Curzio Malaparte

écrivain, cinéaste, journaliste, correspondant de guerre et diplomate italien (1898-1957)
Curzio Malaparte
Description de cette image, également commentée ci-après
Curzio Malaparte vers 1950.
Nom de naissance Curt Erich Suckert
Naissance
Prato (Toscane, Italie)
Décès (à 59 ans)
Rome (Latium, Italie)
Activité principale
Distinctions
Croix de guerre avec palme
Auteur
Langue d’écriture Italien
Genres

Œuvres principales

Signature de Curzio Malaparte

Curzio Malaparte, né Curt Erich Suckert[1], né le à Prato, en Toscane, et mort le à Rome, est un écrivain, cinéaste, journaliste, correspondant de guerre et diplomate italien.

Il est surtout connu en Europe pour deux ouvrages majeurs : Kaputt et La Peau. Il fit inscrire sur son mausolée, en lettres capitales :

« Io son di Prato, m'accontento d'esser di Prato, e se non fossi pratese, vorrei non esser venuto al mondo »

— Curzio Malaparte, Ces sacrés Toscans (italien : Maledetti Toscani), Éditions Le livre de poche, traduit de l'italien par Georges Piroué, Denoël, 1970, p. 67

« Je suis de Prato, je me contente d'être de Prato, et si je n'y étais pas né, je voudrais n'être jamais venu au monde »

C'est dire l'importance affective qu'il attachait à la Toscane et aux Toscans, mais surtout aux habitants de Prato et de sa région[2]. Dans la lignée de l'auteur du Décaméron, qui fut le créateur de la prose italienne, Malaparte demeure par son goût de la chronique un fils spirituel de Boccace, et l'un des prosateurs majeurs de la littérature italienne du XXe siècle.

Biographie modifier

 
Le Duomo, cœur de la ville de Prato.

Jeunesse et Première Guerre mondiale modifier

Né en Toscane de père allemand, Erwin Suckert, et de mère lombarde, Edda Perelli, Curt Erich Suckert fut, très jeune, éloigné de ses parents pour être élevé à Coiano par des paysans pauvres[3]. Malgré de brillantes études et son jeune âge, il choisit de se mettre en danger et s'engage, dès 1914, dans l'armée française.

Il s'échappe du célèbre collège et lycée Cicognini (it) où il faisait ses études classiques[4],[5], il traverse à pied la frontière à Vintimille. Il écrira plus tard dans Le soleil est aveugle : « Mais en haut, sur les pics et sur les névés, sur l'immense chaîne des Alpes savoyardes, lointaines et précises dans le ciel de soie pâle, sur cette fuite ininterrompue d'aiguilles scintillantes et de glaciers bleus, l'air limpide et immobile a une cruauté vierge[6]. » Il s'engage comme volontaire dans l'armée française à seulement 16 ans[7], trichant donc sur son âge, préfigurant ainsi l'écrivain engagé qu'il allait devenir, bien avant Ernest Hemingway et son Adieu aux armes de 1929.

La Légion garibaldienne étant dissoute, il revient en Italie, participe à la campagne interventionniste et s'engage à nouveau dès la déclaration de guerre de l'Italie à l'Empire austro-hongrois : combat sur le front italien dans les régiments alpins (Brigata “Cacciatori delle Alpi”), devient officier, avant de revenir en France où il est gazé lors de la bataille du Chemin des Dames[8], et est décoré de la croix de guerre avec palme (1914-1918)[7].

L'adhésion au fascisme et l'entre-deux guerres modifier

Les mots vont lui permettre d'exprimer ses idées politiques — Viva Caporetto, republié sous le titre La Révolte des saints maudits, est d'ailleurs trois fois saisi et censuré entre 1921 et 1923. Les convictions de Malaparte sont si profondes qu'il est persuadé que le collectivisme russe et l'individualisme italien ne sont pas antinomiques et que, ensemble, ils déboucheront sur une société nouvelle[9].

Il adhère au parti fasciste en . En 1923, dans L’Italie contre l'Europe, traduit en français en 1927, il interprète le fascisme comme un syndicalisme politique et invoque la pensée de Georges Sorel et de Filippo Corridoni[10]. En 1924, sous le nouveau régime, il administre plusieurs maisons d'édition, y compris celle de La Voce de Giuseppe Prezzolini. Dans la foulée de l'assassinat de Matteotti, il est parmi les défenseurs les plus fervents des « escadrons des intransigeants ». Il fonde et dirige la revue La conquête de l’État, qui incite Mussolini au durcissement vers la dictature, matérialisé par le discours du 3 janvier 1925. En 1925, il fait partie des signataires du « Manifeste des intellectuels fascistes ».

Il devient pour un temps un théoricien du fascisme. Alors qu'au sein du parti, les partisans du courant strapaese (retour aux traditions paysannes) et le courant Stracittà (futuriste et technologique) s'opposent, Malaparte se tient à mi-distance des deux courants tout en écrivant des articles strapaese pour le journal Il Selvaggio. Il fonde simultanément avec Massimo Bontempelli en 1926 la revue 900 (cahiers d'Europe et d'Italie), revue intellectuelle et d'avant-garde à laquelle collaborent aussi bien Pablo Picasso que James Joyce ou des dadaïstes comme Philippe Soupault. En 1928, il devient directeur de la revue L'Italia letteraria et, en 1929, rédacteur en chef de La Stampa de Turin.

L'après-guerre est tumultueuse, entrecoupée d'amours et de duels (notamment avec le socialiste Pietro Nenni et le futuriste Mario Carli). Par la suite, il entame une carrière diplomatique qui le conduira à Varsovie, mais qu'il délaisse pour le journalisme et la littérature[11].

 
Statue de Boccace du Piazzale des Offices à Florence.

Il change son état civil en 1925 pour Curzio Malaparte[5] après avoir lu un pamphlet de 1869 intitulé I Malaparte e i Bonaparte. Malaparte disait, à propos de son pseudonyme : « Napoléon s'appelait Bonaparte, et il a mal fini : je m'appelle Malaparte et je finirai bien[12]. » Son nouveau nom est inscrit à l'état-civil par un décret du 15 avril 1937[1],[13]. Ses papiers d'identité ne feront plus mention de Curt Suckert, mais de Curzio Malaparte. « Malaparte est mon étendard[14]. » Ce changement d'ordre symbolique marquera définitivement son appartenance à la lignée des Toscans, en leur compagnie, il mange « l'herbe du ridicule en salade »[15]. Il se dit dans la lignée de Filippo Lippi. Il se dit aussi né comme Filippino Lippi, rue Gaetano Magnolfi [2][16], celle aussi de Marsile Ficin[17]. Son goût des chroniques lui vient de la lecture de Boccace, de Dino Compagni[18] et surtout de Franco Sacchetti qu'il aimait par-dessus tout[19]. Sacchetti, l'auteur de Il trecento novelle (Trois cents nouvelles) regroupées dans Opere[20]. « Une analyse plus technique permettrait de dégager les racines littéraires de son goût de l'hénaurme, qui enjambe Dostoïevski et Nietzsche, pour retrouver le monde plein de sève et d'humeur, mais dégraissé, sec et sans bavures des nouvelles de Franco Sacchetti et de Boccace : à la fois chronique, constat, compte rendu de faits sans jugement préconçu, où la farce côtoie le tragique et où il est interdit de ne rien prendre au sérieux[21]. »

Grâce à sa solide culture classique[22], ce « Toscan d'adoption » choisit ainsi de s'ancrer dans le monde toscan. Ce qui lui vaudra bien des critiques. Il se réinvente alors une vraie famille et une fratrie spirituelle ; aux liens de l'hérédité qu'il rejette, il préfère ceux de l'héritage culturel toscan. Il reste toujours fidèle à ses amis proches et lointains dans le temps jusqu'à la tombe, comme au colonel H. Cumming de l'Université de Virginie, dédicataire de La Peau, rebaptisé Jack Hamilton dans le roman, ou à son chien Febo[23]. « Jamais je n'ai aimé une femme, un frère, un ami comme j'ai aimé Febo », écrit Malaparte dans La Peau.

Il semblerait que les changements politiques qui se sont opérés à partir de 1925 aient commencé à décevoir les espoirs de révolution sociale qui avait initialement attiré Malaparte vers le fascisme. Mais, ses relations avec le régime se détériorent réellement lorsque, se réclamant du fascisme révolutionnaire de 1919, il dénonce les dérives réactionnaires de Mussolini, notamment dans Monsieur Caméléon (1929). Il réprouve ainsi l’embourgeoisement du régime et la signature des Accords du Latran avec le Saint-Siège, et moque le caractère égocentrique de Mussolini[24].

