Saint-Sauveur (quartier)

quartier de la ville de Québec

Saint-Sauveur est un des 35 quartiers de la ville de Québec, et un des six qui sont situés dans l'arrondissement La Cité–Limoilou. Il est l'un des quartiers formant la basse-ville de Québec. Le quartier est nommé en l'honneur de Jean Le Sueur, abbé de Saint-Sauveur, premier prêtre séculier à venir s'établir sur les bords du fleuve Saint-Laurent.

Saint-Sauveur
Saint-Sauveur (quartier)
Administration
Pays Drapeau du Canada Canada
Province Drapeau du Québec Québec
Municipalité Québec
Statut Quartier
Arrondissement La Cité-Limoilou
Démographie
Population 15 495 hab. (2016)
Densité 3 903 hab./km2
Langue(s) parlée(s) Français
Géographie
Coordonnées 46° 48′ 25″ nord, 71° 14′ 24″ ouest
Superficie 397 ha = 3,97 km2
Localisation
Carte
Quartiers de la ville de Québec.

Histoire modifier

Fondation et établissement modifier

 
L'Hôpital général de Québec, fondé en 1692, se trouve au nord du quartier.

Au tout début du régime français, les basses-terres de la plaine qui bordent la rivière Saint-Charles, où naîtra Saint-Sauveur, sont mises en réserve et forment les terres communales. En 1618, Champlain propose d’y installer une ville qu’il nommerait « Ludovica ». Ce projet ne se réalise pas; on abandonne cette idée vers 1638 et on installe plutôt la ville dans ce qui est aujourd'hui le Vieux-Québec, autour du fort Saint-Louis. Dès lors, on procède à la concession des terres. Ainsi, en 1653, Jean Le Sueur, premier prêtre séculier à venir en Nouvelle-France, reçoit de l'Hôtel-Dieu de Québec une concession qui prolonge jusqu'à la rivière celle qu’il possède déjà sur le coteau[1]. Jean Le Sueur, auparavant prêtre de Saint-Sauveur-de-Thury-Harcourt en Normandie, était surnommé Monsieur de Saint-Sauveur. Le quartier lui doit son nom: son surnom s'est étendu aux terres qu'il possédait, dont les limites est et ouest de ces terres sont alors respectivement les rues Durocher et Montmagny[1].

Les récollets, arrivés au Québec en 1615, obtiennent une concession sur les rives de la Saint-Charles. Leur terre s'étend du coteau Sainte-Geneviève à la rivière, entre les actuelles rues Caron et De Mazenod. Ils y érigent une chapelle et un couvent dédiés à Notre-Dame-des-Anges. Chassés de Québec en 1629 par la famille Kirke, ils ne seront de retour qu'en 1670. Ils reconstruisent un couvent et une chapelle, qui existent encore aujourd'hui, au sein de l'Hôpital-Général[1].

Ce faubourg, formant à l'époque une partie de la banlieue de Québec, est au départ peu habité. Dans les années 1840, le quartier est partagé entre quatre grandes propriétés foncières: le fief des récollets, qui appartient aux religieuses de l'Hôpital-Général, le Domaine Bois-Bijou (Boisseauville), les terres de l'Hôtel-Dieu, et une terre appartenant aux Ursulines de Québec[1].

Vers 1845 naît Boisseauville à la suite de travaux d'arpentage. À l'origine, le Domaine de Bois-Bijou appartenait à Michel Sauvageau; on y trouve une villa entourée d'un grand jardin, quelques granges, un étang. Michel Sauvageau fait tracer un premier plan de lotissement en 1810, et une première rangée de lots à bâtir est établie sur la rue Sauvageau, en direction du Faubourg Saint-Jean. Après sa mort, Pierre Boisseau procède au lotissement des terres, où s'élèvera Boisseauville[1].

S'ensuivra la construction d'une première église et d'un hôtel de ville.

Quartier ouvrier et développement urbain modifier

 
Le quartier est rasé en 1866 à la suite du Grand incendie de Québec

Au début du XIXe siècle, le succès des chantiers navals, du commerce du bois et de l’activité portuaire entraîne le développement fulgurant de Saint-Sauveur. La forte demande de main-d’œuvre entraîne la construction d’un grand nombre de maisons. Depuis 1840, Saint-Sauveur était devenu le foyer d’un grand nombre d’ouvriers pauvres puisqu’à cet endroit, les règles de construction permettent de bâtir des maisons qui ne sont pas à l’épreuve du feu. Dès 1845, Saint-Sauveur est considéré comme la banlieue de Québec. L’incendie qui détruit Saint-Roch, le quartier voisin, va provoquer un mouvement de la population vers Boisseauville.

