Sanctuaire fédéral des Trois Gaules
Sanctuaire fédéral des Trois Gaules | |
L'autel du sanctuaire sur un sesterce d'Auguste | |
Localisation | |
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Pays | France |
Lieu | Lyon |
Type | Sanctuaire |
Coordonnées | 45° 46′ 14″ nord, 4° 49′ 50″ est |
Histoire | |
Époque | Construit par Auguste 12 av. J.-C.[réf. nécessaire] |
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Le sanctuaire fédéral des Trois Gaules est un ensemble architectural romain érigé en 12 av. J.-C. à Lyon, principale ville de la Gaule conquise par Jules César, par Drusus[1], beau-fils de l'empereur Auguste.
En 14 avant JC, l'empereur Auguste divise la vaste province impériale de Gaule (chef-lieu : Lyon), conquise depuis -52, en trois provinces nouvelles : la Gaule lyonnaise (Lyon), la Gaule aquitaine (Saintes, ultérieurement Bordeaux) et la Gaule belgique (Reims), qui s'ajoutent à la province sénatoriale de la Gaule narbonnaise, conquise dès -118.
Lyon (Lugdunum, de son nom gaulois latinisé), cité de droit romain créée en -43 par Munatius Plancus, conserve cependant après ce découpage un statut particulier de « capitale fédérale des Trois Gaules », lieu de réunion annuelle assigné aux représentants de la soixantaine de cités gauloises reconnues par Rome après la conquête (cité des Parisii, des Arvernes, des Namnètes, des Rèmes, etc.) , inclues dans les provinces de Lyonnaise, Aquitaine et Belgique.
Cette assemblée avait lieu chaque année à Lyon le 1er août, date anniversaire de la prise d'Alexandrie par Auguste et fête du dieu gaulois Lug, dieu éponyme de la ville, principalement en relation avec le culte de l'empereur et le culte de Rome, dans un ensemble architectural, le sanctuaire fédéral des Trois Gaules, établi sur la colline de la Croix-Rousse, sur les pentes orientées vers la Saône, aujourd'hui dans un espace vert situé près de la rue des Tables Claudiennes, autre vestige archéologique important de Lugdunum.
Localisation et vestiges modifier
Le sanctuaire modifier
Le sanctuaire, qui se trouvait sur le flanc de la colline de la Croix-Rousse, a été détruit complètement. Mais, grâce à des textes et à sa représentation sur des monnaies, on peut reconstituer la partie principale, l'autel des Gaules. Le géographe Strabon le décrit en ces termes : « C'est là qu'on voit ce temple ou édifice sacré, hommage collectif de tous les peuples de la Gaule, érigé en l'honneur de César Auguste : il est placé en avant de la ville, au confluent même des deux cours d'eau, et se compose d'un autel considérable, où sont inscrits les noms de soixante peuples, d'un même nombre de statues, dont chacune représente un de ces peuples, enfin d'un grand naos ou sanctuaire »[2].
L'autel monumental, dédié à Rome et Auguste en l'an -12, et son soubassement de 50 m de long sont en marbre ; les deux victoires ailées qui se dressent à ses côtés, en bronze doré, tiennent de grandes palmes et des couronnes d'or. Elles sont posées sur des colonnes de granite gris jaune provenant d'Égypte, terminées par des chapiteaux sans doute doriques. Ces colonnes ont vraisemblablement été récupérées au XIe siècle et sciées en deux : elles formeraient aujourd'hui les quatre piliers de la croisée du transept de la basilique Saint-Martin d'Ainay qui soutiennent la coupole. Les noms des 60 (ou 64) peuples de Gaule étaient inscrits sur cet autel et chaque nation était représentée par une statue[3].
C'est aussi dans ce sanctuaire qu'étaient exposées les Tables Claudiennes, plaque de bronze (2,50 m x 1,93 m) sur laquelle était gravé le discours de l'empereur Claude prononcé en 48, accordant aux chefs des nations gauloises l'éligibilité aux magistratures romaines et au sénat romain. Ce discours nous est aussi connu par une version de Tacite. La partie inférieure en deux morceaux de ces tables de bronze fut découverte en 1528 par un drapier, dans sa vigne située sur l'emplacement du sanctuaire fédéral des trois Gaules. Ces fragments sont conservés au musée de la civilisation gallo-romaine de Lyon.
L'amphithéâtre modifier
Construit sous Tibère sur l'esplanade du sanctuaire fédéral des trois Gaules pour accueillir « le conseil des Gaules », le monument[pas clair] est reconverti en amphithéâtre sous le règne d'Hadrien et sa capacité est portée à 20 000 spectateurs.
Cet amphithéâtre est le lieu de supplice des martyrs de Lyon, notamment sainte Blandine et saint Pothin, en 177. Un poteau en bois, au centre de l'arène, commémore cet événement depuis la visite de Jean-Paul II à Lyon, en 1986.
