Gaule lyonnaise

province romaine
Gaule lyonnaise
(la) Gallia Lugdunensis

Ier siècle av. J.-C. – Ve siècle

Description de cette image, également commentée ci-après
La Gaule lyonnaise dans l’Empire romain, vers 120.
Informations générales
Statut Empire romain d'Occident
Capitale Lugdunum
Langue(s) Latin vulgaire
Gallo-roman

Entités précédentes :

La Gaule lyonnaise (Gallia Lugdunensis[1] en latin), ou Lyonnaise, était une des trois provinces (avec la Gaule aquitaine et la Gaule belgique) créées par Auguste au début de son principat à partir des conquêtes effectuées par Jules César en Gaule entre 58 et 51/50 av. J.-C. Le sud de la Gaule et la vallée du Rhône, jusqu'à Vienne, sont alors déjà romains, depuis leur conquête effectuée antérieurement entre 125 et Cette dernière région constitue une province distincte, de rang sénatorial, la Narbonnaise, tandis que Gaules lyonnaise, aquitaine et belgique sont des provinces impériales. Ces trois dernières provinces issues du découpage augustéen se trouvaient cependant réunies, à travers les notables gaulois à la tête des cités, dans le cadre d'une assemblée commune, à vocation politique et religieuse, liée au culte impérial, le Sanctuaire fédéral des Trois Gaules, et dont le siège se situait face à la colonie romaine de Lugdunum (Lyon), à la confluence entre Saône et Rhône, lieu nommé condate ou ad confluentes[2]. Cette province a compté au moins vingt-trois peuples dont les Ségusiens ou Ségusiaves et les Éduens[3].

Histoire modifier

La Gaule chevelue de la conquête de César à l'organisation d’Auguste modifier

Lorsque s’achève la guerre des Gaules, l'accord fragile entre César et Pompée vole en éclats et les guerres civiles commencent, d'abord entre ces deux adversaires. Après l’assassinat de César en , un conflit éclate entre Marc Antoine et Octave.

Si ces guerres n’ont pas eu pour théâtre la Gaule, celle-ci sera cependant aussi l’objet de rivalités entre Marc Antoine, qui obtient dans un premier temps le gouvernement de cette nouvelle province[4], avant qu’Octavien, dans le cadre d’un accord de paix précaire avec Marc Antoine n’en prenne à son tour le contrôle[5].

Ce n’est qu’au terme de ces guerres civiles et après l’affermissement du nouveau régime qu’Octave, qui est proclamé Auguste en , est en mesure d’organiser les territoires conquis par César. La date de la réorganisation territoriale est encore discutée, soit entre 27 et , soit entre 16 et , lors de deux séjours différents d'Auguste en Gaule. Le territoire conquis par César est divisé en trois provinces impériales : la Gaule lyonnaise, la Gaule belgique et la Gaule aquitaine. Dans ce nouveau cadre, deux des grands peuples de Gaule, voisins pourtant, se retrouvent séparés : les Éduens en Lyonnaise, les Arvernes en Aquitaine. Mais cette œuvre d’organisation n’est pas que territoriale[pas clair].

Ont peut aussi signaler :

La province de Lyonnaise d'Auguste à Domitien modifier

Liste (partielle) des gouverneurs de la Gaule lyonnaise modifier

  • Caius Calpurnius Acilius Aviola (21)[7]
  • Caius Iulius Vindex (68)
  • Iunius Blaesus (69)
  • Titus Tettienus Severus (78-79)
  • Gaius Cornelius Gallicanus (79-83)
  • Lucius Minicius Rufus (83-87)[8]
  • (anonyme) (entre 102 et 106)
  • Tiberius Claudius Quartinus (vers 123-vers 130)
  • Titus Vitrasius Pollio (136-138)
  • Titus Flavius Longinus Quintus Marcius Turbo (vers 146-149)
  • (Caius Ulpius ?)Pacatus (entre 138 et 161)
  • (...) Pi(...)atus (entre 138 et 161)
  • Caius Popilius Carus Pedo (161-162)
  • Lucius Aemilius Frontinus (entre 162 et 168)
  • (...) Egri(lius Plarianus Larcius Lep)idus (Flavius ...?) (entre 160 et 169 ou 177 et 180)
  • Lucius Septimius Severus (187-188)[9]
  • Titus Flavius Secundus Philippianus (vers 195-198)
  • Tiberius Claudius Paulinus (vers 218)
  • Marcus Aedinius Iulianus (220-222)
  • Badius Comianus (après 223)
  • Apius Alexander (entre 240 et 245)

