Isabelle Gatti de Gamond

féministe belge
Isabelle Gatti de Gamond
Portrait par Alfred Cluysenaar.
Fonction
Directrice d'école
Biographie
Naissance
Décès
Voir et modifier les données sur Wikidata (à 66 ans)
Uccle
Sépulture
Nom de naissance
Isabelle Laure GattiVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Activités
Mère

Isabelle Gatti de Gamond, née à Paris le et morte à Uccle le , est une féministe belge, spécialiste de l'éducation.

Biographie modifier

Jeunesse modifier

Fille de Zoé de Gamond, pédagogue, féministe et fouriériste et de Jean-Baptiste Gatti, artiste peintre et républicain italien, Isabelle nait à Paris le [1],[2]

La famille s'installe à Bruxelles. En 1847, sa mère est nommée inspectrice d'écoles primaires pour filles et écoles normales d'institutrices. De santé fragile, Zoé de Gamond meurt en 1854. La famille a peu de moyens. Dès lors, vers dix-sept ans, Isabelle part travailler pour cinq ans comme préceptrice de deux jeunes filles dans une riche famille patricienne en Pologne. Durant ses temps libres, et profitant de la riche bibliothèque, elle complète sa formation en étudiant le grec, le latin, la philosophie et les sciences[1].

Vers 1861, elle rentre à Bruxelles et entreprend de suivre les cours publics organisés par la Ville de Bruxelles où elle retrouve comme professeur Henri Bergé, un ami de la famille. Elle se lie également avec Marie Errera[1].

Engagement féministe modifier

En 1862, Isabelle lance la revue L'éducation de la femme où elle affirme la nécessité d'un enseignement féminin plus poussé. Deux ans plus tard, ses idées vont prendre corps. Grâce à l'entregent d'Henri Bergé, elle obtient l'aide de la Ville de Bruxelles pour créer son école. C'est ainsi qu'en octobre 1864, le premier Cours d'Éducation pour jeunes filles s'ouvre sous son égide rue du Marais à Bruxelles, administrant aux jeunes filles une formation scientifique solide délivrée de toute emprise cléricale. Il s'agit de la première véritable école communale laïque d'enseignement moyen pour filles de Belgique. Si l'école répond aux vœux de la bourgeoisie libérale, elle provoque l'ire de l'opinion catholique. La presse conservatrice déclenche une violente campagne contre Isabelle Gatti de Gamond qui va durer plusieurs années, certains journaux allant même jusqu'à se livrer à des insinuations malveillantes sur sa vie privée et à la surnommer « la fille Gatti »[3].

Malgré cette opposition pugnace, son ouvrage Cours d'Éducation pour jeunes filles connait un franc succès. L'école s'étend, de nouvelles implantations voient le jour. Isabelle Gatti de Gamond y développe une pédagogie novatrice, rédigeant ses manuels scolaires et formant elle-même son équipe d'institutrices dont Marie Popelin, Augustine De Rothmaler et mademoiselle Henriette Dachsbeck. En 1880, elle crée une section de régentes avec Charles Buls et en 1891, elle installe une section pré-universitaire[3].

L'âge de la retraite venu, elle quitte la direction de l'école en 1899. Si, en tant que directrice, elle s'était imposé un certain devoir de réserve, elle affiche dès lors ses convictions féministes, rationalistes et politiques rejoignant notamment les rangs du Parti Ouvrier Belge (POB). Elle y œuvre pour la justice et l'émancipation affirmant que « le socialisme est en même temps le féminisme ». Elle collabore régulièrement avec les Cahiers féministes, Le Peuple, le Journal de Charleroi et Le Conscrit, un journal antimilitariste. Secrétaire de la Fédération nationale des femmes socialistes, elle milite pour les droits politiques des femmes, exigeant le suffrage universel[4]. Espoir malheureusement déçu lorsque le conseil général du POB suspend le mouvement pour le suffrage féminin en 1901, sous prétexte qu'il favoriserait les cléricaux.

