Galería
Plan des gisements de la sierra d'Atapuerca : Galería est tout au nord de la Trinchera del Ferrocarril.
Localisation
Coordonnées
Pays
Espagne
Province
Massif
Localité voisine
Voie d'accès
Camino del Pajarillo
Caractéristiques
Type
Altitude de l'entrée
1 000 m
Période de formation
Occupation humaine
Patrimonialité
Géolocalisation sur la carte : Castille-et-León
(Voir situation sur carte : Castille-et-León)
Géolocalisation sur la carte : Espagne
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Galería, ou Trinchera Galería (TG), est un aven qui s'est rempli entre il y a 350 000[1] et un peu moins de 200 000 ans[2],[3],[4], et qui a livré de nombreux outils paléolithiques. Cette profusion d'artéfacts en pierre dans les différentes zones de la grotte, apportés à la lumière du puits[5] pour dépecer du gibier pris au piège, nous renseigne sur l'évolution technologique acheuléenne de la région sur cette période[6]. Situé dans la sierra d'Atapuerca, près de Burgos en Espagne, Galería est le premier site fouillé de la Trinchera del Ferrocarril. Au contraire des autres sites voisins, on y a trouvé très peu de fossiles humains : un fragment de mandibule en 1976 dont on ignore la strate d'origine[7], et un fragment de crâne avec fontanelle[8]. Les campagnes de fouille se sont ensuite échelonnées de 1981 à 1996 puis de 2001 à 2010. Une dernière campagne a récemment repris pour terminer les fouilles des niveaux supérieurs[5]. Comme le reste de la sierra d'Atapuerca, le site est classé au patrimoine mondial[9].

Stratigraphie et datations modifier

 
Galería aujourd'hui, découpée le long de la Trinchera del Ferrocarril : à droite, le puits (TN) donne dans la galerie (TG) qui mène à la Covacha de los Zarpazos (TZ), la chambre à gauche.

Le complexe de Galería a une profondeur d'environ 12 m, une largeur de 18 m et une hauteur de 14 m. Galería désigne l'ensemble d'un système composé de trois parties : la principale est Trinchera Galeria (TG). Elle rejoint une petite chambre d'un côté, la Covacha de los Zarpazos (TZ). De l'autre elle communique avec la surface par un puits : c'est la portion Tres Simas Boca Norte (TN).

Cinq phases de remplissages sédimentaires ont été distinguées, de GI à GV, de la base au sommet. Les couches qui ont apporté des artéfacts sont les unités GII et GIII.

  • GI : archéologiquement stérile, on y trouve aussi la limite Brunhes-Matuyama (il y a 781 000 ans) à son tiers supérieur. On retrouve cette limite à la fin de la chronologie de Gran Dolina. L'ouverture de Galería est donc très postérieure à la fermeture de la Gran Dolina[10]. GI a été réévaluée à environ 350 000 ans en 2014[1].
  • Les remplissages GII et suivants sont en discordance angulaire et érosive : ils sont allochtones, ce sont les sédiments arrivés de l'extérieur qui ont progressivement rempli l'aven. GII est elle-même séparée en deux sous-unités, a et b : GIIa a été datée entre 350 000[3] et 600 000 ans[4], mais est forcément limitée par la dernière datation de GI à 350 000 ans. Au-dessus, GIIb est datée d'environ 250 000 ans[3].
  • GIII est datée d'environ 250 000 ans également [4],[2],[3], et est elle aussi décomposée en deux sous-unités a et b.
  • Enfin les niveaux suivants sont à nouveau archéologiquement stériles. Ils remplissent le puits et scellent la grotte il y a un peu moins de 200 000 ans[10],[2],[3],[4],[11].
 
Galería dans la Trinchera, vue depuis l'échafaudage de Gran Dolina.
 
Les fouilles dans la Covacha de los Zarpazos.

Découvertes modifier

Seuls deux fossiles humains ont été mis au jour à Galería, mais ne sont malheureusement pas exploitables. Il s'agit d'une portion de mandibule[7] et d'un morceau de crâne avec fontanelle[8]. L'intérêt de Galería est bien plutôt la quantité d'artéfacts lithiques découverts, qui nous renseignent sur les techniques de l'acheuléen et la façon dont la grotte a été utilisée. Rares et occasionnelles, les occupations visaient à profiter d'herbivores tombés dans le puits, et c'est d'ailleurs sous le puits que l'essentiel des outils ont été retrouvés : la taille de la pierre et le dépeçage des carcasses se faisaient à la lumière[5].