Dans son livre, Technique du coup d'État qu'il publie en 1931 en France chez Grasset, il dénonce également la montée au pouvoir d'Adolf Hitler[25], et considère comme inéluctable l'élimination des SA comme force politique autonome et en anticipe les modalités[26]. Cet ouvrage et le caractère soi-disant individualiste de ses écrits lui valent son renvoi de La Stampa. Son livre est interdit de publication en Italie et en Allemagne (où il est utilisé par la campagne électorale socialiste contre Hitler). Il est exclu du PNF en pour « activités antifascistes à l'étranger », vraisemblablement en raison de ses critiques contre Italo Balbo[24]. De plus, condamné par le régime, Malaparte est confiné aux îles Lipari, en résidence surveillée pour une durée annoncée de cinq ans[27]. En fait, selon Maurizio Serra, il n'y restera que quelques mois. « Le 12 juin 1935, soit un an et huit mois après son arrestation et un peu moins de trois ans avant la fin de la sanction qui lui avait été infligée, il est remis en liberté conditionnelle, « par un acte de clémence de S. E. le Gouverneur »[28]. » En 1941, avec Le soleil est aveugle, il poursuit cette condamnation du régime en condamnant l'agression italienne contre la France.

 
Malaparte à Capri.

À Capri, contre l'avis général, l'écrivain fait construire en 1937 une villa loin de toute voie de communication terrestre, sur l'extraordinaire site de Capo Massullo et de ses falaises[29] : c'est l'étrange et fameuse villa Malaparte. Il résume ainsi son projet à l’architecte chargé de la concevoir, Adalberto Libera : « Faites-moi une maison comme moi[30] ! », dira-t-il. Selon son ami Raymond Guérin[31], cette maison, « ce n'est pas la demeure d'un voluptueux, d'un dilettante, d'un sardanapale. C'est celle d'un errant, d'un aventurier habitué à vivre sous la tente. C'est celle, avant tout, d'un écrivain qui se bat et ose dire ce qu'il faut dire[32]. » Cette villa, « symbole de sa modernité, aussi bien que de son désir de se mettre en scène et de son goût de la provocation[33] », servira de cadre au film Le Mépris de Jean-Luc Godard[34].

Seconde Guerre mondiale modifier

Au début de la Seconde Guerre mondiale, il est d'abord envoyé en reportage pour La Stampa, puis comme correspondant de guerre sur le Front de l'Est pour le Corriere della Sera[35] en 1941[36]. Malaparte envoie ses articles en Italie, mais la censure nazie veille et leur teneur polémique le fait arrêter et assigner à résidence par les Allemands. Il cache alors le manuscrit de Kaputt chez des amis sûrs[37], à travers toute l'Europe. À partir de cette époque l'écrivain rompt définitivement avec le fascisme et ne retourne en Italie qu'à la chute de Mussolini. Il participe aux combats pour la libération de son pays au sein de la division de partisans Potente.

Il fait publier le roman Kaputt[38] en 1943, peu après le débarquement allié de Salerne. Ce livre raconte, avec un humour glacé et féroce, drapé dans un baroque morbide, son expérience de correspondant de guerre à l'Est. Il constitue un témoignage cruel et réaliste de cette période où l'Europe est détruite[39],[40]. Terreur et émerveillement s'y mêlent au sein d'une réalité magique : « Le lac était comme une immense plaque de marbre blanc sur laquelle étaient posées des centaines et des centaines de têtes de chevaux. Les têtes semblaient coupées net au couperet. Seules, elles émergeaient de la croûte de glace. Toutes les têtes étaient tournées vers le rivage. Dans les yeux dilatés on voyait encore briller la terreur comme une flamme blanche[41]. » Comme l'écrivait Henri Barbusse dans Le Feu : « C'est la vérité des choses qui est folle[42]. » Le critique contemporain Gianni Grana (it) note : « On pourrait se demander si un autre livre européen a pu conjuguer à ce point autant de reportage vécu, de métier littéraire et d'ampleur d'invention ; autant de génie évocateur, de sens poétique complexe, dans la conscience de la crise et de la défaite de l'Europe, dans le massacre de ses peuples et la chute définitive de la civilisation chrétienne et moderne, européocentrique[43]. »

Après-guerre modifier

 
Los Desastres de la Guerra, Francisco de Goya.

Avec le roman La Peau (1949)[44], Malaparte met en scène avec force la libération d'une Italie affamée face aux armées américaines qui découvrent l'Europe[45]. On retrouve l'humanisme baroque et désespéré de l'auteur, avec son humour grinçant ainsi que les grands thèmes malapartiens : la honte[46], le dégoût et la pitié. Ce livre d'une veine tout aussi brutale que le précédent déroule devant les yeux du lecteur un monde où le pourrissement côtoie l'obscène, l'atroce et le macabre[47]. Ces nouvelles ou chroniques, devenues roman, ont été écrites par un homme douloureux[48] qui a vécu l'horrible, et comme témoin ironique, cherche à restituer comme Victor Hugo, la souffrance de ces « choses vues » jusqu'à l'invraisemblable, jusqu'au cynisme le plus abject, mais avec, dans la prose, une grande ampleur et une riche matière, un goût prononcé pour l'onirisme porté par des mouvements d'images et des procédés de montage qui relèvent de l'art du cinématographe. Malaparte romancier émeut ici, car il est bien proche de la peinture[49], celle de l'« invraisemblable ». « La comparaison qui vient le plus directement à l'esprit est d'ordre plastique, avec les Peintures noires de Goya, ou Le radeau de la Méduse de Géricault[50]. »

La période fort troublée d'après-guerre[51] donne à Malaparte l'idée d'écrire pour le théâtre. En fuite à Paris (30 juin 1947[52] - [53]), sans doute dans une volonté de rompre avec l'Italie d'alors[54], il écrit le Journal d'un étranger à Paris[55], mais ses pièces de théâtre, Du côté de chez Proust (1948) et Das Kapital (1949), sont un cuisant échec. À son retour au pays natal en 1949, il exerce sa verve toute toscane de chroniqueur dans des éditoriaux hebdomadaires, le Battibecco de 1949 à 1955[56].

1950 demeure une date importante pour Malaparte comme pour Pavese. L'actrice américaine Jane Sweigard, délaissée par Malaparte, se suicide. Pavese, lui, se tue pour une autre actrice américaine, Constance Dowling. Des destins se croisent dans le vivre-écrire : « On ne se tue pas par amour pour une femme. On se tue parce qu'un amour, n'importe quel amour, nous révèle dans notre nudité, dans notre misère, dans notre état désarmé, dans notre néant[57]. »

Puis, il tourne son unique film, Le Christ interdit (Il Cristo proibito)[58] qui sort sur les écrans en 1950 avec en vedettes Raf Vallone et Alain Cuny[59]. Il est présenté au Festival de Cannes l'année suivante. Dans ces années d'après-guerre, le cinéaste Malaparte, toujours à la manière d'un journaliste, met en lumière une fois encore l'actualité brûlante et inquiète de l'Italie des années 1950, les rapports conflictuels entre le désir de justice, le lourd ressentiment et la volonté de paix.

À partir de 1945, Malaparte tente de se rapprocher du Parti communiste. Il effectue une demande d'adhésion qui est refusée par le parti.

Il meurt d'un cancer après un voyage en Chine communiste en 1957. Sur son lit d'hôpital, il réitère sa demande d'adhésion au Parti communiste qui est, cette fois, acceptée par Palmiro Togliatti[60] et lègue sa célèbre maison à la république populaire de Chine. Un mois avant sa mort, le , il avait reçu le baptême et fait sa première communion dans l'Église catholique, après avoir abjuré ce que l'Église avait condamné dans ses écrits.

En 1959 sera publié un ouvrage posthume : Il y a quelque chose de pourri (Mamma Marcia), qui se présente comme un dialogue avec sa mère mourante (« Une mère pourrie »). Ces textes polémiques révèlent la profonde déception, la désillusion d'un soldat après deux guerres mondiales. C'est un véritable déluge verbal d'un style éblouissant, où l'auteur dialogue avec les morts[61]. « Il se convertit au catholicisme et prit, en même temps, la carte du Parti communiste, le tout sur son lit de mort[62] ! » Il meurt d'un cancer du poumon à 59 ans.

