SARS-CoV-2

virus responsable de la Covid-19
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Coronavirus 2 du syndrome respiratoire aigu sévère

Le SARS-CoV-2 (acronyme anglais de severe acute respiratory syndrome coronavirus 2), soit coronavirus 2 du syndrome respiratoire aigu sévère, est le virus responsable de la Covid-19. Son acronyme est parfois partiellement francisé en SRAS-CoV-2[Note 1],[Note 2].

Ce coronavirus hautement pathogène a été découvert en dans la ville de Wuhan (province de Hubei, en Chine).

Le SARS-CoV-2 est un virus à ARN monocaténaire de polarité positive du groupe IV de la classification Baltimore. C'est une souche nouvelle de l'espèce Betacoronavirus pandemicum (ex SARSr-CoV), dans le genre betacoronavirus qui regroupe entre autres les SARS-CoV-1 et MERS-CoV.

Vue au microscope électronique à balayage de particules virales de SARS-CoV-2 (en jaune), le virus qui cause la maladie Covid-19 - ici isolé d'un patient aux États-Unis, émergeant de la surface de cellules (bleues / roses) cultivées en laboratoire.
SARS-CoV-2 isolé d'un patient aux États-Unis (en jaune, vue au microscope électronique à balayage, émergeant de la surface des cellules infectées cultivées en laboratoire).

Dans un contexte de faible immunité collective, le SARS-CoV-2 circule presque toute l'année. Avec le temps, il est possible que le SARS-CoV-2 circule sur un mode épidémique plus saisonnier, entre janvier et mai dans les zones à climat tempéré, tout comme le HCoV-NL63, le HCoV-229E et le HCoV-OC43, des coronavirus responsables de simples rhumes.

Le SARS-CoV-2 est principalement transmis par les microgouttelettes et aérosols et a un tropisme particulier pour le système respiratoire supérieur (nez, trachée) et inférieur (bronches, poumons). Un site complémentaire de réplication primaire est le système digestif, en particulier l’estomac et les intestins. Le SARS-CoV-2 peut se disséminer dans l’organisme via les neurones. Lorsque le SARS-CoV-2 atteint le système nerveux central, il peut se produire une perte totale ou partielle d’odorat (anosmie). Le SARS-CoV-2 a de nombreux sites secondaires de réplication : le système cardiovasculaire, le système immunitaire, le système endocrinien, le système urinaire, le système reproducteur et les glandes sudoripares de la peau.

Le principal récepteur cellulaire utilisé par le SARS-CoV-2 pour infecter des cellules est l’enzyme ACE2. Ce récepteur est reconnu par la protéine S du SARS-CoV-2 qui opère l'essentiel du processus d’entrée du virus dans une cellule. Le SARS-CoV-2 possède au total environ 29 protéines virales. Certaines d’entre elles sont spécialisées dans le détournement de la machinerie de la cellule infectée. D’autres participent activement à la réplication du génome viral. Le SARS-CoV-2 peut infecter des cellules par fusion directe ou en étant absorbé par une cellule via un processus d’endocytose. Le SARS-CoV-2 a aussi la faculté de fusionner des cellules infectées avec les cellules non infectées avoisinantes, formant des « syncytia », c’est-à-dire des cellules géantes englobant des dizaines de cellules productrices de virus.

Présentant en une vitesse de mutation de l’ordre de 5,2 à 8,1 × 10−3 substitutions par site et par an, le SARS-CoV-2 est l'un des virus qui mutent le plus vite au monde.

La réponse immunitaire face au SARS-CoV-2 diffère d'un patient à l'autre : 40 % sont asymptomatiques, 40 % développent une Covid légère, 15 % une forme modérée pouvant conduire à un Covid long, et 5 % une Covid sévère pouvant nécessiter des soins de réanimation. La réponse immunitaire innée et adaptative des formes sévères de Covid-19 est globalement contre-productive et génère autant de dégâts dans l'organisme que le virus.

L'origine du SARS-CoV-2 n'est pas résolue. Le réservoir animal des sarbecovirus se trouve chez les chauve-souris asiatiques du genre Rhinolophus (les rhinolophes). Son adaptation à l'humain pourrait résulter d’un passage direct des chauves-souris aux humains, mais il est également possible qu'elle se soit faite par une transmission impliquant un hôte intermédiaire encore indéterminé, ou soit le fruit d'un gain de fonction en laboratoire[2].

Virologie

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Modèle scientifique du SARS-Cov-2. Chaque spicule (protéine Spike) est ici mobile, car à triple articulation[3] (ce qui n'est pas le cas pour les spicules du virus grippal)[3].

Classification

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Le virus SARS-CoV-2 forme une souche virale génétiquement distincte des autres coronavirus humains comme le MERS-CoV ou d'autres plus bénins, mais il appartient à la même espèce biologique que le SARS-CoV-1, le virus du SRAS[4]. Comme celui-ci, il appartient à l'espèce SARSr-CoV (severe acute respiratory syndrom-related coronavirus), dans le sous-genre Sarbecovirus[5],[6],[7], le genre Betacoronavirus et la famille Coronaviridae[4].

Morphologie et génome

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La morphologie des virions est typique de celle des coronavirus[8], notamment par son halo de protubérances constituées de polymères de protéines virales spiculées (« spikes » en anglais), qui leur a donné leur nom de « virus à couronne ». Le diamètre du virion de SARS-CoV-2 est compris entre 60 et 140 nm[9], contre 50 à 80 nm pour celui du SARS-CoV-1[10],[8],[Note 3].

Le génome du SARS-CoV-2 est constitué d'un ARN simple-brin de 29 903 nucléotides[11],[12],[13]. En ce qui concerne l'homologie des nucléotides, le SARS-CoV-2 est à 79,5 % identique à celui du SARS-CoV[14] et à 50 % identique à celui du MERS-CoV[15].

Filiation génétique

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Les sarbecovirus ont pour réservoir animal les chauves-souris du genre Rhinolophus, les rhinolophes.

Le SARS-CoV-2 présente des similitudes avec les Betacoronavirus trouvés chez des chauves-souris et des pangolins[16],[17].

