Tachia guianensis
Description de cette image, également commentée ci-après
échantillon type de Tachia guianensis collecté par Aublet en Guyane
Classification APG III (2009)
Règne Plantae
Clade Angiospermes
Clade Dicotylédones vraies
Clade Astéridées
Clade Lamiidées
Ordre Gentianales
Famille Gentianaceae
Tribu Helieae
Genre Tachia

Espèce

Tachia guianensis
Aubl., 1775

Synonymes

selon tropicos :

  • Myrmecia scandens Willd.
  • Myrmecia tachia J.F. Gmel.
  • Tachia pavonii Gilg, nom. nud.[1]

selon GBIF :

  • Myrmecia scandens Willd.
  • Myrmecia tachia J.F.Gmel.[2]

Tachia guianensis est une espèce d'arbuste myrmécophile, endémique des Guyanes, appartenant à la famille des Gentianaceae. Il s'agit de l'espèce type du genre Tachia Aubl..

Le nom Tachia provient du nom Galibi, qui désigne les fourmis tachi qui vivent dans ses tiges creuses[3].

On l'appelle en Guyane Tachy[4] ou Mahot noir (créole)[5] [à ne pas confondre avec les Eschweilera spp. également appelés ainsi], et au Guyana loaro-ek, karakalidan (Arawak)[6], guianan tachia (anglais)[7], taquia da Guiana (Portugais)[8], tachia de Guiana (espagnol)[9], alawai, wara-ek[10]. On rapporte aussi les noms de caferana[11], Raiz de jacaré-arú Caferana[12] en Amazonie et Quassia do Para au Brésil[4].

Description modifier

Tachia guianensis est un arbuste ou petit arbre ramifié atteignant jusqu'à 5 m de haut.

Ses branches sont cylindriques (parfois légèrement striées mais non ailées), mesurant 0,3-0,5 cm de diamètre, avec des entre-nœuds longs de (4-)5-9(-10) cm.

Les feuilles sont pétiolées (avec des pétioles longs de 0,5-2 cm), disposées le long de la tige. Le limbe est mince-membraneux, de forme elliptique à oblong-elliptique, à base atténuée, à marge plate, apex acuminé, et mesurant 8,8-22 x 3,9-9,5 cm.

L'inflorescence comporte 1 à 2 fleurs.

Le calice est de couleur orange, mesurant 26-40 x 6-7 mm, avec des lobes ovales, à marge membraneuse, à apex aigu et mesurant 8-14 x 3-4 mm. La corolle est de couleur jaune, en forme de plateau, long de 60-77 mm pour 9-11 mm de large à l'embouchure, à lobes ovales, tordus dans le sens de la longueur à l'anthèse, à apex aigu et longs de 9-13 mm. Les étamines dépassent de de l'embouchure de la corolle, avec des filets droits, longs de 41-45 mm. Les anthères sont de couleur crème ou blanches, de forme elliptiques, longues de 3-4 mm, droites après l'anthèse. L'exine du pollen est réticulée. Le pistil est long de 56-63 mm, avec l'ovaire de 8,5 mm, et le style d'environ 52 mm, et les lobes du stigmate mesurant 3-4 x 1,5-2 mm.

Le Fruit érigé, de forme elliptique, de couleur verte, jaune à orange et brun, mesure 35-43 x 5-6 mm. Les graines ne sont pas visibles[5],[10],[13],[6].

Répartition modifier

La répartition de Tachia guianensis est limitée à l'est du bouclier guyanais et n'est présent que dans les Guyanes[6]. En dehors de cette répartition, il est souvent confondu avec d'autres espèces du même genre.

Écologie modifier

Tachia guianensis croît le plus souvent dans les forêts inondées ou de terre ferme, sur sable blanc ou brun limoneux, du gravier et des roches, du granit ou du grès, parfois sur des sols latéritiques et sur les berges des rivières, à des altitudes allant du niveau de la mer (20 m) à 1 100 m (Mont Ayanganna)[6].

Les fleurs inodores[6] sont pollinisées par plusieurs espèces de colibris[10].

Tachia guianensis est une "myrmécophyte non spécialisée" pouvant abriter plusieurs espèces mutualistes (37 espèces de fourmis différentes ont été trouvées sur cette plante). Certaines espèces vivent dans ses tiges creuses. La guilde des fourmis associées à cette espèce est complexe[14],[15]. En saison des pluies, Tachia guianensis assimile l'azote issue de la décomposition des déchets (riches en champignons[16]) produits par les fourmis[17].