 
Le Mausolée de Malaparte

Son corps repose, depuis 1961, dans un sarcophage de pierre blanche locale qui fut transporté en hélicoptère dans un mausolée prévu à cet effet, sur les hauteurs de Figline di Prato[63], entre Schignano et Vaiano, du côté de Vernio, au-dessus du val de Bisenzio[64]. Sur un mur, il est écrit, selon sa volonté : « Je voudrais avoir ma tombe là-haut, au sommet du Spazzavento » (« pointu et rageur » selon Malaparte lui-même)[65], « pour lever de temps en temps la tête et cracher dans le courant froid de la tramontane[66] ».

« Un miroir que ce ciel toscan, si proche que la moindre haleine le ternit… »

— Curzio Malaparte, Maledetti Toscani[67]

Maudit Toscan[68], — dont acte[69].

Postérité littéraire modifier

« Je préfère les vaincus, mais je ne saurais m'adapter à la condition de vaincu. » dit Malaparte[70]. Il y a des parentés d'écorchés vifs entre les vies et les œuvres de Louis-Ferdinand Céline et de Curzio Malaparte[71], car ils ont une même fascination face à l'horreur du monde[72] et à sa brutalité, bien qu'ils aient réagi de façon différente sur le plan idéologique. « À propos des Juifs : qui d'autre a écrit un témoignage aussi bouleversant sur leur persécution quotidienne dans tous les pays occupés ? Et qui plus est, en 1944, alors qu'on n'en parlait pas encore beaucoup et qu'on n'en savait même presque rien ! » ajoute Kundera dans Une rencontre, éclairant Malaparte, mieux qu'aucun écrivain français avant lui[73]. Pour le romancier Alberto Moravia qui fut pour une courte période de temps, pendant sa jeunesse, le « secrétaire » de Malaparte, « sa qualité principale était une ingénuité quasi animalesque[74] ». Pour Maurizio Serra, l'un de ses récents biographes, Malaparte est « nationaliste et cosmopolite, pacifiste et belliciste, élitiste et populiste, écrivain politique à la prose dégraissée et romancier à l'imagination baroque, arcitaliano et antitaliano, parfois un peu ciarlatano, Malaparte ne cesse de nous déconcerter par sa modernité et son perpétuel défi à toute convention admise[75]. » Son confrère biographe et prédécesseur Giordano Bruno Guerri, quant à lui, le définit comme « un anarchiste de droite, ou mieux un anarcho-fasciste, c'est-à-dire un homme fasciné par les idéaux de l'anarchie, mais qui les tient pour irréalisables. Un personnage qui se considère très supérieur à tout ce qui l'entoure, que ce soit les hommes et les événements, et qui s'en sert à dessein pour servir son art et sa vie. Cette vision du surhomme n'en a pourtant jamais fait un réactionnaire. Le fait est qu'il méprisait les idéologies, mais aimait les révolutions[76]. »

Selon l'Encyclopædia Universalis, « L'écriture de Malaparte fait éclater les genres ; Les Maudits Toscans (Maledetti Toscani, 1956) constituent un développement de cette tendance vers le roman-essai : les observations se font toujours plus incisives, le ton polémique devient insoutenable et s'applique à la fois aux idéologies en général et aux mœurs italiennes en particulier[77]. » Comme Pier Paolo Pasolini dans ses Écrits corsaires (Scritti corsari)[78], Malaparte a beaucoup écrit contre Ces Chers Italiens et leur provincialisme[79]. Pour le romancier toscan de Prato, Sandro Veronesi, Malaparte et Pasolini sont deux indéfendables. « Malaparte était indéfendable par rapport à la droite et au fascisme, tout comme Pasolini par rapport à une certaine gauche plus bigote ou bornée. C'étaient essentiellement deux esprits libres, qui avaient une orientation résolument individualiste et, dans le cas de Pasolini surtout dominée par l'art. Et dans leur diversité, ils se rejoignaient à mes yeux, et souvent leur façon de penser aussi se ressemblait et se ressemble de plus en plus avec le recul[80]. »

L'homme qui écrivit : « Un homme comme Pascal ne serait pas possible en Italie », n'est toujours pas en odeur de sainteté dans son propre pays, sauf dans sa région natale. Il avait écrit aussi : « En présence d'un catholique italien, je sens un abîme de méchanceté, d'hypocrisie, de servitude envers les superstitions, de mépris pour la liberté humaine, de bassesse, d'amour du macabre, de haine pour la vie. En présence d'un catholique français, je sens le souffle du libre esprit, de la libre raison, de la libre conscience[81]. » Malaparte a toujours aimé la France et elle semble bien lui rendre cet amour aujourd'hui. Dans son Journal posthume, il notait son amour très inactuel de « l'imagination, la grâce, la folie sans passion du XVIIIe siècle. Cette folie froide, claire (si elle peut avoir une couleur) maigre, bleue et blanche, sèche et polie comme un os de seiche, qui est l'esprit secret, l'animateur de toute la machine de la civilisation française. Désormais, la plus fragile au monde, car elle n'est qu'un souvenir, que regret, que longue habitude, elle n'est plus amour mais souvenir d'amour[82]. »

Ainsi, il demeure aujourd'hui au purgatoire des Lettres italiennes[83]. « Ce qu'il y a de singulier dans le caractère des Italiens, c'est que leur conscience morale ne se manifeste qu'en présence du sang, car ils subordonnent tout au respect de la vie[84]. » Cet « Archi-italien » (selon Giordano Bruno Guerri[85]) demeure très critiqué[86], pour ses outrances langagières, pour son « emphase » verbale, pour son « exhibitionnisme » morbide, son côté versatile est très « controversé », et surtout pour son étrange et singulière volonté d'avoir manifesté sans cesse son puissant tempérament tempétueux sous une forme, la plupart du temps, provocatrice et scandaleuse[87]. Selon David Lajolo, ami communiste et critique de Cesare Pavese, « Malaparte était un être absolument contradictoire avec d'énormes défauts et de grandes vertus. Il avait réussi à transformer en vertu même son hypocrisie, en courage la part de lâcheté qui est en chacun de nous. Je l'ai combattu et je l'ai aimé : inimitable dans la jactance, dans l'invention, dans la fantaisie, l'homme et le défenseur d'une seule cause qui s'appelait Malaparte[88]. » Antonio Gramsci eut à son égard un jugement très sévère puisqu'il le traita de « caméléon capable de toutes les scélératesses[89] ». Blaise Cendrars dédicace l'un de ses chapitres de Bourlinguer à propos de Naples, « au dégueulasse et génial Curzio Malaparte, auteur de Kaputt ».

Bruno Tessarech, dans son Pour Malaparte écrit : « Plus le captivent la naissance et l'agonie des régimes que leur histoire. Et puis les idéologies, quelles qu'elles soient, l'intéressent peu[90]. Malgré les trésors d'imagination et de rhétorique qu'il a déployés pour défendre le fascisme, il n'y croit pas. À Moscou, à Léningrad, il regarde le peuple faire la queue devant les étals de marchés aux puces. Bien sûr il découvre la misère, l'atroce pénurie, les difficultés où se débat le régime, mais surtout la patience résignée des pauvres[91]. »

 
Le poète Pétrarque, l'humaniste et ses amis.

Pourtant, Milan Kundera fait, dans son livre (essai) Une rencontre, un bel éloge, un exercice d'admiration de romancier européen, face à la puissance des États-Unis d'Amérique. Malaparte est plus proche de Pétrarque que de Garibaldi[92], donc, plus proche du poète humaniste que du combattant patriote. C'est dire aujourd'hui l'« inactualité » de cet écrivain intempestif, plus admiré en France qu'en Italie[93]. Giuseppe Ungaretti, représentant la poésie, fut présent lors de son enterrement. (Voir les images d'archives de La Stampa). Il apparaît nécessaire de lever la véritable « malédiction » qui pèse sur la représentation de l'homme Malaparte[94], dont le nom est si souvent encore associé au fascismo[95]. Eugenio Montale a dit de Malaparte qu'il fut « un exquis causeur et un grand esprit à l'écoute plein de tact et d'éducation[96] ». Cet homme moderne par son élégance verbale et la grâce de sa plume, « dandy » tant décrié[97], est devenu au fil du temps un écrivain classique[98]. La relecture de Kaputt et de La Peau témoigne de cette maîtrise du style, de son art littéraire ainsi que de son architecture narrative.

