Racine primitive modulo n
Les racines primitives modulo n[1] sont un concept issu de l'arithmétique modulaire, dans la théorie des nombres. Ce sont (lorsqu'il en existe) les générateurs du groupe des inversibles de l'anneau ℤ/nℤ.
Définition
modifierSi n est un entier strictement positif, les nombres premiers avec n, pris modulo n, forment un groupe pour la multiplication, noté (Z/nZ)× ou Zn×. Ce groupe est cyclique si et seulement si n est égal à 4 ou pk ou 2pk pour un nombre premier p ≥ 3 et k ≥ 0[2]. Un générateur de ce groupe cyclique est appelé une racine primitive modulo n, ou un élément primitif[3] de Zn×. Une racine primitive modulo n est donc un entier g tel que tout inversible dans Z/nZ est une puissance de g modulo n.
Exemples
modifierPrenons par exemple n = 14. Les éléments de (Z/14Z)× sont les classes de congruence 1, 3, 5, 9, 11 et 13. Donc 3 est une racine primitive modulo 14, et l'on a 32 ≡ 9, 33 ≡ 13, 34 ≡ 11, 35 ≡ 5 et 36 ≡ 1 (modulo 14). La seule autre racine primitive modulo 14 est 5.
Voici une table contenant les plus petites racines primitives pour quelques valeurs de n (suite A046145 de l'OEIS) :
n | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 | 11 | 12 | 13 | 14 |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
racine primitive mod n | 1 | 2 | 3 | 2 | 5 | 3 | - | 2 | 3 | 2 | - | 2 | 3 |
Voici une table donnant les plus petites racines primitives r modulo les nombres premiers p inférieurs à 1 000 (suite A001918 de l'OEIS)[4] :
Calcul
modifierOn ne connait aucune formule générale simple pour calculer les racines primitives modulo n. Il existe cependant une méthode pour tester si un entier m est racine primitive mod n — c'est-à-dire si son ordre multiplicatif modulo n est égal à φ(n) (l'ordre de Zn×) — qui est plus rapide qu'un simple calcul mod n de toutes ses puissances successives jusqu'à l'exposant φ(n) :
On a au préalable calculé φ(n) et déterminé ses diviseurs premiers, soit p1,...,pk. On vérifie qu'aucun ne divise m. Ensuite, on calcule en utilisant par exemple la méthode d'exponentiation rapide. L'entier m est une racine primitive si et seulement si ces k résultats sont tous différents de 1.
Propriétés
modifier- Les racines primitives mod n sont les racines dans ℤ/nℤ du φ(n)-ième polynôme cyclotomique Φφ(n).
- Pour tout nombre premier p, le n-ième polynôme cyclotomique Φn est irréductible sur le corps fini Zp si et seulement si p est une racine primitive modulo n. Par conséquent, les entiers n modulo pour lesquels il n'existe pas de racine primitive (suite A033949 de l'OEIS) sont ceux tels que Φn est réductible sur tous les Zp. Ce sont également les entiers modulo lesquels 1 a d'autres racines carrées que 1 et –1.
- Le nombre de racines primitives modulo n (suite A046144 de l'OEIS), lorsqu'il en existe (suite A033948), est égal à φ(φ(n)), puisque tout groupe cyclique d'ordre r possède φ(r) générateurs.
Supposons que p soit un nombre premier impair.
- Si θ est une racine primitive modulo p, alors θ est une racine primitive modulo n'importe quelle puissance pk de p, sauf si θp−1 ≡ 1 (mod p2); Dans ce cas, θ + p possède cette propriété[5].
- Si θ est une racine primitive modulo pk, alors θ est une racine primitive modulo toute puissance inférieure de p.
- Si θ est une racine primitive modulo pk, alors θ ou θ + pk (celui des deux qui est impair) est une racine primitive modulo 2pk[6]
Pour tout nombre premier p, notons gp la plus petite racine primitive modulo p (entre 1 et p – 1). On a les deux résultats suivants :
- pour tout ε > 0, il existe[7] une constante C telle que pour tout p, gp < C p1/4+ε ;
- si l'hypothèse généralisée de Riemann est vraie, alors[8] gp = O(log6 p).
On conjecture que tout entier relatif différent de –1 et non carré est racine primitive modulo une infinité de nombres premiers (voir « Conjecture d'Artin sur les racines primitives »).
Notes et références
modifier- Carl Friedrich Gauss, Disquisitiones arithmeticae, [détail des éditions], § 54-57.
- Une démonstration est donnée dans l'article « Anneau Z/nZ », § « Groupe des unités ».
- (en) D. Rasch, J. Pilz, R. Verdooren et A. Gebhardt, Optimal Experimental Design with R, Taylor & Francis, coll. « Chapman & Hall/CRC Press », (lire en ligne), p. 291.
- Table des racines primitives des 10 000 premiers nombres premiers.
- Cohen, Henri (1993). A Course in Computational Algebraic Number Theory. Berlin: Springer. p. 26 (ISBN 978-3-540-55640-4).
- voir référence en note précédente.
- (en) Paulo Ribenboim, The New Book of Prime Number Records, Springer, , 541 p. (ISBN 978-0-387-94457-9), p. 24.
- (en) Eric Bach (en) et Jeffrey Shallit, Algorithmic Number Theory, vol. I : Efficient Algorithms, MIT Press, , 512 p. (ISBN 978-0-262-02405-1, lire en ligne), p. 254.
Voir aussi
modifierArticle connexe
modifierBibliographie
modifier(en) Shuguang Li et Carl Pomerance, « Primitive Roots: A Survey », dans Number Theoretic Methods, Springer, (lire en ligne [PDF]), p. 219-231