Abbaye de Dore
L’abbaye de Dore est une ancienne abbaye cistercienne située dans la paroisse civile de Abbey Dore (Herefordshire, Angleterre). Fondée en 1147, c'est l'unique abbaye fondée par Morimond en Angleterre.
Diocèse | Hereford |
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Patronage | Sainte Marie |
Numéro d'ordre (selon Janauschek) | CCXXIX (229)[1] |
Fondation | |
Début construction | 1147 |
Fin construction |
1210 (monastère) 1633 (église) |
Dissolution | 1536 |
Abbaye-mère | Morimond |
Lignée de | Morimond |
Abbayes-filles |
595 - Grace Dieu (1226-1536) 674 - Vale Royal (1266-1538) |
Congrégation | Cisterciens (1147-1536) |
Protection | Scheduled monument depuis le sous le numéro 1016433[2] |
Coordonnées | 51° 58′ 08″ N, 2° 53′ 38″ O[3] |
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Pays | Angleterre |
Comté | Herefordshire |
Région | Midlands de l'Ouest |
Autorité unitaire | Herefordshire |
Paroisse civile | Abbey Dore |
Site | http://www.doreabbey.org.uk/. |
Lors de la Réforme anglaise, l'abbaye est dissoute en 1536. Cependant, l'abbatiale, transformée en église paroissiale, survit à cette suppression. Quelques ajouts postérieurs la transforment en partie, mais elle est toujours utilisée au XXIe siècle, ce qui est un cas unique parmi les anciennes abbayes cisterciennes anglaises.
Localisation et toponymie
modifierL'abbaye de Dore est située au sud-ouest du Herefordshire, à proximité immédiate du Pays de Galles, dans la Golden Valley (en) (« Val d'Or ») qui pourrait lui avoir donné son nom[4]. Selon les sources plus récentes, le nom de « Dore » pourrait être une déformation du mot gallois dŵr qui signifie « eau »[5].
Le monastère est situé juste au-dessus de la zone inondable par la rivière Dore (en), et à proximité de l'antique route romaine reliant Abergavenny à Kenchester[2].
Histoire
modifierFondation
modifierLes sources anciennes évoquent la rencontre de l'abbé de Morimond Otton de Freising et de Robert FitzHarold, seigneur d'Ewyas, au cours de la deuxième croisade. Ce dernier aurait offert à l'abbé des terres lui appartenant pour qu'une abbaye cistercienne y soit bâtie. Le , un groupe de treize moines arrive et commence immédiatement la construction d'un monastère provisoire en bois. L'abbatiale en pierre définitive est commencée plus tard sur le modèle de celle de Morimond[5].
L'exiguïté du site et la pente prononcée obligent les moines à choisir une orientation inhabituelle pour leur monastère. Au lieu d'être tournée vers l'est, l'abbatiale est dirigée vers le nord-ouest. Le cloître, habituellement situé du côté sud de l'église, est ici situé sur son flanc nord-est[2].
Développement
modifierÀ l'instar de nombreuses autres abbayes cisterciennes anglaises, Dore mise sur l’élevage ovin et le négoce de la laine pour fonder son développement économique. À Dore, la qualité de la laine est particulièrement prisée, et les prix pratiqués lors de la vente, notamment en Italie, sont les plus élevés d'Angleterre durant les XIIIe et XIVe siècles[5]. De nombreuses donations datent de la fin du XIIe siècle ou du début du XIIIe, notamment de la part de Jean sans Terre. À son apogée, l'abbaye possède sept granges : Hollin Grange, Morehampton, Newborough, Newbrook, Chapell Grange, Kingston et New Grange[6].
Le développement de Dore s'accompagne au Moyen Âge de pratiques répréhensibles d'acquisition des terres par déplacements forcés de population — « corrupt persuasion » —[4]. L'abbaye Adam, qui dirige l'abbaye de 1186 environ à 1216, est à ce sujet accusé par Giraud de Barri d'utiliser des fins peu recommandables — « fair or foul » — afin d'accroître le temporel de l'abbaye[7].
Au XIIe siècle, une première abbaye-fille est fondée à Trawsgoed, au Pays de Galles, mais cette filiale ne perdure pas et devient une simple grange. En revanche, au XIIIe siècle, l'abbaye essaime plusieurs fois, fondant les abbayes-filles de Grace Dieu en 1226 et surtout de Vale Royal en 1274, cette dernière étant fondée à Darnhall (en) avant d'être déplacée. L'abbaye de Dore reste tout au long de son histoire un établissement modeste, malgré la présence de reliques de la Vraie Croix et la présence du tombeau de Matilda ou Maud de Bohun, née Maud de Fiennes, fille d'Édouard de Salisbury (en), dont la légende disait qu'il avait des facultés thaumaturgiques[4].
Durant la première moitié du XIVe siècle, Richard Stradell, un abbé estimé, dirige l'abbaye. Érudit et théologien, il exerce à l'occasion des fonctions diplomatiques, notamment auprès de la Couronne britannique et du Chapitre général cistercien[7],[4].
Dissolution
modifierComme toutes les abbayes anglaises, l'abbaye de Dore est victime de la Réforme anglaise et est dissoute dès 1536, ce qui montre la pauvreté de sa communauté, dont le revenu était inférieur à cent livres. Les terres sont cédées à John Scudamore of Hom Lacy en 1540[4],[6].