Il fut un reporter exceptionnel, un chroniqueur. Céline et Malaparte furent des chroniqueurs, chacun à leur façon. Selon Frédéric Vitoux, dans sa thèse Louis-Ferdinand Céline, Misère et parole: « Céline, après la guerre, exprime à maintes reprises son ambition d'être un chroniqueur, il parle avec admiration de Tallemant des Réaux, il dédie l'un de ses livres à Pline l'Ancien. Or le chroniqueur — image type de l'écrivain "classique" — est par définition celui qui s'efface devant l'histoire. Il est là, présent, neutre, prêt à rapporter ce dont il a été témoin. Il ne veut pas être un écrivain qui déforme tout au gré de sa sensibilité et au moyen de tel ou tel effet de langage, non, il se contente de reproduire le plus fidèlement possible l'histoire. C'est cela, le chroniqueur ne se justifie que sur le plan de l'histoire, le discours chez lui est insignifiant »[99]. Selon Olivier Weber, écrivain bourlingueur et essayiste, l'engagement du correspondant de guerre fut « le plus dense au sens existentiel et au sens philosophique. » Un engagement éprouvé « dans le fracas des bombes, la mélancolie des paysages dévastés et l'infinie solitude du chroniqueur de la détresse[100] ».

Pour Maurizio Serra, la poétique de Malaparte se résume ainsi : « partir du réel pour le transfigurer, le dévirginiser, le violenter, mais sans jamais le renier, ce qui constitue une des rares déclarations d'une poétique malapartienne. » (Maurizio Serra, Malaparte, vies et légendes, Grasset, 2011, p. 289) halluciné[101] doublé d'un écrivain inclassable, dans la tourmente de la première moitié de l'Europe du XXe siècle en pleine décompositon[102].

Comme l'écrit l'intellectuelle et femme politique italienne Maria-Antonietta Macciocchi, amie de Pier Paolo Pasolini[103], à propos de Malaparte (cet « écrivain des idées » selon Eugenio Montale) : « L'Européen émerge au-dessus d'un horizon gris qui voulait le condamner au silence. Vers l'an 3000[104]... » L'écrivain européen, Curzio Malaparte, homme de la révolte de Caporetto et de la « civilisation de l'homme humain », souligne dans son ouvrage Maledetti Toscani : « Apprenez des Toscans à cracher dans la bouche des puissants, des rois, des empereurs, des évêques, des inquisiteurs, des juges, des seigneuries, des courtisans de toute espèce, comme on a toujours fait en Toscane et comme on fait encore. Apprenez des Toscans "qu'on n'a jamais vu un homme dans la bouche d'un autre", "qu'un homme en vaut un autre, et même moins". Apprenez des Toscans qu'il n'y a rien de sacré en ce monde, à l'exception de l'homme[105]... » — Maudit Toscan certes, car « les Toscans ont le ciel dans les yeux et l'enfer dans la bouche » selon le célèbre proverbe (I toscani hanno il cielo negli occhi e l'inferno in bocca), mais en tout cas, Européen exemplaire[106].

Œuvres littéraires modifier

Ses principaux écrits[107] sont :

  • Viva Caporetto!, Prato, publié à compte d'auteur, 1921 ; republié sous le titre La Révolte des saints maudits (La rivolta dei santi maledetti, 1921), Les Belles Lettres, 2012, trad. S. Laporte
  • Les Noces des eunuques (Le nozze degli eunuchi), 1922, inédit en français
  • L'Italie contre l'Europe (L'Europa vivente, 1923), Paris, Félix Alcan, 1927, trad. M. Y. Lenois, essai
  • Italie barbare (Italia barbara, 1925), trad. Carole Cavallera, éd. la Table Ronde, 2014
  • L'Arcitaliano, Florence et Rome, La Voce, 1928 ; réédité par Enrico Falqui sous le titre L'Arcitaliano e tutte le poesie, Florence, Vallecchi, 1963
  • Sodome et Gomorrhe (Sodoma e Gomorra, 1931), Monaco, Éditions du Rocher, 1959, trad. René Novella, nouvelles
  • La Technique du coup d’État, Paris, Grasset, 1931, essai ; parution en Italie sous le titre Tecnica del colpo di Stato, Milan, Bompiani, 1948
  • Le Bonhomme Lénine, Paris, Grasset, 1932, récit ; parution en Italie sous le titre Lenin Buonanima, 1962 puis Il buonuomo Lenin, 2018
  • La Tête en fuite (Fughe in prigione, 1936), Paris, Denoël, 1961, trad. George Piroué, nouvelles
  • Sang (Sangue, 1937), Monaco, Éditions du Rocher, 1959, trad. René Novella, nouvelles
  • Une femme comme moi (Donna come me, 1940), Monaco, Éditions du Rocher, 1947, trad. René Novella, nouvelles
  • Le Soleil est aveugle (Il sole è cieco, 1941), Paris, Denoël, 1958, trad. George Piroué, récit
  • La Volga naît en Europe (Il Volga nasce in Europa, 1943), Paris, Domat, 1948, trad. Juliette Bertrand
  • Kaputt (1944), Paris, Denoël, 1946, trad. Juliette Bertrand, roman
  • Monsieur Caméléon (Don Camaleo, 1946), Paris, La Table Ronde, trad. Line Allary, récit
  • Le Compagnon de voyage (rédigé en 1946, repris en 1955), publication posthume en 2007 ; trad. Carole Cavallera, Paris, Quai Voltaire (2009) (ISBN 9782710330905)
  • L'Œuf rouge (1948), Éditions du Rocher, essai ; traduit une nouvelle fois en 1995, sous le titre original Le Sourire de Lénine, Éditions Remi Perrin.
  • La Peau (La pelle, 1949, adapté au cinéma en 1981 par Liliana Cavani), Paris, Denoël, 1949, trad. René Novella, roman
  • Das Kapital (1948), précédé de Du côté de chez Proust (1949), Paris, Denoël, théâtre
  • Deux Chapeaux de paille d'Italie, Paris, Denoël, 1948, essai
  • Les Deux Visages de l'Italie : Coppi et Bartali, 1947 ; réédition Bernard Pascuito éditeur, Paris, 2007, illustrations de René Pellos, postface de Jean-Bernard Pouy (ISBN 978-2-35085-026-9)
  • Les femmes aussi ont perdu la guerre (Anche le donne hanno perso la guerra, 1954), Paris-Genève, La Palatine, 1955, théâtre[54]
  • Ces sacrés Toscans (Maledetti toscani, 1956), Paris, Denoël, 1957, trad. René Novella ; réédité en Livre de poche no 2843, essai polémique
  • En Russie et en Chine (Io, in Russia e in Cina, 1958, posthume), Paris, Denoël, 1959, trad. Michel Arnaud, journal et souvenirs
  • Il y a quelque chose de pourri (Mamma marcia, 1959, posthume), Paris, Denoël, 1960, trad. Elsa Bonan, souvenirs
  • L'Anglais au Paradis (L'inglese in paradiso, 1960, posthume), Paris, Denoël, trad. George Piroué, chroniques
  • Ces chers Italiens (Benedetti italiani, 1961, posthume), Paris, Stock, 1962, trad. Mathilde Pomès, essai
  • Voyages entre les tremblements de terre (Viaggio tra i terremoti, 1963)
  • Journal d'un étranger à Paris (1967, posthume), Paris, Denoël, rééd. Paris, La Table Ronde, trad. Gabrielle Cabrini, 2014
  • Prises de bec (Battibecco (1953-1957), 1967, posthume), Paris, Les Belles Lettres, 2017, trad. Stéphanie Laporte, chroniques hebdomadaires
  • L'albero vivo e altre prose, Florence, Valecchi, 1969, nouvelles inédites en français
  • Bal au Kremlin (Il ballo al Cremlino e altri inediti di romanzo, 1971, posthume), Paris, Denoël, 1985, trad. Nino Frank
  • Voyage en Ethiopie (Viaggio in Etiopia e altri scritti africani, 2006, posthume), Paris, éd. Arlea, Arlea Poches - no 194, 2013 (ISBN 9782363080271)
  • Muss suivi de Le Grand Imbécile, trad. Carole Cavallera, éd. la Table Ronde, 2012, posthume
  • Journal secret 1941-1944, trad. Stéphanie Laporte, Paris, Quai Voltaire, 2019

En Italie, une sélection de ses œuvres a fait l'objet d'une réédition dans la collection Meridiani, l'équivalent italien de la bibliothèque de la Pléiade : Opere scelte, préface de Luigi Martellini, Milan, Mondadori, 1997.