La portion sud de l'amphithéâtre se situe sous la chaussée de la rue Lucien Sportisse. Durant les années 60, des fouilles avaient dégagé temporairement ces vestiges. Une partie est a été détruite lors de la construction en 1860 du tunnel du funiculaire menant au plateau de la Croix-Rousse, transformé en tunnel routier en 1967.
Une autre hypothèse de localisation (Daniel Frascone, 2011) modifier
En 2011, Daniel Frascone soumet une autre hypothèse de localisation. Il fonde son argumentation sur un sondage archéologique réalisé en 2006, qui le conduit à positionner le sanctuaire entre le bas de l’actuelle rue Burdeau et le haut de la rue des Tables-Claudiennes, dans la partie inférieure du versant sud de la colline de la Croix-Rousse[4].
Il propose également une nouvelle hypothèse de restitution du sanctuaire. Il place l'entrée du sanctuaire à l'intersection des rues Burdeau et Pouteau et l'autel au sommet de la colline. Les deux n'étant plus qu'alors reliés par un cheminement de rampes qui prend place entre la montée de la Grande-Côte et la montée Saint-Sébastien et dont le tracé actuel des rues garde la trace. Il appuie son argumentation sur de nombreux exemples de sanctuaires à étages connus ou supposés dans l'Empire (Sanctuaire de la Fortuna Primigenia, sanctuaire de Zeugma, de Tarragone)[4].
Bien qu'Armand Desbat admette que cette démonstration est séduisante, elle est rejetée parce que son auteur ne tient pas compte d'autres traces archéologiques de la fouille de 2006 ni de celles résultant de fouilles antérieures. De plus, au regard des nombreuses autres cartes, croquis et plans scénographiques de Lyon, rien ne permet de dire que les percements de la montée Saint-Sébastien et de la Grande-Côte soient antiques comme le suppose Daniel Frascone. La proposition d'A. Audin reste donc maintenue[5].
Historique : l'assemblée fédérale des Trois Gaules modifier
Objet du rassemblement modifier
Ce rassemblement réunissait 60 ou 64[pas clair] délégués qui formaient une assemblée de notables appelée « le conseil des Gaules » (concilium Galliarum). Chaque délégué était choisi par l'assemblée des décurions de sa cité.
Le conseil des Gaules avait une fonction religieuse : rendre un culte aux divinités de l'Empire, à Rome et à Auguste et renouveler chaque année l'allégeance à la puissance protectrice. Les solennités religieuses consistaient en sacrifices, processions, jeux, concours d'éloquence et de poésie.
Elle exerçait également un rôle administratif et politique. Le conseil des Gaules communiquait avec l'empereur directement : il lui transmettait les vœux et les plaintes des populations gauloises. C'est ce conseil qui tente quelquefois de négocier une solution à l'amiable avec l'empereur[6].
Un sentiment d'unité gauloise ? modifier
Cette réunion annuelle est le premier signe d'un sentiment d'unité de la part de l'ensemble des cités gauloises. « D’une certaine façon, les Gaules savent parler d’une voix unie, mais il faut reconnaître que ce facteur d’unité reste encore bien faible »[6].[pas clair][7]
Liste des prêtres du sanctuaire fédéral modifier
On connaît les premiers prêtres (sacerdotes) du sanctuaire fédéral :
- l'Éduen Caius Julius Vercondaridubnus le 1er août 12 av. J.-C.[8],
- le Cadurque M. Lucterius Sencianus
- le Santon Caius Julius Rufus[9]. Selon la dédicace de l'amphithéâtre des Trois Gaules, ce dernier est à l'origine de la construction de ce monument en 19 de notre ère.
Le seul à être connu par des sources littéraires[réf. nécessaire] est le premier d'entre eux, Caius Iulius Vercondaribudnus. Les autres ne sont connus que grâce à l'épigraphie, c'est-à-dire à des inscription gravées dans la pierre, pratique très courante à dans la civilisation romaine, qui a laissé des vestiges par milliers, mais qui ne fournit pas de détails biographiques sur les intéressés.
