Noblesse phanariote

La noblesse phanariote, grecque ou hellénisée, est connue surtout par les noms de quelques-uns des Grands Drogmans de la « Sublime Porte » et des princes qui ont régné au XVIIe siècle et au XVIIIe siècle en Moldavie et en Valachie[1].

D'origine balkanique, a noblesse phanariote est, pour différentes raisons dont l'une est la faiblesse de ses effectifs, et une autre son appartenance confessionnelle à l'église orthodoxe, très peu connue et reconnue hors de son aire historique depuis le milieu du XXe siècle. Elle n'appartient pas à un seul pays, ni actuellement, ni dans son origine, et s'est progressivement intégrée à la noblesse roumaine, à la noblesse russe ou encore aux élites intellectuelles de Grèce ou d'Europe occidentale. Par leurs origines, les familles phanariotes trouvent leurs racines dans différents peuples des Balkans : par exemple, les Ghica étaient Albanais, les Callimachi étaient Moldaves, les Stourdza étaient Valaques, les Graziani italo-levantins, et ainsi de suite[2],[3].

Histoire modifier

Après la chute de l'Empire byzantin, les survivants de l'aristocratie byzantine se sont regroupés autour du siège patriarcal œcuménique de Constantinople. Celui-ci se situant dans le quartier constantinopolitain du Phanar, on surnomma ces nobles Phanariotes. Ces familles ont su parvenir aux plus hauts postes dans le nouvel Empire ottoman et à partir du XVIIe siècle, c'est dans leurs rangs que furent choisis presque tous les princes de Moldavie, les princes de Valachie[4], et les Grands Drogmans[5].

Dans les Constitutions républicaines qui régissent la Roumanie et la Grèce au XXIe siècle, aucun titre de noblesse n'est reconnu. Par ailleurs, historiquement, la noblesse des Balkans n'a ni la même hiérarchie, ni les mêmes rangs, ni les mêmes règles de transmission et de succession que les noblesses occidentales ou russe, et n'est pas endogame, de sorte qu'elle n'est généralement pas reconnue comme telle. C'est pourquoi, dans les pays roumains, les Princes de Moldavie et de Valachie sont connus comme boyards, comme voïvodes ou comme hospodars, mais n'entrent dans les rangs des princes, ducs, comtes, marquis ou barons d'Europe occidentale, centrale ou de la Russie impériale (depuis Pierre le Grand) que si des souverains de ces contrées les ont spécifiquement adoubés. N'étant pas musulmans, à l'exception de quelques rares convertis, les nobles phanariotes n'entrent pas non plus dans les rangs de l'élite ottomane, formée par les charges de mouchir, pacha, dey ou bey : tout au plus appelait-on les fils du Prince Beyzadés : « fils de Bey ». Il existe quelques exceptions : par exemple les familles Aristarchi et Ghica reçurent l'hérédité du titre de Prince moldo-valaque, respectivement du Sultan Abdul-Aziz et du Sultan Mahmoud.

Liste de familles phanariotes modifier

Nom Titre Note Ethnie Ancienneté Blason
Prince La famille Argyropoulo est une des plus anciennes et des plus illustres de la Grèce. Elle descendrait, selon la tradition, de la famille impériale de ce nom. Au IXe siècle jusqu'à nos jours, on retrouve dans l'histoire des membres de la famille Argyropoulo occupant toujours les plus hautes positions.

Déjà au commencement du IXe siècle les Argyropoulo étaient sénateurs généraux de l'Empire de Byzance. En 840, sous le règne de Michel III, Léon Argyre fondait le monastère de St. Elisabeth en Charsiane de la Cappadoce, dont cette famille était originaire. En 848 l'impératricee Théodora le chargeait du commandement de l'expédition contre les Pauliciens, dont plus de cent mille furen tués.