Filmographie modifier

  Sauf indication contraire ou complémentaire, les informations mentionnées dans cette section peuvent être confirmées par la base de données IMDb. Curzio Malaparte a écrit, réalisé et composé la musique d'un unique film :

Par ailleurs, après sa mort, son œuvre littéraire a donné lieu à deux adaptations :

Notes et références modifier

  1. a et b (it) Acte de naissance no 670 de Curt Erich Suckert du registre 335 partie 2 des naissances de la commune de Prato, en ligne sur le site des archives d'état civil de l'Italie.
  2. « Il en revendique notamment l'esprit d'anarchie et les contradictions qui caractérisent, en effet, son parcours politique de membre du parti fasciste interné par le régime mussolinien pour ses sympathies socialistes, avant d'être séduit à la fin de sa vie par le communisme chinois. » Jean-Michel Gardair, Dictionnaire universel des littératures, tome 2, Éditions PUF, p. 2194.
  3. « J'ai honte d'avoir été enfant. » Curzio Malaparte, Sang, 1937.
  4. Établissement fameux, véritable institution aujourd'hui, qui vit passer entre autres Gabriele D'Annunzio, Mario Monicelli et Tommaso Landolfi.
  5. a et b Muriel Gallot, Jean-Luc Nardone et Margherita Orsino, Anthologie de la littérature italienne, tome 3 XIXe et XXe siècles, Presses universitaires du Mirail, 2005 (ISBN 978-2858168125), p. 259.
  6. Curzio Malaparte, Le soleil est aveugle, traduction de Georges Piroué, Paris, Denoël, 1958 ; édition révisée et augmentée par Muriel Gallot, Paris, Gallimard Folio bilingue, 2000, p. 177.
  7. a et b François Livi et Christian Bec, De Marco Polo à Savinio : écrivains italiens en langue française, Presses Paris Sorbonne, 2003 (ISBN 978-2840502753), p. 147.
  8. Malaparte, auteur de poèmes écrit : « Les morts de Bligny jouent aux cartes / Dans l'ombre verte des bois, / Ils parlent en riant de la guerre, / Des jours de permission, / De la maison lointaine, des amis, / Qui sont restés vivre dans le soleil chaud. / Le canon tonne, tonne le canon encore / Du côté de Reims, de Château-Thierry, de Soissons, / Ou peut-être est-ce un orage qui s'éloigne / Vers le Chemin des Dames, vers Épernay, / Vers Laon où les nuages lourds / D'herbe et de feuilles effleurent en passant / Les vignes sur les blancs coteaux de Champagne. » Vers traduits par Maurizio Serra, dans Malaparte, (biographie), Appendice I, Malaparte, Les morts de Bligny jouent aux cartes, p. 563.
  9. Gianni Grana, « Malaparte, écrivain d'Europe », sur Chroniques italiennes — Paris 3, (consulté le ), p. 11-12.
  10. Willy Gianinazzi, Naissance du mythe moderne : Georges Sorel et la crise de la pensée savante (1889-1914), Maison des Sciences de l'Homme, 2006 (ISBN 978-2735111053), p. 104.
  11. Stéphanie Denis, « Le mal n'est pas un sujet neuf », sur LeFigaro.fr, (consulté le ).
  12. « Malaparte Curzio », sur lisons.info (consulté le ).
  13. Manzano 2011, p. 225-226.
  14. Lettre à Leo Longanesi du dans Malaparte,I, p. 776. Cité par Maurizio Serra, Malaparte, éd. Grasset, février 2011, (ISBN 9782246752813) p. 116.
  15. Curzio Malaparte, Maledetti toscani in Opere scelte, Milano, Mondadori, « I Meridiani », 1998, p. 1478 : « L'erba del ridicolo la coltivano in tutti gli orti […] ed è cosa meravigliosa […] mangiar di quell'erba in insalata, in compagnia con loro. » C'est aussi Malaparte qui appelle la Toscane « il mio paese » cf., par exemple, le premier chapitre de Mamma marcia, Firenze,Vallecchi, 1959.
  16. Marie-Anne Rubat du Mérac, Maledetti Toscani de Curzio Malaparte ou d’un voyage au « pays » de ceux qui « cultivent l'herbe du ridicule » et la « mangent en salade » [1] Consulté le 28 septembre 2011.
  17. Son attachement à la Toscane est le sujet même d'un des livres les plus célèbres et des plus savoureux que Malaparte ait écrit tardivement en 1955 : son Maledetti Toscani. « Ces qualités qui font des Toscans les meilleurs fils de l'Italie, Malaparte va les définir, traçant par contraste et comme en creux le portait des autres Italiens... Maniant avec verve l'érudition et l'ironie, nous menant de Pérouse chez ces fous de Florentins en passant par Prato, sa ville natale, écorchant les pisans, moquant les siennois, vantant les belles Livournaises, nous initiant au vol des poulets à Campi, Curzio Malaparte nous donne une chronique étourdissante de gaieté. » Introduction à Ces sacrés Toscans, Éditions Le livre de poche, n° 2843, Paris, 1970.
  18. Il est le créateur d'une célèbre expression toscane : il cerbaccone (« le cerveau »). Il fut très apprécié de Malaparte et des Toscans pour ses inventions langagières, fortes et crues, alla toscana.
  19. On retrouve par exemple l'astringent esprit toscan dans une critique jalouse et quelque peu abrupte de l'écrivain Alberto Moravia dans ce genre de propos. En effet, Malaparte dans une note, avait surnommé son compatriote romancier, toujours maladif alors que, lui, sans cesse faisait preuve de courage : « L'Amaro Gambarotta » (l'amer jambe-cassée), jeu de mots à propos faisant référence à une marque d'amer alors en vogue. [extrait de la correspondance de Malaparte, cité par Maurizio Serra, Malaparte, vies et légendes, p. 294.
  20. Les noms de Boccace et Sacchetti sont récurrents dans Ces sacrés Toscans. Pour Sacchetti, voir Tables florentines, Écrire et manger avec Franco Sacchetti, traduit sous la direction de Jacqueline Brunet et Odile Redon, Éditions Stock/Moyen Âge, Paris, 1984 (ISBN 9782234017344).
  21. Maurizio Serra, Malaparte, éd. Grasset, février 2011, (ISBN 9782246752813) p. 358.
  22. « J'ai fait de solides études classiques. Machiavel, l'Arioste, Michel-Ange, les conteurs du XIVe et du XVIe ont eu, sur moi, une réelle influence. Également, tous les écrivains qui battirent en brèche tous les illuminismes : Montaigne, Voltaire, Montesquieu, Stendhal. Mais le livre qui m'a, peut-être, le plus marqué est, je crois bien, l'Âne d'or d'ApuléeRaymond Guérin, Du côté de chez Malaparte, éd. Finitude, Bordeaux, 2009, (ISBN 978-2-912667-65-6), pp. 27-28.
  23. « Et j'imagine qu'il y en a encore qui hausseront les épaules : « Comediante! » quand je raconterai que chaque fois que Malaparte fait un pas en dehors de chez lui, qu'il soit seul ou non, il va se recueillir devant la tombe de son chien Febo, creusée dans le rocher. Là, il s'incline un instant et pose ses lèvres sur la pierre. Bien sûr, aux yeux de la plupart, ce geste peut paraître théâtral, forcé, impudique même. Moi, j'y vois, au contraire, le signe d'une fidèle tendresse envers l'animal, qui fut son unique compagnon pendant ses années de misère. » Raymond Guérin, Du côté de chez Malaparte, Éd. Finitude, p. 69.
  24. a et b Laurent Schang, « La maison rouge de Malaparte », Éléments,‎ , p. 66-68
  25. Une femme : Hitler (titre du chapitre VIII)
  26. « La dictature est la forme la plus complète de la jalousie. » Curzio Malaparte, Technique du coup d'État, 1931.
  27. Dictionnaire Le Petit Robert 2, rédaction Alain Rey, Paris, 1996, (ISBN 285036472X), p. 1290.
  28. Malaparte, vies et légendes, p. 240.
  29. « Et là, tout en bas, allongée sur l'abrupt rocher de la pointe de Massullo, solide comme une casemate, insolite comme une architecture de Chririco, avec son escalier-terrasse de trente-deux marches en forme de trapèze, montant vers le ciel, impressionnant comme un temple aztèque, et ce blanc solarium à figure d'épure dont l'audace mérita les éloges de Le Corbusier, avec des à-pics de soixante mètres au-dessus de la mer, jaillissant, libre et nue, des touffes d'euphorbes et de campanules, enfin nous apparut, solitaire et de bon augure, la casa « Come Me » : la maison « Comme Moi » ! » Raymond Guérin, Du côté de chez Malaparte, éd. Finitude, Bordeaux, 2009, (ISBN 978-2-912667-65-6), p. 14.
