Gwyneth Jones

artiste lyrique britannique
Gwyneth Jones
Dame Gwyneth Jones à Paris, 2000.
Biographie
Naissance
Nationalité
Formation
Activité
Période d'activité
depuis Voir et modifier les données sur Wikidata
Autres informations
Tessiture
Soprano dramatique (en)Voir et modifier les données sur Wikidata
Genre artistique
Distinctions

Gwyneth Jones, née le à Pontypool, au pays de Galles, Grande-Bretagne est une soprano dramatique galloise.

Biographie modifier

Jeunesse modifier

Née près des mines de charbon du Pays de Galles, à quelque 30 kilomètres de Cardiff, dans une bourgade où, plaisante-t-elle, « tout le monde s'appelle Jones, et toutes les femmes, Gwyneth ! »[1], Gwyneth Jones grandit dans une famille modeste. Elle perd sa mère à trois ans, et compense ce manque par la joie que lui procure le son du piano dont son père joue chaque soir. Elle assiste régulièrement aux offices de la paroisse locale où les chœurs d'enfants l'enchantent. « À cinq ans, j'étais déjà sûre de monter un jour sur scène », confie-t-elle. « Pour moi, il n'y avait aucun doute ! Je ne savais pas si je serais tragédienne, comédienne ou chanteuse d'opéra, mais j'étais irrésistiblement attirée par la scène »[2].

Pour l'heure, elle se contente de prendre des leçons de chant et de participer aux eisteddfods, compétition galloise de chansons. Travailleuse assidue, elle fait le bonheur de sa maîtresse de chorale alors qu'elle n'a que douze ans[1].

Débuts modifier

En 1956, peu après le décès de son père, elle obtient une bourse qui lui permet d'entrer au Royal College of Music (RCM) de Londres. Tout en multipliant les petits métiers afin de vivre décemment, elle découvre un monde nouveau : « C'est là que j'ai commencé à connaître et à aimer l'opéra »[1]. Elle passe quatre ans au RCM, travaillant en premier un répertoire d'oratorios et de lieder, développant un timbre de mezzo-soprano.[réf. nécessaire] Durant ces années, Jones découvre que le chant d'opéra nécessite un talent d'actrice : « J'ai compris que j'étais née pour chanter et jouer ; pas pour le concert ou l'oratorio ». C'est ce pour quoi l'école dispense également des cours de danse, d'escrime ou de théâtre shakespearien[1].

En 1960, elle part pour l'Italie suivre les cours de l'Académie musicale Chigiana de Sienne où, entre autres, elle se familiarise avec la langue. De retour à Londres, elle gagne le concours de la Boise Foundation qui lui permet d'aller travailler en Suisse, notamment aux côtés de Maria Carpi. Deux ans plus tard, elle fait ses débuts, toujours en tant que mezzo-soprano, avec le rôle d'Orfeo dans Orphée et Eurydice de Gluck et obtient d'être engagée dans la troupe de l'opéra de Zürich pour la saison 1962-1963.[réf. nécessaire]

Très vite, Gwyneth Jones se rend compte de l'étendue de sa voix et d'un possible changement de registre. Elle hésite, mais Maria Carpi et d'autres[Qui ?] la voient déjà devenir soprano. Le chef d'orchestre Nello Santi qui l'auditionne alors dans divers rôles de mezzo du répertoire allemand, tranche une bonne fois pour toutes : « Vous êtes une soprano ; jamais je ne vous accepterai dans des rôles de mezzo avec moi »[1]. Jones travaille alors l'extension de sa voix vers l'aigu, et aborde, dès 1964, Amelia, du Bal masqué de Verdi.[réf. nécessaire]

La même année, elle se retrouve sur le devant de la scène à Covent Garden. Prévue pour jouer les possibles doublures de Leontyne Price dans le rôle de Leonora du Trouvère de Verdi, dans une mise en scène signée Luchino Visconti et sous la baguette de Carlo Maria Giulini, elle la remplace au pied levé le , puis pour le reste des représentations. En 1964 également, elle remplace Régine Crespin dans le rôle-titre de Fidelio de Ludwig van Beethoven, qui connaît un certain succès et marque une première approche des rôles de soprano dramatique.[réf. nécessaire]