L'arbre phylogénétique de la branche des coronavirus apparentés au SARS-CoV-2, tel qu'obtenu sur la base du gène RdRp, est le suivant[18],[19],[20] :



Rc-o319, proche à 81 % du SARS-CoV-2, Rhinolophus cornutus, Iwate, Japon (récolté en 2013, publié en 2020)[21]





SL-ZXC21, 88 %, Rhinolophus pusillus, Zhoushan, Zhejiang (récolté en 2015, publié en 2018)[22]



SL-ZC45, 88 %, Rhinolophus pusillus, Zhoushan, Zhejiang (récolté en 2017, publié en 2018)[22]





SL-CoV-GX, 89 %, Manis javanica, Asie du Sud-Est (récolté en 2017, publié en 2020)[23]




SL-CoV-GD, 91 %, Manis javanica, Asie du Sud-Est[24]





RacCS203, 91,5 %, Rhinolophus acuminatus, Chachoengsao, Thaïlande (métagénome de 4 coronavirus collectés en juin 2020, publié en 2021)[19]






RmYN02, 93,3 %, Rhinolophus malayanus, Mengla, Yunnan (récolté en juin 2019, publié en 2020)[25]



RpYN06, 94.4 %, Rhinolophus pusillus, Mengla, Yunnan (récolté en mai 2020, publié en 2021)[18]





RshSTT182, 92,6 %, Rhinolophus shameli, Stoeng Treng, Cambodge (récolté en 2010, publié en 2021)[20]



RaTG13, 96,1 %, Rhinolophus affinis, Mojiang, Yunnan (récolté en 2013, publié en 2020)[26]





SARS-CoV-2 (100 %)










SARS-CoV-1, proche à 79 % du SARS-CoV-2


En matière d'homologie, le SARS-CoV-2 est :

Le SARS-CoV-2 est très proche de la souche RaTG13 (un sarbecovirus qui pourrait s'être adapté aux rongeurs[38],[39]), mais sa protéine S en est très différente. Le domaine de liaison au récepteur (RBD) du SARS-CoV-2 est en revanche très proche de celui de l'isolat BANAL-20-52[27],[28].

Le SARS-CoV-2 présente également deux innovations déterminantes pour son adaptation à l'humain :

  1. La mutation T372A dans le RBD facilite la liaison au récepteur ACE2 humain[40] (mais aussi du pangolin et de R. macrotis (it)). On la trouve dans tous les SARS-CoV-2 et seulement chez eux, ce qui pourrait en partie expliquer pourquoi la protéine S du SARS-CoV-2 a une affinité pour le récepteur ACE2 humain 10 à 20 fois plus élevée que celle du SARS-CoV-1[41],[42].
  2. L'insertion d'une séquence de 4 acides aminés -S[PRRA]RSV- au site de clivage (-RS-) affichant une séquence -RRAR- qui permet chez l'humain l'activation du clivage par la furine[43]; cette séquence est absente des isolats les plus proches de SARS-CoV-2, comme BANAL-20-52[27]. De telles séquences se retrouvent dans d'autres coronavirus humains mais pas chez les sarbecovirus, SARS-CoV-1 inclus. Le MERS-CoV, un merbecovirus humain, a pour sa part une séquence différente: -PRSVRSV-.

Description

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Structure protéique du virus

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Représentation du péplomère, glycoprotéine du SARS-CoV-2 (PDB: 6VSB), formant le spicule. La protéine entière est un homotrimère, dont un seul monomère est détaillé ici, le reste du trimère étant représenté en gris. Certaines parties de la structure réelle ne sont pas représentées. Sont représentés les domaines protéiques, du N-terminal (lettre N) au C-terminal (lettre C): Domaine N-terminal (bleu) ; domaine de liaison au récepteur ACE2 (magenta); structure générale (cyan); hélice centrale (orange); le domaine du connecteur qui ancre le péplomère à l'enveloppe lipidique du virus (violet). Les liaisons disulfure sont en jaune, et les glucides en rouge. Le « plancher » gris présente la membrane lipidique du virus

Comme d'autres coronavirus, le SARS-CoV-2 possède quatre protéines structurales :

  1. Protéine S (dite protéine spike, spicule ou protéine spiculaire) : elle forme les péplomères, protubérances de la « couronne » caractéristique des coronavirus. Ces péplomères jouent un rôle clé dans la liaison du virus à un ou plusieurs récepteurs en surface d'une cellule[44]. La protéine S semble être l'un des principaux déterminants du tropisme du SARS-CoV-2[45].
    La publication du génome viral a permis de modéliser sa structure tridimensionnelle (voir ci-contre). Elle a aussi été décrite au niveau atomique par la microscopie électronique cryogénique[42],[46] ;
  2. Protéine E (enveloppe) ;
  3. Protéine M (membrane) ;
  4. Protéine N (nucléocapside) ; c'est elle qui enveloppe et protège l'ARN viral (le code génétique du virus).

Les protéines S, E et M constituent, ensemble, l'enveloppe virale[44].

Génome

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Organisation du génome du SARS-CoV-2 qui se décompose en 11 gènes, 15 ORF et 33 protéines virales ?

Le génome du SARS-CoV-2 contient 11 gènes[47] reconnaissant 15 Open Reading Frame (ORF) permettant de produire entre 29 et 33 protéines virales après protéolyse. Initialement 29 protéines virales avaient été identifiées[48]. Fin 2020 au moins 4 autres protéines virales supplémentaires ont été proposées (ORF2b, ORF3c, ORF3d et ORF3d-2)[49].

Le génome du SARS-CoV-2 a une coiffe à son extrémité 5' et une queue polyadénylée à son extrémité 3'[50] :

  • à son extrémité 5', sont placés les gènes ORF1a et ORF1b codant des protéines non structurales (NSP). ORF1a et ORF1b représentent deux tiers du génome et se chevauchent légèrement et sont donc parfois confondus et appelés ORF1ab. ORF1ab est considéré comme un gène unique codant 16 protéines dont plusieurs sont des enzymes qui ont un rôle essentiel dans la réplication et l’expression du génome[51] ;
  • à son extrémité 3', sont placés les dix gènes qui codent les protéines structurales et accessoires. Le SARS-CoV-2 a quatre gènes spécifiques à des protéines structurales : S, M, E et N. Le gène de la protéine N intègre également les ORF permettant de produire deux protéines accessoires : 9b et 9c[47]. En plus, le SARS-CoV-2 a six gènes associés à des protéines accessoires : 3a, 6, 7a, 7b, 8, et 10. Le gène de l'ORF3a code également l'essentiel de la protéine ORF3b[52],[53] et de 3 autres protéines virales (ORF3c, ORF3d et ORF3d-2). Il est également suggéré que l'ORF codant la protéine S produit une seconde protéine baptisée ORF2b[49].

