Utilisateur:Archives nationales DJI/Brouillon/Commission de révision des naturalisations

La commission de révision des naturalisation est une entité administrative chargée par le gouvernement de Vichy de réviser les naturalisations postérieures à 1927. Elle a travaillé de novembre 1940 à mai 1944 et son activité a été annulée à la Libération.

Création

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La commission de révision des naturalisations est créée par l’article 2 de la loi du 22 juillet 1940[1]. L’article 1 de cette loi institue la révision de « toutes les acquisitions de la nationalité française intervenues depuis la promulgation de la loi du 10 août 1927 sur la nationalité »[1]. Raphaël Alibert, garde des Sceaux du 12 juillet 1940 au 27 janvier 1941, instigateur de la loi du 3 octobre 1940 sur le statut des Juifs, est à l’origine de ce texte voté dix jours après son arrivée à la Chancellerie. Alibert avait envisagé un retrait général de toutes les acquisitions de la nationalité française postérieures à 1927, avant de mettre en place une dénaturalisation au cas par cas[2][3]. Objet de nombreuses critiques, surtout à droite, la loi de 1927 était accusée d’avoir fait des « Français de papier »[4], selon l’expression de l’Action française [on parle bien du mouvement et pas du journal ?].

Composition

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L’arrêté du 31 juillet 1940 fixe l’organisation et la composition de la commission de révision. Celle-ci siège au ministère de la Justice et est rattachée au Secrétariat général du gouvernement de Vichy. Georges Dayras, titulaire du poste de Secrétaire général [du ministère de la Justice ?], exerce ses fonctions [président du comité ?] de juillet 1940 à janvier 1944, puis de mars à août 1944. La commission compte dix membres, y compris son président. Sollicité par Raphaël Alibert, le conseiller d'État Jean-Marie Roussel accepte ce poste et l'occupe de septembre 1940 à la fin du mois d’avril 1944. Il est secondé par André Mornet, président de chambre honoraire à la Cour de cassation en 1940, qui deviendra le procureur général du procès de Philippe Pétain en 1945. Il est l’auteur, à propos de Vichy, de la célèbre formule « quatre ans à rayer de notre histoire »[5]. Le second vice-président de la commission est Raymond Bacquart, conseiller d’État, qui préside également la commission de révision des changements de noms à partir de 1942. Au nombre des autres membres de la commission, on compte plusieurs magistrats, un représentant du ministère des Affaires étrangères, un de l’Intérieur, un autre de la Défense et enfin un représentant du secrétariat d’État à la jeunesse et à la famille[6].

L’article 3 de la loi du 22 juillet 1940[1] indique que les décrets de retrait de la nationalité sont pris sur le rapport du garde des Sceaux après avis de la commission de révision.

Organisation de la procédure

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La Commission de révision siège à Paris et non à Vichy, à la demande de son président[ref]. Elle doit en effet examiner des centaines de milliers de dossiers de naturalisation qu’il est impossible de déplacer. Le bureau du Sceau au ministère de la Justice, très impliqué dans le fonctionnement de la Commission de révision, en assure le secrétariat et fournit les dossiers aux magistrats rapporteurs, chargés de les étudier avant de les présenter lors des séances de la commission. Celle-ci émet alors un avis de maintien ou de retrait. Elle peut également diligenter une enquête auprès des préfectures et des ministères (notamment celui de la Défense, pour connaître des états de service ou un statut de prisonnier de guerre - critères essentiels de maintien). Si l’avis de retrait est suivi par le garde des Sceaux, un décret de retrait est prononcé à l’encontre de ceux qui ont été « jugés indignes de conserver notre nationalité »[7]. Ces retraits sont publiés en préfecture et dans les tribunaux par voie d’affichage et sont insérés dans un journal local d’annonces légales. La gendarmerie ou l’autorité de police se présente également au domicile des intéressés pour notifier le retrait et réclamer la remise immédiate des ampliations de décrets de naturalisation et des cartes d’identité françaises de toute la famille[8].

Activité de la commission

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La première séance de la commission de révision des naturalisations s'ouvre le 21 septembre 1940. Deux mois plus tard, pour accélérer l’examen des dossiers, trois sous-commissions sont créées, chacune dirigée par le président et les deux vice-présidents. Le 21 mars 1941, une nouvelle loi introduit le recours gracieux qui permet, à la demande des personnes ayant fait l’objet d’un retrait, de réétudier le dossier et de revenir éventuellement sur ce retrait[9]. Les recours sont également examinés par la commission de révision. Lors de plus de 1300 séances, entre novembre 1940 et mai 1944, elle aurait contribué à dénaturaliser 15 154 hommes, femmes et enfants, selon les chiffres fournis par le bureau du Sceau à la Libération[3]. Dans le même temps 388 retraits auraient été rapportés (c'est-à-dire annulés) et 651 440 personnes maintenues dans la nationalité française.

