Henri Jeanson

écrivain, journaliste et scénariste français
Henri Jeanson
Henri Jeanson en 1933.
Biographie
Naissance
Décès
Sépulture
Cimetière d'Équemauville (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Nom de naissance
Henri Jules Louis Jeanson
Nationalité
Activités
Conjoint
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Membre de

Henri Jeanson est un écrivain, journaliste, scénariste et populiste français, né le [1] à Paris 13e et mort le à Équemauville (Calvados)[2]. Il a également été satrape du Collège de 'Pataphysique.

Biographie modifier

Famille, enfance et jeunesse modifier

Henri Jeanson est né à Paris boulevard de Port-Royal, d'un père instituteur[1] et professeur d'économie politique. À six ans, il entre à l'école communale de la rue de l'Arbalète. Très jeune, il manifeste un mépris de l'autorité, ainsi à sept ans, tous les matins, lorsqu'il passe devant l'appartement se trouvant au rez-de-chaussée de son immeuble dans lequel vit un officier de paix, il crie « À bas les flics, morts aux vaches ! ». Son père meurt à 45 ans de la tuberculose alors qu'il a 10 ans. Sa mère l'élève seule et doit travailler dans une parfumerie puis à la Banque nationale pour le commerce et l'industrie. Il entre comme boursier au lycée Henri-IV[3].

Journaliste avant guerre modifier

En 1917, après divers petits métiers (futur pacifiste, Henri Jeanson occupe ainsi un rôle de figuration de soldat dans une carte « porte-bonheur » pour un marchand de cartes postales…), fréquentant les maisons de tolérance[4], il devient journaliste au journal La Bataille, organe de la CGT, mais rêve de devenir comédien. En 1918, il est réformé pour faiblesse[5].

Remarqué pour sa plume redoutable, il est journaliste dans les années 1920 et intervient comme reporter, interviewer ou critique de cinéma, et se distingue par ses bons mots, la virulence de son style et un goût prononcé pour la polémique.

Il travaille dans divers journaux dont le Journal du peuple, Les Hommes du jour, Le Canard enchaîné, où il défend le pacifisme intégral et se lie d'amitié avec Marcel Achard et Antoine de Saint-Exupéry.

En novembre 1923, en reportage en Italie pour le compte de Paris-Soir, il rencontre Kurt Lüdecke, un agent d'influence nazi, collecteur de fonds pour le NSDAP, et, l'interviewant, lui pose cette question : « Quand Hitler se sera emparé du pouvoir, que fera-t-il ? », celui-ci lui répond : « On ne peut rien prévoir. En tout cas, l’Allemagne subira une brutale dictature nationale qui s’inspirera de celle de Lucius Cornelius dans la Rome antique. Pour restituer à notre patrie la liberté de l’intérieur et de l’extérieur et pour faire respecter les droits du peuple allemand, nous emploierons tous les moyens. Pour le salut de la culture chrétienne, les autres peuples suivront notre exemple. Nous séculariserons les biens juifs et nous irons exterminer les derniers survivants en Russie[6]. »

En avril 1932, il se fait remarquer par sa célèbre apostrophe au préfet de police Jean Chiappe parue dans le quotidien Les Hommes du jour d'Henri Fabre. Le titre était Little flic Quiappe, préfet sur talonnettes. Il y ajoutait le post-scriptum suivant :

« Lorsque j'ai déménagé, j'ai envoyé à M. Quiappe la carte suivante : Henri Jeanson, 14, rue de la Fontaine, Auteuil 33-12. Et j'ai ajouté de ma main sur cette carte : Pour tous renseignements s'adresser à la concierge. Au cas où, selon sa louable habitude, M. Quiappe voudrait, soit mettre de la coco dans mes poches, soit me compromettre dans j'ignore quelle affaire, il sait où me trouver : 14, rue La Fontaine, 2e étage à droite. La sonnette fonctionne. »

Il démissionne du Canard enchaîné en 1937, par solidarité avec Jean Galtier-Boissière. Il s'en explique dans La Flèche de Paris[7], où il tiendra dès lors une rubrique de critique cinématographique.