Les protéines accessoires du SARS-CoV-2 divergent en partie de celles du SARS-CoV-1[47] :

  • les SARS-CoV-2 et SARS-CoV-1 ont en commun les protéines 3a, 6, 7a, 7b, 9b et 9c ;
  • les protéines 3b et 8 du SARS-CoV-2 sont différentes des protéines 3b, 8a et 8b du SARS-CoV-1. Les protéines ORF3b et ORF8 seraient avec la protéine N, les premières cibles des anticorps produits par les lymphocytes B après une infection au SARS-CoV-2. Et ce bien avant que des anticorps ne soient produits contre des fragments de la protéine S. Ce qui laisse à penser que les protéines ORF3b et ORF8 sont d’une grande importance dans la pathogénèse[54] ;
  • le SARS-CoV-2 aurait 5 protéines accessoires inédites : 10, 2b, 3c, 3d et 3d-2[49].
Gènes exprimés par SARS-CoV-2[47]
ORF Nucléotide début Nucléotide fin Nombre de codons Protéine
ORF1a 266 13 483 4 405 Polyprotéines Pp1a et Pp1ab
ORF1b 13 484 21 555 2 691 Polyprotéine Pp1ab
ORF2 21 563 25 384 1 273 Péplomère (protéine S) + ORF2b
ORF2b[49] 21 744 21 860 39 La protéine ORF2b est localisée aux codons 60 à 99 de la protéine S - protéine inédite
ORF3a 25 393 26 220 275 Protéines ORF3a + ORF3c + ORF3d + ORF3d-2 + ORF3b
ORF3c[49] 25 457 25 579 41 La protéine ORF3c est localisée aux codons 21 à 62 de ORF3a - protéine inédite
ORF3d[49] 25 524 25 694 57 La protéine ORF3d est localisée aux codons 43 à 100 de ORF3a - protéine inédite
ORF3d-2[49] 25 596 25 694 33 La protéine ORF3d-2 est localisée aux codons 67 à 100 de ORF3a - protéine inédite
ORF3b 25 814 26 281[52] 156 ORF3b est à cheval sur ORF3a et ORF4. ORF3b est initialement tronquée et a 4 paliers d'évolution (4 codons STOP). Stade 1 initial : ORF3b1 de 22 codons (localisée aux codons 141-163 d’ORF3a). Stade 2 : ORF3b1+2 de 56 codons (localisée aux codons 141-197 d’ORF3a). Stade 3 : ORF3b1+2+3 de 78 codons (localisée aux codons 141-219 d’ORF3a). Stade 4 : ORF3b1+2+3+4 de 156 codons (localisée au codon 141 d’ORF3a jusqu’au codon 13 d’ORF4)[52]
ORF4 26 245 26 472 75 Protéine d'enveloppe (protéine E)
ORF5 26 523 27 191 222 Protéine membranaire (protéine M)
ORF6 27 202 27 387 61 Protéine ORF6
ORF7a 27 394 27 759 121 Protéine ORF7a
ORF7b 27 756 27 887 43 Protéine ORF7b
ORF8 27 894 28 259 121 Protéine ORF8
ORF9 28 274 29 533 419 Phosphoprotéine de capside (protéine N) + Protéine ORF9b + Protéine ORF9c
ORF9b 28 284 28 572 97 ORF9b correspond aux codons 4 à 101 de l’ORF9
ORF9c 28 729 28 950 73 ORF9c correspond aux codons 152 à 225 de l’ORF9
ORF10 29 558 29 674 38 Protéine ORF10 - protéine inédite

Cycle de réplication

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Cycle viral de réplication : (1) entrée du virus à l’intérieur de la cellule, (2) détournement de la cellule par le virus, (3) réplication en série du virus par la cellule

Comme c'est généralement le cas des virus, le cycle de réplication du SARS-CoV-2 se traduit par (1) l’entrée du virus à l’intérieur de la cellule, (2) le détournement de la machinerie cellulaire par le virus, (3) la réplication du virus par la cellule et/ou la réalisation de taches bien précises par la cellule répondant aux besoins du virus.

Entrée dans une cellule

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La protéine S du SARS-CoV-2 est le principal acteur dans l'infection des cellules. La protéine S est constituée de deux sous-unités fonctionnelles : la sous-unité S1 permet la liaison du virus au récepteur de la cellule hôte et la sous-unité S2 assure la fusion de l’enveloppe virale avec la membrane cellulaire[55]. La sous-unité S1 contient deux domaines (le RBD et le NTD) qui chacun reconnaît des récepteurs cellulaires différents. Le principal domaine utilisé jusqu'à présent par le SARS-CoV-2 est le RBD. Le RBD permet la liaison au récepteur ACE2[56],[57],[58]. Le NTD est un domaine secondaire. Le NTD permet au SARS-CoV-2 de s'attacher aux récepteurs L-SIGN (en) s'exprimant fortement dans les poumons, le foie, les reins et les ganglions lymphatiques, ou aux récepteurs DC-SIGN (en), répandus dans les cellules dendritiques, matures ou non[59],[60].

Une fois que la sous-unité S1 est liée à un récepteur (le plus souvent ACE2), deux clivages protéolytiques successifs sont nécessaires. Le premier clivage coupe la protéine S en S1 et S2. Le second appelé S2' libère l'extrémité du peptide de fusion (FP) qui comme son nom l'indique amorce la fusion du virion avec la cellule. Une des originalités de la protéine S du SARS-CoV-2 est qu’elle intègre une séquence d'activation atypique pour un coronavirus[61] au site de clivage S1 / S2, similaire aux séquences observées dans les virus de grippe. Ainsi, à l’instar du virus de la grippe, la protéine S du SARS-CoV-2 peut être clivée à l’aide d’une protéase qui se trouve en abondance dans le plasma humain : la furine. Les scientifiques suggèrent que cette capacité à pouvoir effectuer le clivage S1 / S2 par la furine est la raison pour laquelle le SARS-CoV-2 a causé une épidémie humaine[62].