Une grande majorité des dénaturalisés sont nés en France. C'étaient des enfants naturalisés par déclaration avant leur majorité, ou par le même décret que leurs parents ; ils sont compris dans le retrait de la nationalité touchant le père de famille. La dénaturalisation pouvait en effet être étendue à la femme et aux enfants, ce qui est arrivé dans la plupart des cas[10]. Les personnes nées en Italie sont ensuite [?] les plus nombreuses, mais étant également les plus nombreuses parmi les naturalisés, elles sont en réalité sous-représentées. Les originaires d’Europe de l’est, Pologne et Roumanie particulièrement, sont quant à eux sur-représentés. Beaucoup d’entre eux sont juifs. Même si la proportion de juifs naturalisés entre 1927 et 1940 n’est pas connue (les postulants n’étaient pas interrogés sur leur religion lors de la procédure de naturalisation), il semble évident que les juifs sont sur-représentés parmi les dénaturalisés[9] [difficile à justifier].

Annulation de la procédure

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L’ordonnance du 24 mai 1944[ref] annule tous les décrets de retrait pris en application de la loi du 22 juillet 1940. Les dénaturalisés sont juridiquement considérés par les autorités françaises comme n’ayant jamais cessé d’être français.

Cette annulation n’a toutefois pas été décidée sans débat : François de Menthon, commissaire à la Justice de la France libre avait en effet envisagé « le maintien de cette institution nouvelle »[11] ; le général Giraud avait quant à lui annulé les actes de Vichy postérieurs au 22 juillet 1940, annonçant ainsi son souhait de maintenir les retraits prononcés en application de la loi de révision. C’est finalement le Comité juridique de la France libre, René Cassin en particulier, qui impose ses vues et obtient l'annulation complète des retraits de nationalité.

Jean Marie Roussel, président de la commission de révision, est sanctionné à la fin de la guerre par une mise à la retraite d’office. André Mornet, qui a appartenu à une organisation résistante de la magistrature, le Comité national judiciaire, fut en revanche sollicité pour être le procureur général du procès Pétain, tandis que les autres magistrats poursuivirent leur carrière sans encombre.

tableau avec présidents (et VP ?) par date ?

dvl réf archives

illustrations

Références

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  1. a b et c « Décret-loi du 22 juillet 1940 relative à la révision des naturalisations », Journal officiel de la République française,‎ , p. 4567 (lire en ligne)
  2. Archives du ministère de la Justice [détailler].
  3. a et b Archives nationales, archives de la Haute cour de Justice, instruction Alibert (3 W 46-47).
  4. Ralph Schor, L'opinion française et les étrangers en France, 1919-1939, Publication de la Sorbonne, (ISBN 2859440712 et 9782859440718, OCLC 14178590, lire en ligne)
  5. Pierre Laborie, Les Français des années troubles : de la guerre d'Espagne à la Libération, Desclée De Brouwer, (ISBN 2220049000 et 9782220049007, OCLC 406976536, lire en ligne)
  6. « Arrêté du 6 septembre 1940 portant nomination des membres de la commission de révision des naturalisations », Journal officiel de la République française,‎ , p. 4959 (lire en ligne)
  7. Formule reprises sur les décrets de retrait de la nationalité française (p. ex. celui du 5 mai 1943, Archives nationales, A 1894).
  8. Circulaire du ministère de la Justice du 3 mai 1941 donnant les instructions aux préfets sur la procédure de notification du retrait de la nationalité française. [cote archives ?]
  9. a et b Archives nationales, fichier des retraits de la nationalité française (BB/27/1421-1445).
  10. Les pièces d'instruction sont conservés aux Archives nationales dans la série BB/11, ajoutées au sein de chacun des dossiers de demande de naturalisation.
  11. Patrick Weil, Qu'est-ce qu'un Français? : histoire de la nationalité française depuis la Révolution, Gallimard, (ISBN 2070426572 et 9782070426577, OCLC 420203277, lire en ligne)

Voir aussi

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Bibliographie

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Article connexes

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Commissariat général aux questions juives

Déchéance de la nationalité française

Nationalité française

Régime de Vichy


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