  30. Raymond Guérin, Du côté de chez Malaparte, Finitude, 2009 (ISBN 978-2-912667-65-6), « Casa "Come Me" », sur Finitude (consulté le ), p. 13.
  31. Dans sa biographie de Raymond Guérin, Jean-Paul Kauffmann (Raymond Guérin, 31, allées Damour, La Table ronde, 2004), ce dernier tente un rapprochement entre les deux hommes : « Guérin et Malaparte n'aiment pas leur époque. On pourrait penser qu'ils sont trop narcissiques pour se regarder à travers elle. Mais ce sont plutôt deux électrons libres. Aucun parti, aucune coterie ne les reconnaît. Ils paient cher leur non-alignement et leur autonomie. »
  32. Raymond Guérin, Du côté de chez Malaparte, éd. Finitude, Bordeaux, 2009, (ISBN 978-2-912667-65-6), p. 15.
  33. Fabio Gambaro, « L'énigme Malaparte », dans Le Monde, 25 mars 1998.
  34. « Le Mépris » (présentation de l'œuvre), sur l'Internet Movie Database.
  35. Bertrand Poirot-Delpech, « Il y a trente ans mourait Malaparte l'européen exemplaire », dans Le Monde, 24 juillet 1987.
  36. « Et cette horreur procède d'une expérience qui n'appartient pas qu'à moi, mais à toute ma génération. C'est pourquoi d'ailleurs elle a quelque valeur. Les récits groupés dans ce recueil sont le fruit de cette expérience. Ils sont l'histoire de mes premières intuitions, découvertes et révélations des lois mystérieuses du sang, ainsi que du lent et douloureux tourment... » Extrait de Sang, cité par Le Nouveau Dictionnaire des Œuvres, tome V, Laffont-Bompiani, Paris, 1994 (ISBN 9782221077139), p. 6551.
  37. « Kaputt est un livre horriblement cruel et gai. Sa gaieté cruelle est la plus extraordinaire expérience que j'aie tirée du spectacle de l'Europe au cours de ces années de guerre. » Préface de Curzio Malaparte à Kaputt, traduction de l'italien par Juliette Bertrand, Éditions Folio Gallimard, n° 237, p. 9.
  38. Le critique Gianni Grana analyse ainsi ce roman de Malaparte, écrivain d'intervention selon son expression : « Le roman livre un témoignage complexe et hautement composé, entre réalisme visionnaire et évocation imaginaire : une méditation historique empreinte de moralisme chrétien, utilisant une quantité de faits et d'émotions enregistrées sur les différents théâtres de désastres européens pendant la période où Malaparte était dans la presse comme correspondant de guerre. Mais la présence, dans l'Europe victime de la guerre, de la terrible peur allemande n'empêche pas l'écrivain d'opérer, par sa réflexion et son invention, ce détachement nécessaire à la méditation littéraire et linguistique la plus exigeante. Il utilise ainsi une technique très subtile de composition des épisodes, emboîtés les uns dans les autres selon une texture raffinée et paradoxale où vient s'insérer une page de réflexion, avec ses pointes moralistes, et l'évocation illusionniste, qui donne forme à la description mémoriale de la scénographie de l'horreur. L'ensemble est lié par des accords thématiques plus larges, des assonances musicales parfois précieuses, et des tableaux symboliques d'une grande énergie figurative. Spectacle baroque, ou même néo-baroque contemporain, fait d'érudition littéraire et picturale, dont tous les éléments reçoivent une fonction dans la composition de l'ensemble : tous les détails concourent à la construction emblématique de tableaux surréels, montrant une réalité absurde et apocalyptique, dans une tonalité expressionniste. » Extrait de la communication donnée à Paris, à l'Institut Italien de Culture, le 30 septembre 1993. Voir aussi : Malaparte, Scrittore d'Europa, Prato & Milan, Marzorati, 1991.
  39. « Aucun mot mieux que cette dure et quasi mystérieuse expression allemande : Kaputt, qui signifie littéralement : brisé, fini, réduit en miettes, perdu, ne saurait mieux indiquer ce que nous sommes, ce qu'est l'Europe, dorénavant : un amoncellement de débris. Qu'il soit bien entendu que je préfère cette Europe kaputt à l'Europe d'hier et à celle d'il y a vingt ans, trente ans. J'aime mieux que tout soit à refaire, que d'être obligé de tout accepter comme un héritage immuable. » Curzio Malaparte, préface à Kaputt, Éditions Folio Gallimard, p. 9.
  40. Comme l'écrit le critique littéraire Poirot-Delpech : « Mieux vaut ces décombres, aux yeux de Malaparte, que les marbres de mort du fascisme. Il existe un bon usage de la conscience de fragilité. » Bertrand Poirot-Delpech, « Il y a trente ans mourait Malaparte l'européen exemplaire », dans Le Monde, 24 juillet 1987.
  41. 4e de couverture du n° 237 de l'édition de Kaputt, Folio Gallimard, Éditions Denoël 1946.
  42. Henri Barbusse, Le Feu (Journal d'une escouade), Paris, Flammarion, 1917, p. 285.
  43. Gianni Grana, « Malaparte, écrivain d'Europe », communication que l'auteur a donnée à Paris, à l'Institut culturel italien de Paris, le 30 septembre 1993.
  44. « La Peau : Un archi-roman », titre donné par Milan Kundera au chapitre qu'il consacre à Malaparte dans son livre Une rencontre, Gallimard, coll. « blanche », Paris, 2009 (ISBN 9782070122844), p. 179.
  45. Se sentir européen était une nouvelle manière de voir le monde. Milan Kundera écrit : « Dans La Peau, cette nouvelle façon d'être surgit de la galerie de portraits, courts, succincts, souvent drôles, des Américains alors présents en Italie. » Citation tirée de Une rencontre, Gallimard, coll. « blanche », Paris, 2009 (ISBN 9782070122844), p. 200.
  46. « C'est une honte de gagner la guerre ! » Exclamation qui clôt son roman La Peau.
  47. « On ne se bat plus pour l'honneur, pour la liberté, pour la justice, on se bat pour sa peau, pour sa sale peau. » Phrase de Malaparte extraite de La Peau, citée dans le Dictionnaire des Œuvres, Laffont-Bompiani, tome V, Éditions Robert Laffont, Paris, 1994 (ISBN 9782221077139), p. 5417.
  48. Bertrand Poirot-Delpech, « Il y a trente ans mourait Malaparte l'européen exemplaire », dans Le Monde, 24 juillet 1987 : « Malaparte n'est pas cynique. Il veut sa foi épurée de toute chanson. C'est un homme exténué qui écrit les dernières pages de La Peau ; exténué d'avoir trop vu de cadavres. Il n'a pas tué, personnellement (en quoi il peut estimer qu'il est resté chrétien) ; mais il a vu faire. »
  49. Bertrand Poirot-Delpech, « Il y a trente ans mourait Malaparte l'européen exemplaire », dans Le Monde,  : « Il y avait du Bosch dans les fresques de Kaputt ; il y a dans La Peau, un Goya de la misère napolitaine, enfin débarrassée du stéréotype des draps aux fenêtres, des chants joyeux, des espiègleries, des arlequinades. »
  50. Remarque de Maurizio Serra dans sa biographie Malaparte, p. 326.
  51. Dans sa biographie très détaillée, Malaparte, Giordano Bruno Guerri écrit p. 207 : « Revenons pourtant aux raisons qui, en 1947, le poussèrent à émigrer en France. Au-delà de la peur, il y eut un malaise culturel, et même plus qu'un malaise. Celui d'un intellectuel, polémiste par nature et par choix, qui se voyait alors exclu du débat et du renouveau dont il avait espéré devenir le protagoniste. »
  52. « 30 juin 1947. Je rentre enfin à Paris après quatorze ans d'exil en Italie. » C'est ce que note Malaparte avec son goût de la provocation (p. 13 du Journal d'un étranger à Paris, Éditions Denoël, 1967).