Partition modifier

En 297, sous Dioclétien, la Lyonnaise fut divisée en deux provinces :

  • la Lyonnaise première, capitale Lugdunum (Lyon) ;
  • la Lyonnaise seconde ou Lyonnaise armoricaine, capitale Rotomagus (Rouen).

Enfin, Constantin (306-337) subdivise encore ces deux provinces :

  • la Lyonnaise première est divisée en :
    • Lyonnaise première (vallées de la Saône et de l’Allier), capitale Lugdunum,
    • Lyonnaise quatrième ou Sénonaise (Orléanais, sud de l'Ile de France, Sénonais), capitale Agendicum (Sens),
  • la Lyonnaise seconde en :
    • Lyonnaise seconde (Normandie actuelle), capitale Rotomagus,
    • Lyonnaise troisième (Bretagne continentale, Maine, Anjou et Touraine), capitale Caesarodunum (Tours).

Ces quatre provinces sont toutes rattachées au diocèse des Gaules et à la préfecture du prétoire des Gaules.

Invasion modifier

Les Bretons installés en Lyonnaise IIIe se révoltèrent contre le pouvoir impérial vers les années 450, la Lyonnaise Ire fut occupée par les Burgondes vers 460, la présence romaine demeura en Lyonnaise IIe et IVe jusqu’en avec Ægidius et Syagrius.

Géographie modifier

 
Carte de la Gaule romaine sous Dioclétien (Droysens Allgemeiner historischer Handatlas, 1886) :

L’appréhension des frontières géographiques de la Gaule lyonnaise entre les réformes d’Auguste et les remaniements de Domitien pose de nombreux problèmes à la recherche historique. Les sources textuelles permettant de travailler sur cette question sont peu nombreuses et concernent essentiellement Pline l'Ancien et Strabon. Une autre difficulté vient du fait que la représentation de l’espace géographique dans l’Antiquité est différente de la nôtre et très déformée. Ainsi, Strabon décrit la chaîne des Pyrénées comme orientée du Nord au Sud[10], la Garonne, la Loire[11], la Seine et le Rhin[12] lui étant tous parallèles. Les passages concernant le découpage provincial sont les suivants :

Strabon, Géographie, IV, 1, 1[13].

« Mais Auguste vint qui divisa la Gaule en quatre parties : il fit de l'ancienne Celtique la province Narbonitide ou Narbonnaise, maintint l'Aquitaine telle qu'elle était du temps de César, si ce n'est qu'il y annexa quatorze des peuples compris entre le Garounas et le Liger, puis, ayant distribué le reste de la Gaule en deux provinces, il rattacha l'une à Lugdunum, en lui donnant pour limite le cours supérieur du Rhin, et assigna l'autre aux Belges[14]. »

Plus loin en IV, 3, 1 :

« A la province d'Aquitaine et à la Narbonnaise succède une autre région, qui, partant du Liger et du haut Rhône, autrement dit de la portion du Rhône comprise entre sa source et la ville de Lugdunum, s'étend jusqu'au Rhin et borde ce fleuve dans tout son cours. La partie haute de cette région, j'entends celle qui avoisine les sources des deux fleuves, les sources du Rhin et celles du Rhône, s'étendant ensuite à peu près jusqu'au milieu de la plaine, relève de Lugdunum ; quant au reste du pays, lequel se prolonge jusqu'à l'Océan[15], on en a fait une autre province attribuée politiquement aux Belges. »

Pline l'Ancien, Histoire Naturelle, IV, 31[16].

