Braj bhasha

langue
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Braj bhasha
ब्रज भाषा (braj bhāṣā)
Pays Inde
Région Uttar Pradesh, Rajasthan, Madhya Pradesh, Haryana
Nombre de locuteurs 1,6 million (2011)
Classification par famille
Codes de langue
IETF bra
ISO 639-2 bra
ISO 639-3 bra
Glottolog braj1242
Carte
Image illustrative de l’article Braj bhasha
Aire de distribution du Braj bhasha, à l'échelle de la Plaine gangétique.

Le braj bhasha (devanagari : ब्रज भाषा), appelé aussi brij bhasha (बॄज भाषा), brak bhakha (ब्रज भाखा), dehaati zabaan (देहाती ज़बान) ou simplement braj (ब्रज), est une langue indo-aryenne parlée par environ 1 600 000 de personnes[1] dans la zone qui s'étend entre Delhi et Agra, en Uttar Pradesh. Il s'agit d'un dialecte du hindi occidental. Ce fut « la principale langue littéraire de l'Inde du Nord jusqu'au XIXe siècle »[2]. Le braj basha est proche de l'awadhi, parlé dans la région voisine de l'Awadh.

Étymologie modifier

Le mot vraja (qui vient de la racine vraj-, « aller ») signifie « pâturage, enclos à bétail ». S'il figure déjà dans le Rig-Veda, c'est sans référence à une population ou à une région spécifique. Ce n'est que dans les Puranas (entre autres dans le Bhagavat-Purana) que ce terme désignera définitivement une colonie de bergers sise dans les environs de Mathura et dont le roi est Nanda, le père adoptif de Krishna[3].

On trouve dans l'ancienne littérature hindi les formes braj et brij, utilisées pour dénommer le pays autour de Mathura. En revanche, toujours dans la même littérature, la langue de ce pays s'appelle bhāshā[Note 1] ou encore bhākhā, et on retrouve ce terme pour désigner les autres dialectes littéraires du hindi[4]. Avec sa signification de « langue courante », le mot était utilisé par les auteurs indiens écrivant en persan pour distinguer ce parler du sanskrit[5].

Toutefois, ce n'est qu'au XVIIe siècle que le mot braj apparaît. Avant cela, on donnait à cette langue le nom de madhyadeshîyabhâshâ (langue de la région centrale), du fait que c'est à Gwalior (Madhya Pradesh) que parurent les premières œuvres dans un idiome vernaculaire proche du braj. D'ailleurs, dans le persan parlé en Inde, on l'appelait parfois zabân-i-Gvâliar, c'est-à-dire langue de Gwalior[5].

Aire géographique modifier

Historiquement, c'est la langue du pays braj, qui s'étendait entre Delhi et Agra, le long de la rivière Yamuna, et dont la ville principale est Mathura[2]. Aujourd'hui, le Brajbhumi (« pays braj ») est le nom donné à la région où Krishna aurait vécu jusqu'à l'âge de trente ans environ[6] : il se situe dans la région du Doab, formant un triangle entre les villes d'Agra, Delhi et Jaipur, et s'étend sur une superficie d'environ 5 000 km2. Cette aire est toutefois mieux définie culturellement que géographiquement[7]. Elle est un lieu important de pèlerinage lié à Krishna (une des localités principales étant Vrindavan, à une dizaine de kilomètres au nord de Mathura), avec quelque 50 millions de pèlerins visitant la région chaque année[8].

De façon plus approximative, on peut dire que le braj est parlé sur une aire qui comprend l'ouest de l'Uttar Pradesh, l'est du Rajasthan et le nord du Madhya Pradesh[5] ainsi que le district de Faridabad dans le Haryana[9]. Les formes les plus pures sont parlées dans les villes de Mathura, Agra, Etah, and Aligarh[10].

Caractéristiques modifier

 
Le braj se trouve dans la partie occidentale de la zone centrale de l'hindi.

Le braj se base sur un dialecte parlé à l'est et au sud de Delhi, et à ce titre, il fait partie de la zone centrale de l'hindi[11]. Il descend d'un prakrit appelé Śaurasenī[12]. Le braj occupe une place parallèle à celle d'autres dialectes voisins comme le Hariyānī ou le Kanauji, ainsi que des langues comme le penjabi, le rajasthani, le gujarati, le marathi et le bengali[12].

Littérature modifier

Le braj est des principales langues vernaculaires utilisées dans la littérature de l'Inde du Nord[5]. La littérature hindi produite avant le XIXe siècle s'écrit largement le braj. Mais c'est surtout aux XVe et XVIe siècles que le braj va dominer la littérature hindie. L'essentiel des œuvres importantes de cette époque sont écrites en braj, à l'exception notable du Ramayan de Tulsidas, composé en awadhi[13] (mais Tulsidas a aussi écrit en braj).

