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  Histoire

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A)     Les origines de l’administration sociale parisienne

Le CASVP a été créé sous le nom de Bureau d’aide sociale de la Ville de Paris par décret du 9 janvier 1969[1]. Cet opérateur municipal de l’aide sociale est héritier de compétences prélevées d’une part de l’Assistance publique (maisons de retraite et hospices, et dispensaires) et d’autre part de la Préfecture du Département la Seine (dispositifs d’aide aux sans-abris, foyers de travailleurs migrants). Bien que de création récente, le CASVP gère ainsi des établissements dont certains remontent au 19e siècle.

L’origine d’une administration sociale parisienne peut remonter au Grand bureau des pauvres[2] créé par François Ier en 1544. Concentré sur l’octroi de secours aux indigents méritants de la capitale, par charité et afin de prévenir la mendicité, le service subsiste jusqu’en 1791. Il est rattaché au Parlement de Paris, tandis que les structures médicales (Hôtel-Dieu, hôpitaux Saint-Louis et Sainte-Anne) sont autonomes, administrées par un collège de laïcs et d’ecclésiastiques. En 1656, Louis XIV met en place l’Hôpital Général, une nouvelle administration chargée de lutter contre la mendicité et la délinquance par l’enfermement des plus pauvres. Cette configuration témoigne des premières politiques sociales mises en place par les États modernes, de leurs origines tant charitables que répressives.


L’avènement de la Révolution française, en s’emparant de la question sociale, rebat les cadres administratifs et philosophiques de l’assistance aux pauvres. Sous l’influence de la philosophie des Lumières, la pauvreté est perçue comme un dysfonctionnement de la société et la charité comme une pratique insuffisante pour résoudre les problèmes sociaux. Dans la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1793, il est fait de l’Assistance un droit, le moyen de parvenir à résoudre les inégalités sociales. Mais cette bienfaisance publique devait rester modeste pour ne pas engendrer le dégoût du travail et l’oisiveté chez les bénéficiaires.

Deux types d’aide sont énoncés : secours à domicile ou placement dans un établissement[3]. L’administration parisienne se réforme en conséquence : les arrêtés consulaires de l’an X (1801) créent le Conseil général des hospices[4] qui regroupe hôpitaux, hospices (vieillards, enfants-trouvés, incurables) et secours à domicile (accordés par les bureaux de bienfaisance, créés par la loi du 7 frimaire an V[5] soit le 6 décembre 1796, ce sont les services les plus anciens encore en activité au CASVP[6]). Cette institution devient en 1849 l’Assistance Publique, administration qui s’étoffe à mesure que s’amplifient les besoins sociaux d’une population parisienne dont l’accroissement démographique est considérable.

Si l’Hôpital Général a été dissous à la Révolution, l’une de ses fonctions perdure avec la généralisation des dépôts de mendicité après le décret impérial du 5 juillet 1808, laissant à la Préfecture de Police de Paris la gestion de l’enfermement des vagabonds et mendiants, décisions à l’origine des établissements actuels du CASH de Nanterre ainsi que de la maison de retraite parisienne située à Villers-Cotterêts, installée de 1808 à 2014 dans le château de François Ier.


La fin du19esiècle voit aussi le Département de la Seine intervenir de plus en plus dans les affaires sociales. Déjà en charge des asiles d’aliénés, il inaugure des établissements sanitaires (dont les bains-douche) et sociaux : centres destinés à l’enfance (maisons maternelles[7], crèches), aux infirmes (aveugles, sourds), et empiète aussi sur les compétences de l’Assistance Publique en construisant ses propres maisons de retraite et hôpitaux (hôpital Max Fourestier au sein de la Maison de Nanterre, hôpital Paul Brousse ou hôpital franco-musulman de Bobigny). Le retour d’exil des communards à partir de 1880 renforce la présence des radicaux de gauche qui détiennent la majorité au Conseil municipal de Paris jusqu’en 1909 ; cela permet la création (toujours sous l’égide du Département, le Conseil de Paris ayant aussi fonction de Conseil général) des premiers centres publics destinés aux sans-abri. L’expansion de l’exode rural, le développement du chômage (et de la figure du chômeur[8]) ainsi que la raréfaction des logements conduisent de nombreuses personnes valides à la rue. La prise en charge des SDF reposait sur leur enfermement dans des dépôts de mendicité (abolis en 1889) ou sur leur hébergement dans les établissements privés du réseau confessionnel ou philanthrope (Armée du Salut, Œuvre de l’hospitalité de nuit, Société philanthropique). Ici, le Département de la Seine propose à partir de 1886 un hébergement dans un cadre laïc pour quelques nuits (refuges municipaux, ancêtres des centres d’hébergement d’urgence), ou de quelques mois dans des asiles-ouvroirs (ancêtres des centres d’hébergement et de réinsertion sociale), à l’intérieur desquels l’hébergé.e rembourse son accueil en contrepartie d’un travail, disposant ensuite d’une somme d’argent à sa sortie du centre (pécule). Il s’agit des premières ébauches de politique de réinsertion sociale[9], dont l’engagement idéologique de ses concepteurs est rendu visible par le nom de certains établissements (Benoît Malon, Alexandre Luquet, Pauline Roland – centre pour femmes inauguré le 17 juillet 1890 et toujours en activité).

