Lambic

style de bière fermentée spontanément

Le lambic (lambiek ou encore lambik en néerlandais)[1] est une bière de fermentation spontanée, en principe exclusivement produite dans la vallée de la Senne (sud de Bruxelles) et dans le Pajottenland (ouest de Bruxelles). C'est une bière plus ou moins acide selon son âge, sans pétillant ni mousse, et titrant environ 5 degrés d'alcool. Elle est consommée telle quelle et sert aussi de base pour la production du faro, de la gueuze et de la kriek.

Quelques exemples de bières à base de lambic

Histoire modifier

Origine modifier

Une bière appelée « allambique » apparaît pour la première fois en 1794, à Bruxelles. Le faro, qui est une bière de la même famille, est mentionné dans un contexte bruxellois en 1721, et apparaît dans le paiement d'une dîme à Asse en 1775[2].

Une première description de l'application de la fermentation spontanée est donnée en 1829, dans un texte qui est aussi parmi les premiers à mentionner la « geuze-bier » qui sera bientôt connue sous le nom de « gueuze »[3]. À la fin du XIXe siècle, la gueuze, sous la forme d'un lambic refermenté en bouteille devient de plus en plus populaire, comme le krieken-lambic.

Étymologie modifier

La première mention de lambic est sous la forme « allambique », qui semble être dérivée du mot alambic. Localement, on produit du genièvre par distillation du grain dans les alambics. En raison de la ressemblance entre les alambics et les cuves de brassage on parlait de « bière d'alambic ».

 
Logo de la STG

Protection de l'appellation modifier

Depuis 1997, les bières de lambic bénéficient de la mention STG (Spécialité traditionnelle garantie)[4]. Toutefois cette mention ne garantit pas la provenance géographique et les définitions Faro, Geuze et Kriek sont trop imprécises pour constituer une garantie sérieuse de qualité. Les mentions Vieille Gueuze et Vieille Kriek sont en revanche plus fiables.

À la même époque, l'Union européenne a rendu obligatoire l'étiquetage et la mention d'une date limite d'utilisation optimale (DLUO) remplacée par la date de durabilité minimale (DDM) en [5]. Auparavant les bouteilles de gueuze et de kriek étaient simplement marquées d'un trait à la chaux blanche ou rouge.

Brassage modifier

 
Houblon suranné
 
Cuve ouverte, large et peu profonde, pour le refroidissement du lambic et son ensemencement par les levures ambiantes après cuisson
 
Barriques de lambic traditionnelles en bois, des indications à la craie permettent d'identifier le brassin
 
Fûts industriels de lambic

Les lambics sont brassés à partir d'environ 50-70 % de malt d'orge et 30-50 % de froment.

Au cours de la cuisson, on ajoute du houblon suranné (âgé de 2 à 3 ans).

Le moût est ensuite versé dans un bac refroidisseur très large et peu profond, en général installé sous le toit. Là, il refroidit à l'air libre durant une nuit, où il est ensemencé par des bactéries et des levures sauvages dont Brettanomyces bruxellensis et Brettanomyces lambicus, caractéristiques de la vallée de la Senne et du Pajottenland. Il n'y a pas d'ajout de levure contrairement aux ales ou aux pils. On parle de fermentation spontanée. Le procédé n'est utilisé que d'octobre à mai suivant l'adage : « En hiver, brasse qui veut ; en été, brasse qui peut. » Le reste de l'année il fait trop chaud, la bière ne refroidit pas assez vite et l'air est trop riche en bactéries nuisibles.

Le moût ensemencé est ensuite transféré en barriques de chêne ou châtaignier où il fermente et devient lambic. Ces barriques sont généralement achetées d'occasion à des producteurs de vin ou de porto en raison du prix élevé des barriques neuves. Elles sont entretenues et conservées le plus longtemps possible. La maturation du lambic peut durer plus de trois ans. Le processus est complexe ; certaines levures et bactéries sont rapidement très actives, d'autres se manifestent plus tard. Ceci est le procédé pour la méthode traditionnelle. Pour la méthode industrielle on emploie des fûts en métal.[réf. nécessaire]

Différents lambics modifier

  • le lambic (lambiek ou lambik en néerlandais)

Il s'agit d'une bière vieille de six à douze mois (lambic jeune) ou même jusqu'à trois ans (lambic vieux) environ, trouble, avec peu de pétillant. Elle n'est pas conditionnée en bouteille et on n'en trouve que dans certains cafés.

  • la gueuze (geuze en néerlandais)

La gueuze est produite par un assemblage de lambics jeunes et vieux qui provoque une refermentation secondaire en bouteille produisant le pétillant. Elle titre de 5 à 8 % vol.[6] Elle est souvent qualifiée de « champagne de la bière ». Ses points communs avec le vin de Champagne sont l'utilisation de bouteilles de champagne et le fait qu'il s'agisse d'un assemblage de différents millésimes[7]. Par contre on n'ajoute pas de liqueur de tirage. La gueuze n'est donc pas produite par une méthode champenoise[8].