En 1633, John Scudamore, le petit-fils du précédent, fait restaurer et réaménager le chœur de l'ancienne abbatiale, qui forme l'église paroissiale. La nouvelle église est consacrée le par Theophilus Feild (en), évêque de St David's. Une partie des bâtiments monastiques, nommée Lancashire Hall, est à cette occasion reconvertie en presbytère desservant la paroisse. Cependant la situation en fond de vallée provoque de fréquentes inondations du bâtiment, qui peu à peu se dégrade. Le choix est fait en 1665 de complètement le détruire et d'en reconstruire un nouveau[2],[6].
Jusqu'en 1821, le domaine est indivis entre les héritiers de la famille Scudamore. À cette date un partage des terres est effectué entre les héritiers. La part contenant Abbey Dore proprement dit échoit à John Parsons avec 1 434 acres (580 hectares environ) de terrain. Au cours du XIXe siècle sont bâtis autour de l'ancienne église les bâtiments agricoles et d'habitation qui forment le village. Une seconde restauration de l'église est menée entre 1895 et 1904 ; à cette occasion, une campagne de fouilles est menée par Roland Paul. Ce dernier réalise des croquis à l'échelle des fondations du monastère. Son travail permet de rendre compte de la conformité initiale du plan de l'abbaye de Dore au schéma cistercien traditionnel[2],[6].
L'association des amis de l'abbaye de Dore — The friends of Dore Abbey — est formée en 1993, après que les bâtiments restants de l'abbaye ont été classés de grade I[8].
Architecture
modifierLe site de l'abbaye est encore perceptible au XXIe siècle non seulement sur le cadastre moderne, mais également grâce à la présence d'une levée de terre qui reprend peu ou prou le tracé de l'enceinte monastique. Les aménagements hydrauliques des cisterciens survivent également à l'état de fossés et de drains. L'eau entrait dans l'abbaye du côté nord-ouest, alimentait le réfectoire, l'infirmerie, les cuisines et les sanitaires, puis le moulin, enfin trois étangs à poissons rectangulaires qui avaient été creusés par la communauté de l'abbaye[2].
Le plan de Dore était globalement très fidèle au plan traditionnel cistercien. Toutefois, quelques particularités locales ont été mises en place. La salle capitulaire délaisse le traditionnel plan rectangulaire pour un plan octogonal, qui n'est pas unique — on le retrouve aussi à Whalley — mais très rare ; ces particularités suggèrent une influence de l'école ayant bâti la cathédrale de Wells et l'abbaye de Glastonbury[9].
Église abbatiale
modifierLa nef de l'ancienne église abbatiale a disparu. À sa place est situé le cimetière. Comme les fouilles de 1895-1904 l'ont montré, c'est désormais le chœur de l'église qui constitue l'église paroissiale. Cette réutilisation paroissiale est l'unique cas en Angleterre d'un usage liturgique moderne d'une ancienne abbatiale cistercienne. Quoiqu'ayant disparu, l'église abbatiale originelle est clairement perceptible dans le paysage, son emprise étant remblayée sur une hauteur de un à deux mètres au-dessus du terrain naturel[2],[9].
Notes et références
modifierNotes
modifierRéférences
modifier- (la) Leopold Janauschek, Originum Cisterciensium : in quo, praemissis congregationum domiciliis adjectisque tabulis chronologico-genealogicis, veterum abbatiarum a monachis habitatarum fundationes ad fidem antiquissimorum fontium primus descripsit, t. I, Vienne, Vindobonae, , 491 p. (lire en ligne), p. 92 & 93.
- (en) « Dore Abbey: a Cistercian monastery », Historic England (consulté le ).
- (it) Luigi Zanoni, « Dore », sur cistercensi.info, Certosa di Firenze (consulté le ).
- Bernard Peugniez, Le guide routier de l'Europe cistercienne : esprit des lieux, patrimoine, hôtellerie, Strasbourg, Éditions du Signe, , 1155 p. (ISBN 9782746826243, OCLC 891520247), « 32 - Dore », p. 902.
- (en) Ruth E. Richardson, « Guest Author Essay: Dore Abbey », Herefordshire Through Time, (consulté le ).
- (en) « Abbey Dore Herefordshire Family History Guide »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?), Parishmouse, (consulté le ).
- (en) « Cistercian abbeys : Dore », Digital Humanities Institute (consulté le ).
- (en) « The Friends of Dore Abbey »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?), The Friends of Dore Abbey (consulté le ).
- (en) « Dore Abbey: a Cistercian monastery », Ancient and Scheduled Monuments (consulté le ).
Voir aussi
modifierArticles connexes
modifierBibliographie
modifier- (en) Roland Wilmot Paul, Dore Abbey, Herefordshire : a short account of its history and an appeal for its repair : with ground plan and illustrations, Londres, Pewtress, , 12 p. (OCLC 7318645)
- (en) David H. Williams, The white monks of Dore : 1147-1536, Londres, , 14 p. (OCLC 14205421)
- (en) Ron Shoesmith et Ruth E. Richardson, A definitive history of Dore Abbey, Woonton Almeley, Logaston Press, , 240 p. (ISBN 9781873827840, OCLC 60183996)