  53. Alain Sarrabayrouse, « Malaparte et l'attrait contrasté de la France », p. 2, dans Fosca Mariani Zini (dir.), Chroniques italiennes, no 44, 1995 [lire en ligne (page consultée le 19 mai 2009)].
  54. a et b Myriam Tanant, « L'Italie interdite : Malaparte et le théâtre », p. 2, dans Fosca Mariani Zini (dir.), Chroniques italiennes, no 44, 1995 [lire en ligne (page consultée le 19 mai 2009)].
  55. « J'ai l'impression d'être un Français perdu dans une foule d'étrangers. » Phrase ironique tirée de la 4e de couverture de l'édition Denoël de 1967.
  56. Jean-Michel Gardair, Les écrivains italiens, Larousse, 1974 (ISBN 2030010456), p. 191.
  57. Cesare Pavese, Œuvres, Quarto Gallimard, extrait du Métier de vivre,(note du 25 mars 1950) (ISBN 978-2-07-012187-8) p. 1795.
  58. Maurizio Serra écrit : « Nous y retrouvons le goût de Malaparte pour les grands tragiques grecs. De là vient, sans doute, le côté statique de la prise de vues, avec ses plans ralentis de visages, de mains et de torses qui doivent communiquer le sens de la fatalité qui pèse sur les hommes : une approche qu'on retrouvera souvent dans le cinéma de Pasolini, d'Accattone à Medea. D'ailleurs les affinités entre ces deux bousculeurs des conventions établies, ennemis du politiquement correct, ne se limitent pas à une simple donnée technique.» (Cf. Malaparte, vies et légendes, Grasset, p. 476.)
  59. « Le Christ interdit » (présentation de l'œuvre), sur l'Internet Movie Database.
  60. Muriel Gallot, Jean-Luc Nardone et Margherita Orsino, op. cit., p. 260.
  61. « C'est d'eux aussi que je tiens cette particulière façon que j'ai de regarder un paysage, un arbre, une maison, une bête, une pierre. » Traduction française : Éditions Denoël, 1960, cité par Le Nouveau Dictionnaire des Œuvres, tome III, collection Bouquins, Éditions Robert Laffont, Paris, 1994 (ISBN 9782221077115), p. 3557.
  62. Fabio Gambaro, « L'énigme Malaparte », journal Le Monde, édition du . Il est à signaler cependant que d’autres auteurs se sont montrés plus sceptiques quant à la réalité de cette conversion. Maria Antonietta Macciocchi p. ex., après avoir rappelé que Malaparte avait toujours été un athée convaincu et qu’en outre il était de confession luthérienne à l’origine (par son père saxon), évoque le témoignage d’un ami de l’écrivain (sans le citer nommément), témoignage ainsi libellé : « Les jésuites s’étaient emparés de la clinique Sanatrix. Le Père Virgilio Rotondi était même arrivé à louer une chambre dans la clinique, [...] au même étage que Curzio. De cette chambre, il contrôlait complètement la situation. Cette présence envahissante, quotidienne, possessive du Père Rotondi était pour les communistes, les amis authentiques de Malaparte, une énorme source d’ennuis. En ce qui me concerne, Malaparte me disait quand j’allais lui rendre visite ou quand il m’appelait à la maison : “Je vous en prie, envoyez-moi des camarades du service d’ordre de la section locale pour me protéger, je suis encerclé par ces prêtres. J’ai eu peur cette nuit, ils se sont introduits dans ma chambre pour me dire que je suis en train de mourir. Ils me terrorisent. Vous ne devez pas me laisser seul”. Il avait demandé avec insistance la carte du parti, la carte d’adhésion. Selon le récit que le Père Rotondi fit à la radio le lendemain de la mort de Malaparte, celui-ci aurait déchiré la carte pendant son agonie. Mais je ne le crois pas, car c’était encore, à cette époque-là, la guerre froide entre les communistes et l’Église [...] ». Cf. Maria Antonietta Macciocchi, Éléments pour une analyse du fascisme (ouvrage collectif sous la direction de M. A. Macciocchi), vol. II, Paris, Union générale d’éditions, coll. « 10/18 », , 442 p. (ISBN 2-264-00013-9), « Lettres de Malaparte à Maria Antonietta Macciocchi », p. 226-227.
  63. « Il y a quelques années encore, les années 1960, quand quelqu'un revenait du Spazzavento, il semblait comme revenir de l'enfer ! Les anciens Toscans l'interrogeaient : « Vous étiez là-haut, avec les serpents ? Da Malaparte ! »… » Raymond Guérin, Du côté de chez Malaparte (La boîte à clous, 1950), suivi de Fragment testamentaire, Éditeur Finitude, réédition 2003 (ISBN 2-912667-13-5), p. 64.
  64. « […] le fleuve au bord duquel je suis né, « l'heureux Bisenzio » de Marsile Ficin », autre Toscan (de Figline Valdarno). Curzio Malaparte, Ces chers Italiens, Éditions Stock, p. 154.
  65. Colline venteuse dominant la ville de Prato, balayée par le vent, d'où son nom. Malaparte parlait du « genou nu du Spazzavento » (Maudits Toscans, Édition Le livre de poche, p. 67).
  66. Curzio Malaparte, Ces sacrés Toscans, Éditions Le livre de poche, édité en 1970, n° 2843, p. 77.
  67. p. 115 de la version française du Livre de poche, traduction Georges Piroué.
  68. Malaparte s'était constitué une fratrie spirituelle en Toscane. Dans son livre Ces sacrés Toscans, cela apparaît, mais de manière implicite, plutôt suggérée qu'avouée. Parlant du vent en Toscane, il écrit, p. 126 : « […] un vent que nous nous sommes façonné de nos propres mains, à notre mesure, un vent de maison comme le pain des paysans, et on le retrouve dans la chevelure des arbres de Giotto, sur les fronts et dans les yeux des jeunes gens de Masaccio, dans les paysages de Piero della Francesca, de Leonardo da Vinci, de Filippino Lippi, dans les vers de Cavalcanti et de Guido Guinizzelli, dans la prose de Dino Compagni et de Machiavel, jusque dans les soupirs de Pétrarque, pourtant brisés par le mistral provençal. C'est le vent de Pulci, de Berni, de Cellini, et on le retrouve chez Dante, Boccace, Franco Sacchetti, Lachera, Bernocchino (célèbres personnages de Prato) ; sur tout ce qu'il touche, il laisse son signe et vous déchire les habits sur le dos sans que vous vous en aperceviez. »
  69. « […] s'il faut conclure, je dirais qu'un portrait véridique et complet de Malaparte est impossible : on peut bien raconter quantité d'épisodes, plus ou moins bienveillants, certains même très méchants. Et après ? Le vrai tient dans son Caméléon et ce caméléon, c'est lui-même… Comment voulez-vous faire le portrait d'un caméléon ? » Orfeo Tamburini, Malaparte à contre-jour, préface de Nino Frank, Denoël, Paris, 1979, p. 82.
  70. « 20 domande a Curzio Malaparte », Il Tempo, Milan, 19 mai 1946.
  71. Maria-Antonietta Macciocchi voit un anti-Céline chez Malaparte. « Malaparte e' l'anti-Celine. », dans Corriere della Sera, 21 mars 1998, p. 31. Elle ne fait que reprendre l'idée de Poirot-Delpech : « Il est l'anti-Céline, dans la mesure où il conserve une sainte horreur de la mouise qu'il a observée et subie. La nécessité, où plonge la guerre, de sauver sa peau ou de la vendre, il n'y voit pas une fatalité jouissive, ni le fin mot de l'homme, moins encore, comme tant de peintres du désastre, un sujet juteux. Toujours, il finit par préférer les lueurs d'aube à celles du crépuscule ; et sa prose en est illuminée. » Bertrand Poirot-Delpech, « Il y a trente ans mourait Malaparte l'européen exemplaire », dans Le Monde, 24 juillet 1987.
  72. « Au réveil, dans mon lit, le matin, je ne me souvenais plus de rien, mais il me semble bien que la nuit, j'errais avec les morts, pâles larves nocturnes. [...] Assurément, c'était avec eux que j'errais et c'est d'eux que je dois tenir ces choses merveilleuses dont mes livres regorgent. Des choses que seuls les morts peuvent connaître. » (extrait de Il y a quelque chose de pourri cité dans Le Nouveau Dictionnaire des Œuvres, Laffont-Bompiani, tome III) (ISBN 9782221077115), p. 3557.