Membre du Comité de la fédération nationale des libres penseurs, elle participe aux travaux de la Libre Pensée et ira notamment au congrès international de la Libre pensée à Madrid en 1892. Elle fait partie du comité de surveillance de l'Orphelinat rationaliste dès sa fondation en 1893. En 1900, Elle en devient directrice, fonction qu'elle assume jusqu’à sa mort. C’est sous sa direction qu'est créée la première école primaire mixte, annexée à l’orphelinat, et construite l’annexe de la rue Marconi, à l’époque rue Verte[1].

Dans un texte de 1903, elle décrit les méthodes éducatives mises en œuvre à l'Orphelinat : « Que sera l’Orphelinat laïque? L’ancien système éducatif avait pour formule: la religion et le prêtre; le nouveau aura pour devise: l’hygiène et le médecin.(...) Quand la vieille pédagogie parle de répression et de punition, la nouvelle parle d’attention vigilante et de soins physiques. » Les principaux traits de ces nouveaux établissements ont été ébauchés à Cempuis, et reproduits à Forest-Bruxelles : coéducation, instruction rationnelle, travaux manuels, culture des sens par la musique et le dessin, voyages, chants, etc.

Franc-maçonnerie et fin de vie modifier

Vers 1903, elle est initiée dans la loge maçonnique « Diderot » de la Grande Loge symbolique écossaise mixte et maintenue (GLSE II), à Paris. C'est la première femme belge franc-maçonne[4].

Elle meurt le , des suites d'une opération chirurgicale. Ses funérailles sont l'occasion d'un imposant rassemblement et c'est « la citoyenne Lepelletier - Madeleine Pelletier -, ayant ceint le cordon bleu bordé de rouge et orné des insignes maçonniques »[5] qui prononça l'éloge maçonnique au nom de la loge « Diderot ». Elle est enterrée au cimetière du Dieweg à Uccle où sa sépulture est toujours visible. Par testament, elle lègue sa fortune entre trois organismes : l'Orphelinat rationaliste, le Cours d'infirmiers et d'infirmières rationalistes créé par César De Paepe et la Libre Pensée[1].

Hommages modifier

Publications modifier

  • L'enseignement de la grammaire mis en harmonie avec les méthodes nouvelles, Bruxelles : Henri Manceaux, 1868
  • Historiettes imitées de l'anglais et de l'allemand, Bruxelles : Lebègue, 1869
  • Cours d'éducation et d'instruction pour les jeunes filles. Année préparatoire, Paris : A. Ghio, s.d.
  • L'instruction supérieure de la femme. Une expérience sociologique en Angleterre, Bruxelles : H. Lamertin, 1891
  • Projet d'un enseignement supérieur spécial pour les femmes, Bruxelles : H. Lamertin, 1893
  • Éducation-Féminisme, édité par les soins d'Hector Denis et d'Eugène Hins, Paris-Bruxelles : V. Girard et E. Brière & Henri Lamertin, 1907
  • Question sociale, morale et philosophie, édité par les soins d'Hector Denis et d'Eugène Hins, Paris : V. Girard ; Bruxelles : Henri Lamertin, 1907

Notes et références modifier

  1. a b c d et e Pol Defosse, « Isabelle Gatti de Gamond », sur ligue-enseignement.be (consulté le ).
  2. « Page introuvable », sur paris.fr (consulté le ).
  3. a et b Denise Karnaouch, « Féminisme et laïcité, 1848-1914 », sur archivesdufeminisme.fr, (consulté le ).
  4. a et b Sylvie Lausberg, « Mémoire d'émail: Isabelle Gatti de Gamond (III) La franc-maçonne qui fit trembler la Belgique de papa », sur archives.lesoir.be, (consulté le ).
  5. Histoire de la Fédération belge du Droit humain. Tome I. Des origines à la guerre 1940-1945. Éditions du Droit humain, Bruxelles, 1978, p. 34.

Voir aussi modifier

Bibliographie modifier

  • Isabelle Gatti de Gamond et l'origine de l'enseignement secondaire des jeunes filles en Belgique, B.J. Baudart, Bruxelles : Librairie Castaigne, 1949 [présentation en ligne]
  • Isabelle Gatti de Gamond hors du féminisme bourgeois, Anne Morelli, dans Sextant, no 1 (hiver 1993), p. 57-73
  • Isabelle Gatti de Gamond, dans De Morgen,

Article connexe modifier

Liens externes modifier