Noms des prêtres | Origine | Date | Sources |
---|---|---|---|
Caius Iulius Vercondaribudnus | Eduen | -12 | [10] |
Caius Iulius Rufus | Santon | Vers 18/19 | [10] |
(Caius) Iulius Sacrovir | Eduen | Peut être en 21? | [11] |
Caius Iulius Victor | Santon | Vers 25 | [10] |
Quintus Adginnius Martinus | Sequane | 73/74 | [10] |
Caius Pompeius Sanctus | Pétrucore | Vers 100/120 | CIL XIII, 1704 |
Marcus Pompeius Libo (fils du précédent) | Pétrucore | Vers 130/140 | CIL XIII, 1704 |
Marcus Lucterius Leo | Cadurque | Vers 80/130 | CIL XIII, 1541 |
Caius Iulius Ma(...) | Carnute | Vers 120/200 | CIL, XIII, 1694 |
Quintus Licinius Vltor (à l'age de 22 ans) | Lémovices | Vers 150/200 | CIL, XIII, 1698-1700 |
peut être Marcus Bucc(ius?) Galer(...)? | citoyen de Lyon | Sous les Sévères | AE, 1979, 403 |
Caius Servilius Martianus | Arverne | Vers 177/180 ou vers 195/209 | CIL XIII, 1706 |
Caius Catullius Deciminus | Tricasse | Sous les Sévères | CIL XIII 1691 |
Caius Ulatt(ius) | Segusiave | CIL XIII 1712 | |
Titus Sennius Sollemnis | Viducasses | 220 | CIL XIII, 3162[12] |
(...) | Senon | Entre 218 et 222 | CIL XIII 1684 |
Tiberius Iulius (...) | Carnute | CIL XIII 1672 |
-
CIL XIII 1691 mentionnant Caius Catullius Deciminus.
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CIL XIII 1712 mentionnant Caius Ulatt[ius]
-
CIL 1684
Le sanctuaire des Trois Gaules dans la littérature modifier
- Christian Goudineau, Le Voyage de Marcus : les tribulations d'un jeune garçon en Gaule romaine, Arles, Actes Sud, 2005.
Notes et références modifier
- Turcan Robert, « Un bimillénaire méconnu : l'assemblée des trois Gaules », Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 135e année, n° 4, 1991? p. 733-742.Lire en ligne.
- Strabon, Géographie, livre III, 3, 2
- Amable Audin et Pierre Quoniam, « Victoires et colonnes de l'autel fédéral des Trois Gaules : données nouvelles », Gallia, vol. 20, no 1, , p. 103-116 (lire en ligne, consulté le )
- Daniel Frascone, « Une nouvelle hypothèse sur le sanctuaire des Trois Gaules à Lyon », Revue Archéologique de l'Est, vol. 60, (lire en ligne, consulté le )
- Armand Desbat, « Le sanctuaire des trois Gaules et la question du forum provincial », Revue archéologique de l’Est, no tome 65, , p. 303–323 (ISSN 1266-7706, lire en ligne, consulté le )
- Bruno Dumézil, Des Gaulois aux Carolingiens, Paris, Presses Universitaires de France, « Une histoire personnelle de ... »[pas clair], 2013, p. 38. URL : https://www.cairn.info/des-gaulois-aux-carolingiens--9782130592259-page-27.htm
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- Periochae de Tite-Live, 139
- Christian Goudineau, « La Gaule de la mort de César à celle de Néron », Regard sur la Gaule, Paris, Babel, 2007, p. 377-378.
- Emmanuel Arbabe, « Chapitre III : La Gaule romaine », dans La politique des Gaulois : Vie politique et institutions en Gaule chevelue (IIe siècle avant notre ère-70), Éditions de la Sorbonne, coll. « Histoire ancienne et médiévale », (ISBN 979-10-351-0132-9, lire en ligne), p. 103–169
- Emmanuel Arbabe, « Iulius Sacrovir et la révolte gauloise de 21 », L'Antiquité Classique, vol. 84, , p. 151–171 (ISSN 0770-2817, lire en ligne, consulté le )
- Michel Christol, « Doubles lyonnais d'inscriptions romaines de Narbonne (CIL, XIII, 1994 = CIL, XII, 4486 ; CIL, XIII, 1982 a = CIL, XII, 4497) », Revue archéologique de Narbonnaise, vol. 14, no 1, , p. 221–224 (ISSN 0557-7705, DOI 10.3406/ran.1981.1068, lire en ligne, consulté le )
Voir aussi modifier
Bibliographie modifier
- Anne-Catherine Le Mer et Claire Chomer, Académie des inscriptions et belles-lettres, Carte archéologique de la Gaule 69/2 : Lyon, Paris, Éditions de la Maison des sciences de l'homme, , 1re éd., 884 p. (ISBN 978-2-87754-099-5).
- Klaus-Peter Goethert, « Un autel pour Rome et Auguste à Trèves. Une copie de l'autel de Lyon », Monuments et mémoires de la Fondation Eugène Piot, vol. 88, no 1, , p. 83–92 (DOI 10.3406/piot.2009.1721 ).
- Daniel Frascone, « Une nouvelle hypothèse sur le sanctuaire des Trois Gaules à Lyon », Revue archéologique de l’Est, vol. 60, no 183, , p. 189–216 (ISSN 1266-7706, lire en ligne , consulté le ).
- Djamila Fellague, « La difficulté de datation des monuments : à propos des monuments de Lugudunum, en particulier ceux considérés comme hadrianiques », Revue archéologique de l’Est, vol. 65, , p. 187-214 (lire en ligne , consulté le ).