Détournement de la cellule

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Concrètement la fusion avec une cellule consiste en l'introduction du génome viral avec la protéine N du SARS-CoV-2 dans la cellule. Une fois dans la cellule, la protéine N bloque la production d’interféron[63],[64]. Les interférons sont des molécules de signalisation qui permettent d'alerter les cellules voisines qu'une infection est en cours[65]. Dans le même temps, l’ARN viral est traduit par les ribosomes de la cellule hôte qui se mettent à produire des protéines virales[66],[53].

Une fois synthétisées par les ribosomes, une grande partie des 16 protéines non structurales du SARS-CoV-2 s'assemblent pour former le Complexe Réplicase-Transcriptase (CRT) indispensable à la réplication en série du génome viral. D'autres protéines non structurales sont en charge de prendre le contrôle de la machinerie traductionnelle de la cellule et d'éteindre la traduction « normale » qui jusque là fonctionne, empêchant ainsi la synthèse de protéines interférons par les ribosomes. Nsp1 se fixe ainsi au ribosome de la cellule hôte et bloque tous les ARN messagers de la cellule, sauf ceux liés au génome du virus[67]. D'autres protéines virales sont plus ou moins spécialisées dans l'inhibition des interférons : nsp3[68], ORF3b[52], ORF6[69],[70],[71], ORF9b[72],[73] et ORF9c[74],[75],[76]. La protéine du SARS-CoV-2 ayant la plus forte activité anti-interféron semble être ORF3b. Et il est suggéré qu'au gré des mutations à venir, la protéine ORF3b pourrait progressivement exercer une activité anti-interféron de plus en plus forte[52].

Des protéines virales vont aussi exercer une activité empêchant la synthèse d'un antigène. Un antigène est une molécule permettant aux globules blancs de reconnaître un pathogène et de lutter contre en mobilisant la mémoire immunitaire. Les protéines virales ORF8[77],[78] et ORF3a[79] empêchent la synthèse d'un antigène par la cellule infectée. Tandis que la protéine S active des récepteurs sur la cellule infectée (récepteurs HLA-E) qui protègent la cellule infectée contre une destruction par les lymphocytes NK[80],[81].

Production des virions

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Après avoir pris le contrôle de la cellule infectée, et alors que le Complexe Réplicase-Transcriptase (CRT) réplique en série le génome viral, les ribosomes sont mobilisés pour produire en série des protéines virales structurales. Ces protéines s’assemblent entre elles dans le lumen (l’intérieur) d’un compartiment dérivé du réticulum endoplasmique[82]. Cette étape est appelée le bourgeonnement[82]. D’abord, une protéine N (nucléocapside) se fixe à une copie d'ARN et l’empaquette dans une protéine M (membrane) qui donne sa forme au virion[82]. Ensuite des protéines S sont incorporées[82]. La protéine M dirige la plupart des interactions protéine-protéine nécessaires à l'assemblage des virus après sa liaison à la nucléocapside[83]. La protéine E contribue à l’assemblage et à la libération du virion hors de la cellule infectée, en suivant la voie de sécrétion (appareil de Golgi, puis vésicules sécrétoires)[53]. Le virion quitte le milieu intracellulaire par exocytose, et est prêt à infecter une autre cellule.

Syncytia

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Dans des organes tels que les poumons, les reins ou le foie, les cellules épithéliales sont étroitement compactées, l’espace extracellulaire est très limité. Le SARS-CoV-2 y tire un avantage. Les cellules infectées peuvent fusionner avec les cellules non infectées avoisinantes, formant des « syncytia », c’est-à-dire des cellules géantes englobant des dizaines de cellules productrices de virus[84]. Ce processus est médié par la protéine S nouvellement synthétisée qui s'accumule à la surface de la cellule infectée. Mais la formation de syncytia peut se faire aussi par « fusion from without (FFWO) », c’est-à-dire par des cellules infectées qui n’ont pas encore répliqué la protéine S[85].

Ce mode d’infection permet au SARS-CoV-2 d’infecter vite un grand nombre de cellules avec une faible quantité de protéines S. Lorsque le SARS-CoV-2 infecte de nouvelles cellules au sein d’un syncytium, les anticorps se révèlent d’une faible efficacité[85]. En revanche, IFITM (en), (interferon-inducible transmembrane protein), une protéine transmembranaire produite en présence d'interférons, peut bloquer cette fusion. Mais son effet peut être contrecarré par TMPRSS2 qui facilite la formation de syncytia[84].

Tropisme

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Primaire

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Les voies respiratoires supérieures (nez, pharynx) et inférieures (bronches, poumons) sont le principal site de réplication primaire. Un site complémentaire de réplication primaire est le système digestif, en particulier l’estomac et les intestins. Des particules du SARS-CoV-2 sont facilement détectées dans les selles[86], ce qui a permis de suivre le développement de l'épidémie via des analyses d'eaux d'égouts[87]. Le SARS-CoV-2 se réplique néanmoins moins bien dans le système digestif que dans le système respiratoire[88]. L’infection du système digestif se fait probablement par auto-infection, c'est-à-dire par absorption de mucus nasal infecté.

Secondaire

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Les sites de réplication secondaires du SARS-CoV-1 dans les formes sévères sont le cœur, les glandes sudoripares de la peau, les reins et le système endocrinien qui régule les hormones (glandes surrénales, la parathyroïde et l’hypophyse)[89],[90]. Pour le SARS-CoV-2, les formes sévères (et modérées[91] ?), sont susceptibles d’infecter ces mêmes organes, mais également :

Globules blancs

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Certaines séquences de la protéine S des coronavirus ont été identifiées comme activant les anticorps facilitants. Dans le cas du SARS-CoV-1, il s’agissait de la séquence d’acides aminés LYQDVNC située aux codons 597-603.

