Hexagone (France)
« Hexagone » est une locution désignant la partie continentale de la France métropolitaine (hors Corse), rappelant que géographiquement sa forme s'inscrit dans un hexagone presque régulier (trois côtés terrestres et trois côtés maritimes). Le recours à ce polygone prend sa source dans l'enseignement de la géographie à la fin du XIXe siècle.

Par métonymie, elle est fréquemment utilisée pour désigner le pays proprement dit. En plus de la langue, elle est également utilisée dans de nombreux symboles graphiques pour représenter la France.
Histoire modifier
Les hussards noirs représentent dans les années 1880 la France en un hexagone, cette simplification pédagogique sur les cartes scolaires étant mise en avant par les réformateurs de l'enseignement de la géographie tels que Pierre Émile Levasseur et Pierre Foncin[1]. Les géographes Emmanuel de Martonne et Théophile Lavallée privilégient le pentagone, Élisée Reclus l'octogone[2], mais la forme hexagonale s'impose d'autant plus après la guerre franco-allemande de 1870 qui voit la perte de l'« Alsace-Lorraine »[3].
La métonymie par laquelle l'Hexagone désigne la France date des années 1960. Cette symbolique est d'autant plus accentuée après la politique de l'aménagement du territoire initiée par Charles de Gaulle, l'ouverture des frontières à la suite du traité de Rome en 1957 et la décolonisation concrétisée par les accords d'Évian en 1962. La figure hexagonale est ainsi une manière de définir la France métropolitaine réduite à sa dimension européenne après la décolonisation[4].
La métaphore de l'hexagone n'a pas toujours été évidente et a subi plusieurs inversions de valeurs : elle a été le symbole de la puissance française sous de Gaulle mais à l'inverse l'image des métropolitains frileux pour les Pieds-noirs et enfin le reflet du francocentrisme[5],[6],[7],[2],[8].
Au début du XXIe siècle, les termes « Hexagone » et « France hexagonale » sont proposés et commencent à être utilisés pour remplacer les termes « métropole » et « France métropolitaine », jugés coloniaux et renvoyant au passé colonial de la France[9].
Géométrie modifier
On peut montrer mathématiquement que l'hexagone n'est pas le polygone régulier représentant le mieux le territoire concerné[10].[à développer]
Usages modifier
Langue modifier
L'expression Hexagone est fréquemment utilisée pour désigner la partie continentale de la France métropolitaine, par opposition à la France d'outre-mer[11], voire à la Corse. Ainsi, la déclinaison du second pilier de la politique agricole commune (PAC), qui concerne le développement rural, se fait via le PDRH : programme de développement rural hexagonal (la Corse et l'outre-mer ayant en effet leur propre déclinaison).
Par extension, le terme est aussi utilisé pour désigner le pays proprement dit. Par exemple, le chanteur Renaud a écrit une chanson qui porte le titre Hexagone, dans laquelle il décrit le pays, assez sombrement.
Numismatique modifier
L'hexagone est tracé sur des pièces de monnaie françaises : sur l'avers de la pièce de 1 franc de Gaulle (1988, gravée par Émile Rousseau) et sur les faces nationales des pièces de 1 euro et 2 euros (gravées par Joaquin Jimenez).
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Avers de la pièce de 1 franc de Gaulle.
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Avers de la pièce française de 1 euro de la 2e série (2022-).
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Avers de la pièce française de 2 euros de la 2e série (2022-).
Logos modifier
À des fins de communication ou de publicité, certaines sociétés ou organisations françaises utilisent l'hexagone dans leur logo pour rappeler la France, parfois en association avec les couleurs du drapeau français :
- Institutions :
- logo de l'Assemblée des Français de l'étranger (AFE),
- logo des sites naturels classés ou inscrits, où l'hexagone est imbriqué avec le diaphragme d'un appareil photo[12],
- logo de FranceConnect où l'hexagone encadre la Marianne gouvernementale de profil[13] ;
- Établissements publics :
- ancien logo des chambres de commerce et d'industrie (CCI), où l'hexagone encadre un caducée,
- logo du Centre Pompidou-Metz (le bâtiment qui l'accueille est lui-même inscrit dans un hexagone rappelant la France, motif repris dans les éléments de sa charpente[14],[15],[16]) ;
- Entreprises publiques ou dans lesquelles l'État a des participations :
- ancien logo de la chaîne de télévision FR3, où l'hexagone représente l'iris d'un œil,
- logo de Colissimo, où l'hexagone se confond avec un colis pour en représenter la distribution à travers la France[17],
- logo des Assurances générales de France (AGF) ;
- Partis politiques :
- logo du Parti social français (PSF) dans les années 1930,
- ancien logo du Parti radical (PR), où l'hexagone encadre Marianne et est accompagné de la devise de la France,
- ancien logo de l'Union pour la démocratie française (UDF) ;
- Associations :
- ancien logo de l'Association des maires de France (AMF), où l'hexagone est formé par une écharpe tricolore de maire,
- logo de l'association Les Plus Beaux Villages de France,
- logo de la Fédération française de football (FFF), où l'hexagone encadre un coq gaulois.
- Exemples de logos utilisant l'Hexagone comme symbole de la France
Art modifier
En 1976, Victor Vasarely réalise une sculpture intitulée Hommage à Georges Pompidou, qui représente le visage de Georges Pompidou, ancien président de la République française mort deux ans plus tôt, inscrit dans un hexagone. Il est également l'auteur d'un Hommage à l'hexagone France, découpage et collage de cartons représentant un hexagone aux couleurs du drapeau français[18].