Reconnaissance internationale modifier

À partir de ce jour, Gwyneth Jones inscrit à son répertoire les héroïnes de Giuseppe Verdi : Desdémone dans Otello et Elisabeth dans Don Carlos — dont elle est l'une des rares sopranos à avoir joué le premier acte, dit Acte de Fontainebleau. Elle incarne également Donna Anna de Don Giovanni, l'une de ses rarissimes incursions dans l'univers de Mozart, Santuzza dans Cavalleria rusticana de Pietro Mascagni et les rôles-titres de Médée de Luigi Cherubini et Aïda, qu'elle chante en italien.

La cantatrice, qui gagne en popularité, travaille également des rôles plus complexes, telle Lady Macbeth, qui joue sur deux tessitures. Elle chante alors Minnie dans La fanciulla del West de Giacomo Puccini, Crysothémis dans Elektra, Ariadne dans Ariadne auf Naxos, La Maréchale du Chevalier à la rose et les rôles-titres de Salomé et d'Hélène d'Égypte, cinq opéras de Richard Strauss qui prouvent qu'elle est pleinement devenue soprano dramatique. En 1966, elle fait ses débuts à Vienne avec Fidelio, en remplacement de Birgit Nilsson.

En plus de sa voix, Jones est comédienne. Elle est désignée par Claude Mutafian comme une sorte de « Protée aux cent formes »[1]. Elle chante, mais elle incarne aussi le personnage qu'elle interprète. « En scène, c'est une torche, une tigresse, une épée », dit d'elle la journaliste Sylvie de Nussac[2]. Jones dit d'elle-même : « Quand je suis sur scène, je me sens encore moi-même tout en ayant les sentiments de quelqu'un d'autre ; c'est très étrange à décrire et en même temps très fascinant. En même temps qu'à la voix, on doit penser au corps. Si je joue Salomé, mon corps est très détendu, dans Tosca tout bouge différemment. Santuzza est une paysanne, la Maréchale, une aristocrate. Et il y a une différence énorme entre Octavian et la Leonore de Fidelio : toutes deux femmes déguisées en homme, mais les mouvements masculins du premier doivent être naturels, car il est un garçon alors que l'autre essaie de le paraître »[1].

Elle est donc à la fois comédienne, tragédienne ou chanteuse d'opéra, ce qui explique que, petit à petit, Jones se détache de la douce Leonora verdienne pour lui préférer Salomé ou Fidelio, personnages fébriles et ambigus[3]. « Au début, le respect de l'œuvre est immense, on ose à peine s'y atteler. C'est comme si l'on était trop petit en tant qu'homme, et je dois me surpasser, me dépasser, me libérer pour atteindre quelque chose de quasi métaphysique. […] On doit faire sauter presque toutes les frontières »[4].

Gwyneth Jones se produit désormais dans la plupart des opéras du monde : Covent Garden, Vienne, Münich, San Francisco, Buenos Aires, Berlin, Milan, Tokyo, New York et à l'Opéra de Paris où, le , elle triomphe dans Le Trouvère aux côtés de Placido Domingo et Piero Cappuccilli. Elle travaille également avec les plus grands chefs d'orchestre : Georg Solti, qui fut son révélateur, puis, dans le désordre, Carlo Mari Giulini, Rudolf Kempe, Josef Krips, Colin Davis, Claudio Abbado, sir John Barbirolli, Christoph von Dohnanyi, Karl Böhm, Zubin Mehta, Leonard Bernstein mais, surtout, Carlos Kleiber et Pierre Boulez.[réf. nécessaire]