Constantin Argyropoulo[6]
né le (78 ans)
VIIIe siècle  
Prince La famille Argyropoulos, d'origine phanariote installée en Roumanie, apparaît sous le nom «Argyre» dès le VIIIe siècle. Elle est originaire de l'empire byzantin et plus particulièrement de la zone autour de la forteresse de Charsianon en Cappadoce. VIIIe siècle  
Prince La famille Callimachi est d'origine moldave, les Chroniques de la Moldavie l'appellent «Calmâsul». Au XVIIe siècle, le prince Philippe Callimachi était secrétaire de l'empereur Léopold Ier du Saint-Empire; après sa mort, il se serait établi en Moldavie.  
Prince La famille Cantacuzène était déjà une des plus illustres et des plus puissantes parmi les phanariotes au XVIIe siècle, régnant alternativement sur les deux principautés roumaines. Alexandre Cantacuzène[7]  
Prince La famille Caradja a émigré à Constantinople déjà vers la fin du XVe siècle, nous y trouvons Jean Caradja, dont le fils, Constantin Caradja était Commissaire des Vivres de l'armée ottomane en 1560. Elle aurait été officier chez les Khan de Crimée. Constantin Caradja[8]
né le (81 ans)
 
Prince La famille Ghica, d'origine arvanite, émigra à Constantinople au XVIIe siècle. Elle fournit de nombreux princes de Moldavie et de Valachie, en 1673 l'empereur Léopold Ier du Saint-Empire lui décerna le titre de prince du Saint-Empire. Stefan Ghica[9]
né le (59 ans)
 
Prince La famille Ghica, d'origine arvanite, émigra à Constantinople au XVIIe siècle. Elle fournit de nombreux princes de Moldavie et de Valachie, en 1673 l'empereur Léopold Ier du Saint-Empire lui décerna le titre de prince du Saint-Empire. Emmanuel Handzery[10]
né le (79 ans)
 
Prince La famille Manos est originaire de Kastoria, en Macédoine, s’installe à Constantinople avec Manolaki (né vers 1655), fils de Georges et petit-fils d'Emmanuel Philippou (1610-1699). Il est nommé Grand Logothète du patriarche de Constantinople. Constantin Mano[11]
né le (86 ans)
 
Prince La famille Manos est originaire de Kastoria, en Macédoine, s’installe à Constantinople avec Manolaki (né vers 1655), fils de Georges et petit-fils d'Emmanuel Philippou (1610-1699). Il est nommé Grand Logothète du patriarche de Constantinople. Anthony Noël Maurocordato[12]
né le (79 ans)
 
Prince La famille Manos est originaire de Kastoria, en Macédoine, s’installe à Constantinople avec Manolaki (né vers 1655), fils de Georges et petit-fils d'Emmanuel Philippou (1610-1699). Il est nommé Grand Logothète du patriarche de Constantinople.  
Prince La famille Mourousis appartient à une ancienne famille byzantine. Ils habitèrent l'Empire de Trébizonde et s'allièrent à la famille impériale par le mariage d'un des leurs avec la fille du dernier empereur David Comnène. Paul Mourousis[13]
né le (60 ans)
 
Prince La famille Movilești, originaire des principautés roumaines (Moldavie et Valachie), est une famille de boyards Ioan Movilă ou Moghilă de Udești grand Logothète de Moldavie, mort moine en 1570, qui avait épousé la fille du prince Pierre IV Rareș.  
Prince La famille des Mușatini est une famille princière de Moldavie, branche de la famille des Bogdanești issue de Bogdan II Mușat, et dont quelques représentants comme Étienne Ier le Sourd ou Alexandre III ont aussi régné en Valachie. XIVe siècle  
Prince La famille Pálffy a reçu le statut de baron hongrois en 1581. Nicolas (Miklós) II Pálffy d'Erdőd (1552-1600), originaire du château de Csábrág (Čabraď) et ispán du comitat de Pozsony (Bratislava), était un chef militaire. Ils ont été anobli comte et prince. XVe siècle  
Prince La famille Rosetti est d'origine grecque : le premier membre épouse une sœur d'Andronic Cantacuzène. C'est ce qui permet à Antonie Ruset, de régner sur la Moldavie. Sa famille s'intègre aux Phanariotes au cours des XVIIe siècle et XVIIIe siècle. Radu-Alexandru Rosetti[14]
né le (55 ans)
XVIIe siècle  
Prince La famille Rosetti est d'origine grecque : le premier membre épouse une sœur d'Andronic Cantacuzène. C'est ce qui permet à Antonie Ruset, de régner sur la Moldavie. Sa famille s'intègre aux Phanariotes au cours des XVIIe siècle et XVIIIe siècle. XVIIe siècle  
Prince La famille Soutzoest originaire d'Epire, le nom primitif de la famille parait avoir été celui de «Draco», et c'est par ce nom que les princes Soutzo ont toujours été désignés dans les Décrets Impériaux turcs. Ils régnèrent sur la Valachie. Jean-Marie Soutzo[15]
né le (80 ans)
XVIe siècle  
Prince La famille Sturdza est une vieille famille valaque, descendant de Jon Vlad Tourzo, Hospodar de Transylvanie en 1432, duc d'Almassu et de Fagarassu. La famille est rentrée également au service de la famille impériale de Russie. XVe siècle  
Prince La famille Ypsilántis appartient à une ancienne famille byzantine, qui avait déjà donné un Patriarche à Constantinople, qui suivit Alexis Ier Comnène, lorsqu'il alla fonder l'empire de Trébizonde en 1204. Elle occupa toujours une haute position. XIIIe siècle  