« Toute la Gaule désignée sous le nom général de Chevelue est divisée entre trois peuples séparés surtout par des fleuves : la Belgique, de l'Escaut à la Seine; de la Seine à la Garonne, la Celtique ou Lyonnaise; de la Garonne à la chaîne des Pyrénées, l'Aquitaine, appelée auparavant Arémorique. »

Christian Goudineau, afin de mieux comprendre cette organisation territoriale, a dans un premier temps tenté de représenter graphiquement par une carte cette vision déformée de l'espace chez Strabon, puis y a intégré les divisions territoriales straboniennes et pliniennes[17]. Le constat est celui d'un découpage rationnel répartissant l'espace géographique tel que connu alors selon des formes géométriques, « rectangles et carrés[18] », de dimensions similaires.

Un second constat est celui d'un découpage territorial assez différent de celui connu au Haut-Empire pour les provinces de Lyonnaise et de Belgique. En effet, tandis que, dans la période postérieure à Auguste, Lyonnaise et Belgique se partagent la région comprise entre la Loire, la Narbonnaise et le Rhin selon un axe nord-ouest / sud-est, chacune des deux provinces disposant d'une fenêtre maritime, le découpage augustéen rapporté par Strabon montre une répartition du territoire selon un axe est-ouest. La Gaule belgique d'Auguste contrôle toute la façade maritime depuis l'estuaire de la Loire jusqu'aux bouches du Rhin ; la Lyonnaise contrôle elle un territoire uniquement continental. Cette première frontière augustéenne entre Lyonnaise et Belgique est difficilement restituable de manière précise sur une carte contemporaine, seule semble être acquise une section de cette frontière à mi-chemin du cours du Rhin et que conservera plus tard la frontière séparant Germanie Inférieure et Germanie Supérieure, créées par Domitien.

Administration modifier

La Gaule lyonnaise était une province impériale administrée par un légat d'Auguste propréteur de rang prétorien installé à Lugdunum (Lyon). Elle eut notamment pour gouverneur Septime Sévère, le futur empereur d’origine nord-africaine[19]. Le rôle privilégié de Lugdunum fut renforcé par la présence d’un atelier monétaire impérial puis du Sanctuaire fédéral des Trois Gaules, dédié au culte de Rome et Auguste.

En 68, ce fut la première à se soulever contre Néron de toutes les provinces, bien que les habitants de Lugdunum ne suivissent guère le mouvement. Le Gaulois Caius Julius Vindex était le gouverneur et proclama Galba empereur avant d’être vaincu.

Division en cités au Haut-Empire modifier

À partir du règne de Domitien, soit avec la création des provinces de Germanie supérieure et de Germanie inférieure, constituées sur une partie des territoires de Gaule lyonnaise et de Gaule belgique, le territoire de la Gaule lyonnaise se compose des cités gallo-romaines suivantes :

Économie modifier

La Gaule lyonnaise est l’une des provinces les plus peuplées de l’Empire, et des plus riches. Elle fournit à partir de l’an 48 un nombre important et grandissant de sénateurs, notamment Éduens. Elle fournit aussi des légionnaires et des auxiliaires aux légions du Rhin, et les villes d’Augustodunum et Lugdunum sont d’importants centres dans l’Occident bien que la population de ces villes n’ait sûrement jamais excédé 35 000 habitants pour Augustodunum, 70 000 pour Lugdunum. D’autre part, la campagne est bien exploitée avec une densité importante de villas et de vici (bourgades rurales).

Villes principales : Lugdunum, Augustodunum (Autun, reste d’un temple gallo-romain et de porte d’entrée de la ville), Lutetia (Paris, vestiges des thermes et d’un amphithéâtre), Juliomagus (Angers), Condate Riedonum (Rennes), Rotomagus (Rouen), Caesarodunum (Tours), Augustodurum (Bayeux), Forum Segusiavorum (Feurs), etc.