  • le faro

Le faro[9] est un lambic adouci par l'ajout de sucre candi brun qui lui confère un goût caramélisé. C'est sous cette forme que le lambic était autrefois majoritairement consommé. Le succès de la pils et le développement de la gueuze et la kriek, permis par l'amélioration de la solidité des bouteilles et l'emploi de bouteilles à champagne, l'ont presque fait disparaître. Le faro doit être consommé assez rapidement car le sucre candi relance la fermentation. Malgré cette DLUO courte, quelques brasseurs proposent aujourd'hui du faro en bouteille[10].

  • la kriek et autres lambics aux fruits

Les lambics fruités, notamment à la cerise (kriek), à la pêche (Pêcheresse) ou à la framboise, sont produites par le mélange de lambic jeune avec des fruits, sous forme de fruits entiers, de pulpe, ou de jus. S'ils sont présents, la peau, le noyau ainsi que les levures présentes sur le fruit participent à l'élaboration du goût. Les cerises utilisées pour la kriek ont un goût suret et le sucre qu'elles apportent se transforme en alcool. Les vraies krieks ont un goût très peu sucré. On trouve aussi des lambics au cassis, au citron, à la pèche… Pour des raisons autant pratiques qu'économiques (la saison des fruits est courte et les fruits sont souvent importés de l'étranger), on utilise parfois des fruits congelés avec un résultat convenable. Par contre, l'utilisation de jus ou de sirop pour les productions industrielles de certains brasseurs produit des bières fort sucrées plus apparentées à de la limonade qu'à de la bière-lambic.

Brasseurs et coupeurs modifier

Les brasseurs et les coupeurs commercialisent tous au moins de la gueuze et de la kriek à l'exception de la gueuzerie Tilquin ne produisant pas de kriek. Chez la plupart on trouve aussi de la framboise. Quelques-uns vendent du lambic ou du faro ainsi que des lambics aromatisés avec d'autres fruits. En Belgique[11] elles sont commercialisées sous les marques et sous-marques :

Brasserie/Gueuzerie Village (Commune) Province Marque Variétés des bières Production annuelle en hl Membre HORAL Géolocalisation
Brasserie Belle-Vue (fait partie d'AB InBev) Leeuw-Saint-Pierre Brabant flamand Belle-Vue Gueuze, Kriek, Framboise +0030 000, (2017) / 50° 47′ 55″ N, 4° 17′ 12″ E
Brasserie Boon Lembecq (Hal) Brabant flamand Boon Gueuze, Faro, Kriek, Framboise +0014 000, (2011) HORAL 50° 42′ 41″ N, 4° 13′ 09″ E
Brasserie Cantillon Anderlecht Bruxelles Cantillon Gueuze, Kriek, Framboise, Autres fruits +0004 500, (2018) / 50° 50′ 30″ N, 4° 20′ 07″ E
Gueuzerie De Cam Gooik Brabant flamand De Cam Gueuze, Lambic, Faro, Kriek +0 000100, (2009) HORAL 50° 47′ 45″ N, 4° 06′ 51″ E
Brasserie De Troch Wambeek (Ternat) Brabant flamand Chapeau Gueuze, Faro, Kriek, Framboise, Autres fruits +0004 000, (2014) HORAL 50° 51′ 10″ N, 4° 09′ 51″ E
Brasserie Drie Fonteinen[12] Beersel Brabant flamand Drie Fonteinen, Doesjel, Armand'4 Gueuze, Lambic, Kriek +0001 000,(*) (2010) / 50° 46′ 00″ N, 4° 18′ 28″ E
Brasserie Girardin Chapelle-Saint-Ulric (Dilbeek) Brabant flamand Girardin Gueuze, Lambic, Faro, Kriek, Framboise +0005 000, (2004) / 50° 52′ 30″ N, 4° 14′ 03″ E
Gueuzerie Hanssens[13] Tourneppe (Beersel) Brabant flamand Hanssens Gueuze, Kriek, Fraise +0 000300, (2010) HORAL
Brasserie Lindemans Vlezenbeek (Leeuw-Saint-Pierre) Brabant flamand Lindemans Gueuze, Lambic, Faro, Kriek, Framboise, Autres fruits 125 000 (2021) HORAL 50° 48′ 57″ N, 4° 12′ 45″ E
Brasserie Mort Subite ex De Keersmaeker (fait partie d'Alken-Maes<Heineken) Kobbeghem (Asse) Brabant flamand Mort Subite Gueuze, Lambic, Faro, Kriek, Framboise, Autres fruits +0050 000, (2006) HORAL 50° 54′ 39″ N, 4° 14′ 59″ E
Brasserie Omer Vander Ghinste[14] (ex Bockor) Bellegem (Courtrai) Flandre-Occidentale Jacobins, Max Gueuze, Faro, Kriek, Framboise, Autres fruits +0090 000,(*) (2014) / 50° 46′ 36″ N, 3° 16′ 45″ E
Gueuzerie Oud Beersel Beersel Brabant flamand Oud Beersel Gueuze, Lambic, Kriek +0001 000, (2010) HORAL 50° 45′ 31″ N, 4° 18′ 03″ E
Gueuzerie Tilquin Bierghes (Rebecq) Brabant wallon Tilquin Gueuze, Autres fruits +0 000600, (2014) HORAL 50° 41′ 36″ N, 4° 06′ 42″ E
Brasserie Timmermans (fait partie de la Martin's Finest Beer Selection) Itterbeek (Dilbeek) Brabant flamand Timmermans Gueuze, Lambic, Faro, Kriek, Framboise, Autres fruits +0015 000, (2006) HORAL 50° 50′ 24″ N, 4° 14′ 50″ E
Brasserie Van Honsebrouck Ingelmunster Flandre-Occidentale Saint-Louis Gueuze, Lambic, Kriek, Framboise, Autres fruits +0075 000, (2004) / 50° 55′ 17″ N, 3° 14′ 08″ E

