Swing circonscription

Une swing circonscription, « swing circos »[1], ou « circonscription-clé » ou « circonscriptions très serrée », notion dérivée de celle de swing state aux États-Unis, désigne une circonscription qui peut facilement basculer d'un camp à l'autre lors d'une élection législative.

En France, l'expression a émergé en 2017 puis fleuri en 2022 quand au total, « 92 députés ont été élus avec moins de 1 000 votes d’écart, dont 13 avec moins de 100 voix »[2], alors qu'une circonscription compte en moyenne 120 000 habitants[3],[4].

Définition

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Cette notion, de science politique, dérivée de celle de swing politique, correspond à celle de « circonscription changeante » dans la province canadienne du Québec. En France, ces circonscriptions-clés[5], dites aussi « très serrées »[5], sont appelées « swing circonscriptions » ou « swing circos »[6],[7] et sont scrutées de près par la presse régionale[7] et nationale[8],[9],[10],[11],[12],[6] jouent un rôle majeur dans l'obtention d'une majorité absolue ou relative. Certaines sont rurales, d'autres urbaines[13].

Histoire

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Selon le journal Marsactu, la notion de « swing circonscription » apparait dès mai 2017 lors des élections législatives en France, où malgré le succès très large du parti d'Emmanuel Macron, dans 104 circonscriptions, l’écart entre les deux candidats qualifiés est inférieur à 5 points[14]. Elle est en particulier utilisée pour qualifier « celle arrachée de justesse par Valérie Boyer (LR) à Marseille en 2012 » face à Christophe Masse (PS), avec seulement « 505 voix d’avance »[15]. L'expression est utilisée par un conseiller d’arrondissement apparenté PS qui la définit comme « un endroit où les enjeux sont très forts et où tout peut arriver »[15].

Cette émergence se produit quelques mois après la victoire de Donald Trump aux États-Unis à l'élection présidentielle de novembre 2016, malgré un nombre de voix inférieur d'environ trois millions à celui de sa rivale Hillary Clinton, grâce à une victoire de justesse dans plusieurs swing states importants de la région des Grands lacs.

Les swing circonscriptions en 2022

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Lors des législatives 2022, la gauche a perdu « de nombreux duels très serrés », parmi ses 182 duels de second tour contre le parti du président[16] dont 58 pour « moins de cinq points d’écart »[16]. Dans 47 cas sur 58, c'était face à ce président[17]. Ces faibles écarts de voix ont entraîné des recours au Conseil constitutionnel dans 75 circonscriptions en 2022, dont 8 hors de France[18]. Le chef de file de la NUPES a estimé qu'environ 17 000 voix lui auraient suffi pour la majorité absolue[16], mais selon le quotidien Le Monde le chiffre réel est nettement plus élevé, de l'ordre de 393 344 voix. L'élection s'est jouée à moins de 500 voix dans deux circonscriptions du Nord et deux du Pas-de-CalaisLens, Desvres, Aniche ou Cambrai)[19].

Les swing circonscriptions en 2024

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Selon Vincent Tiberj, professeur à Sciences Po Bordeaux, la gauche a en 2024 fait « un bon choix d’avoir investi des socialistes dans de nombreuses circonscriptions gagnables mais perdues en 2022 » pour viser un meilleur report de voix au second tour qu’avec l'étiquette LFI de 2022[17], car 92 swing circonscriptions s'étaient jouées à moins de 1 000 votes d’écart en 2022, et 13 avec moins de 100 voix[2].

Le scrutin sera très suivi dans une centaine où gauche et RN ont fait 30 %, des « territoires davantage ruraux et périurbains » à courtiser si la gauche veut avoir une chance, selon le chercheur Simon Audebert, auteur d’une étude électorale publiée par The Conversation et la Fondation pour l’écologie politique[17].

Dans beaucoup d'entre elles, l'issue va se jouer « dans un mouchoir de poche », selon Marine Tondelier, secrétaire nationale des Écologistes, pour qui le nombre élevé de procurations est « une donnée majeure »[1]. Selon Pierre Jouvet, chargé des élections au Parti socialiste, elles sont particulièrement nombreuses en Ardèche, en Dordogne, dans la Drôme, dans la Loire-Atlantique, en Meurthe-et-Moselle, et à Marseille[1].