Bibliographie modifier

Références modifier

  1. Rizo-Rangabé 1892, p. 1-6.
  2. Rizo-Rangabé 1892, p. 7-10.
  3. Rizo-Rangabé 1892, p. 11-14.
  4. Rizo-Rangabé 1892, p. 15-36.
  5. Rizo-Rangabé 1892, p. 37-44.
  6. Rizo-Rangabé 1892, p. 45-58.
  7. Rizo-Rangabé 1892, p. 59-60.
  8. Rizo-Rangabé 1892, p. 61-70.
  9. Rizo-Rangabé 1892, p. 71-80.
  10. Rizo-Rangabé 1892, p. 81-86.
  11. Rizo-Rangabé 1892, p. 87-94.
  12. Rizo-Rangabé 1892, p. 95-98.
  13. Rizo-Rangabé 1892, p. 99-106.
  14. Rizo-Rangabé 1892, p. 107-110.
  15. Rizo-Rangabé 1892, p. 111-122.
  16. Rizo-Rangabé 1892, p. 123-128.
  17. Rizo-Rangabé 1892, p. 129-140.
  18. Rizo-Rangabé 1892, p. 141-152.
  19. Rizo-Rangabé 1892, p. 153-156.

Notes modifier

  1. Jean-Michel Cantacuzène, Mille ans dans les Balkans, Éditions Christian, Paris, 1992. (ISBN 2-86496-054-0).
  2. Mihail Dimitri Sturdza, Dictionnaire historique et généalogique des grandes familles de Grèce, d'Albanie et de Constantinople, M.-D. Sturdza, Paris, chez l'auteur, 1983 (ASIN B0000EA1ET)
  3. Eugène Rizo-Rangabé, Livre d'or de la noblesse phanariote en Grèce, en Roumanie, en Russie et en Turquie, Athènes, S. G. Vlastos, (ISBN 978-2-012-89991-9) (Lire en ligne).
  4. Neagu Djuvara, Les pays roumains entre Orient et Occident : les Principautés danubiennes au début du XIXe siècle, Publications Orientalistes de France, 1989
  5. Joëlle Dalègre, Grecs et Ottomans 1453-1923 : de la chute de Constantinople à la fin de l’Empire Ottoman, L’Harmattan, Paris 2002, (ISBN 2747521621).
  6. Arbre généalogique de la famille Argyropoulo
  7. Arbre généalogique de la famille Cantacuzène
  8. Arbre généalogique de la famille Caradja
  9. Arbre généalogique de la famille Ghica
  10. Arbre généalogique de la famille Handzery
  11. Arbre généalogique de la famille Mano
  12. Arbre généalogique de la famille Maurocordato
  13. Arbre généalogique de la famille Mourousis
  14. « Arbre généalogique de la famille Rosetti », sur ghyka.com.
  15. Arbre généalogique de la famille Soutzo