La structure de son bois a été étudiée[18], ainsi que ses orbicules (ultrastructures cellulaires)[19].

Usages modifier

Tachia guianensis fait partie des plantes médicinales amazoniennes décrites par C.F.P. von Martius au XIXe siècle. Il disait ses racines « extrêmement amères, toniques, incisives, fièvres intermittentes »[12]

De même, en 1897, Heckel rapporte sur Tachia guianensis : « Racines excessivement amères et fébrifuges. (A étudier comparativement avec les Gentianées indigènes de France et avec les plantes coloniales appartenant à la même famille). C'est le Quassia do Para des Brésiliens. »[4].

Tachia guianensis est traditionnellement utilisé en infusion contre la fièvre et la malaria[20],[21],[22],[23], [24], [25], [26], [27] et son activité anti-paludéenne a été étudiée[28],[29].

Tachia guianensis pourrait avoir des effets sur le système nerveux central[30].

Protologue modifier

 
Tachia guianensis par Aublet (1775) :
Planche 29. - 1. Calice. - 2. Corolle. - 3. Tube de la corolle ouvert. Étamines. - 4. Diſque. Ovaire. Style. Stigmate. - 5. Capſule. - 6. Capſule ſéparée du calice. - 7. Capſule ouverte en deux valves.[3]

En 1775, le botaniste Aublet en a proposé le protologue suivant[3] :

« 1. TACHIA Guianenſis. (TABULA 29.)

Frutex, trunco quinque aut ſex-pedali, ramos plures, ſarmentoſos, oppoſitos, nodoſos, tubuloſos, tetragonos emittente. Folia oppoſita, ovata, acuta, glabra, integerrima, ſubſeſſilia, caulem amplectentia, & vaginantia. Flores utrinque axillares, ſolitarii. Corolla lutea. Uno alterove flore abortiente, gutta flava, ſicca, reſinoſa reperitur.

In cavitate trunci & ramorum plurimæ degunt formica:, undè TACHI vocatur à Caribaris Galibienſibus, ſeu nidus formicarum.

Florebat, fructumque ferebat Octobri.

Habitat in ſylvis Sinémarienſibus, ad ripas rivulorum.


LE TACHI de la Guiane. (Planche 29.)

Cet arbrisseau a un tronc haut de cinq à ſix pieds, gros par le bas, diminuant a meſure qu'il s'élève. Il eſt creux, à quatre angles : il jette dès le bas, de diſtance en diſtance, de longues branches grêles, creuſes, à quatre angles, oppoſées en croix. Ces branches ſont noueuſes : à chaque nœud elles portent deux feuilles oppoſées, & diſpoſées en croix, entourées, en deſſus, d'une petite gaîne membraneuſe. Ces feuilles ſont vertes, liſſes, molles, entières, ovales, & terminées en pointe. Leur pédicule eſt fort court, & embraſſe en partie la tige : il eſt convexe en deſſous, & creuſé en goutiere en deſſus. De l'aiſſelle de l'une & l'autre feuille naît une fleur ſeſſile.

Le calice eſt d'une ſeule pièce. C'eſt un tube long d'un pouce & demi, attaché autour d'un diſque qui porte l'ovaire. Il eſt renflé à ſa partie ſupérieure, & ſe partage en cinq lobes aigus qui ſe roulent & s'inclinent en dehors.

Les étamines ſont au nombre de quatre, attachées à la paroi interne & inférieure du tube. Leur filet eſt long ; il déborde la fleur ouverte, & porte une anthère longue, à deux bourſes.

Le piſtil eſt un ovaire oblong entouré à ſa baſe d'un diſque compoſé de cinq petits corps glanduleux. Il eſt ſurmonté d'un style long de deux pouces, terminé par un ſtigmate à deux lames vertes & charnues.

L'ovaire devient une capsule ſèche, longue, renfermée dans le calice. Elle s'ouvre en deux valves, elle a deux loges ſéparées par une cloiſon membraneuſe, chargée de semences très menues, jaunes, elles ſont enduites d'une matière viſqueuſe, qui s'attache aux doigts.

Toutes les parties de cette fleur ſont de couleur jaune.

A l'aiſſelle des feuilles ou il ne pouſſe aucune fleur, on trouve ordinairement une larme de réſine jaune & tranſparente.

Le tronc, & les branches qui ſont creux, ſervent de retraite aux fourmis : c'eſt pour cette raiſon que cet arbriſſeau eſt nomine TACHI par les Galibis, ce qui en leur langue ſignifie, suivant leur rapport, nid de fourmis. »

— Fusée-Aublet, 1775.