Architecture modifier
Depuis 2014, les institutions de la Défense nationale sont réunies à Paris sur l'hexagone Balard, un bâtiment qui dessine un hexagone en son centre, sur le modèle du Pentagone aux États-Unis.
Notes et références modifier
- Olivier Kempf, Géopolitique de la France : Entre déclin et renaissance, Paris, Technip, coll. « Géopolitique », , 311 p. (ISBN 978-2-7108-1000-1), p. 23 [lire en ligne].
- Robic 1989.
- Laurence Turetti, Quand la France pleurait l'Alsace-Lorraine : Les “provinces perdues” aux sources du patriotisme républicain, 1870-1914, Strasbourg, La Nuée bleue, , 204 p. (ISBN 978-2-7165-0709-7), p. 56.
- Jean-Luc Bœuf et Yves Léonard, La République du Tour de France : 1903-2003, Paris, Seuil, , 268 p. (ISBN 2-02-058073-X), p. 75.
- Smith 1969.
- Weber 1985.
- Weber 1986.
- Lefort 1992.
- Julie Postollec, « L'Assemblée nationale abandonne le terme 'métropole', jugé colonial, dans un texte de loi », Outre-mer La Première, .
- Zimmermann et al. 2019.
- Michèle Lenoble-Pinson et Paul Martens (collab.) (préf. Guy Canivet), Dire et écrire le droit en français correct : Au plaisir des gens de robe, Bruxelles, Bruylant, , 2e éd., 854 p. (ISBN 978-2-8027-6047-4).
- « Le logo Grand Site de France », sur grandsitedefrance.com, .
- Bruno Texier, « E-administration : FranceConnect, c'est aussi pour les collectivités », Archimag, .
- Vincent Noce, « Grand-Metz pour Pompidou », Libération, .
- « Lancement des travaux de la charpente du Centre Pompidou-Metz », sur tout-metz.com, .
- Lorraine 2022/23, Vanves, Hachette Tourisme, coll. « Guide du routard », , 443 p. (ISBN 978-2-017-17224-6 et 978-2-017-87987-9), p. 71 [lire en ligne].
- « Symbolique des formes : que signifie un logo hexagonal ? », sur graphiste.com, .
- « Lot 619 : Victor VASARELY (1908 - 1997), Hommage l'hexagone France », vente Contemporary Art 2, sur artcurial.com, Artcurial, .
Voir aussi modifier
Bibliographie modifier
- Jeanine Cohen, Marie-Claude Guerrini, Nicole Mathieu et Marie-Claire Robic, chap. 19.1 « De l'hexagone a une image brouillée de la France ? », dans Hervé Théry (dir.), L'État et les stratégies du territoire (communications de la Commission de géographie politique aux colloques Le contrôle des grands et des petits espaces, -, et État et stratégies du territoire, hier et aujourd'hui, -), Paris, Éditions du CNRS, coll. « Mémoires et documents de géographie », , 242 p. (ISBN 2-222-04599-1, DOI 10.3917/cnrs.thery.1991.01.0197), p. 197–207 [lire en ligne].
- Isabelle Lefort, « La figure de l'hexagone », dans La lettre et l'esprit : Géographie scolaire et géographie savante en France, 1870-1970, Paris, Éditions du CNRS, coll. « Mémoires et documents de géographie », , 257 p. (ISBN 2-222-04666-1), p. 66–69 [lire en ligne].
- Marie-Claire Robic, « Le panneau Hexagone-France : À l'heur du monde ? », dans La carte pour qui ? La carte pour quoi ? : Cartes et pratiques géographiques (actes du colloque Géopoint 1986, Avignon, -, organisé par le Groupe Dupont), Avignon, Groupe Dupont, coll. « Géopoint », , 235 p. (ISBN 2-902909-06-3), p. 223–230.
- Marie-Claire Robic, « Sur les formes de l'hexagone », Mappemonde, no 4 « L'Hexagone », , p. 18–23 (DOI 10.3406/mappe.1989.2535, lire en ligne).
- (en) Todd Shepard, chap. 3 « The Birth of the Hexagon : 1962 and the Erasure of France's Supranational History », dans Manuel Borutta (dir.) et Jan C. Jansen (dir.), Vertriebene and Pieds-Noirs in Postwar Germany and France : Comparative Perspectives, Houndmills, Palgrave Macmillan, , 300 p. (ISBN 978-1-137-50840-9, 978-1-137-46390-6 et 978-1-137-46389-0, DOI 10.1057/9781137508416_3), p. 53–69 [lire en ligne].
- (en) Nathaniel B. Smith, « The Idea of the French Hexagon », French Historical Studies, vol. 6, no 2, , p. 139–155 (JSTOR 286162).
- Eugen Weber, « La formation de l'hexagone républicain », dans François Furet (dir.), Jules Ferry fondateur de la République (actes du colloque organisé par l'EHESS en à l'occasion du centenaire des lois scolaires), Paris, EHESS, coll. « Civilisations et sociétés » (no 72), , 256 p. (ISBN 2-7132-0839-4), p. 223–241.
- Eugen Weber, « L'Hexagone », dans Pierre Nora (dir.), Les Lieux de mémoire, vol. II : La Nation - 2. Le territoire, l'État, le patrimoine, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque illustrée des histoires », , 610 p. (ISBN 2-07-070659-1), p. 97–116.
- Karel Zimmermann, François Rodolphe, Tatiana Zharinova-Zimmermann et Joël Pothier, « Aux quatre coins de l'Hexagone : Peut-on vraiment appeler la France « l'Hexagone » ? », Pour la science, no 498, , p. 52–55 (DOI 10.3917/pls.498.0052, HAL hal-03839050, lire en ligne).