Faune modifier

Les principaux restes d'animaux rencontrés représentent des mégacéros, des Hemitragus, des cerfs élaphes, des daims, des bisons, des Stephanorhinus, des chevaux sauvages, des ânes européens, des ours de Deninger, des lions, des lynx pardelles, des chats et chiens sauvages, des loups, des renards, des blaireaux, des belettes, des  furets. On y trouve aussi quelques micromammifères et des oiseaux. Cette faune indique un milieu montagnard tempéré et forestier[12].

Sur les os, des stries de décarnisation montrent un accès primaire des hommes au gibier tombé par le puits TN, donc dans une situation de compétition avec d'autres carnivores. Mais moins de 1,2% des os ont été brisés par des hommes, le site n'a donc pas servi à la consommation directe. Les carnivores eux, surtout les canidés, parfois des hyénidés et des félidés, consommaient bien sûr in situ, et ont pu accéder à des carcasses déjà dépouillées par des humains[13].

Fossiles modifier

 
Fragment de mandibule humaine de Galería trouvé en 1976.

Le fossile AT76-T1H est un petit fragment d'un corps de mandibule droite, trouvée par le doctorant Trinidad de Torres en 1976, l'été où il découvrit l'ancienneté des gisements d'Atapuerca avec l'association spéléologique voisine de Burgos. Malheureusement la stratigraphie n'était pas établie et on ne peut pas retrouver sa position exacte, ce qui empêche de l'associer aux outils et aux datations. Il est bien sûr imaginable qu'elle vienne des couches TN6 à TN8 puisque c'est là qu'on trouve aussi l'essentiel des artéfacts.

On y voit l'alvéole de la molaire M1, M2 et M3 sont encore in situ. Le mur buccal est perdu, les racines des deux molaires sont visibles. L'ossature est large et minéralisée, les fissures sont dues à l'érosion. L'aspect général est plus robuste que les mandibules de la Sima de los Huesos, davantage similaire à Arago13[7].

Évolutions techniques de l'outillage modifier

 
Un biface du niveau GIIb. Il est plus travaillé que ses prédécesseurs de GIIa au point qu'il n'est pas possible d'identifier s'il a été fait depuis un galet ou depuis un éclat[6]. GIIb daterait d'environ 250 000 ans.
 
Un racloir du niveau GIIIb.

À l'Acheuléen l'homme se servait d'outils caractéristiques pour dépouiller les chairs. Mais la configuration de la grotte impliquait un transport depuis l'extérieur : non seulement l'apport des outils déjà configurés et fonctionnels, mais aussi le transport des matières premières pour façonner et retoucher les outils nécessaires à l'extraction de la viande. La chaîne opératoire principale consiste à trouver des galets dont on se sert comme percuteurs durs, pour débiter d'autres galets en galets aménagés (technologie de mode 1, oldowayenne), en racloirs voir en éclats ensuite façonnés pour obtenir d'autres outils comme des bifaces (mode 2, acheuléen), d'autant plus soignés avec l'évolution culturelle.

À Galería on observe surtout deux évolutions, entre les niveaux GIIa et GIIb : le choix de la matière première, et le procédé de fabrication d'un outil. Dans GIIa, les matières choisies sont essentiellement de la quartzite et du silex (en particulier de la chaille du Néogène), et les outils sont la plupart du temps un produit de débitage de galets. Mais dans GIIb, le grès devient prépondérant au détriment de la quartzite, tandis que les outils deviennent non seulement plus gros, mais aussi fabriqués à partir d'éclats, ce qui demande beaucoup plus de matière initiale et donc de capacité à anticiper. De façon générale, une plus grande diversité de matières premières est maîtrisée[6],[14].

