Corum L'Épargne
Corum L'Épargne est un voilier monocoque français de 60 pieds conçu pour la course au large, lancé le . Huitième et dernier Imoca de la génération 2018-2020, il est barré par Nicolas Troussel.
Corum L'Épargne | |
Corum L'Épargne à Lorient en juillet 2023 | |
Type | monocoque |
---|---|
Classe | Imoca |
Fonction | course au large |
Gréement | sloop |
Histoire | |
Architecte | Juan Kouyoumdjian |
Chantier naval | CDK Technologies et Mer agitée |
Design | prototype |
Lancement | 2020 |
Équipage | |
Équipage | un, deux ou quatre marins |
Caractéristiques techniques | |
Longueur | 20,8 m |
Longueur de coque | 18,28 m |
Maître-bau | 5,70 m |
Tirant d'eau | 4,50 m |
Déplacement | 7,9 tonnes |
Hauteur de mât | 27,30 m |
Voilure | 270 m2 au près, 535 m2 au portant |
Carrière | |
Propriétaire | CORUM L’Épargne (d) |
Armateur | Corum Sailing Team |
Port d'attache | • le Kernevel, Larmor-Plage (2020-2021) • Lorient (depuis 2022) |
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Le projet est arrêté en septembre 2023, après des incidents à répétition en compétition.
Conception
modifierProjet
modifierCorum L'Épargne est un groupe de gestion d'épargne, principalement immobilière[1]. Connu dans le milieu financier, il ne l'est pas du grand public. Souhaitant acquérir de la notoriété[2], le groupe soutient, pour la saison 2018 de Class40, le skipper Nicolas Troussel, double vainqueur de la Solitaire du Figaro (2006 et 2008)[3].
Le , Troussel et Corum L'Épargne annoncent la construction d'un Imoca en vue d'une participation au Vendée Globe 2020-2021[4] et à la Route du Rhum 2022[3]. Le directeur du projet est Greg Evrard[5],[6].
L'architecte argentin Juan Kouyoumdjian est chargé du dessin et des calculs de structure[7]. Le maître d'œuvre est Michel Desjoyeaux[8] : sa première structure, Mer agitée, pilote l'ensemble du projet, et doit livrer un bateau fini[7].
Construction
modifierLa construction débute en mars 2019 à Port-la-Forêt chez CDK Technologies, qui fabrique la coque, le pont et certaines pièces de structure[5],[9]. La coque est réalisée à partir des moules de l'Arkéa Paprec de Sébastien Simon, un plan Kouyoumdjian[8].
Terminée en juillet, elle est transférée à deux pas de là, sur le chantier de Desjoyeaux, dont la deuxième structure, Mer forte, a la responsabilité du plan de pont, de l'organisation du cockpit, de la mécanique générale, de l'accastillage, des safrans, des foils et des systèmes embarqués[5]. Elle n'intervient pas sur le profil des foils[7]. Ceux-ci sont construits chez Multiplast, à Vannes[7].
Si la pandémie de covid-19 affecte la préparation de la plupart des concurrents, elle met Troussel dans une situation particulièrement délicate. Le chantier est stoppé pendant trois semaines. Il reprend avec un effectif réduit de moitié pour respecter les gestes barrières. Prévue le , la mise à l'eau de Corum L'Épargne s'effectue le , six mois seulement avant le départ du Vendée Globe[10],[11]. Le bateau gagne son port d'attache du Kernevel, près de Lorient[12]. Le , ses foils sont installés[13], des foils « en C »[14]. Les semaines suivantes, Troussel embarque Sébastien Josse, Nicolas Lunven et Thomas Rouxel — et même Desjoyeaux, au début — pour finaliser les réglages des systèmes embarqués et vérifier que tout fonctionne bien à bord[15].
Cependant, mis à l'eau tardivement en raison de la crise du covid, le bateau ne peut être développé comme on l'aurait voulu. Les problèmes de structure vont s'enchaîner[16].
Caractéristiques
modifierLa carène est assez plate[17]. Si la coque est sensiblement la même que celle d'Arkéa Paprec, le dessous est renforcé, « surtout au milieu et à l'arrière de la carène », et le plan de pont et le cockpit sont différents[18]. Le cockpit, très protégé[17], est original, avec un rouf intégré au pont. Le franc-bord est haut[19].