Un écart serré est particulièrement prévu dans au moins 78[6], parmi lesquelles la 5e de l'Essonne[20],[21], mais aussi celles de membres du gouvernement, comme Clément Beaune (septième circonscription de Paris), Olivier Véran (première circonscription de l'Isère) Gabriel Attal, Sabrina Agresti-Roubache (première circonscription des Bouches-du-Rhône), Gérald Darmanin (dixième circonscription du Nord) et Agnès Pannier-Runacher (deuxième circonscription du Pas-de-Calais).

Magnitude des circonscriptions

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La magnitude des circonscriptions, plus ou moins forte en France selon les époques mais en baisse au XXIe siècle, est encline à faire jouer un rôle important aux swing circonscriptions. En 2022, Le Monde observait qu'environ 17 000 voix suffisaient à se maintenir au second tour dans la 3e circonscription de la Vendée, contre seulement 631 à Saint-Pierre-et-Miquelon, et « 29 000 pour les Français d’Amérique du Nord »[3], la taille des des circonscriptions « allant presque du simple au triple », comme le montre l'exemple concret de différence de taille entre la 2e circonscription du Cantal (62 753 habitants) et la 5e de la Loire-Atlantique (167 177 habitants)[3].

Références

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  1. a b et c "Pour gagner, le Nouveau Front populaire anticipe sa stratégie de second tour", par Mathieu Dejean, dans Médiapart le 23 juin 2024 [1]
  2. a et b Article par Marie Maison le 21 juin 2022 dans Le Monde [2]
  3. a b et c Article par Romain Imbach et Maxime Ferrer le 24 mai 2022 dans Le Monde [3]
  4. Article par Robin Prudent, Brice Le Borgne, pour France Télévisions le 20 juin 2022 [4]
  5. a et b "Législatives 2024 : ce que l’on sait pour l’instant sur les projections électorales dans les 577 circonscriptions" par Luc Bronner dans Le Monde le 13 juin 2024 [5]
  6. a b et c Article par par Alexandra Schwartzbrod le 19 juin 2024 dans Libération [6]
  7. a et b "Vivez-vous en Bretagne dans une « swing circo », ces circonscriptions qui peuvent basculer aux législatives ?", par Blandine Le Cain et Juliette Pirot Berson, dans Le Télégramme le 20 juin 2024
  8. "Elections législatives : les « circos » à surveiller", article par Louis Mollier-Sabet, le 12 juin 2022 sur Pubic Sénat [7]
  9. "Législatives 2024 : On a suivi une opération de « phoning » pour le Nouveau Front populaire" par Emilie Petit dans 20 Minutes le 19 juin 2024 [8]
  10. "À Limoges, la « méthode Ruffin » s’adapte à une campagne éclair" par Mathieu Dejean, le 19 juin 2024 dans Médiapart []
  11. Newsday, 18 juin 2022 [9]
  12. "Dans l’Essonne, l’optimisme infaillible des « vieilles du porte-à-porte », article dans Politis le 21 juin 2024 [10]
  13. "Législatives : focus sur les « swing circos » du Rhône"sur Rue89 [11]
  14. "Législatives : 104 circonscriptions où pèse l’incertitude" par Patrick Roger, dans Le Monde le 13 juin 2017 [12]
  15. a et b "La 1ère circo, ce “swing state”, reportage par Coralie Bonnefoy, dans le journal Marsactu le 22 Mai 2017 [13]
  16. a b et c "La Nupes à 16 000 voix de la majorité relative à l’Assemblée ? L’écart était en réalité plus élevé". Article par Pierre Breteau dans Le Monde le 23 juin 2022 [14]
  17. a b et c "Ce que la gauche peut (raisonnablement) espérer des législatives" par Fabien Escalona, dans Médiapart le 23 juin 2024 [15]
  18. "Législatives : 91 recours de candidats malheureux reçus par le Conseil constitutionnel", dans Le Courrier des maires le 01/07/2022 [16]
  19. Article sur France3 par Martin Vanlaton le 19/06/2024 [17]
  20. "23 CIRCONSCRIPTIONS À SUIVRE PARTICULIÈREMENT" par Hortense de Montalivet, BFM 22/06/2024 à[18]
  21. , la Sixième circonscription de la Haute-Garonne, la huitième circonscription de Seine-et-Marne, la septième circonscription du Val-de-Marne, la huitième circonscription des Yvelines, la première circonscription des Hautes-Alpes, ref>La Dépêche le 20/06/2022 [19]

Articles connexes

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