Lors de l’exposition universelle de 1900, les centres parisiens des trois acteurs (Département, Assistance Publique, Préfecture de Police) sont récompensés[10] dans la catégorie des œuvres d’Assistance (groupe XVI, classe 112) en ce qu’ils incarnent des structures novatrices participant du progrès de la société. Paris apparaît ainsi comme un laboratoire privilégié des dispositifs sociaux, la ville est capable au début du 20e siècle d’accompagner les pauvres dans tous les âges et circonstances de la vie[11]. L’offre publique consiste principalement dans le placement en établissement, régi sur le modèle de l’institution disciplinaire[12]. Les populations aidées s’insèrent dans un réseau spécialisé et hiérarchisé de centres dont les gammes de confort, très contrastées, reflètent souvent la situation sociale des personnes. A la marge de la sphère carcérale et de celle de l’Assistance, perdure la Maison de répression de Nanterre qui succède au dépôt de mendicité au début du 20e siècle.


Ce cadre administratif parvient en l’état jusque dans les années 1950, le début du 20e siècle est cependant marqué par le départ du personnel religieux consécutivement aux lois de séparation des églises et de l’État : ces agents constituaient une grande partie du personnel de service dans les établissements ainsi que dans les bureaux de bienfaisance où les sœurs de la congrégation des Filles de la charité assuraient la dispensation des aides en nature (vêtements, comestibles, soins ou médicaments). Leurs maisons de secours deviennent des dispensaires. La promulgation du premier Code de l’aide sociale et des familles en 1956 fait alors basculer le fond et les formes de l’action sociale. Elle devient un droit et non plus une faveur, acquiert un caractère obligatoire. Les bureaux de bienfaisance sont renommés en bureaux d’aide sociale et les allocations en nature (qui permettaient de mieux contrôler l’usage des aides aux bénéficiaires) deviennent marginales, au profit des sommes en argent. Le terrible hiver de 1954 voit l’appel de l’Abbé Pierre[13] être relayé par le Département de la Seine qui organise le premier Plan grand froid en ouvrant des stations de métro la nuit pour un hébergement d’urgence. La Préfecture de Police contribue aussi à cet élan en mettant en place une Équipe de Ramassage des Vagabonds[14] (ERV), devenue en 1968 l’actuelle Brigade d’assistance aux personnes sans-abris, la BAPBSA.


B)     Depuis 1969 et la création du Bureau d’aide sociale de la Ville de Paris.

Avec la reconfiguration administrative de l’Ile-de-France, le Département de la Seine est éclaté, ses compétences parisiennes sont provisoirement gérées par la Préfecture de Paris. Le démantèlement des attributions sociales de l’Assistance Publique (qui souhaite se concentrer uniquement sur le médical) sont réunies à celles du Département pour créer le Bureau d’aide sociale de la Ville de Paris[1] (BASVP) dont la mise en place s’échelonne de 1969 à 1974. Il s’agit d’un établissement public dont le Conseil d’administration est composé de membres d’associations, d’élus du Conseil de Paris et présidé alors par le Préfet de Paris (puis le maire à partir de 1977), cela rapproche l’administration sociale parisienne du fonctionnement des autres CCAS.

La priorité de cette nouvelle administration est orientée vers les établissements pour personnes âgées, souvent créés au 19e siècle à partir de legs de philanthropes (dont Michel-Jacques Boulard, Jean-Hubert Debrousse, Cécile Furtado-Heine, les frères Galignani). Une politique d’humanisation des établissements[2] (dont certains sont centenaires) permet de rompre avec les formes et usages de l’hospice. Concernant les foyers de travailleurs migrants, il est décidé (contrairement aux nouveaux départements de banlieue) de ne pas en confier la gestion au secteur privé (Sonacotra, Aftam) mais de les rénover pour mieux accompagner les restructurations urbaines de Paris des années 1970 (Belleville, Olympiades, Orgues de Flandres…). L’objectif est ainsi d’éviter l’occupation clandestine des îlots insalubres et d’héberger pour de bas loyers, des travailleurs à proximité des chantiers ou des grandes usines. Le contexte de croissance économique des années 1970 accorde davantage d’attentions aux dispositifs d’aide au handicap qu’à la lutte contre l’exclusion[3]. Il en résulte un fort retard dans la rénovation des centres d’aide aux sans-abri, qui architecturalement ou dans leur mode de fonctionnement, restent encore figés dans le 19e siècle (le centre d’accueil pour femmes Pauline Roland, ouvert en 1890 et reconstruit en 1972, subit de ses résidentes un mouvement de contestation médiatisé[4] ; le centre pour hommes Nicolas Flamel, ouvert en 1886, n’est restructuré qu’en 1994).  