La principale caractéristique du bateau, dit Desjoyeaux, c'est un pont avec beaucoup de volume, « ce qui permet d'avoir un bulbe de quille plus léger. C'est un peu comme s'il n'y avait pas de rouf. » De ce fait, le skipper est bien protégé dans le cockpit[17].
Pour Sébastien Josse, le bateau « n’a pas un ou quelques points forts. On sent bien que c’est l’ensemble qui est un point fort. Il a un vol bas sur l’eau, avec une bonne stabilité et du volume de coque et de pont pour alléger le lest[20]. »
Josse est impressionné par les écarts de vitesse entre ces bateaux de nouvelle génération et les anciens Imoca, surtout aux allures serrées. Selon lui, l'écart est le même entre foils version 1 et foils version 2 qu'entre dérives droites et foils : « En deux générations, ces bateaux ont pris au moins 8 nœuds de mieux[20]. »
- Longueur : 18,28 m
- Largeur : 5,70 m
- Tirant d'eau : 4,50 m
- Tirant d'air : 29 m
- Déplacement : 7,9 tonnes
- Mât : 27,30 m
- Voilure :
- 270 m2 au près
- 535 m2 au portant[8]
Budget
modifierSelon Frédéric Puzin, président du groupe Corum L'Épargne, le coût de construction est de l'ordre de 6 millions d'euros, et le budget de fonctionnement jusqu'à la Route du Rhum 2022 représente une moyenne d'environ 2 millions d'euros par an. En tout, la dépense est donc de 14 millions sur quatre ans[2].
Courses 2020-2022
modifierLors du Vendée Globe 2020-2021, le bateau est victime d'un démâtage dans la nuit du 15 au , au nord-ouest du Cap-Vert[21].
Le , il s'engage dans The Ocean Race Europe. Troussel a pour équipiers Marie Riou, Benjamin Schwartz et Sébastien Josse[22]. Corum L'Épargne termine 4e des cinq Imoca engagés[23]. Mené par Troussel et Sébastien Josse, il se classe 7e sur 12 dans les 48 heures du Défi Azimut[24]. En octobre, le bateau teste des foils en V, qui devraient apporter, dans certaines conditions, un gain de vitesse de plus de 15 % par rapport à la première version, en C[25]. Toujours mené par Troussel et Josse, il termine 8e sur 22 Imoca dans la Transat Jacques-Vabre 2021[26].
En mai 2022, dans la Bermudes 1000 Race, Troussel doit abandonner sur avarie de quille, à 60 milles de Fastnet Rock[27]. En novembre, dans la Route du Rhum, il termine 20e sur 38 Imoca[28] : « On finit complètement à la ramasse, dit Frédéric Puzin, avec plein de problèmes techniques à nouveau et Nico qui fait bien ce qu’il sait faire, mais qui doit se remettre dans le rythme et reprendre ses marques pour arriver au plus haut niveau[29]. »
Chantier 2023
modifierLa série de déconvenues — que l'on ne peut s'empêcher de rapprocher de celles du sister-ship, l'Arkéa-Paprec de Sébastien Simon[29] — ne décourage pas Frédéric Puzin. Plutôt que de construire un nouveau bateau, il préfère garder celui-ci. Il ne remet en cause ni l'architecte ni le skipper[29].
Ce qu'il veut être à même de comprendre, c'est pourquoi une même pièce réputée incassable, produite par un même sous-traitant connu, ne casse pas sur les autres bateaux, mais casse sur Corum L'Épargne. Ce que Puzin regrette, c'est de n'avoir pas eu, au moment de la construction, les bons interlocuteurs pour discuter avec l'architecte, de n'avoir pas eu en interne le bureau d'études et les ingénieurs dont il dispose à présent « pour challenger les choix techniques[29] ». « Le niveau de difficulté technique de ces bateaux a été mal appréhendé, dit-il, c’est pour moi le sujet de fond. On ne met pas l’argent qu’il faut […] sur les recherches en termes de matériaux, de résistance[29]… » Puzin décide de tout passer en revue, « avec une approche de l’aéronautique au niveau qualité » pour « mieux comprendre ce qui se passe[29] ».