Le SARS-CoV-2 est capable de se répliquer dans certains globules blancs. In vitro, face à des globules blancs, le SARS-CoV-2 infecte en priorité les monocytes (44,3 %), les lymphocytes T CD4+ (14,2 %), les lymphocytes T CD8 (13,5 %) et les lymphocytes B (7,58 %). In vivo, l’infection des globules blancs par le SARS-CoV-2 est différente. Dans le cas de Covid sévère, des monocytes et lymphocytes B peuvent être infectés et, dans une moindre mesure, des lymphocytes T[98],[99].

Des virus tels que les coronavirus peuvent infecter les globules blancs, par un mécanisme connu sous le nom de facilitation dépendante des anticorps (ADE), comme cela a été mis en évidence avec le SARS-CoV-1 et le MERS-CoV[100]. Même si aucun cas d'une telle ADE n'a pu être constaté pour l'instant avec le SARS-CoV-2, ce risque incite à la prudence tant dans la recherche vaccinale que pour les traitements expérimentaux à base de sérums de patients infectés ou d'anticorps monoclonaux[101].

Dans le cas du SARS-CoV-1, la séquence activant les anticorps facilitants est l’épitope peptidique « LYQDVNC » localisé sur le fragment « SD2 » de la protéine S. Cette séquence est présente dans la souche originelle du SARS-CoV-2 (celle de Wuhan) et correspond aux codons de la protéine S : L611, Y612, Q613, D614, V615, N616, C617[100]. La mutation D614G sur la protéine S, qui est devenue dominante parmi les variants du SARS-CoV-2, a transformé la séquence « LYQDVNC » en « LYQGVNC », et semblerait empêcher le phénomène d'anticorps facilitants[102].

D'autres mécanismes pouvant générer des anticorps facilitants ont été proposés pour le SARS-CoV-2. Certains anticorps ciblant le RBD de la protéine S du SARS-CoV-2 seraient susceptibles d'activer le récepteur FcγRIIB[103], reconnu par les lymphocytes B. Tandis que certains anticorps ciblant le NTD[104],[105],[106], pourraient activer :

Chez le coronavirus du chat, un des rares coronavirus capable de se reproduire activement dans un globule blanc (les macrophages), le phénomène des anticorps facilitants induit une péritonite infectieuse (PIF). À noter que pour soigner la PIF, le GS-441524, autre nom du remdesivir, s’est montré efficace[107].

Dissémination

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Après s’être répliqué localement au niveau des voies respiratoires et éventuellement dans le système digestif, le SARS-CoV-2 peut se disséminer dans l'organisme via 3 voies :

Incubation et charge virale

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La période d’incubation est le délai entre la contamination et l’apparition des premiers symptômes de la maladie. Dans le cas d'une infection au SARS-CoV-2, la période d'incubation varie entre deux et quatorze jours[110]. La période d'incubation médiane est de 5 jours, et 97,5 % de ceux qui développent des symptômes le font en moins de 11,5 jours[111].

 
Symptômes de la maladie à coronavirus 2019, causée par le SARS-CoV-2.

Bien que des études aient suggéré que le pic de charge virale dans les voies respiratoires supérieures (nez, pharynx) soit atteint avant l'apparition des premiers symptômes de la maladie, il semble que le pic se produise en fait peu de temps après, voire 3 à 5 jours après. Ce pic est suivi d'une clairance continue du SARS-CoV-2 dans l’organisme. Dans les voies respiratoires supérieures, l'ordre de grandeur du pic viral est similaire entre les individus asymptomatiques et symptomatiques infectés, autour de 70 millions de copies d'ARN/mL par test PCR. Néanmoins, de manière assez similaire à la grippe, la clairance virale est plus rapide chez les individus asymptomatiques que chez ceux qui sont symptomatiques[112]. Plus de la moitié des contaminations serait le fait de porteurs asymptomatiques[113].

Les asymptomatiques peuvent tolérer un certain degré d'infection des voies respiratoires inférieures sans développer de symptômes. Indépendamment de l’âge, environ 40 à 50 % des Covid-19 asymptomatiques pourraient présenter des anomalies radiographiques des poumons, le plus souvent des nodules en verre dépoli[114],[115]. Le verre dépoli aigu exprime un œdème, une hémorragie ou simplement une inflammation pulmonaire. Généralement il faut moins de 3 mois pour que ces nodules disparaissent[116].

Il est suggéré que le taux de létalité apparente (décès/cas confirmés) du SARS-CoV-2 serait autour de 2 %, tandis que le taux de létalité réelle (décès/cas réels) est autour de 0,8 %[117], ce qui est élevé au regard de la contagiosité du SARS-CoV-2. Les personnes développant des formes sévères sont généralement âgées ou en surpoids, ou présentent des comorbidités (hypertension, diabète, cancersetc.). En France, en 2020, l'âge médian des décès est de 84 ans[118], et 75 % des patients décédés ont plus de 75 ans[119]. Le taux de mortalité des malades admis en réanimation est compris suivant les hôpitaux entre 10 %[120] et 40 %[121].

Une typologie à affiner pour distinguer les différentes réponses immunitaires face au SARS-CoV-2 est :

  • 40 % d’asymptomatiques[122] ;
  • 40 % de symptomatiques légers, type grippe ;
  • 15 % de formes modérées pouvant conduire à une Covid long[123] ;
  • 5 % de formes sévères pouvant nécessiter des soins de réanimation[124].

Réponse immunitaire

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Covid léger

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De manière probablement assez similaire à la grippe, l'ARN viral du SARS-CoV-2 finit par être détecté par des globules blancs « sentinelles » comme les cellules dendritiques ou les macrophages. La détection du virus conduit à la sécrétion d'interférons de type I (IFN), de chimiokines et de cytokines pro-inflammatoires[125], induisant un état antiviral généralisé. Sur le site de l'infection des globules blancs spécifiques à la réponse innée sont recrutés. Les plus importants sont les lymphocytes NK qui pilotent la clairance virale. Les monocytes et les neutrophiles vont aider à éliminer les cellules mortes infectées[125].