Carlos Kleiber est le fils d'Erich Kleiber, le premier officie à Munich. C'est un homme extrêmement exigeant, peu bavard, qui ne compte pas les heures de répétition et les remises en question. Gwyneth le rencontre pour la première fois en , où elle interprète Desdémone dans Otello. Il faut pourtant attendre la fin des années 1970 pour les retrouver au sommet de leur art : Jones, qui fut jadis Octavian, interprète alors La Maréchale dans un Chevalier à la rose où se retrouvent, entre autres, Brigitte Fassbaender, Lucia Popp et Karl Ridderbusch. « Gwyneth est une grande dame et une chic fille », raconte le maestro dans un hommage à l'artiste. « Sérieuse mais amusante, pleine de cœur et d'âme, avec une mémoire merveilleuse, avec une puissance spectaculaire, avec un sens du dévouement etc. Encore un détail très particulier : on ne peut être impatient avec Gwyneth. Elle fera comme si de rien n'était et, à vrai dire, on s'en trouve fort embarrassé. C'est comme vouloir inquiéter Lao-Tseu ou quelque chose du même type. Autant peut-on apprendre les bonnes manières auprès d'elle, autant ne donne-t-elle pas de leçon. »[5]. Gwyneth retrouve le second, Pierre Boulez, le au festival wagnérien de Bayreuth. Elle interprète Kundry dans Parsifal. Il s'agit encore d'une simple approche. Six ans s'écoulent avant la vraie rencontre.[réf. nécessaire]

Gwyneth Jones est alors une cantatrice confirmée. La force de sa voix, sa robuste capacité et son don de savoir être une soprano-actrice forcent l'admiration de tous. Pourtant, son parcours va connaître quelques accrocs. Ainsi la retrouve-t-on handicapée par un vibrato trop large dans l'enregistrement du Hollandais volant[6] — alors qu'elle est enceinte.[réf. nécessaire] Elle continue toutefois de lutter, notamment durant les années 1970. Entre 1969 et 1991, elle annule cinq représentations sur mille six cents[2].

Wagner ou la consécration modifier

Dès 1963, en fait, Gwyneth Jones fréquente l'univers de Wagner et participera régulièrement au Festival de Bayreuth dès 1966. De petits rôles, certes, mais elle s'imprègne d'un monde musical unique. Mais Wagner existe aussi en dehors de Bayreuth. En Grande Bretagne, notamment. Elle ose alors d'autres personnages : Wellgunde puis la troisième Norne, dans Le Crépuscule des Dieux, Ortlinde et surtout Sieglinde, dans La Walkyrie ; rôle qui lui permet d'incarner « l'amour dans sa plénitude, l'amour débordant et incestueux »[1]. Elle doit le chanter dans une mise en scène de Hans Hotter, baryton-basse qui fut un somptueux Wotan, mais se trouve en fin de carrière. Semaine après semaine, Gwyneth va répéter son personnage, ses nuances, ses dérives, au domicile de Hotter, à Munich. Sans doute rassurée par la présence de Solti au pupitre, qui ne cesse de l'encourager, elle se lance. Sur la scène de Covent Garden, le , la critique acclame « une nouvelle Lotte Lehmann ». Jusqu'en 1975, elle chante dix fois ce rôle à Bayreuth, et, en 1967, à Buenos Aires. Mais là-bas, le défi est bien plus rude : il s'agit d'enchaîner six cycles complets. « Je faisais Sieglinde, Gutrune et la troisième Norne, sous la direction de Ferdinand Leitner, et aux côtés de Nilsson et Wolfgang Windgassen. On faisait six Rheingold pendant lesquels on répétait La Walkyrie, et ainsi de suite »[1].

Un cran est franchi cette même année, lorsqu'elle interprète Senta à Covent Garden. En 1966 Wieland Wagner, qui a contribué à révolutionner les mises en scène à Bayreuth, l'appelle pour une possible Elisabeth, de Tannhäuser qu'elle apprend en un seul jour. Malheureusement, il meurt, et le projet ne se concrétisera pas. C'est son frère, Wolfgang, qui reprend les rênes de la maison et refait appel à elle, en 1965, pour le rôle de Senta dans une nouvelle mise en scène, lors du centenaire des Maîtres Chanteurs de Nüremberg. Encore un cran plus haut, elle aborde Ortrude de Lohengrin et Kundry, de Parsifal, deux rôles réputés dangereux pour la voix. Elle les chantera tous deux à Bayreuth : Ortrude en 1968 et Kundry, en 1969. Sa vie wagnérienne se développe. Certes, n’a-t-elle pas déjà, en 1972, réalise l’exploit de chanter le même soir Elisabeth et Venus (Tannhäuser) ?