Corum L'Épargne est un bateau « puissant, large, assez lourd[16] ». Il donne toute satisfaction au reaching et au près, reconnaît Frédéric Puzin. Sa carène très tendue sur l'arrière lui permet d'être bien appuyé au reaching « et d'avoir beaucoup de longueur à la flottaison ». Mais, au portant VMG, cette même carène le handicape[29] : il ne va pas vite et a tendance à planter dans les vagues. Le problème affecte les autres bateaux de la même génération, mais il est plus marqué sur Corum L'Épargne[16]. Comment combler ce handicap sans altérer les qualités au reaching et au près ? On espère y parvenir en apportant des modifications importantes, et avec de nouveaux foils[29].
Dès le mois de décembre 2022, un chantier est lancé. Il va durer sept mois. Toute la structure est reconstruite pour gagner en solidité[16]. Le bateau est amputé de six mètres à l'avant, soit un tiers de sa longueur. Cette partie est entièrement refaite pour se rapprocher, autant que la jauge Imoca le permet, de l'idée du scow : plus de volume à l'avant et étrave spatulée[30]. Le rouf est agrandi vers l'avant, ce qui permet, au regard de la jauge, d'ôter du poids dans le bulbe de quille. Les puits de foil sont modifiés et déplacés. Une nouvelle paire de foils va être posée, que Troussel espère « plus tolérante et moins sujette au décrochage » pour permettre au bateau de voler plus souvent dans certaines conditions, notamment au portant[30]. « On sait, dit Nicolas Troussel, que c’est compliqué de rattraper les bateaux de nouvelle génération, mais on devrait être au moins meilleurs qu’en 2020. On va faire des ajustements au niveau des voiles. L’important, c’est d’avoir des bons foils et une carène qui passe bien dans la mer[16]. »
Le , Corum L'Épargne sort du chantier Multiplast, à Vannes. Il est convoyé vers Lorient, son port d'attache, pour y recevoir sa quille et son mât[30].
Le , l'IMOCA démâte douze heures après le départ du Défi Azimut[31]. Alors que le bateau est engagé pour prendre le départ de la Transat Jacques-Vabre le mois suivant, ce nouvel incident signe la fin du projet Corum L'Épargne[32].
Palmarès
modifier- Skippé par Nicolas Troussel
- 2020. Abandon dans le Vendée Globe[21]
- 2021 :
- 4e sur 5 Imoca dans The Ocean Race Europe, en équipage avec Marie Riou, Benjamin Schwartz et Sébastien Josse[23]
- 7e sur 12 dans les 48 heures du Défi Azimut, en double avec Sébastien Josse[24]
- 8e sur 22 Imoca dans la Transat Jacques-Vabre, en double avec Sébastien Josse[26]
- 2022 :
- Abandon dans la Bermudes 1000 Race[27]
- 20e sur 38 Imoca, dans la Route du Rhum[28]
- 2023 :
- Abandon sur le Défi Azimut (démâtage)[31]
Notes et références
modifier- « Frédéric Puzin », sur challenges.fr, 2020 (consulté le ).
- Jacques Guyader, « Pour Corum, le projet Vendée Globe avec Nicolas Troussel, c'est 14 millions d'euros », sur ouest-france.fr, 24 mai 2019 (consulté le 30 juillet 2020).
- « Nicolas Troussel », sur imoca.org (consulté le ).
- Vendée Globe. Troussel : « Depuis le temps que j’attendais ça… » sur letelegramme.fr, 13 janvier 2019 (consulté le ).
- « Corum L'Épargne : nouvelle étape dans la naissance de l'Imoca », sur imoca.org, 30 juillet 2019 (consulté le 29 juillet 2020).
- « La Corum Sailing Team », sur www.corum.fr, 2020 (consulté le 16 septembre 2020).
- Dominic Bourgeois, « Vendée Globe. Michel Desjoyeaux, cash : « Tous les bateaux ne feront pas le tour du monde ! » sur voilesetvoiliers.ouest-france.fr, 28 janvier 2020 (consulté le 30 juillet 2020).