Chez les Covid-19 asymptomatiques, ces mécanismes de défense du système immunitaire inné pourraient être suffisants pour venir à bout du SARS-CoV-2. Chez les Covid-19 légèrement symptomatiques, la clairance ultime vient avec l’immunité adaptative où interviennent les lymphocytes T et les lymphocytes B. L'immunité adaptative ou la mémoire immunitaire est activée dès qu'un globule blanc « sentinelle » présente un antigène, c'est-à-dire un fragment du SARS-CoV-2, aux lymphocytes T dans un ganglion lymphatique[126]. Les lymphocytes sont les seuls globules blancs à avoir une mémoire[127]. L’immunité adaptative s’appuie sur :

La très grande majorité de la population mondiale a déjà contracté un rhume à cause d’un coronavirus bénin comme le HCoV-NL63, le HCoV-229E ou encore le HCoV-OC43[128]. À la suite de cette infection, des lymphocytes T à mémoire ont conservé une immunité cellulaire de combat et sont capables de la mobiliser contre le SARS-CoV-2, une fois que l'antigène leur a été présenté. Il s’agit donc d’une immunité cellulaire croisée[129],[130],[131]. En revanche il est suggéré qu'il n'existe pas d'immunité croisée pour les lymphocytes B qui produisent des anticorps[132]. Dans le cas d'une infection par le SARS-CoV-2, seuls les anticorps ciblant la protéine S du SARS-CoV-2 se révéleraient neutralisants[106]. Les anti-S commencent à être détectés en sérologie, environ deux semaines après l’infection. Les anticorps contre la protéine S ciblent seulement quelques fragments spécifiques : le RBD représente entre 65 et 77 % des anti-S, et le NTD représente entre 6 et 20 % des anti-S[105].

Les résultats de plusieurs équipes mettent en évidence que tous les patients infectés ne développent pas de réponse anticorps. Le taux d’anticorps était significativement plus élevé chez les patients plus âgés[129]. L’ensemble évoque que l’on peut guérir de l’infection en l’absence d’anticorps et que ceci est particulièrement vrai pour les plus jeunes et les patients asymptomatiques, faisant évoquer l’importance de l’immunité innée et de l’immunité cellulaire dans la clairance virale[129].

Covid sévère

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Dans les formes modérées de Covid-19 et particulièrement dans celles sévères, la réponse innée est inefficiente. Elle se caractérise par un taux d’interférons de type I et III relativement bas[133]. Et surtout dans la semaine consécutive à l’infection, il est observé chez ces patients une chute des lymphocytes T, avec une lymphopénie en forme de V. Toutes les situations de stress aigu peuvent se compliquer de lymphopénie via l’augmentation des taux circulants de cortisol par le système endocrinien et spécifiquement par les glandes corticosurrénales. Alors que chez un individu en bonne santé, le taux de cortisol est généralement autour de 375 nmol/L[134], chez les patients Covid-19 en état de stress, ce taux atteint rapidement 620 nmol/L[135],[136].

La raréfaction des lymphocytes est rapidement compensée par une synthèse massive de neutrophiles (neutrophilie)[137],[138]. Les neutrophiles qui se substituent aux lymphocytes pour lutter contre le SARS-CoV-2 libèrent dans les tissus infectés des « NEToses », c’est-à-dire des fibres composées d'ADN et de protéines, dont la fonction est de piéger des micro-organismes pathogènes (bactéries ou autres). Un excès de neutrophiles contribue à la thrombogénèse, c'est-à-dire à la formation de caillots sanguins[139].

La réponse immunitaire innée et adaptative des formes sévères de Covid-19 est globalement contre-productive et génère autant de dégâts dans l'organisme que le virus. Du fait de la lymphopénie, les lymphocytes T sont recrutés en nombre réduit. Ces lymphocytes T sur-expriment le récepteur CD69, la protéine Tim-3 (en) et le facteur de transcription aiolos (en), ce qui a pour effet une production massive d’interférons gamma (IFN-γ)[133],[140],[141]. En réponse à l’élévation du taux d’IFN-γ, les monocytes et macrophages sécrètent massivement de l’IP-10 (en), une chimiokine appelée également CXCL10. L’élévation du taux de CXCL10 annonce le syndrome de détresse respiratoire aiguë de la Covid-19[142].

La concomitance de l’apparition des anticorps, deux semaines après l’infection, avec l’orage cytokinique, ainsi que la corrélation positive entre le taux d’anticorps et la sévérité de l’infection a fait envisager l’hypothèse que les anticorps puissent être impliqués dans les mécanismes physiopathologiques[129]. Dans une étude auprès de 15 patients Covid-19 brésiliens admis en soins intensifs, la moitié des patients présentaient une infection des globules blancs[98],[99]. Très peu, sinon aucun des lymphocytes T était infecté. En revanche les lymphocytes B étaient particulièrement ciblés par le SARS-CoV-2[98],[99].

Peut-être en lien avec des anticorps non neutralisants et facilitants, il est observé une prolifération de monocytes / macrophages qui sécrètent des niveaux élevés de cytokines et chimiokines notamment des IL-6, IL-8 et IL-10[143]. Les formes sévères nécessitant une hospitalisation en unité de soins intensifs se démarquent en particulier par des concentrations plus élevées de IP-10/CXCL10 (en), MCP-1/CCL2 et TNFα[142].

Les taux de cytokines de la Covid-19 sévère ne sont pas spécialement élevés, en comparaison d’un choc septique ou d'une infection respiratoire aiguë sévère classique[144]. Pourtant il se produit bien un orage cytokinique avec la Covid-19, ce qui concrètement se traduit par un processus incontrôlé de mort cellulaire par pyroptose (en), apoptose et nécroptose des tissus infectés[145]. La mort cellulaire est mesurable par le taux sérique de lactate déshydrogénase (LDH). Chez plus de 95 % des patients décédés de la Covid, le taux de LDH est au-dessus du seuil de tolérance qui est fixé à 250 U/L[146]. Et ce processus de destruction cellulaire est induit par le cocktail de cytokines de la Covid-19[145]. Il est suggéré que la production concomitante de TNFα et d’IFNγ induit une production délétère d'oxyde nitrique, à l’origine d'une mort cellulaire incontrôlable et in fine du syndrome de détresse respiratoire aiguë[145]. L’utilisation à forte dose de corticoïdes pour soigner des Covid sévères inhibe les IFNγ[147] et par conséquent pourrait empêcher la production mortelle d'oxyde nitrique.