En 1972, c'est toujours avec Wagner et « Sieglinde » qu'elle fait ses débuts au Metropolitan Opera de New York sous la direction de Herbert von Karajan. Le couronnement viendra lorsqu'elle abordera Isolde de Tristan et Isolde et Brünnhilde, dans l’Anneau du Nibelung.

Ce Tristan et Isolde ne verra le jour qu'à San Francisco en 1982. Brünnhilde va apparaître bien avant. « Brünnhilde demande plus, vocalement, et même au niveau physique. La ligne d'Isolde est bien plus lyrique, surtout au second acte », note-t-elle[1]. Dès 1974, elle chante Brünnhilde pour la première fois à Bayreuth pour le seul acte final : Le Crépuscule des Dieux. Beaucoup pensent qu'il est insensé de commencer par la fin. Mais elle est certaine de pouvoir l'affronter. « Je savais que le moment était venu pour moi, explique la cantatrice. Alors pourquoi ne pas commencer par le plus difficile ? »[1] En 1975, c'est au tour du deuxième et troisième actes: La Walkyrie et Siegfried. En deux années, elle a abordé toutes les Brünnhilde. Car ce rôle est multiple, tant vocalement que psychologiquement. Il y a la guerrière, la femme amoureuse et la femme blessée, et, elle le reconnait volontiers : « Le travail scénographique de Wolfgang Wagner, laissant les personnages comme figés, ne m'a pas apporté grand-chose. Ce fut, pour ainsi dire, une répétition. »[3]

« C'est pendant l'été 1966, où je dirigeais pour la première fois Parsifal à Bayreuth, que Wieland Wagner a dû me parler du Ring », se souvient Pierre Boulez. « Ce projet restant vague, il n'entra ni dans mes préoccupations, ni dans mon calendrier. […] Après la mort de Wieland, Wolfgang reprit contact avec moi au sujet du Ring du centenaire (1876-1976) ; cela devait se passer trois ou quatre ans avant l'échéance prévue, donc en 1972 ou 1973. […] Il me semble que j'ai dû accepter sans arrière-pensée, presque avec imprudence… »[7]. Le chef d'orchestre a reçu de Wolfgang Wagner l'assurance que le metteur en scène serait, soit choisi par lui, soit avec son approbation. Après plusieurs approches infructueuses, c'est vers Patrice Chéreau qu'il se tourne. Le metteur en scène, déjà en pleine gloire, n'a que trente-deux ans et ne connaît strictement rien à Wagner. Ce qui, curieusement, rassure Boulez : il cherchait « la fraîcheur d'un regard »[7]. Tous deux sont en face d'un défi hors normes : « Il faut rappeler que le Ring comporte quatre ouvrages, rappelle le maestro, dont la durée totale représente environ quatorze heures de spectacle ; on doit le monter, à Bayreuth même, en deux mois et demi. »[7] La distribution repose, elle, entre les mains de Wolfgang Wagner. Choisie pour être cette Brünnhilde d'exception, Gwyneth Jones désire, dès que tous pourront se retrouver en Bavière, rencontrer Chéreau au plus vite. Elle ne veut plus d'une autre répétition, surtout pour cinq ans de suite. Elle veut pouvoir se mesurer avec un homme, tour à tour ami ou adversaire. Ce sera chose faite dès 1975. « Dès le début, Patrice et moi nous sommes retrouvés sur la même longueur d'onde. J'ai pu travailler tous les détails avec lui, il m'a ouvert de nouvelles « cases », et m'a beaucoup apporté. Un exemple : le duo final de Siegfried, ces deux enfants qui découvrent l'amour pour la première fois, comme une belle rose qui s'ouvre et dont ils respirent la beauté. L'amour comme une révélation ! D'habitude, dans cette scène, chacun reste de son côté ; ils ne se touchent presque jamais… »[1]

 
Gwyneth Jones dans le "Ring" du centenaire, répétitions Bayre uth, 1976.