- « Nicolas Troussel », sur vendeeglobe.org (consulté le 29 juillet 2020).
- « Corum L'Épargne », sur cdk-technologies.com (consulté le ).
- Pascal Sidoine, « Pas simple, mais pas impossible », L'Équipe, 26 avril 2020.
- « Le Corum L'Épargne de Nicolas Troussel a touché l'eau », sur lequipe.fr, 5 mai 2020 (consulté le 29 juillet 2020). — « Mise à l'eau de l'Imoca Corum L'Épargne », sur courseaularge.com, 5 mai 2020 (consulté le 29 juillet 2020).
- « Corum L'Épargne, l'Imoca de Nicolas Troussel, dévoile ses foils. Explications », sur scanvoile.com, 3 juin 2020 (consulté le 29 juillet 2020).
- « Les foils sont installés sur Corum L'Épargne », sur adonnante.com, 23 mai 2019 (consulté le 30 juillet 2020).
- Maxime Leriche, « Corum L'Épargne, le dernier ovni de la classe Imoca », sur bateaux.com, 31 octobre 2020 (consulté le 22 juillet 2023).
- Pascal Sidoine, « Une Dream Team autour de moi », L'Équipe, 26 avril 2020.
- « Vendée Globe. Le nouvel Imoca Corum de Nicolas Troussel », sur courseaularge.com, 17 juillet 2023 (consulté le 19 juillet 2023).
- Pascal Sidoine, « Vendée Globe : les premières images du Corum L'Épargne de Nicolas Troussel », sur lequipe.fr, 5 mai 2020 (consulté le 29 juillet 2020).
- Dominic Bourgeois, « Michel Desjoyeaux cash : « Les nouveaux Imoca sont comme des tabourets auxquels il manque un pied », sur voilesetvoiliers.ouest-france.fr, 21 septembre 2019 (consulté le 30 juillet 2020).
- « Corum L'Épargne », sur imoca.org (consulté le 29 juillet 2020).
- Nicolas Fichot, « Sébastien Josse revient aux affaires sur le Corum L’Épargne de Nicolas Troussel », sur voilesetvoiliers.ouest-france.fr, 17 juin 2020 (consulté le ).
- Redacteur, « Vendée Globe. Corum L’Épargne a démâté ! », sur Course au Large, (consulté le )
- « Ocean Race Europe. Corum L’Épargne dévoile son équipage », sur courseaularge.com, 2 avril 2021 (consulté le 14 avril 2022).
- (en) « Scoreboard - Provisional results », sur theoceanrace.com, 2022 (consulté le 14 avril 2022).
- « Classements », sur defi-azimut.net, 2021 (consulté le 14 avril 2022).
- « Transat Jacques Vabre. De nouveaux foils pour l’Imoca Corum L'Épargne », sur courseaularge.com, 27 octobre 2021 (consulté le 22 juillet 2023).
- « Transat Jacques-Vabre. Les arrivées se succèdent en Imoca », sur courseaularge.com, 29 novembre 2022 (consulté le 14 avril 2022).
- « Guyader Bermudes 1000 Race : avarie de quille, Nicolas Troussel abandonne, Charlie Dalin reste en tête », sur letelegramme.fr, 10 mai 2022 (consulté le 11 avril 2022).
- « Yoann Richomme, impérial en Class40… », sur adonnante.com, 23 novembre 2022 (consulté le 11 avril 2023).
- « Frédéric Puzin : « On n’est pas dans le misérabilisme », sur tipandshaft.com, 11 avril 2023 (consulté le 11 avril 2023).
- Thibaud Vaerman, « Un 60 pieds revisité pour Nicolas Troussel : « On a presque un bateau neuf entre les mains », sur voilesetvoiliers.ouest-france.fr, 21 juillet 2023 (consulté le 21 juillet 2023).
- « Voile : le bateau CORUM l’Épargne démâte sur le défi Azimut », sur LEFIGARO, (consulté le )
- Quentin BURBAN et Jacques GUYADER, « Voile. Le projet « Corum L’Épargne » de Nicolas Troussel va s’arrêter », sur Ouest-France.fr, (consulté le )