Il est condamné en à 18 mois de prison pour avoir publié dans SIA (Solidarité internationale antifasciste), le périodique fondé en novembre 1938 par Louis Lecoin, plusieurs articles sur les colonies portant atteinte à l'intégrité du territoire national.

Le , il est également condamné à 100 francs d'amende pour un article dans lequel il félicitait Herschel Feidel Grynszpan pour son attentat contre Ernst vom Rath, conseiller à l'ambassade d'Allemagne à Paris. Il est arrêté, en , alors qu'il a déjà rejoint son régiment à Meaux, pour des articles parus en mars et et pour avoir signé le tract de Louis Lecoin « Paix immédiate ». Le , il est condamné par un tribunal militaire à 5 ans de prison pour « provocation de militaires à la désobéissance », mais ne restera en prison que quatre mois.

Parcours pendant la Seconde Guerre mondiale modifier

Quelques jours avant l'entrée des Allemands à Paris, Henri Jeanson est en prison pour ses écrits pacifistes. Sa levée d'écrou est obtenue par César Campinchi, avocat et ministre. Peu après, en 1939, il est consigné au dépôt d'infanterie, et ne sera démobilisé qu'à l'armistice du 24 Juin 1940[5]. Il ne quitte pas Paris et, entré en contact avec Roger Capgras, mandataire des halles et directeur du Théâtre des Ambassadeurs, se voit confier en la rédaction en chef d'Aujourd'hui, un journal « indépendant ». Le premier numéro sort le . En , les autorités allemandes somment le polémiste de prendre publiquement position contre les Juifs et en faveur de la politique de collaboration avec l'État français. Henri Jeanson démissionne alors, puis retourne en prison. Il est libéré quelques mois après, à la suite de l'intervention de son ami Gaston Bergery, néoradical passé à la collaboration par ultra-pacifisme. Interdit désormais de presse et de cinéma, il travaille au noir, écrivant des dialogues de films qu'il ne signe pas. Avec Pierre Bénard, il participe à l'élaboration de feuilles clandestines et manque d'être encore une fois arrêté en 1942. Il restera dans la clandestinité jusqu'à la Libération.

L’épisode de septembre-novembre 1940 illustre les contradictions et parfois les compromissions du pacifisme intégral : la volonté d'éviter la guerre avec l'Allemagne s'est transformée, après la défaite, en désir de « coexistence » correcte, voire en offre de service. Le journal Aujourd'hui était loin d'être innocent dans sa chasse aux responsables de la défaite, dans le recours au mythe du coup de balai purificateur, dans son anglophobie : il entrait en résonance avec le discours du maréchal Pétain, et allait de fait dans le sens de la propagande allemande.

Journaliste après guerre modifier

Henri Jeanson retrouve la rédaction du Canard enchaîné à la Libération. Il reprend alors son métier de journaliste (au Crapouillot, au Canard enchaîné, à Combat, à l'Aurore). Il quitte la rédaction du Canard enchaîné en avril 1947, à la suite d'un article coupé sur le sujet « Aragon, Elsa Triolet, Maurice Thorez et les communistes ». Ce départ fut l'occasion d'éclats, et de règlements de comptes dans la presse. Il revint ensuite au journal, et publia jusqu'en 1970 des articles dans le Canard enchaîné (où il signait ses philippiques du pseudonyme d'« Huguette ex-Micro », allusion malicieuse à l'actrice créditée sous le nom d'Huguette ex-Duflos). Il participe à Cinémonde. De 1967 à 1970, il est critique de télévision pour le quotidien L'Aurore.

Il fut redouté dans le monde des arts et de la politique pour ses formules assassines. Ainsi à propos de l'actrice Maud Loty : « Un mégot de femme ramassé sur le trottoir »[8], du journaliste Clément Vautel « qu'il lit d'un derrière distrait »[9].

Il a également mené, en avant-garde, de grands combats politiques (pacifisme, anticolonialisme, défense de la liberté d'expression), tout en demeurant toujours un homme libre. Ainsi, en 1956, il rédige et signe la préface d'un livre de Paul Rassinier intitulé Le Parlement aux mains des banques[10].