(*) Production totale de la brasserie comprenant aussi le brassage d'autres types de bières que des lambics.

Remarques modifier

Production modifier

La production de bière à base de lambic était en 2004 d'environ 500 000 hl[15], soit environ 0,035 % de la production mondiale de bière. La production est assurée à 29 % par les brasseurs et coupeurs du HORAL, 29 % par les 2 brasseries situées hors de la région traditionnelle du lambic, 42 % par la brasserie Belle-Vue, et le restant par la brasserie Cantillon :

Belle-VueBrasserie Van HonsebrouckBockorLindemansBrasserie Mort SubiteTimmermans (bière)Brasserie BoonBrasserie GirardinDe TrochBrasserie CantillonDrie FonteinenHanssensDe CamOud Beersel

Événements modifier

Depuis 1992, les Opstalse Bierpallieters organisent le Week-end de la Fermentation Spontanée qui donne l'occasion de goûter environ soixante-cinq bières différentes, majoritairement à base de lambic [2].

Depuis 1997, les années impaires, le HORAL organise le Tour de gueuze (Toer de geuze en néerlandais) qui permet de visiter les brasseries membres et de goûter leurs bières.

Depuis 2004, les années paires, In de Verzekering tegen de grote dorst, un "geuzecafé" typique à Eizeringen (Lennik) organise La nuit de la grande soif qui est un festival international de la gueuze et de la kriek.

