heures 30. Quatre français et autant d'Allemands (enterrés à Dax) ont été tués, un camion allemand a été détruit et neuf capturés[17]. D’après Louis Papy, natif de Mont-de-Marsan, les Allemands furent surpris de ne pas être soutenus par leurs camarades qu’ils croyaient retranchés dans l'aérodrome.

Fin de la guerre modifier

Le chef-lieu et tout l’est des Landes sont libérés de l’occupant, Paul Chary est nommé nouveau préfet des Landes. Le 23 août, Dax est libéré. Le 24 août a lieu la cérémonie des obsèques des quatre victimes du combat du pont de Bats.

Le 28, l'ensemble du département des Landes est officiellement libéré[18].

Le 3 septembre 1944, un rassemblement républicain regroupant les nouvelles autorités locales, dont Charles Lamarque-Cando (Président du Comité départemental de Libération) et Léon des Landes, est organisé dans les arènes du Plumaçon pour fêter la liberté retrouvée. Des soldats coloniaux, anciens du 14e RTS et récemment libérés des camps de prisonniers environnants, sont rassemblés à la caserne Bosquet avant leur départ en prévision des combats de libération de la Pointe de Grave. Quelques soldats sud-africains et kényans, supplétifs de l'armée britannique capturés par les Allemands lors de la bataille d'El Alamein et détenus dans des camps de prisonniers de la ville sont inhumés dans le cimetière de l'hôpital Sainte-Anne, après leur décès probablement dû à la tuberculose[1].

La guerre cesse en Europe le 8 mai 1945. La lente reconstruction du pays est en marche, comme à Mont-de-Marsan où l'on répare et reconstruit les structures endommagées par les Allemands avant leur départ (base aérienne, hôpital Layné, hôtel Richelieu, etc.)[1]. Le bordel de Mont-de-Marsan, situé 1 place Saint-Louis, était pudiquement surnommé « la passerelle » du fait de sa situation près d'un ouvrage de franchissement de la Midouze depuis remplacé par le pont Saint-Louis. Réquisitionné par les Allemands pendant l'Occupation, il ferme consécutivement à l'adoption de la loi Marthe Richard du 13 avril 1946[19].

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. Cette demeure appartient à l'origine aux Lacaze, vieille famille montoise qui compte notamment Antoine Lacaze, maire de Mont-de-Marsan de 1867 à 1870 et qui lègue à la Ville le donjon Lacataye, ou encre Étienne Lacaze, industriel qui gère avec son frère Jacques deux usines de bois situées à Saint-Perdon et à Morcenx. Par la suite, elle appartient au docteur Labatut.
  2. Jean Larrieu est né à Aire-sur-l'Adour en 1885. Il exploite le commerce de charcuterie dont il est propriétaire situé 25 rue Léon-Gambetta à Mont-de-Marsan avec son épouse, Marie Larrieu-Pommiès, née en 1890 à Garein. Il décède à plus de 100 ans.
  3. Voir la liste des ponts de Mont-de-Marsan

Références modifier

  1. a b c d e f g h i j k l m n o p q r s t u v w x et y Itinéraires de mémoire des deux guerres mondiales à Mont-de-Marsan, Saint-Pierre-du-Mont et alentours, réalisé par l'ONACVG, AAL-ALDRES, Conseil départemental des Landes, Ville de Mont-de-Marsan, 2017, consulté le 8 février 2024
  2. a et b H. Delpont et A. Lafourcade, Mont-de-Marsan : Horizontale et aérienne (1914-2008), Société de Borda.
  3. a et b « La France sous l'Occupation 1940-1945 - Les administrations allemandes et françaises », sur Institut historique allemand (consulté le )
  4. (en) Michael Holm, « Fernaufklärungsgruppe 5 », sur https://ww2.dk, 1997-2003 (consulté le )
  5. a b et c Alain Lafourcade, Mont-de-Marsan, la ville aux 1000 rues : Dictionnaire historique, AAL-ALDRES, , 374 p. (ISBN 9791069901117), p. 79, 215 et 315
  6. « Mont-de-Marsan : l'ancien tunnel qui permettait de fuir la zone occupée par l'Allemagne pendant la guerre », sur francebleu.fr (consulté le ).
  7. « Les heures sombres de l’Occupation dans les Landes : en juin 1940, les Allemands investissaient Mont-de-Marsan », sur Sud Ouest, (consulté le ).
  8. a b et c « Que s’est-il passé le 18 août 1942 à la ferme du Pouy (St-Pierre-du-Mont) ? », sur https://cprd-landes.org/ (consulté le )
  9. Centre pédagogique de la résistance et de la déportation des Landes, « La prison de Mont-de-Marsan pendant la Seconde Guerre mondiale », sur Centre pédagogique de la résistance et de la déportation dans les Landes (consulté le )
  10. Centre pédagogique de la résistance et de la déportation des Landes, « La rafle du 11 janvier 1944 dans les Landes », (consulté le )
  11. Marina Grey, Mimizan-sur-Guerre : Le Journal de ma mère sous l'Occupation, Paris, Éditions Stock, , 468 p. (ISBN 2-234-00498-5).
  12. a b et c Christian Levaufre, « Mont-de-Marsan, la base aérienne pendant la Seconde Guerre mondiale, le bombardement du 27 mars 1944 », sur Espace patrimonial Rozanoff, (consulté le )
  13. « La libération des Landes », sur histoiresocialedeslandes.fr (consulté le ).
  14. « Dominique Lormier : en 1944, «le Sud-Ouest s'est libéré seul» », sur ladepeche.fr (consulté le ).
  15. « La Libération - Saint-Pierre-du-Mont », sur saintpierredumont.fr (consulté le ).
  16. Marion Canu, « Mont-de-Marsan commémore la libération de la ville en 1944 », Sud-Ouest,‎ (ISSN 1760-6454, lire en ligne, consulté le )
  17. « Seconde Guerre Mondiale : Mont-de-Marsan libérée grâce à l'explosion d'un camion allemand », sur ici, par France Bleu et France 3, (consulté le ).
  18. « Occupation et Libération des Landes (1940-1945) - Archives départementales des Landes »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), sur archives.landes.fr (consulté le ).
  19. Serge Pacaud, La prostitution dans les Landes au temps des maisons de tolérance, Atlantica, , 128 p. (ISBN 2-84394-725-1)

Annexes modifier

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Bibliographie modifier

  • [Dupau et Campa 2004] Gilbert Dupau et François Campa, Résistance et déportation, 1940-1944 dans le département des Landes par les stèles, les plaques, les monuments, Éditions Gascogne, , 143 p. (ISBN 9782914444187, présentation en ligne)
  • [Dupau 2008] Gilbert Dupau, La Résistance dans les Landes, 1940-1945 : visages et témoins de résistants, Éditions Gascogne, , 321 p. (ISBN 9782914444521, présentation en ligne)
  • [Groc 2016] Pierre Groc, Chronique de Mont-de-Marsan sous l'Occupation, Éditions des Régionalismes, , 276 p. (ISBN 9782824051321, présentation en ligne)

Articles connexes modifier