De son côté, Chéreau est tout aussi séduit. « A Bayreuth, enfin, en cet été 1975, j'avais vu Gwyneth Jones qui chantait et jouait les trois Brünnhilde, et j'avais vu une enfant sur le plateau. Alors, c'était vrai, me disais-je, il est possible que ce soit une enfant, je peux me l'autoriser : dès sa première apparition devant son père, avec sa lance, je voyais une enfant joyeuse, courageuse et droite, qui jouait avec cette arme en poussant des cris qui n'étaient plus ridicules ; je m'étais déjà dit que seule une enfant pouvait agir comme elle le faisait — une enfant courageuse, c'est-à-dire plus courageuse que les adultes, défendant ses idées avec obstination ; Cordelia ou Jeanne d'Arc, et plus que Jeanne d'Arc encore, la Simone Machard de Bertolt Brecht, qui repousse les Allemands et rêve qu'elle est la Pucelle, avec sa cuirasse trop grande sur sa robe d'écolière. […] Elle doit avoir, me disais-je, un regard très mûr, elle s'oppose à Wotan parce qu'elle ne connait pas la duplicité. On ne peut changer d'avis, dit-elle en substance, la justice ne peut être que d'un côté à la fois ; seule une enfant aura cette naïveté sans que cela soit rance ou ridicule. […] Je croyais Brünnhilde encore très prisonnière du vieil ordre, défendant le monde du pouvoir, des dieux, des puissants, « historiquement » rétrograde, mais elle devait avoir de la fraîcheur, de l'ingénuité, du courage, et Gwyneth Jones allait m'y aider. »[8]

La première a lieu, avec L’Or du Rhin, le . Les quatre œuvres après, l’accueil est extrêmement divisé. Une masse de critiques enthousiastes, d’un côté et, de l’autre, presque de la haine. Pour les Wagnériens extrémistes, le péché est double : une association franco-française pour un anniversaire allemand, et l’insupportable « choc » du parti pris de Patrice Chéreau, qui situe l’ensemble du Ring dans les dernières années du XIXe siècle, années où l’industrialisation devient reine. Le « mythe » est irrémédiablement cassé… Pour Brünnhilde, réinventée, transfigurée, ces « gardiens du temple » sont rudes. Selon la revue anglaise Opera, « Jones ne possède pas encore la stature héroïque pour faire la Brünnhilde du Crépuscule. » C'est oublier que la cantatrice a commencé ce rôle par la fin... Cette mise en scène saluée par un Grammy Award en 1983. François Regnault, collaborateur de Chéreau, lui rend hommage dans un livre de 1991.

Les années d'après modifier

Pour Gwyneth Jones, Wagner peut être surpassé. Pourtant, elle continue de chanter Brünnhilde régulièrement. Il y aura aussi son Isolde de San Francisco en 1982, mais bien d'autres incarnations, et non des moindres : une incursion dans le monde de Claudio Monteverdi avec Poppée, en 1978 ; le rôle-titre d'Elektra. Aux Jeux olympiques de Los Angeles (1984), après avoir été préparée par Eva Turner, elle interprète le rôle-titre de Turandot pour la première fois et en fera l'une de ses plus grandes interprétations.

En 1985, elle aborde le rôle de la Teinturière dans La Femme sans ombre de Strauss. Ses cinq rôles majeurs de l'univers de Strauss incluent, aussi, une incroyable performance, lorsqu'un soir, elle chanta à la fois La Teinturière et L'Impératrice de ce dernier opéra.

Condamnée malgré elle à demeurer dans le cercle Wagner-Strauss-Puccini, elle parvient à s'en évader avec le rôle d'Hanna Glawari dans La Veuve joyeuse de Franz Lehar en 1979, ainsi qu'avec le rôle-titre de la Norma de Vincenzo Bellini. Elle intègre à son large répertoire la Veuve Begbick dans Grandeur et décadence de la ville de Mahagonny, opéra politico-satirique de Kurt Weill sur un livret de Bertolt Brecht au festival de Salzbourg en 1998. Viennent, ensuite, Kostelnicka, dans Jenůfa et la Kabanicha, dans Katja Kabanova, deux œuvres de Leoš Janáček. Elle a également interprété Ortrud, dans Lohengrin, ce qui fait d'elle la seule cantatrice à avoir chanté tous les principaux rôles féminins de Wagner, à l'exception d'Elsa.