Le nouveau code municipal de 1855 oblige les petites villes et villages du Québec à se donner une administration municipale. Saint-Sauveur se regroupe d’abord avec Limoilou en une municipalité appelée « banlieue de Saint-Roch » jusqu’en 1862. Sur le plan religieux, l’archevêque de Québec transforme, ce qui n'était qu'une desserte de la paroisse de Saint-Roch en paroisse de plein exercice en 1853[2]. Il en confie la gestion à la congrégation des Oblats de Marie Immaculée. Le quartier obtient une charte municipale autonome en 1862, et change son nom officiel de Saint-Roch nord en Saint-Sauveur en 1872[3].

En 1866, Saint-Sauveur est rasé par le Grand incendie de Québec. La même année, le Boulevard Langelier est alors élargi pour éviter que le feu ne se propage entre Saint-Roch et Saint-Sauveur[3]. En 1874, une partie du territoire de Saint-Sauveur est détaché pour la création de la Paroisse de Notre-Dame-du-Sacré-Cœur qui deviendra Sacré-Cœur-de-Jésus en 1886.

En 1888, on construit le marché Saint-Pierre, là où se trouve aujourd’hui le centre Durocher. Baptisé en l’honneur de Pierre Boisseau, il devient la propriété de la ville de Québec lors de l’annexion en 1889 du village de Saint-Sauveur. La halle de briques rouges mesure 170 pi de long, soit la même dimension que la halle Montcalm[4]. Elle échappe à la conflagration de 1889 qui rase le quartier. Fermé en 1915, l'édifice est loué aux Œuvres de jeunesse, puis incendié en 1945[5].

Un autre incendie détruit 600 maisons le . « La nuit dernière, vers minuit, la population de la ville a été mise en émoi par le tocsin qui sonnait à tous les clochers de la ville ». Ainsi s’exprime le Journal de Québec pour rendre compte de cet incendie. Le feu éclate le mercredi 15 mai, vers 23h30, dans la propriété de Mme McKennon, boucher, sur la rue Saint-Vallier, et se propage en arrière sur le "terrain Bédard". À deux heures du matin, il ne reste déjà plus rien des rues Saint-Ambroise, Sainte-Catherine, Parent, Chenest, Sainte-Marie, et Saint-Louis[6]. Le feu consume près du tiers de la paroisse, soit environ cinq cents maisons dans la partie nord, le long de la rue Saint-Vallier, laissant de quatre à cinq mille personnes sans abri[1].

Cela relance le débat de l’annexion du quartier à la ville de Québec. L'enjeu principal concerne l'installation d'un réseau de distribution d’eau, essentielle pour combattre le feu. Les pourparlers commencent en juin 1889 entre les deux municipalités. Les citoyens de Saint-Sauveur entérinent l’entente par référendum les 26 et 27 septembre 1889[1]. Les autorités de Québec introduisent dans le quartier, et font construire des égouts, des trottoirs, pavent et éclairent des rues[3].

 
Le quartier vu depuis la haute-ville, en 1899

Les transformations seront rapides. Charles Baillargé, ingénieur à la ville parle de « la transformation la plus magique dont aucune ville n’ait jamais été témoin ». En moins de trois ans, le quartier rattrape son retard sur le reste de la ville quant aux équipements urbains : réseau de distribution d’eau, réseau de drainage, trottoirs, chaussées empierrées, poste de pompiers et de police, téléphones, éclairages électriques, etc. Le quartier s’étendra alors à la rue Saint-Vallier. À cette époque, la rue Saint-Ours, qui s’appellera plus tard le boulevard Langelier, constitue la plus belle artère de la ville.

En 1914, Jules Gingras fonde sur l'avenue du Sacré-Cœur la Laiterie de Québec, qui deviendra plus tard la Laiterie Arctic (ainsi nommée en l'honneur du navire du capitaine Joseph-Elzéar Bernier)[7]. C'est la première laiterie de Québec qui pasteurise son lait[8]. La laiterie sera déménagée sur le boulevard Charest Ouest en 1956.

Le , le quartier est le théâtre d'une des émeutes de la Crise de la conscription à Québec. La même année, la grippe espagnole fait 500 victimes à Québec. 80% des victimes se retrouvent dans la basse-ville de Québec, surtout dans les deux quartiers les plus pauvres: Saint-Sauveur et Saint-Malo[9].