Voir aussi modifier

Articles connexes modifier

Notes et références modifier

  1. (en) Référence Tropicos : Tachia guianensis (+ liste sous-taxons)
  2. (fr + en) Référence GBIF : Tachia guianensis
  3. a b et c Jean Baptiste Christian Fusée-Aublet, HISTOIRE DES PLANTES DE LA GUIANE FRANÇOISE, rangées suivant la méthode sexuelle, avec plusieurs mémoires sur les différents objets intéreſſants, relatifs à la culture & au commerce de la Guiane françoiſe, & une Notice des plantes de l'Iſle de France. volume I, Londres et Paris, P.-F. Didot jeune, Librairie de la Faculté de Médecine, quai des Augustins, (lire en ligne), p. 75-77
  4. a b et c Édouard Heckel, Les plantes médicinales et toxiques de la Guyane française : catalogue raisonné et alphabétique, Mâcon, Protat frères, , 160 p. (lire en ligne), p. 112
  5. a et b (en) Scott A. Mori, Georges Cremers et Carol Gracie, Guide to the Vascular Plants of Central French Guiana : Part 2. Dicotyledons, vol. 76, New York Botanical Garden Pr Dept, coll. « Memoirs of the New York Botanical Garden », , 776 p. (ISBN 978-0-89327-445-0), p. 83
  6. a b c d et e (en) Lena Struwe, Matthew P. Kinkade et Daniel Potter, « Revision of Tachia (Gentianaceae: Helieae) », Systematic Botany, vol. 38, no 4,‎ , p. 1142-1159 (lire en ligne)
  7. (en) Peters, W., M. P. Kinkade, A. P. Pohlit et L. Struwe, Tachia field guide, New Brunswick: Rutgers University and Manaus, Instituto Nacional de Pesquisas da Amazoˆ nica (INPA), (lire en ligne)
  8. (pt) Peters, W., M. F. Calio´, M. P. Kinkade, A. P. Pohlit et L. Struwe, Guia de Campo para Tachia, New Brunswick: Rutgers University and Manaus, Instituto Nacional de Pesquisas da Amazoˆ nica (INPA), (lire en ligne)
  9. (es) Peters, W., R. Corte´s, M. P. Kinkade, A. P. Pohlit et L. Struwe, Guía de Campo de Tachia, New Brunswick: Rutgers University and Manaus, Instituto Nacional de Pesquisas da Amazoˆnica (INPA), (lire en ligne)
  10. a b et c (en) L. Struwe, J. Allogio, L. Cobb, J .R. Grant, M.J. Jansen-Jacobs, M. Kinkade, K.B. Lepis, H. Maas-van de Kamer, P.J.M. Maas et M.I. Palmer, Flora of the Guianas : Fasc. 30. Gentianaceae, Kew, S. Mota de Oliveira. Royal Botanic Garden, coll. « Series A: Phanerogams », , 131  (ISBN 978-1-84246-507-3)
  11. P. LE COINTE, L'Amazonie Brésilienne. Le pays, ses nabitants, ses ressources. vol. 2., Paris, A Challamel. 2e éd., , 510 p. (lire en ligne)
  12. a et b (en) Ulrike B. Breitbach, Michael Niehues, Norberto P. Lopes, Jair E.Q. Faria et Maria G.L.Brandão, « Amazonian Brazilian medicinal plants described by C.F.P. von Martius in the 19th century », Journal of Ethnopharmacology, vol. 147, no 1,‎ , p. 180-189 (DOI 10.1016/j.jep.2013.02.030)
  13. (en) Bassett Maguire et Richard E. Weaver, Jr., « THE NEOTROPICAL GENUS TACHIA (GENTIANACEAE) », Journal of the Arnold Arboretum, vol. 56, no 1,‎ , p. 103-125 (23 pages) (lire en ligne)
  14. (en) Alain Dejean, Frédéric Azémar, Frédéric Petitclerc, Jacques H. C. Delabie, Bruno Corbara, Céline Leroy, Régis Céréghino et Arthur Compin, « Highly modular pattern in ant-plant interactions involving specialized and non-specialized myrmecophytes », The Science of Nature, vol. 105, no 43,‎ (DOI 10.1007/s00114-018-1570-0, lire en ligne)
  15. (en) Alain Dejean, Frédéric Petitclerc, Arthur Compin, Frédéric Azémar, Bruno Corbara, Jacques H. C. Delabie et Céline Leroy, « Hollow Internodes Permit a Neotropical Understory Plant to Shelter Multiple Mutualistic Ant Species, Obtaining Protection and Nutrient Provisioning (Myrmecotrophy) », The American Naturalist, vol. 190, no 5,‎ (DOI 10.1086/693782, lire en ligne)