C'est à Paris, le qu'elle apparaît seule en scène, pour La Voix humaine, de Francis Poulenc, long monologue d'une femme chantant son amour et son désespoir au téléphone. Un rôle d'actrice, plus que de cantatrice. S'ensuivra une étonnante composition de la femme perdue, affolée et, peut-être folle, dans Erwartung, d'Arnold Schoenberg, mini-opéra de 45 minutes.

En plus de récitals d'air d'opéras ou de lieder, et de classes de maître, Gwyneth Jones fait, en 2003, ses débuts en tant que metteuse en scène et costumière pour une production du Hollandais volant à Weimar. Elle interprète en 2007 la reine de cœur dans Alice in Wonderland, opéra de Unsuk Chin, d'après l'œuvre de Lewis Carroll. En , elle incarne Herodias' dans une production de Salomé signée Stephen Langridge, à Malmö (Suède), sous la direction d'Adrian Müller. Elle reprend le rôle pour une version de concert en au Festival de Verbier, sous la direction de Valery Gergiev.

"Parmi toutes les cantatrices que j'ai rencontrées, écrit en 1991 la grande Birgit Nilsson, je n'en connais aucune possédant tant de dons divins que Gwyneth Jones et travaillant plus durement pour améliorer son remarquable talent artistique."[9]

Avec un répertoire fort de plus de cinquante rôles, Gwyneth Jones n'a pas encore mis le point final[3]. Aussi n'est-il pas étonnant qu'elle choisisse Khalil Gibran pour se décrire, à savoir "Le travail est l'amour rendu visible"[4]

En 2012, Gwyneth Jones fait une apparition dans le film Quartet, réalisé par Dustin Hoffman. Inspiré d’une pièce de théâtre de Ronald Harwood, le film se déroule dans une maison de retraite pour artistes lyriques et raconte les préparatifs de leur concert de gala annuel.

Gwyneth Jones a habité pendant plus de trente ans sur les hauteurs de Zürich. En , elle se réinstalle en Grande-Bretagne avec son mari, le chef d’orchestre Adrian Müller. Elle a une fille, Susannah Haberfeld, qui est mezzo-soprano.

Distinctions modifier

Récompenses modifier

  • 1976 : Fête sa centième Leonore.
  • 1987 : Lauréate du Prix Shakespeare (en).
  • 1988 : Reçoit la Croix du mérite fédéral, première Classe (Suisse).
  • 1990 : Présidente de la Wagner Society (en) de Londres (qu'elle est toujours).
  • 1991 : Reçoit la Décoration d'or du Land à Vienne.
  • 2003 : Lauréate du prix Puccini (pour sa première mise en scène)

Décorations modifier

Discographie sélective d'opéras modifier

Divers modifier

Filmographie partielle modifier

Références modifier

  1. a b c d e f g h i j k et l Claude Mutafian, Les Trésors de l'Opéra de Paris, n°7, 1980.
  2. a b et c Till Haberfeld, Gwyneth Jones, éditions Atlantis-Musikbuch, .
  3. a b et c Fabian Gastellier, « La Fièvre Jones », Elle,‎ .
  4. a et b Till Haberfeld et Gwyneth Jones, Gwyneth Jones, éditions Atlantis-Musikbuch, .
  5. Erich Kleiber et Gwyneth Jones, Gwyneth Jones, éditions Atlantis-Musikbuch, .
  6. Karl Böhm/DGG
  7. a b et c Pierre Boulez, in L'Histoire d'un Ring, de Sylvie de Nussac et François Regnault, éditions Diapason/Robert Laffont, 1980
  8. Patrice Chéreau, in L'Histoire d'un Ring, op.cit.
  9. Birgit Nilsson in "Gwyneth Jones", de Till Haberfeld, op.cit.

Liens externes modifier