En 1920, un auteur anonyme écrit dans L'Action catholique au sujet de Saint-Sauveur : « Jamais débuts ne furent plus modestes: le terrain est une savane non-irriguée et les résidences, de misérables cabanes ». D’ailleurs, Saint-Sauveur "était surnommé le faubourg des tuyaux, car beaucoup d’habitations n’avaient pas de cheminées de briques mais de simples tuyaux de tôle qui dépassaient du toit"[1].

Revitalisation modifier

 
La rivière Saint-Charles dans le quartier Saint-Sauveur près du pont Scott

Dès 1971, une campagne est lancée pour démanteler le chemin de fer qui traversait une partie du quartier et le coupait du parc Victoria. Les voies sont finalement enlevées en 1974[10].

De 2006 à 2008, la Ville de Québec entreprend de refaire au complet le boulevard Charest entre le boulevard Langelier et l'avenue Saint-Sacrement. L'artère principale subit des travaux de réfection majeurs sur 2,5 kilomètres avec le retrait du terre-plein, l'élargissement des trottoirs et la plantation d'arbres. On amorce aussi plusieurs projets de construction résidentielle dans le même secteur.

La rivière Saint-Charles, au nord du quartier, fait l'objet de travaux de renaturalisation des berges en 2007. Le parc Victoria est aussi transformé par la construction d'un bassin de rétention d'eau, par la démolition de l'aréna Victoria et par le déménagement d'une chapelle.

Liste des maires de Saint-Sauveur[11] modifier

  • ?1901-1904 : Émile Tourangeau[12]

Hommages toponymiques modifier

  • La rue Louis-Falardeau a été nommée en l'honneur maire Falardeau, en 1875, dans la municipalité de paroisse de Saint-Sauveur, maintenant présente dans la ville de Québec.
  • La rue Kirouac a été nommée en l'honneur du maire Kirouac en 1890 dans la ville de Québec.
  • La rue Dolbeau s'appelait auparavant, la rue Émile en l'honneur du maire Tourangeau entre 1905 et 1909 dans la ville de Québec.

Portrait du quartier modifier

Le quartier de Saint-Sauveur est situé dans la basse-ville de Québec.

 
Les limites géographiques approximatives de la majorité du quartier, en jaune.

Au conseil municipal de Québec, le quartier est représenté par les districts de Saint-Sauveur et de Duberger-Les Saules.

Artères principales modifier

 
Rue Saint-Vallier

Édifices notables modifier

Parcs, espaces verts et loisirs modifier

 
Parc du Moulin-de-l'Hôpital

Patro Laval

Édifices religieux modifier

En fonction modifier

Disparus modifier

  • Chapelle Notre-Dame-de-Lourdes (1879), démolie en 1968 pour faire place à un centre d’hébergement.
  • Église Notre-Dame-de-Pitié[17] (1947), fermée en 2008, détruite en 2011 pour faire place à des logements pour ainés.
  • Église Notre-Dame-de-Grâce[18] (1926), fermée en 2001, détruite en 2009 pour faire place à deux coopératives d'habitations, L'Étale et La Barraque.
  • Église Saint-Joseph[19] (1941), fermée en 1998, démolie en 2013 pour faire place à des logements locatifs.

Musées, théâtres et lieux d'expositions modifier

  • Petit Théâtre de Québec

Commerces et entreprises modifier

 
Le magasin de plein-air Latulippe (rue Saint-Vallier)
  • La rue des commerçants et artisans du quartier Saint-Sauveur est la rue Saint-Vallier Ouest. De petits magasins, coiffeurs, épiceries, pharmacies et parcs forment le cœur de cette artère importante.
  • Le quartier est reconnu pour sa concentration de restaurants aux saveurs du monde (vietnamien, thaïlandais, chinois, créole, africain, etc.)
  • Parc industriel Saint-Malo.
  • Patro Laval

Lieux d'enseignement modifier

 
Ancien collège Maria-Joseph, aujourd'hui une résidence pour personnes âgées.

Tous les établissements publics d'enseignement du quartier sont opérés par la Commission scolaire de la Capitale.