En 1977, la première élection du maire de Paris a pour effet de dynamiser le dispositif : l’aide sociale devient un enjeu électoral en ce qu’elle peut faire partie d’un programme politique. Les allocations se diversifient, avec en particulier des aides pour les personnes âgées (avec l’allocation ville de Paris, la gratuité des transports en commun, l’offre d’une boîte de chocolats en fin d’année) mais aussi pour les familles (premières allocations en France pour les familles monoparentales), témoignant des nouveaux usages démographiques que peut permettre l’aide sociale à un moment où la capitale perd ses habitants au profit du développement de la grande banlieue. Le BAS se charge aussi d’organiser l’accueil sur Paris des rapatriés d’Algérie en 1962 (au centre Baudricourt) puis celui des Boat-people en 1979 (dans l’EHPAD Alquier-Debrousse).

Le Bureau d’aide sociale est renommé en Centre d’action sociale de la Ville de Paris en 1995[5]. Il contribue à la naissance du SAMU Social, participe à son fonctionnement et lui met à disposition ses locaux de l’hospice Saint-Michel (parmi les premières maisons de retraite fondées à Paris par le legs de Michel-Jacques Boulard en 1825). L’informatisation de l’octroi des aides sociales dans les années 1990 permet leur massification, elles ne sont plus réservées au seul public précaire ; les progrès de l’accès au droit tendent à informer les Parisiens des allocations auxquelles ils peuvent prétendre.

L’administration resserre aussi ses activités. Déjà, à partir des années 1980, beaucoup de difficultés surgissent dans les foyers pour travailleurs migrants (suroccupation, désengagement des institutions[6], trafics, pertes financières, vieillissement de la population – les chibanis) et conduisent la municipalité à transférer ses derniers foyers au secteur associatif en 2006. L’amélioration des conditions sanitaires des Parisiens conduit aussi le BAS à fermer certains dispensaires (centres de santé) puis à en déléguer les derniers au réseau privé ou au Département de Paris (DASES), tandis que l’accompagnement des bénéficiaires du RMI dans les cellules d’appui pour l’insertion (CAPI) cesse de faire partie de ses missions en 2008.

En 2018, la première Nuit de la solidarité, décompte des personnes à la rue à Paris, est pilotée par le CASVP.

Voir aussi

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1)      Etablissements du CASVP sur Wikipedia Articles connexes (sur Wikipedia) : APHP / Archives de Paris / enfants assistés / travail social / louise Koppe / philanthropie / bienfaisance / histoire sociale / Ville de Paris / jardins de l’hospice Debrousse / Fondation Galignani

Fiches dont un raccordement à la page Wikipedia CASVP est souhaitable.

Hospice Saint-Michel / Cécile Furtado-Heine / Jean-Hubert Debrousse / Jardins de l‘hospice Debrousse / Château de Bagnolet / Mairie de Paris / CCAS / Fondation Galignani / Foyer de travailleur migrants / Villers-Cotterêts / dépôt de mendicité


2)      Bibliographie :

Administration de l’Assistance publique à Paris, Cent ans d’assistance à Paris,

1849-1949. 1949

-   1886-1986 : centenaire de Nicolas Flamel, André Dauvergne, Bureau d’aide sociale de la Ville de Paris, 1986

-   BASVP, Au Cœur de l’action, le BAS fête ses 25 ans, 1994

-   Alan Forest, La révolution française et les pauvres, Perrin, Paris 1988

-   Colette Bec, Assistance et République, éditions de l’Atelier, Paris, 1994

-   Catalogue de l’exposition Le Peuple de Paris au XIXe siècle, Paris-Musées, 2011

-   Axelle Brodiez-Dolino, Combattre la pauvreté : vulnérabilités sociales et sanitaires,

1880 à nos jours, Paris, CNRS éditions, 2013

-   Voyage au pays de Gérousie, le grand âge en institution, APHP, 2007

-   Mathilde Rossigneux-Méheust, Vivre, vieillir, mourir en institution au 19e siècle, Champ Vallon, 2018