Notes et références modifier

  1. Parfois au féminin "La lambic" cité par le brasseur lindemans
  2. Thierry Delplancq, 'Les brasseurs de lambic. Données historiques et géographiques (XVIIIe S. - XXe S.) (1)', dans: Archives et bibliothèques de Belgique, volume 67 (1996), no. 1-4, p. 257-320; Jacob Campo Weyerman, De Rotterdamsche Hermes, Amsterdam 1980, p. 391.
  3. Jean Baptiste Vrancken, ‘Antwoord op vraag 81’, dans: Nieuwe verhandelingen van het Bataafsch Genootschap der Proefondervindelijke Wijsbegeerte te Rotterdam, Rotterdam 1829.
  4. Sont protégées les dénominations suivantes (règlements (CEE) n° 2082/92 et 2301/97, citations : [1]) :
    • Faro
    « Certaines composantes du Faro ont subi une maturation de plus de 3 ans et sont à l'origine de son goût caractéristique et les définations. Relativement acide à la base, le Faro est édulcoré au sucre candi. »
    • Lambic, Gueuze Lambic, Gueuze/Lambiek, Geuze-Lambiek, Geuze
    « Le nom lambic est dû aux Brettanomyces lambicus et bruxellensis [sic], composantes microbiennes déterminantes qui donnent au lambic son goût caractéristique. La composante la plus âgée de la gueuze (ou gueuze lambic) a subi une maturation de plus de 3 ans en tonneaux de bois. »
    • Kriek, Kriek-Lambic, Framboise-Lambic, Fruit-Lambic/Kriek, Kriekenlambiek, Frambozenlambiek, Vruchtenlambiek
    « Bière acide, la Kriek résulte du coupage de différents lambics. Elle contient entre 10 et 25 % de cerises (en fruits, jus ou jus concentré), comme les autres bières fruitées, à l'exception de la pêche qui peut en contenir jusqu'à 30 % et de la kriek ''Drie Fonteinen'' qui en contient 35 %. »
    • Vieille Gueuze, Vieille Gueuze-Lambic, Vieux Lambic/Oude Geuze, Oude Geuze-Lambiek, Oude Lambiek
    « La Gueuze et Vieille Gueuze sont le résultat d'un coupage de lambics dont la composante la plus âgée présente au moins 3 ans de maturation en tonneaux de bois. Une différence est que chez la Vieille Gueuze l'âge moyen pondéré des lambics utilisés doit être supérieur ou égal à 1 an. Une autre distinction entre une Gueuze et une Vieille Gueuze consiste entre autres dans le fait qu'une Vieille Gueuze a subi une refermentation et est conditionnée sur lie. »
    • Vieille Kriek, Vieille Kriek-Lambic, Vieille Framboise-Lambic, Vieux fruit-Lambic/Oude Kriek, Oude Kriekenlambiek, Oude Frambozenlambiek, Oude Fruit-lambiek
    « La distinction entre une Kriek et une Vieille Kriek ou entre un Fruit lambic ou un Vieux Fruit lambic consiste entre autres dans le fait qu’une Vieille Kriek/Vieux Fruit lambic a subi une refermentation et est conditionné(s) sur lie. »
  5. Par exemple pour la Oude Geuze Boon issue des saisons brassicoles 2002-2003 la date limite de consommation conseillée est de 2025 !
  6. La Oude geuze Boon Mariage parfait titre 8 % vol.
  7. Les champagnes millésimés ne sont toutefois produit qu'à partir de raisins d'une seule année.
  8. La brasserie Cantillon produit une cuvée spéciale appelée Lou Pepe qui se rapproche des champagnes millésimés. Seul un lambic de deux ans est utilisé et il y a un ajout d'une liqueur sucrée pour provoquer la refermentation.
  9. Et comme le dit si bien le petit Charmant Debaudelaire : « faro is een bier dat tweemaal gedronken is ».
  10. « Bouteille de bière Faro Lindemans 4.5° », sur bouteille-de-biere.com (consulté le ).
  11. En France, par exemple, la brasserie Van Honsebrouck utilise la dénomination gueuze Vieux-Bruges (sic) et InBev la dénomination gueuze Bécasse.
  12. Armand Debelder était au départ coupeur de lambic comme De Cam et Hansens. Depuis 1999, il brasse également son propre lambic.
  13. De Cam, Hanssens et Tilquin ne sont pas des brasseurs à proprement parler mais des coupeurs. Ils achètent du moût de lambic chez Boon, Girardin ou Lindemans et se chargent ensuite du vieillissement en fût, du coupage et la mise en bouteille. En plus de ces trois fournisseurs, Tilquin pour sa part achète également du moût de lambic chez Cantillon.
  14. « La brasserie Omer Vander Ghinste va investir 10 millions d’euros », sur deredactie.be, VRT NWS: le site d'information de référence, (consulté le ).
  15. Geuze en kriek de champagne onder de bieren, Jef van den Steen, Davidsfonds /Leuven, 2006. (ISBN 90-5826-410-6)

Voir aussi modifier

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Articles connexes modifier

Bibliographie modifier

  • (nl) Jef van den Steen, Geuze en kriek. De champagne onder de bieren, Louvain, Davidsfonds/Leuven, , 176 p. (ISBN 90-5826-410-6)
  • Jef van den Steen, Gueuze & Kriek. La magie du Lambic, Lannoo, , 224 p. (ISBN 978-90-209-9875-7, lire en ligne)
  • Michael Jackson, Les grandes bières de Belgique [« The greats beer of Belgium »], Anvers, MMC-CODA, , 500 p. [détail des éditions] (lire en ligne), p. 100-160
    5e édition depuis 1991, chaque fois revue et complétée
  • Raymond Buren, Gueuze, faro et kriek, Bruxelles, Glénat, coll. « Bacchus et Gambrinus », , 150 p. (ISBN 2-87176-013-6)
  • (en)/(nl) Tim Webb, Chris Pollard et Joris Pattyn, LambicLand/LambikLand, Cambridge, Cogan & Mater, , 64 p. (ISBN 0-9547789-0-1)
  • (en) Tim Webb, Chris Pollard et Siobhan McGinn, LambicLand : A journey round the most unusual beers in the world, Cambridge, Cogan & Mater, , 2e éd., 128 p. (ISBN 978-0-9547789-7-2 et 0-9547789-7-9)
  • Nicole Darchambeau, Le temps des cerises, Limillette, Les Capucines, (réimpr. 2005), 56 p., p. 7-12
    2e éd. parue sous le titre Le temps des cerises chez Cantillon, préf. Jean-Pierre Van Roy (maître-brasseur chez Cantillon)

Liens externes modifier