  • École primaire Marguerite-Bourgeoys:
    • En 1856, on construit la première école Marguerite-Bourgeoys (Frères des Écoles chrétiennes). Ce beau bâtiment sera détruit lors du grand incendie de 1866. Déjà, le 14 octobre 1866, on reconstruit le couvent Saint-Sauveur sous l'égide de la congrégation de Notre-Dame. Lors du centenaire en 1956, on célèbre avec faste alors que 742 élèves entourés de 25 religieuses et 14 laïques entreprennent l'année scolaire avec enthousiasme. Déjà on dresse les plans d'une nouvelle école et c'est ainsi qu'en 1958, l’école Marguerite-Bourgeoys ouvre ses portes[20]. L'école accueillera au plus fort de ses activités en 1967-68 1137 élèves confiés à une équipe de 77 professeurs. Aujourd'hui, cet établissement est l'école primaire du quartier.
  • École primaire Sacré-Cœur
  • École primaire Saint-Malo
  • École secondaire Cardinal-Roy
  • École des métiers et occupations de l'industrie de la construction de Québec (ÉMOICQ)

Autres services modifier

  • Caserne No 3 Saint-Sauveur[21]

Démographie modifier

Lors du recensement de 2016, le portrait démographique du quartier était le suivant[22] :

  • sa population représentait 14,4 % de celle de l'arrondissement et 2,9 % de celle de la ville.
  • l'âge moyen était de 42,5 ans tandis que celui à l'échelle de la ville était de 43,2 ans.
  • 22,4 % des habitants étaient propriétaires et 77,6 % locataires.
  • Taux d'activité de 65,1 % et taux de chômage de 6 %.
  • Revenu moyen brut des 15 ans et plus : 32 113 $.
Évolution démographique
1996 2006 2011 2016
15 51515 60515 81015 495

Galerie modifier

Notes et références modifier

  1. a b c d e f g et h Ville de Québec, Division du Vieux-Québec et du patrimoine, Saint-Sauveur, à l'image du début de siècle, Québec, Ville de Québec, (ISBN 2-920860-03-8)
  2. « Québec, Saint-Sauveur – OMI World » (consulté le )
  3. a b et c Valérie November, « L’incendie créateur de quartier ou comment le risque dynamise le territoire », Cahiers de géographie du Québec, vol. 47, no 132,‎ , p. 367–388 (ISSN 0007-9766 et 1708-8968, DOI https://doi.org/10.7202/008087ar, lire en ligne, consulté le )
  4. Courville, Serge, 1943- et Garon, Robert., Québec, ville et capitale, Sainte-Foy (Québec), Presses de l'Université Laval, , 457 p. (ISBN 2-7637-7674-4 et 9782763776743, OCLC 46617308, lire en ligne)
  5. Louise Mercier, « Autrefois, les marchés de Québec », Continuité, no 98,‎ , p. 44–46 (ISSN 0714-9476 et 1923-2543, lire en ligne, consulté le )
  6. « Un lugubre anniversaire », Le Soleil,‎ , p. 5 (lire en ligne)
  7. Jean-Marie Lebel, « Québec et ses laiteries industrielles », Cap-aux-Diamants : la revue d'histoire du Québec, no 71,‎ , p. 33–33 (ISSN 0829-7983 et 1923-0923, lire en ligne, consulté le )
  8. « Quebec - Arctic », sur laiteriesduquebec.com (consulté le )
  9. Réjean Lemoine, « La grippe espagnole de 1918 à Québec », Cap-aux-Diamants : la revue d'histoire du Québec, vol. 1, no 1,‎ , p. 39–39 (ISSN 0829-7983 et 1923-0923, lire en ligne, consulté le )
  10. Jean-Marie Lebel, Québec 1608-2008 : Les chroniques de la capitale, Québec, Les Presses de l'Université Laval, , non paginé (présentation en ligne)
  11. Gabriel Bernier, Le quartier Saint-Sauveur de Québec : jalons historiques,
  12. Division de la toponymie de la Ville de Québec, « Dolbeau, rue », sur ville.quebec.qc.ca (consulté le )
  13. Description de l'église Saint-Sauveur sur Les églises de Québec
  14. Description de l'église Saint-Malo sur Les églises de Québec
  15. PIERRE-OLIVIER FORTIN, Une église catholique passe aux mains des évangélistes, journaldequebec.com, Canada, 27 novembre 2016
  16. [www.mosqueedelacapitale.com]
  17. Description de l'église Notre-Dame-de-Pitié sur Les églises de Québec
  18. Description de l'église Notre-Dame-de-Grâce sur Les églises de Québec
  19. Description de l'église Saint-Joseph sur Les églises de Québec
  20. Lire l'histoire de la visite de l'école par la reine Elizabeth II en 1959.
  21. Liste des casernes et véhicules de la Ville de Québec Casernes et véhicules
  22. Portrait sociodémographique et économique du quartier Saint-Sauveur - Janvier 2019

Annexes modifier

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Articles connexes modifier

Liens externes modifier