Références modifier

  1. a et b (en) Martina Demuro, Lee J. Arnold, Josep M. Parés, Alfredo Pérez-González, Ana I. Ortega, Juan Luis Arsuaga, José M. Bermúdez de Castro et Eudald Carbonell, « New Luminescence Ages for the Galería Complex Archaeological Site: Resolving Chronological Uncertainties on the Acheulean Record of the Sierra de Atapuerca, Northern Spain », PLOS One, 10e série, vol. 9,‎ (DOI 10.1371/journal.pone.0110169, lire en ligne)
  2. a b et c Christophe Falguères, Jean-Jacques Bahain, Yuji Yokoyama, James L. Bischoff, Juan Luis Arsuaga, José María Bermúdez de Castro, Eudald Carbonell et Jean-Michael Dolo, « Datation par RPE et U-TH des sites pléistocénes d'Atapuerca: Sima de los Huesos, Trinchera Dolina et Trinchera Galería. bilan géochronologique », L'Anthropologie, 1re série, vol. 105,‎ , p. 71-81 (DOI 10.1016/S0003-5521(01)80006-6, lire en ligne)
  3. a b c d et e (en) Christophe Falguères, Jean-Jacques Bahain, James L. Bischoff, Alfredo Pérez-González, Ana Isabel Ortega, Andreu Ollé, Anita Quiles, Bassam Ghaleb, Davinia Moreno, Jean-Michel Dolo, Qingfeng Shao, Josep Vallverdú, Eudald Carbonell, José María Bermúdez de Castro et Juan Luis Arsuaga, « Combined ESR/U-series chronology of Acheulian hominid-bearing layers at Trinchera Galería site, Atapuerca, Spain », Journal of Human Evolution, 2e série, vol. 65,‎ , p. 168-184 (DOI 10.1016/j.jhevol.2013.05.005, lire en ligne)
  4. a b c et d (en) G.W. Berger, A. Pérez-González, Eudald Carbonell, Juan Luis Arsuaga, José María Bermúdez de Castro et T.-L. Ku, « Luminescence chronology of cave sediments at the Atapuerca paleoanthropological site, Spain », Journal of Human Evolution, 2e série, vol. 55,‎ , p. 300-311 (DOI 10.1016/j.jhevol.2008.02.012, lire en ligne)
  5. a b et c (en) Paula García-Medrano, Isabel Cáceres, Andreu Ollé et Eudald Carbonell, « The occupational pattern of the Galería site (Atapuerca, Spain): A technological perspective », Quaternary International, vol. 433,‎ , p. 363-378 (DOI 10.1016/j.quaint.2015.11.013, lire en ligne)
  6. a b et c (en) Paula García-Medrano, Andreu Ollé, Marina Mosquera, Isabel Cáceres, Carlos Díez et Eudald Carbonell, « The earliest Acheulean technology at Atapuerca (Burgos, Spain): Oldest levels of the Galería site (GII Unit) », Quaternary International, vol. 353,‎ , p. 170-194 (DOI 10.1016/j.quaint.2014.03.053, lire en ligne)
  7. a b et c (en) José María Bermúdez de Castro et Antonio Rosas, « A human mandibular fragment from the Atapuerca Trench (Burgos, Spain) », Journal of Human Evolution, 1re série, vol. 22,‎ , p. 41-46 (DOI 10.1016/0047-2484(92)90028-8, lire en ligne)
  8. a et b (es) Eudald Carbonell, Antonio Rosas et Juan Carlos Díez Fernández-Lomana, Atapuerca : ocupaciones humanas y paleoecología del yacimiento de Galería, Valladolid, Junta de Castilla y León, Consejería de Educación y Cultura, , 380 p. (ISBN 84-7846-876-5, lire en ligne)
  9. « Page du site archéologique de la sierra d'Atapuerca sur le site web de l'UNESCO »
  10. a et b (es) Grün, R. et Emiliano Aguirre, El hombre fósil de Ibeas y el Pleistoceno de la Sierra de Atapuerca, Valladolid, Junta de Castilla y León, , 201-204 p., « Datación por ESR y por la serie del U, en los depósitoscársticos de Atapuerca »
  11. Alfredo Pérez-González, Joseph María Parés, Eudald Carbonell, Trinidad Aleixandre, Ana Isabel Ortega, Alfonso Benito et Miguel Ángel Martin Merino, « Géologie de la Sierra de Atapuerca et stratigraphie des remplissages karstiques de Galería et Dolina (Burgos, Espagne) », L'Anthropologie, 1re série, vol. 105,‎ , p. 27-43 (DOI 10.1016/S0003-5521(01)80004-2, lire en ligne)
  12. Nuria García et Juan Luis Arsuaga, « Les carnivores du gisement à hominidés du Pléistocène moyen du site de Trinchera-Galería, Sierra de Atapuerca, Espagne », Geobios, 5e série, vol. 31,‎ , p. 659-674 (DOI 10.1016/S0016-6995(98)80053-3, lire en ligne)
  13. (es) Cáceres, I., Huguet, R., Rosell, J., Esteban Nadal, M., Saladié, P., Díez, J.C., Ollé, A., Vallverdú, J., García, P. et Eudald Carbonell, Reunión de científicos sobre cubiles de hiena (y otros grandes carnívoros) en los yacimientos arqueológicos de la Península Ibérica., Zona Arqueológica, Alcalá de Henares, , p. 157-165, « El yacimiento de Galería (Sierra de Atapuerca, Burgos, España) : un enclave para la obtención de recursos cárnicos en el Pleistoceno Medio »
  14. Marcos Terradillos-Bernal, « Les gisements de Galería, Gran Dolina TD10 et Ambrona (le Complexe Inférieur) : trois modèles technologiques dans le deuxième tiers du Pléistocène moyen », L'Anthropologie, 5e série, vol. 117,‎ , p. 494-514 (DOI 10.1016/j.anthro.2013.10.004, lire en ligne)

Voir aussi modifier

Articles connexes modifier