-   Lucia Katz, L’avènement du sans-abri, les asiles de nuit 1871-1914, éditions Libertalia, 2015


3)      Liens externes : expos CASVP + livret + rapport d’activité CASVP :

-   La page du CASVP sur Paris.fr https://www.paris.fr/pages/le-centre-d-action-sociale-de-la-ville-de-paris-casvp-145

-   Rapport d’activité du CASVP de 2015

https://fr.calameo.com/books/000197834a14238984263

-   Paris, deux siècles d’aide sociale, livret réalisé par le CASVP, 2017.  https://fr.calameo.com/books/000197834eee80bf67505

-   Charité, bienfaisance, solidarité, histoire de l’aide municipale à Paris, exposition sur l’histoire des bureaux de bienfaisance réalisée par le CASVP, 2013

https://fr.calameo.com/books/000197834b1a9b7ae5c67

-   Du refuge à la réinsertion sociale, 120 d’hébergement à Paris, exposition sur l’histoire des centres d’hébergement réalisée par le CASVP, 2011

https://fr.calameo.com/books/000197834b43bac63a257

-   De la maison François Ier aux EHPAD de demain, exposition sur l’histoire de la maison de retraite François Ier située à Villers-Cotterêts réalisée par le CASVP, 2012

https://fr.calameo.com/books/0001978348b331cd1a8b2


[1]https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000849500&categorieLien=id    

[2]Bureau d’aide sociale de la Ville de Paris, Au Cœur de l’action, le BAS fête ses 25 ans, 1994

[3] Robert Castel, les métamorphoses de la question sociale, Fayard, 1995

[4] Article de Libération, 25 octobre 1976, le 19esiecle n’est pas fini au foyer Pauline Roland

[5]https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000736296&categorieLien=id

[6]Le BAS est en litige constant avec le Fond d’action sociale pour les travailleurs immigrés et leur famille (FAS) au sujet du subventionnement des foyers (voir dans l’instrument de recherche du fond d’archives des EATM versé aux Archives de Paris http://archives.paris.fr/_depot_ad75/_depot_arko/ead/INV2224.pdf). D’une manière générale, le durcissement des conditions d’immigration à la fin des années 1970 réduit les attentions accordées aux structures d’accueil des étrangers.  



[1]https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000849500&categorieLien=id

[2] Voir la fiche du service d’archives de l’AP-HP http://archives.aphp.fr/grand-bureau-des-pauvres-1544-1791/

[3]https://www.cairn.info/revue-gerontologie-et-societe1-2007-4-page-153.html Ces deux types de secours sont décrits dès 1791 dans des projets de décrets du Comité de mendicité présentés à l’Assemblée nationale. Cf. aussi Mathilde Rossigneux-Méheust, Vie d’hospice, vieillir et mourir en institution au XIXe siècle, Champ Vallon, 2018, p. 36

[4] Voir la fiche du service d’archives de l’AP-HP http://blogs.aphp.fr/wp-content/blogs.dir/113/files/2013/04/3_conseil-g%C3%A9n%C3%A9ral-des-hospices.pdf

[5]Voir la fiche rédigée par les Archives de Paris http://archives.paris.fr/a/295/action-sociale/

[6]Les Bureaux de bienfaisance se sont appelés à Paris, bureaux de charité sous la Restauration, bureaux d’aide sociale après la réforme de 1955 puis sections d’arrondissement d’aide sociale et portent le nom de Centre d’action sociale de la ville de Paris d’arrondissement (CASVP d’arrondissement) depuis 2018.

[7]Voir la fiche du service d’archives de l’AP-HP  http://blogs.aphp.fr/wp-content/blogs.dir/113/files/2013/04/96_Michelet.pdf

[8] Christian Topalov, Naissance du chômeur 1880-1910, Albin Michel, 1994

[9] Lucia Katz, L’avènement du sans-abri, les asiles de nuit 1871-1914, éditions Libertalia, 2015

[10] Rapport du jury complet accessible sur le site du Conservatoire numérique des arts et métiers : http://cnum.cnam.fr/CGI/redir.cgi?8XAE580.4

[11] Mathilde Rossigneux-Méheust, Vivre, vieillir, mourir en institution au 19e siècle, Champ Vallon, 2018

[12] Tel que l’entend le philosophe Michel Foucault dans Surveiller et punir, naissance de la prison, 1978

[13] Axelle Brodiez-Dolino, Emmaüs et l’Abbé Pierre, Presses de Sciences PO, 2009

[14]http://eclairs.fr/wp-content/uploads/2012/06/PriseEnChargeVagabondsDamonRDSS.pdf