Mutation et variants

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D'abord réputé stable[148], le SARS-CoV-2 s’avère en fait un virus extrêmement instable[149],[150].

Les mutations de la protéine S sont celles qui ont été le plus médiatisées. La première mutation d'importance est D614G qui a favorisé l'infectivité du SARS-CoV-2[151]. À partir de décembre 2020, le variant anglais se distingue par au moins 17 modifications (mutations ou délétions), toutes protéines virales confondues, un record[152]. La plus connue des mutations est N501Y qui a amélioré la liaison du RBD avec le récepteur ACE2[152]. Le variant anglais multiplie par deux l’infectivité du virus[153]. En parallèle apparaissent les variants sud-africain et brésilien qui ont la particularité de partager avec le variant anglais la mutation N501Y. Mais ces deux variants contiennent surtout des mutations comme E484K qui affaiblissent l’efficacité des anticorps des vaccins de première génération et facilitent les réinfections au SARS-CoV-2[154].

Au total, fin mars 2021, sur les 1 273 codons de la protéine S, il est recensé 28 mutations (2 %) qui se propagent[155] :

  • 11 d’entre elles (40 %) concernent le NTD : mutations aux codons 18, 69, 70, 80, 138, 144, 215, 222, 241, 242 et 243 ;
  • 6 d’entre elles (20 %) concernent le RBD : mutations aux codons 417, 439, 452, 477, 484 et 501 ;
  • 4 concernent les SD1 et SD2 : mutations aux codons 570, 614, 677 et 681.

Le NTD est le fragment le plus instable de la protéine S, autrement dit celui qui mute le plus rapidement. Il est anticipé que la prochaine mutation majeure sur le NTD se produise sur le codon 248. Cette mutation pourrait encore affaiblir davantage les anticorps des vaccins de première génération (AstraZeneca, Pfizer, Moderna…)[156],[157].

En dehors de la protéine S, fin mars 2021, le SARS-CoV-2 concentre de fortes mutations sur :

  • ORF9c : sur les 73 codons de cette protéine, sept (10 %) sont en pleine évolution : 194, 199, 202, 203, 204, 205 et 220[155]. La protéine ORF9c est essentielle au SARS-CoV-2 pour déréguler à son profit les gènes des cellules infectées[74],[75],[76] ;
  • ORF9b : sur ses 97 codons, quatre (4 %) mutent assez fortement : 10, 16, 32 et 70[155]. Outre son activité anti-interférons, la protéine ORF9b bloque l’apoptose (autodestruction de la cellule)[72],[73] ;
  • ORF8 : sur ses 121 codons, sept (6 %) ont déjà des mutations bien avancées : 27, 52, 68, 73, 84 et 92[155]. La protéine ORF8 permet au SARS-CoV-2 de bloquer la présentation d’un antigène par le CMH-I des cellules infectées, ce qui retarde la réponse immunitaire adaptative[77],[78] ;
  • ORF3b : sur les 156 codons de cette protéine, seulement quatre connaissent une forte évolution : 171, 172, 174 et 223[155]. Mais ORF3b est la protéine du SARS-CoV-2 exerçant la plus forte activité anti-interférons. Et surtout ORF3b est tronquée. L’ORF3b qui la code contient quatre codons-stop qui devraient sauter au fur et à mesure des mutations et permettre progressivement à cette protéine d’exercer une activité anti-interférons de plus en plus forte[52][réf. à confirmer].

Finalement, il existe des milliers de variants du SARS-CoV-2, certains influencent négativement la santé des humains, les diagnostics et les vaccins[158]. Globalement, les variants du SARS-CoV-2 qui s'imposent sont ceux qui sont les plus contagieux ou qui échappent aux vaccins de première génération.

Vitesse d’évolution du SARS-CoV-2 en comparaison d’autres virus
Virus Vitesse de mutation (Substitutions/site/an)
Mutation la + rapide Polio[159] ∼1,0 × 10−2
SARS-CoV-2[149],[150] 5,2 à 8,1 × 10−3
VIH-1[160] 3 à 8 × 10−3
Grippe[160] 2 à 8 × 10−3
Virus de l'hépatite C[161] 1,5 × 10−3
Virus de l'hépatite A[162] 1,21 à 2 × 10−3
Ebola[163] 1,2 × 10−3[à vérifier]
Dengue[160] 7 à 9 × 10−4
Rougeole[164] 6,0 à 6,5 × 10−4
Virus de la rage[165] 5 × 10−4
Virus de l'encéphalite japonaise[166] 3,5 à 5,3 × 10−4
HCov-229E[167] 3 à 8 × 10−4
Virus de la fièvre jaune[160] 2 à 5 × 10−4
Varicelle[168] 1,82 × 10−5 à 3,8 × 10−6
Virus de l'hépatite B ~10−6
HPV-18[169] ∼4,5 × 10−7
Mutation la plus lente EBV[170] ~10−9

Nom du virus et de la maladie

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D'abord dénommé « coronavirus de Wuhan »[171] puis « nouveau coronavirus 2019 » (2019-nCoV), son nom officiel SARS-CoV-2 (pour « severe acute respiratory syndrome coronavirus 2 », en anglais) a été défini le par l'International Committee on Taxonomy of Viruses (ICTV)[1]. La forme longue en français de l’acronyme SARS-CoV-2 est désignée par l’OMS « coronavirus 2 du syndrome respiratoire aigu sévère »[172], tandis que l’Office québécois de la langue française le désigne « coronavirus du syndrome respiratoire aigu sévère 2 » et francise partiellement l'acronyme en SRAS-CoV-2[171],[Note 1],[Note 2].

Le groupe d'étude Nidovirales de l'ICTV a proposé le nom SARS-CoV-2 au terme d'une analyse taxonomique poussée[4]. Ce travail montre notamment que le nouveau coronavirus appartient à la même espèce biologique (SARSr-CoV) que SARS-CoV-1 qui avait causé l'épidémie de SRAS en 2003, même si le syndrome observé en 2019, lui-même très polymorphe, diffère du SRAS à proprement parler.