  16. (en) Alain Dejean, Frédéric Azémar, Piotr Naskrecki, Maurice Tindo, Vivien Rossi, Christian Faucher et Hervé Gryta, « Mutualistic interactions between ants and fungi: A review », Ecology and Evolution, vol. 13,‎ , e10386 (DOI 10.1002/ece3.10386, lire en ligne)
  17. (en) Alain Dejean, Frédéric Petitclerc et Frédéric Azémar, « Seasonality influences ant‑mediated nutrient acquisition (myrmecotrophy) by a Neotropical myrmecophyte », Evolutionary Ecology, vol. 34,‎ , p. 645–657 (DOI 10.1007/s10682-020-10056-y1, lire en ligne)
  18. (en) Sherwin Carlquist et Jason R. Grant, « Wood anatomy of Gentianaceae, tribe Helieae, in relation to ecology, habit, systematics, and sample diameter », Structural Botany, vol. 57,‎ , p. 276–291 (DOI 10.1663/0007-196X(2005)057[0276:WAOGTH]2.0.CO;2, lire en ligne)
  19. (en) Stefan Vinckier et Erik F Smets, « Morphological and Ultrastructural Diversity of Orbicules in Gentianaceae », Annals of Botany, vol. 92, no 5,‎ , p. 657–672 (DOI 10.1093/aob/mcg187, lire en ligne)
  20. (en) Gustavo Pereira Cosenza, Nádia Somavilla, Nádia Somavilla, Christopher William Fagg, Christopher William Fagg et Maria G.L. Brandão, « Bitter plants used as substitute of Cinchona spp. (quina) in Brazilian traditional medicine », Journal of Ethnopharmacology, vol. 149, no 3,‎ , p. 790-796 (DOI 10.1016/j.jep.2013.08.004, lire en ligne)
  21. (en) Renata Braga Souza Lima, Gina Frausin, Stacy Brody et Lena Struwe, « Gentians Used in South America as Antimalarial Agents », dans The Gentianaceae - Volume 2: Biotechnology and Applications, Rybczyński, J., Davey, M., Mikuła, A., , 421–437 p. (DOI 10.1007/978-3-642-54102-5_18)
  22. (en) Le Cointe P, « Árvores e plantas úteis (indígenas e aclimatadas) », Companhia Editora Nacional, São Paulo, vol. 251,‎ , p. 506
  23. (en) Carvalho LH et Krettli AU, « Antimalarial chemotherapy with natural products and chemically defined molecules. », Mem Inst Oswaldo Cruz, vol. 86,‎ , p. 181–184 (lire en ligne)
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  27. (en) Pohlit AM,, Santos EVM, Silva TCM, Morais SKR, Nunomura SM et Struwe L, « A rare secoiridoid monoterpene and a xanthone from Tachia grandiflora Maguire & Weaver », Biochem Sys Ecol, vol. 44,‎ , p. 267–269
  28. (en) Carvalho LH, Brandão MG, Santos-Filho D, Lopes JL et Krettli AU, « Antimalarial activity of crude extracts from Brazilian plants studied in vivo in Plasmodium berghei-infected mice and in vitro against Plasmodium falciparum in culture », Brazilian Journal of Medical and Biological Research = Revista Brasileira de Pesquisas Medicas e Biologicas, vol. 24, no 11,‎ , p. 1113-1123 (lire en ligne)
  29. (en) Satish Bahekar et Ranjana Kale, « Herbal Plants Used For the Treatment of Malaria- A Literature », Journal of Pharmacognosy and Phytochemistry, vol. 1, no 6,‎ , p. 141 (lire en ligne)
  30. (en) Melina Giorgetti, Giuseppina Negri et Eliana Rodrigues, « Brazilian plants with possible action on the central nervous system—A study of historical sources from the 16th to 19th century », Journal of Ethnopharmacology, vol. 109,‎ , p. 338–347 (DOI 10.1016/j.jep.2006.08.003, lire en ligne)

Références taxinomiques modifier

Sur les autres projets Wikimedia :

  • « Tachia guianensis », sur FLORE DE GUYANE, (consulté le )
  • « Tachia guianensis », sur la chaussette rouge, (consulté le )