Notes et références modifier

  1. Le nom de cette province est formé à partir de celui de la colonie romaine, Lugdunum, qui en est la capitale.
  2. Turcan Robert. Un bimillénaire méconnu : l'assemblée des trois Gaules. In: Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 135e année, N. 4, 1991. p. 733-742.Lire en ligne.
  3. Hector du Lac de la Tour d'Aurec, Précis historique et statistique du département de la Loire : Forest. [Volume 1], Le Puy, impr. J. B. La Combe, .
  4. À la suite des accords secrets de Philippes, suivant immédiatement la bataille du même nom, en , et qui voit Marc Antoine allié à Octavien vaincre les assassins de César. C'est dans le cadre de cet accord que le gouvernement de la Gaule échoit à Marc Antoine. François Hinard (dir.), Histoire romaine, Tome I, des origines à Auguste, Fayard, 2000, p. 823.
  5. Après les accords de Brindes, en , confirmés par la paix de Misènes, en , qui mettaient fin à un premier affrontement armé entre Marc Antoine et Octavien. François Hinard (dir.), Histoire romaine, Tome I, des origines à Auguste, Fayard, 2000, p. 864-865.
  6. Jérôme France,« Administration et fiscalité douanières sous le règne d'Auguste : la date de la création de la Quadragesima Galliarum », MEFRA, 105-2, 1993, p. 895-927, [lire en ligne].
  7. Tacite, Annales,III 41.1
  8. Michel Christol, « Doubles lyonnais d'inscriptions romaines de Narbonne (CIL, XIII, 1994 = CIL, XII, 4486 ; CIL, XIII, 1982 a = CIL, XII, 4497) », Revue archéologique de Narbonnaise, vol. 14, no 1,‎ , p. 221–224 (ISSN 0557-7705, DOI 10.3406/ran.1981.1068, lire en ligne, consulté le )
  9. Dion Cassius, Histoire Romaine
  10. Strabon, Géographie, III, 1, 3.
  11. Strabon, Géographie, IV, 2, 1. Parlant de la Garonne (Garounas) et de la Loire (Liger) : « Ces deux fleuves, à peu près parallèles au mont Pyréné, déterminent, par rapport à cette chaîne de montagnes, un double parallélogramme, dont les deux autres côtés sont figurés par l'Océan et par les monts Cemmènes ».
  12. « Mais il y a encore une autre rivière, le Sequanas, qui prend sa source dans les Alpes et va se jeter dans l'Océan, après avoir coulé parallèlement au Rhin (...) ». Strabon, Géographie, IV, 3, 2.
  13. Strabon est contemporain d'Auguste et connut aussi les premières années du règne de Tibère. Son témoignage est donc très proche dans le temps de la réorganisation augustéenne.Lire en ligne.
  14. Le Garounas correspond à la Garonne, le Liger à la Loire, Lugdunum est Lyon.
  15. Pour les Anciens, l'Océan est bien sûr l'Atlantique, mais aussi la Manche et la mer du Nord, qu'ils ne différencient pas.
  16. Le témoignage de Pline est plus récent que celui de Strabon. Il est cependant antérieur aux réformes de Domitien, Pline étant mort en 79 apr. J.-C.Lire en ligne.
  17. Christian Goudineau, « Les provinces de Gaule : problèmes d'histoire et de géographie », Mélanges Pierre Lévêque, ALUB, 1990, 5, p. 161-170.
  18. Ainsi Strabon en IV, 1, 3 parlant de la Narbonnaise comme « d'un parallélogramme, dont le mont Pyréné forme le côté occidental et le mont Cemmène le côté septentrional, tandis que les deux autres côtés sont formés, celui du midi, par la portion de mer comprise entre le mont Pyréné et Massalia, et celui du levant en partie par la chaîne des Alpes, en partie par la ligne qui prolonge cette chaîne jusqu'à la rencontre des premières pentes du Cemmène du côté du Rhône, lesquelles forment un angle droit avec la ligne en question. Lire en ligne.
  19. Anne Daguet-Gagey,Septime Sévére, p. 166-167, Payot, 2000, (ISBN 2-228-89336-6).

Voir aussi modifier

Articles connexes modifier

Antiquité romaine

Bibliographie modifier

Sources antiques modifier

Liens externes modifier