Simultanément, l'OMS donne à la maladie liée au virus le nom officiel de « maladie à coronavirus 2019 » (COVID-19[172],[173], de l'anglais coronavirus disease 2019) qui était jusque là informellement dénommée « pneumonie de Wuhan ». À noter que Covid-19 désigne la maladie et non le coronavirus, d'où des recommandations de l'employer au féminin[174],[175].

Même si nommer différemment la maladie et l'agent qui la cause est habituel (exemple : le VIH cause le sida), et si la définition des espèces biologiques dépend d'autres éléments que ceux purement conjoncturels (exemple : Botrytis cinerea cause la pourriture grise mais aussi la pourriture noble recherchée pour la vinification des sauternes), l'apparition des deux noms le même jour a d'abord suscité quelques incompréhensions tant dans le public peu averti mais sensibilisé par une situation de crise[176], que dans la communauté scientifique[177],[178].

Selon l'historien Frédéric Vagneron, « c’est sans doute la première fois dans l’histoire que l’on a détecté un virus avant même de donner un nom à la maladie qu’il provoque »[179].

Ressources scientifiques

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L'émergence de SARS-CoV-2, jusque là inconnu de la communauté scientifique, a donné lieu en quelques semaines à une explosion sans précédent de production scientifique, à son partage à l'échelle planétaire et à son application pour la mise au point de tests de dépistage, de vaccins et de traitements, pour le bénéfice public mais soulevant parfois des questions de fiabilité[180],[181].

Les archives de prépublications, notamment bioRxiv et medRxiv, et divers forums de chercheurs, permettent une diffusion rapide — mais non formellement approuvée par les pairs — de l'information scientifique concernant SARS-CoV-2[182]. BioRxiv a publié le premier preprint sur SARS-CoV-2 (alors nommé 2019-nCoV) le [183] et medRxiv le [184].

Les premières publications scientifiques validées par les pairs datent du [185]. Plusieurs grandes revues et grands éditeurs scientifiques, devant l'urgence de la situation, ont décidé de rendre disponibles hors abonnement certaines publications scientifiques sur le nouveau coronavirus et la pneumonie associée. C'est notamment le cas de Elsevier[186], The Lancet[187], The New England Journal of Medicine[188], Science[189], Springer-Nature[190] ou encore Wiley[191].

Le 2 avril 2020, la Commission européenne a ouvert un portail de données dédié[192], appuyé sur l'infrastructure ELIXIR (en), afin de faciliter la collecte et le partage des données de recherche disponibles[193] : séquences, données d'expression, protéines, structures, littérature, autres. Cette ressource sert au passage de pilote pour la mise en place du dispositif European Open Science Cloud (EOSC).

Une plateforme internationale en open-data, GISAID, est destinée à recueillir les données sur le séquençage du génome du virus, et qui a par ailleurs étendu sa collecte à des données épidémiologiques. Ces données sont exploitées par un projet lui aussi en accès libre, NextStrain[194]. Au , GISAID recense plus de 63 000 séquences du génome. Il semblerait toutefois qu'en raison d'enjeux financiers ou de pouvoir, le partage des données se tarisse après le pic de la pandémie. Selon Mediapart (à la date de juillet 2020), la France n'aurait publié que « 394 génomes dans cette base, soit à peine 1 % du nombre total de génomes partagés au niveau international »[195].

Illustration emblématique

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Illustration d'un virion de SARS-CoV-2, créée par Alissa Eckert et Dan Higgins, du Département de la Santé et des Services sociaux des États-Unis en 2020.
 
Casque de moto en forme de SARS-CoV-2, porté par un policier en mars 2020 (Inde).

La modélisation de la particule (virion) de SARS-CoV-2 par les illustrateurs médicaux Alissa Eckert et Dan Higgins, des centres pour le contrôle et la prévention des maladies, les principales agences fédérales des États-Unis en matière de protection de la santé publique, s'est imposée aux médias du monde entier comme l'image emblématique du virus ; quand bien même des illustrations plus précises sont apparues ultérieurement. En pleine pandémie, elle fait la une de la presse et des émissions télévisuelles ; les gens se l'approprient à travers des déguisements, des peluches ou des piñatas cathartiques[Quoi ?]. Elle en devient le symbole[196].

Diffusée sous licence libre au tout début de l'épidémie à partir de , il s'agit de la première modélisation du virus créée afin d'alerter la population américaine.

Basée sur une photographie en noir et blanc issue du Centre chinois de contrôle et de prévention des maladies de Pékin, son rendu est colorisé et stylisé, et n'est pas strictement fidèle à la réalité scientifique[196]. En effet, la lumière polarisée, la texture granuleuse, la rondeur parfaite de la cellule ainsi que les couleurs chaudes sont des mises en scène artistiques. Ainsi, le rouge des protéines S évoque inconsciemment le danger et le sang ; les grains jaunes des protéines E et orange des protéines M sont gommés pour mettre en valeur les protéines S qui figurent l'identité du virus. Selon l'historienne de l'art Fleur Hopkins-Loféron, cette illustration est l'héritière de l'image du virus du SIDA : une boule rougeoyante inquiétante ornée de piquants agressifs[196].

En 2020, cette modélisation reçoit le prix Beazley décerné par le Design Museum de Londres[196].

Notes et références

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  1. a et b L'acronyme SRAS-CoV-2 est presque uniquement utilisé au Canada et en Suisse romande.
  2. a et b L'OMS, en français, recommande l'usage du nom officiel défini par l'ICTV [c'est-à-dire SARS-CoV-2] (voir Appellation de la maladie à coronavirus 2019 (COVID-19) et du virus qui la cause, § Quel est le nom utilisé par l'OMS pour le virus ?).
  3. Dans tous les cas, le virion est toujours d'une taille largement suffisante pour être assez facilement visible au microscope électronique, y compris sur des coupes minces, sans toutefois qu'on puisse le distinguer par sa forme d'autres coronavirus.

Références

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Voir aussi

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Bibliographie

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Articles connexes

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Liens externes

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