Gouvernement Charles Floquet

Le gouvernement Charles Floquet est le gouvernement de la Troisième République en France du au .

Contexte

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Le début de l'année 1888 est marquée par l'augmentation de la menace du boulangisme et le gouvernement Tirard décide le 20 mars, de traduire Georges Boulanger devant un conseil d'enquête, qui conclu à la culpabilité du général pour fautes graves le 26 mars. Le 27, Logerot radie le général des cadres de l'armée[1].

Alors que le gouvernement est déjà pressenti pour tomber, Georges Laguerre, souhaitant accélérer les choses et propose à la Chambre une proposition de révision constitutionnelle le . Tirard, pose la confiance envers le gouvernement contre l'urgence de la proposition. Il est alors renversé par 268 contre 237 (les socialistes, l'extrême gauche et la gauche radical votant en même temps que 136 députés de droite). La Chambre refuse cependant la nomination immédiate de la commission. Pierre Tirard présente la démission du Gouvernement au président de la République, Sadi Carnot[2].

C'est le nom de Charles Floquet qui est porté par les radicaux qui s'impose rapidement pour éviter de donner le pouvoir à Georges Clemenceau que les opportunistes souhaitent éviter. De plus, son ambition ministérielle est bien connu de tous, doublée d'une division sur sa personnalité qui est jugée trop vaniteuse et n'ayant pas l'ossature d'une homme d'état. Il est donc soutenu par les opportunistes uniquement pour contrer le boulangisme. Le gouvernement de Tirard étant tombé sur la question de la révision constitutionnelle, le gouvernement Floquet doit porter cette réforme en premier.

Une nouvelle fois, Boulanger est écarté du ministère de la Guerre et remplacé pour la première fois par un civil : Charles de Freycinet. Paul Peytral est aussi un gage pour les opportunistes car se vision de réformes fiscales est assez limitée. Le ministère est institué le 3 avril et se présente immédiatement devant les Chambres où l'accueil est glacial. Il n'y a aucun vote de confiance en raison de la fin de la session parlementaire[3].


Composition

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Ministres nommés le 3 avril 1888

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Fonction Image Nom Parti politique
  Président du Conseil des ministres   Charles Floquet Gauche radicale
Fonction Image Nom Parti politique
  Ministre de l’Intérieur   Charles Floquet Gauche radicale
  Ministre de la Justice et des Cultes   Joannis Ferrouillat Radical
  Ministre des Affaires étrangères   René Goblet Gauche radicale
  Ministre des Finances   Paul Peytral Gauche radicale
  Ministre de la Guerre   Charles de Freycinet[4] Gauche républicaine
  Ministre de la Marine et des Colonies   Jules François Émile Krantz[5] SE
  Ministre de l'Instruction publique, des Beaux-Arts   Édouard Lockroy Gauche radicale
  Ministre des Travaux publics   Pierre Deluns-Montaud Gauche républicaine
  Ministre de l'Agriculture   Jules Viette[5] Gauche radicale
  Ministre du Commerce et de l'Industrie   Pierre Legrand Gauche républicaine

Nomination du 5 avril 1888

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Fonction Image Nom Parti politique
  Sous-secrétaire d'État à la Marine et aux Colonies (spécialement pour les colonies)   Amédée de La Porte Gauche radicale

Nomination du 19 mai 1888

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Fonction Image Nom Parti politique
  Sous-secrétaire d'État à l'Intérieur   Léon Bourgeois Gauche radicale

Remaniement du 5 février 1889

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Remaniement du 6 février 1889

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Fonction Image Nom Parti politique
  Ministre de la Justice et des Cultes   Edmond Guyot-Dessaigne Union des gauches
(Union républicaine)

Lors de son arrivée Charles Floquet indique qu'il a la volonté de faire une révision de la Constitution sans donner de dates. Ce projet n'est présenté qu'en octobre 1888 et la discussion ne commence qu'en février 1889, en même temps que des propositions de lois. Le projet de révision porte d'abord sur la méthode d'élaboration de la loi pour en raccourcir le temps d'élaboration. La Chambre des députés fait la loi et la vote définitivement, celle-ci serait renouvelée partiellement tous les deux ans par tiers pour permettre la poursuite des travaux parlementaires. Le Sénat n'aurait alors qu'un droit de contrôle et obtient le droit d'ajournement des lois jusqu'au prochain renouvellement partiel. La loi de finance doit être votée avant le 31 décembre et ne peut être retardée par le Sénat. Il serait aussi renouvelle par tiers tous les deux ans à la même période que la Chambre. Le Président perdrait le droit de dissolution et d'ajournement.