  73. Milan Kundera, Une rencontre, Gallimard, coll. blanche, Paris, 2009 (ISBN 2070122840), p. 188.
  74. Cité par Maria-Antonietta Macciocchi, « Malaparte, L'Europe découvre l'archi-italien », dans Corriere della Sera, 21 mars 1998, p. 31.
  75. Maurizio Serra, Malaparte, vies et légendes, éd. Grasset, février 2011 (ISBN 9782246752813) p. 28.
  76. op. cit, p. 591, dans les Annexes de l'ouvrage.
  77. Encyclopædia universalis, vol. 20, Paris, 1980 (ISBN 2852292815), p. 1291.
  78. « D'ailleurs les affinités entre ces deux bousculeurs des conventions établies, ennemis du politiquement correct, ne se limitent pas à une simple donnée technique. » (Remarque de Maurizio Serra dans son Malaparte, éd. Grasset, février 2011, p. 476.
  79. Titre d'un livre de Malaparte, Benedetti Italiani, Éditions Stock, Paris, 1962.
  80. Interview de Sandro Varesi par Maurizio Serra, dans Malaparte Grasset, février 2011, Annexes, p. 620.
  81. Curzio Malaparte, Diario di uno straniero a Parigi, Florence, Valecchi, 1961, pp. 24.
  82. Cité par Maurizio Serra, dans Malaparte, vies et légendes, p. 452.
  83. « Malaparte reste curieusement sous-estimé en Italie, dont il est vrai qu'il a à la fois illustré et stigmatisé les défauts », Dictionnaire Le Robert 2, 1996, p. 1290.
  84. Curzio Malaparte, dans sa Préface à Sang, 1937.
  85. Giordano Bruno Guerri, L'arcitaliano. Vita di Curzio Malaparte, Milan, Bompiani, 1980 (traduction française : Denoël, Paris, 1983).
  86. Pour le critique du Monde, Bertrand Poirot-Delpech (op. cit.) « Il aura été - il s'en flattait - l'écrivain le plus haï par les fascistes et le plus interdit dans les pays sans liberté, les communistes compris, car, contrairement à tant d'autres écrivains d'alors, Malaparte n'a pas payé son engagement antitotalitaire de la moindre illusion sur les paradis de l'Est... »
  87. Malaparte n'est même pas cité dans Antologia della letteratura italiana de Mario Pazzaglia, édité par Nicola Zanichelli, Volume III, Bologne, 1989 (ISBN 9788808002440).
  88. David Lajolo, préface à Bianca Fabbri : Schiava, cit., p. 9.
  89. « E'un cameleonte capace di ogni scelleraggine » Citation dans Maria-Antonietta Macciocchi, « Malaparte e' l'anti-Celine. », dans Corriere della Sera, 21 mars 1998, p. 31.
  90. Malaparte se disait anarchiste : « Emilio Cecchi a écrit récemment que je suis un anarchiste. Oh ! Ils commencent à s'en apercevoir, quoique avec un peu de retard. », 16 avril 1946, « Lettre à Anne », cité dans le livre de Giordano Bruno Guerri, Malaparte, éd. Denoël, 1981, p. 228.
  91. Bruno Tessarech, Pour Malaparte, portrait, Éd. Buchet-Chastel, Paris 2007 (ISBN 9782283021095), p. 127.
  92. Milan Kundera, Une rencontre, Gallimard, collection blanche, Paris, 2009 (ISBN 2070122840), p. 183.
  93. « Kundera, lecteur avant d’être écrivain »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?), sur passouline.blog.lemonde.fr (consulté le ).
  94. Selon Maria-Antonietta Macciocchi, « Malaparte est entré au Parnasse des Meridiani de Mondadori. Mais tard, très tard. À cent ans, date de la naissance (Prato, 9 juin 1898), et à quarante ans, date de la mort (Roma, 19 juillet 1957). Trop tard, si l'on considère que Malaparte est l'écrivain italien le plus célèbre d'Europe. » Citation tirée de l'article « Malaparte L'Europa scopre l'arcitaliano », dans Corriere della Sera, 21 mars 1998, p. 31.
  95. En 1939 quand Malaparte est allé en Éthiopie, pour le Corriere, Benito Mussolini déclara : « Il est capable de se mettre à la tête de quelque bande rebelle et de vouloir conquérir l'Italie » cité par Maria-Antonietta Macciocchi, « Malaparte L'Europa scopre l'arcitaliano », dans Corriere delle Sera, 21 mars 1998, p. 31.
  96. « Un parlatore squisito e un grande ascoltatore pieno di tatto ed educazione ».
  97. Claude Nabokoff Joxe, petite fille des fidèles amis Halévy a cette judicieuse remarque : « On aurait dit qu'il portait un masque et qu'il avait toujours peur que le masque pût tomber. » Cité par Maurizio Serra dans sa biographie Malaparte, p. 442-443.
  98. « Je ne l'ai jamais dit, je ne le dis qu'à contrecœur : mais je me sens plus près de Chateaubriand que de n'importe quel autre écrivain moderne.» Journal d'un étranger à Paris, traduit de l'italien par Gabrielle Cabrini, Éditions Denoël, Paris, 1967, p. 271.
  99. . (Gallimard, 1973, pp. 86-87)
  100. Extrait de l'article de Hélène Rochette, « Mots du front », Télérama no 3319 du 24 au 30 août 2013, p. 134.
  101. Entre les œuvres de Malaparte et de Céline, que d'analogies. On pourrait affirmer de même, à propos de Malaparte, l'idée selon laquelle comme le remarquait André Gide en une formule toute pénétrante de sagacité à propos de Céline, "ouvrier dans les ondes" (Céline, Lettres à M. Hindus, Cahiers de L'Herne, n°3) : « Ce n'est pas la réalité que dépeint Céline, c'est les hallucinations que la réalité provoque. » (Cité par Frédéric Vitoux dans sa thèse Louis-Ferdinand Céline, Misère et parole, Gallimard, 1973, p. 188.
  102. Malaparte avait eu l'intuition qu'il fallait que les Européens résistent à la superpuissance des États-Unis. Milan Kundera l'affirme à son tour dans Une rencontre : « Ce qui l'a fasciné, c'est la nouvelle façon d'être européen, la nouvelle façon de se sentir européen, qui dorénavant sera déterminée par la présence de plus en plus intense de l'Amérique. » Milan Kundera, Une rencontre, Gallimard, collection blanche, Paris, 2009 (ISBN 2070122840), p. 200.
  103. Selon Guerri, Malaparte assuma dans les années 50, pour les lecteurs de Tempo, la fonction que devait prendre vingt ans plus tard Pasolini auprès des lecteurs du Corriere della Sera : secouer la grisaille et le conformisme naissants. D'ailleurs Pasolini prendra la place de Malaparte à Tempo, après Ansaldo et Quasimodo. Et Pasolini est un des rares écrivains italiens qui aient su, comme Malaparte, être aussi un « personnage » qui partagea avec notre auteur l'esprit de provocation, l'activisme effréné dans toute sorte de domaines, le goût de la désacralisation. Giordano Bruno Guerri, op. cit., p. 233.
  104. « L'europeo esemplare emerge sopra un orizzonte grigio che voleva condannarlo al silenzio. Verso il Tremila... », cité dans Maria-Antonietta Macciocchi, « Malaparte L'Europa scopre l'arcitaliano », dans Corriere delle Sera, 21 mars 1998, p. 31.
  105. Malaparte, Ces sacrés Toscans, éd. Le Livre de poche, Paris, traduit de l'italien par Georges Piroué, p. 170.
  106. Bertrand Poirot-Delpech notait le courage de Malaparte, courage dans une période historique, le XXe siècle, où pour le dire avec René Char, l'Homme était au plus bas. « Dans le grand suicide des années 1940, bien peu d'artistes européens ont su ne pas insulter l'avenir de ce qui leur était commun. Il fallait, pour cela, dépasser les discours politiques du fait accompli, de la légalité immédiate, du drapeau. Il fallait se sentir dépositaire de valeurs supérieures à celles au nom desquelles les armées étaient jetées les unes contre les autres. Il fallait braver l'accusation de trahison, risquer l'apparent déshonneur de la prison. Les grandes espérances sont souvent à ce prix. » Bertrand Poirot-Delpech, « Il y a trente ans mourait Malaparte l'européen exemplaire », dans Le Monde, 24 juillet 1987.
  107. Pour une bibliographie complète : voir la recherche de Vittoria Baroncelli et Caterina Santi dans Malaparte, scrittore d'Europa, Milano et Prato, Marzorati, 1991, p. 267-333.

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