Henri Jeanson a abandonné le cinéma en 1965 pour se consacrer au journalisme polémique et à la rédaction de ses mémoires, qui seront publiés sous le titre 70 Ans d'adolescence, quelques mois après sa mort. Il est mort à Équemauville, près d’Honfleur (Calvados) le .

Scénariste et dialoguiste modifier

1932, Henri Jeanson signe le scénario et les dialogues de La Dame de chez Maxim's d'Alexander Korda, film qui marque les débuts de sa carrière d'écrivain de cinéma.

Son talent et son esprit sont sollicités par de grands cinéastes, notamment Robert Siodmak (Mister Flow, 1936), Julien Duvivier (Pépé le Moko, 1936), Maurice Tourneur (Le Patriote, 1937), Marc Allégret (Entrée des artistes, 1938) ou Marcel Carné (Hôtel du Nord, 1938).

À la Libération, il retrouve sa place au générique de nombreux films, parmi lesquels Un revenant (1946) et Fanfan la Tulipe (1951) de Christian-Jaque, Copie conforme (1946) de Jean Dréville, Les Maudits (1947) de René Clément, La Minute de vérité (1952) de Jean Delannoy, La Fête à Henriette (1952), Pot-bouille (1957) et Le Diable et les Dix Commandements de Julien Duvivier, Montparnasse 19 (1957) de Jacques Becker, La Vache et le Prisonnier (1959) d'Henri Verneuil.

Il réalise en 1949, Lady Paname, une évocation nostalgique du monde du spectacle dans les années 1920, interprétée par son ami Louis Jouvet et Suzy Delair.

Vie privée modifier

En 1928[1], Henri Jeanson épouse l'actrice Marion Delbo ; après leur divorce, il se remarie en 1967[1] avec la comédienne et scénariste Claude Marcy (1899-1996)[11].

Filmographie modifier

Scénario et dialogues

Écrivain modifier

Henri Jeanson a aussi écrit pour le théâtre (sa discipline artistique favorite), sans grand succès toutefois. Il fut membre de l'Académie de l'Humour et de l'Académie Rabelais. Au théâtre, il écrit entre autres : Amis comme avant, Aveux spontanés, Le Petit Navire, Toi que j'ai tant aimée, L'Heure éblouissante.

Publications modifier

  • Entrée des Artistes. La Nouvelle édition - Les classiques du cinéma français. 1946.
  • 70 Ans d'adolescence. Stock, 1971.
  • En verve. Mots, propos, aphorismes. Éditions Horay, 1971.

Notes et références modifier

  1. a b c et d Archives de l'état civil de Paris en ligne, acte de naissance no 13/550/1900 (consulté le 10 avril 2012)
  2. Henri Jeanson sur lesgensducinema.com
  3. Henri Jeanson : 70 ans d'adolescence, Mémoires publiés après sa mort.
  4. Henri Jeanson : 70 ans d'adolescence (Mémoires publiés après sa mort), page 108 et 109 (éditions du Livre de Poche, 1973).
  5. a et b « Visionneuse - Archives de Paris », sur archives.paris.fr (consulté le )
  6. Robert Klein, Je suis partout, les Juifs, 1941, Amazon, , 190 p. (ISBN 978-1731151193), p.153.
  7. Henri Jeanson, « Quand "Le Canard enchaîné" tombe sur son propre bec », La Flèche de Paris,‎
  8. "J'en ai vu des choses..." Tome I des Mémoires de Louis Merlin, éditions Julliard, 1962, page 253.
  9. https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9811988s/f1.item.r=%22derri%C3%A8re%20distrait%22.zoom. (à l'époque les journaux servaient aussi à se torcher)
  10. L'Express du 20 novembre 2008, p54, extrait de La face cachée du Canard enchainé par Karl Laske et Laurent Valdiguié, Stock, 2008
  11. Jeanson par Jeanson, La Mémoire du cinéma français, Éditions René Château, 2000

Voir aussi modifier

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Autres articles modifier

Bibliographie modifier

  • Henri Jeanson, de Christophe Moussé, Presses universitaires de Nancy, 1993, Collection « Films, textes, références ».
  • Jeanson par Jeanson, La Mémoire du cinéma, Éditions René Chateau, 2000.

Articles modifier

Liens externes modifier