Le gouvernement aurait une durée légale de mandat reçut du Président de la République, de deux ans selon la proposition initiale. Les ministres peuvent cependant démissionner. La Chambre peut renverser le gouvernement en envoyant une déclaration au Président, il est ainsi rappelé l'article 28 de la loi du 24 avril 1791. Enfin, le conseil d'État est désigné par le Sénat et la Chambre pour préparer, discuter et rédiger les lois au niveau juridique et donne des avis sur plusieurs questions. La commission chargée de ces propositions accepte la révision le 9 février 1889 mais en raison de la loi constitutionnelle, elle ne peut donner un véritable avis sur les différentes propositions, laissant le Congrès décider[6].

Le général Boulanger entre à la Chambre des députés à l'occasion d'une élection partielle en juin. Les joutes oratoires à la tribune auront pour conclusion un duel entre le général et Floquet qui tourne en faveur du civil. Boulanger est blessé et humilié. Toutefois Boulanger, après avoir démissionné le 12 juillet, il est à nouveau élu triomphalement dans trois départements le 19 août.

Le gouvernement entre juin et décembre 1888 est assez bloqué par la situation parlementaire. Il réussit cependant à faire passer la loi du 8 juin pour permettre au comptoir national d'escompte de Paris de faire une souscription de 1,2 millions d'obligations sur la compagnie universelle du canal interocéanique de Panama mais seuls 800 000 francs sont obtenus. Le 13 décembre, la difficulté financière est rendue publique après une nouvelle demande de souscription tandis que le gouvernement propose de suspendre les payements pendant trois mois, qui est refusé par le Chambre et entérine la ruine de la société et de ses souscripteurs qui perdent tout[7].

Floquet propose alors de revenir aux scrutins d'arrondissement pour les prochaines législatives, soutenu par les opportunistes et par de nombreux conseils généraux, mais aussi sous la pression du Président Sadi Carnot. À l'inverse, Goblet y est opposé et menace de démissionner. Ce retournement contre l'orthodoxie républicaine, choque les radicaux. Le 2 octobre, le gouvernement décrète que les étrangers doivent être en possession d'une carte d'identité[8].

Il fait voter la loi du 13 février 1889. Le lendemain pourtant, la Chambre, où les opposants hostiles au révisionnisme se regroupent autour des boulangistes et des conservateurs, vote l'ajournement de la révision constitutionnelle, et le gouvernement Floquet doit démissionner.

Fin du gouvernement et passation des pouvoirs

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Le , lors de la discussion du projet de loi et des propositions de résolution tendant à la révision des lois constitutionnelles, après un ajournement à la huitaine proposé par Armand de Mackau repoussé par 375 voix contre 173 sur 548 votants, la proposition d'ajournement indéfinie proposée par Gaston de Douville-Maillefeu est acceptée par 307 voix contre 218 sur 525 votants. Les votes pour l'ajournement venant de la droite, des modérés et des boulangistes. Désavoué, Charles Floquet présente immédiatement la démission du Gouvernement à la Chambre et ensuite au président de la République, Sadi Carnot. Le jour-même, le président charge Jules Méline de former un gouvernement, mais ce dernier décline et recommande Floquet.

Le , des rumeurs courent que Charles de Freycinet forme un nouveau gouvernement.

À partir du , Carnot tente une combinaison Tirard-Méline, mais les journaux se déchirent entre un gouvernement Tirard-Méline, un gouvernement de Freycinet ou un nouveau gouvernement Floquet.

Le , le président appelle Léopold Faye, ministre de l'Instruction publique du gouvernement Tirard, à constituer un cabinet. Cependant, un gouvernement de Freycinet se confirme de plus en plus.

Le , Sadi Carnot propose à Pierre Tirard la présidence du Conseil des ministres.

Le , le second gouvernement Tirard est officialisé.

Voir aussi

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Notes et références

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  1. Origine populisme, p. 267-272.
  2. Origine populisme, p. 269-272.
  3. Origine populisme, p. 482-484.
  4. Premier civil à occuper ce ministère
  5. a et b Membre du gouvernement précédent ayant conservé son poste
  6. « Journal officiel de la République française. Débats parlementaires. Chambre des députés : compte rendu in-extenso », sur Gallica, (consulté le )
  7. Origine populisme, p. 521-522.
  8. Origine populisme, p. 524-530.
  • Bertrand Joly, Aux origines du populisme : histoire du boulangisme, Paris, CNRS Éditions, (ISBN 978-2-271-13972-6).