Littérature krishnaïte modifier

La mythologie hindoue place la naissance, l'enfance et la jeunesse de Krishna (en compagnie de Radha) dans la région entre Mathura et <, au cœur du Brajbhumi. Or au XVIe siècle, les grands réformateurs religieux redécouvrent la geste de Krishna et développent autour de lui et des lieux qu'il a fréquentés un culte important. Vallabha (1479-1531) fondateur de la secte des vallhabites, encouragea vivement le développement d'une littérature en braj autour de Krishna et de sa geste, et cet élan fut poursuivi par son fils Vitthalnath (1518-1588). De très nombreux dévots-poètes fournirent une très grande production littéraire en langue braj[14], célébrant Krishna-Gopâl (« Krishna-bouvier »)[15].

Littérature de cour modifier

Littérature sikh modifier

C'est également une langue importante dans le sikhisme; elle a tenu une place notable dans les écrits de deux fondateurs de cette religion, Guru Amar Das et Guru Arjan[16]. Le poète et bhagat Surdas, dont certains poèmes ont été repris dans le sikhisme, l'utilisait régulièrement.

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. En sanskrit, ce terme signifie « parole, langage parlé, langue vernaculaire ». (Voir « bhāṣā » dans Sanskrit Heritage Dictionary - Lire en ligne; consulté le 24 août 2020)

Références modifier

  1. Census of India, 2011, « Abstract of speakers' strength of languages and mother tongues - 2 ». (Lire en ligne - Consulté le 29 juillet 2020). Ce chiffre semble toutefois étonnant au vu du résultat du recensement de 2001 qui fait état de 575 000 locuteurs (voir le point 6.8).
  2. a et b Charlotte Vaudeville et al., « L'Inde in "Pastorale, genre littéraire" », sur universalis.fr, Encyclopædia Universalis [en ligne] (consulté le )
  3. Varma 1935, p. 24.
  4. Varma 1935, p. 25.
  5. a b c et d Delvoye 2001b, p. 316.
  6. (en) Dev Prasad, Krishna: a journey through the land & legends of Krishna, Bombay, Jaico Publishing House, 2010, 364 p. (Version Kindle: v. emplacements 245 et 391 à 413).
  7. (en) « About Braj: Braj is not just Vrindavan », sur brajfoundation.org (consulté le )
  8. (en) « About Braj : A peek into braj », sur brajfoundation.org (consulté le )
  9. Gopalakrishan 2011, p. 144.
  10. (en) « Braj Bhasha language », sur britannica.com (consulté le )
  11. Jean Sellier, Une histoire des langues et des peuples qui les parlent, Paris, La Découverte, , 711 p. (ISBN 978-2-7071-9891-4), p. 230
  12. a et b Snell 1991, p. 3.
  13. Varma 1935, p. 25 ; 29.
  14. Sauf mention contraire, les informations de cette partie proviennent de Delvoye, 2001b, p. 316-318.
  15. Charlotte Vaudeville, « Introduction » in Soûr-Dâs, Pastorales, trad. du braj avec introduction notes et glossaire de Charlotte Vaudeville, Paris, Gallimard, coll. « Connaissance de l'Orient », 1971, p. 11-21.
  16. W. Owen Cole et Piara Singh Sambhi, A Popular Dictionary of Sikhism: Sikh Religion and Philosophy, Routeldge, 1997, p. 53. (ISBN 0700710485)

Bibliographie modifier

  • [Delvoye 2001a] Françoise Delvoye, « Keshav-Dâs et la poésie de cour hindî en braj », dans Pierre-Sylvain Filliozat, Dictionnaire des littératures de l'Inde, Paris, PUF, (1re éd. 1994), 379 p. (ISBN 978-2-130-52135-8), p. 167-170
  • [Delvoye 2001b] Françoise Delvoye, « Sûr-Dâs et la littérature krishanaïte cour hindî en braj », dans Pierre-Sylvain Filliozat, Dictionnaire des littératures de l'Inde, Paris, PUF, (1re éd. 1994), 379 p. (ISBN 978-2-130-52135-8), p. 316-319
  • (en) N. Gopalakrishan, « Brajbasha », sur censusindia.gov.in, India: Language Division Office of the Registrar General & Census Commissioner, (consulté le ), p. 143-198
  • (en) Rupert Snell, The Hindi Classical Tradition : A Braj Bhāṣā Reader, Londres, School of Oriental and African Studies, , xv+259 (ISBN 978-0-7286-0175-8, présentation en ligne, lire en ligne)
  • Direnda Varma, La langue braj (Dialecte de Mathura) (Thèse de Doctorat de l'Université - Faculté des Lettres de l'Université de Paris), Paris, Librairie d'Amérique et d'Orient, , 135 p.

Annexes modifier

Articles connexes modifier