XD 1000-1200

autorail français De Dietrich
XD 1000-1200
Description de cette image, également commentée ci-après
PO-Midi ZZ PEty 23921 (puis XD 1201 SNCF).
Identification
Surnom Glouglou
De Dietrich 210 ch
Type autorail
Motorisation Diesel
Composition M
Constructeur(s) De Dietrich
Nombre 1 + 34
Mise en service 1933-1935
Effectif 0
Retrait 1960
Caractéristiques techniques
Disposition des essieux 1A'A1'
Écartement standard (1 435 mm)
Moteur thermique 2 * CLM 85L4 puis
2 * Poyaud 4 PDT
Puissance CLM : 77 kW
Poyaud : 84,5 kW
à 1 500 tr/min
Transmission mécanique Mylius CV2
Puissance continue CLM : 154 kW
Poyaud 169 kW
Longueur HT 17,900 m
Empattement du bogie 3,200 m

Les XD 1000-1200 sont une série d'autorails à moteur Diesel fabriqués par De Dietrich pour le compte des compagnies ferroviaires françaises avant la création de la SNCF.

Un protoype est mis en service en 1933 ; les commandes et les mises en service de 34 engins de série surviennent dans les deux ans qui suivent. Si les différents lots partagent des caractéristiques communes (longueur de caisse, motorisation, puissance), la SNCF décide finalement de les immatriculer finalement dans des séries différentes selon la compagnie qui les avait achetés. Les derniers exemplaires sont radiés en .

Le son particulier des deux moteurs Diesel à cycle deux temps qui les équipent à l'origine leur vaut le surnom générique de « Glouglou » tout comme l'appellation « autorail De Dietrich 210 ch » est parfois retenue, eu égard à la puissance cumulée de ces deux moteurs.

Genèse de la série modifier

Outre sa production d'appareils de chauffage, l'entreprise De Dietrich de Reichshoffen construit des wagons et des voitures pour les compagnies de chemin de fer françaises. Les commandes baissant, elle cherche à se diversifier en se lançant dans la construction d'autorails, mode de transport alors en plein développement en France[1].

Voulant de démarquer de Renault et de Bugatti, alors très présents sur le marché[2], De Dietrich opte pour des solutions techniques inédites. Le principe retenu repose sur une double motorisation avec des groupes de faible puissance installés directement sur les bogies — cela simplifie la transmission, améliore la tenue de voie en abaissant le centre de gravité et réduit les vibrations de la caisse —, associée à une caisse légère. Les moteurs, en position inclinée sur les bogies, sont plus facilement démontables[3]. Le chauffage des compartiments voyageurs est réalisé au moyen d'une chaudière De Dietrich au fioul qui alimente des radiateurs à eau, le chauffage par circulation de l'eau de refroidissement du moteur n'étant pas jugé assez efficace[4].

Le prototype effectue sa première circulation le sur la ligne appartenant à De Dietrich qui relie Mouterhouse à Bannstein[4]. Le constructeur réalise, les 8 et , un voyage de démonstration entre Paris, Dreux et Bagnoles-de-l'Orne, auquel participent les dirigeants des grandes compagnies ferroviaires françaises[5]. Toutes passent commande du modèle auprès de De Dietrich, sauf la Compagnie des chemins de fer de Paris à Lyon et à la Méditerranée (PLM) qui estime la puissance de l'autorail insuffisante pour les lignes à profil difficile de son réseau[N 1] et la Compagnie des chemins de fer du Nord qui s'équipe localement auprès des Aciéries du Nord[7]. L'Administration des chemins de fer d'Alsace et de Lorraine (AL), outre sa commande d'autorails neufs, achète le prototype[4].

Description modifier

Caractéristiques techniques modifier

La caisse du prototype possède une ossature en alliage léger recouverte de plaques en duralium ; sur les exemplaires de série, toutes ces structures sont en acier[8] mais dans tous les cas la longueur hors tampons de l'appareil est fixée à 17,900 m[9].

Les moteurs d'origine de ces autorails, construits par la compagnie lilloise de moteurs (CLM 85L4) sous licence Junkers, sont déjà largement utilisés dans l'industrie automobile[10]. Ce sont des moteurs Diesel à cycle deux temps, à quatre cylindres et à huit pistons où deux pistons par cylindre travaillent en opposition — le rendement de ce type de moteurs n'est pas optimal[11]. Leur puissance s'élève à 77 kW (105 ch)[12]. Sur chaque bogie, un moteur est accouplé à une boîte de vitesses mécanique Mylius CV2 à commande pneumatique, à quatre rapports avec inverseur, qui transmet le mouvement à l'essieu intérieur du bogie[2]. Les roues du prototype, qui possèdent entre le boudin et le moyeu trois anneaux élastiques destinés à amortir les vibrations, sont remplacées par des roues monobloc sur les autorails de série[4]. Pour améliorer l'inscription du bogie dans les courbes de la voie et assurer une meilleure adhérence, les roues porteuses de chaque bogie (côté extrémité de l'autorail) ont un diamètre de 760 mm et les roues motrices (côté intérieur) sont plus grandes avec 850 mm ; en outre, le pivot du bogie est décalé vers l'intérieur[13]. Le freinage est assuré par un double dispositif : tambours calés sur les essieux et patin électro-magnétique plaqué sur le rail[4]. Comme sur la plupart des autorails à cette époque, aucun dispositif d'attelage n'est prévu[14].

À partir de 1952, les XD 1000-1200 bénéficient d'un nouveau moteur Diesel Poyaud 4 PDT à l'architecture conventionnelle qui permet d'augmenter de 20 ch leur puissance globale. Vers la même époque, d'autres modifications sont apportées : remplacement des freins à tambour par des freins à sabot plus efficaces et plus faciles d'entretien, démontage du frein par patin électro-magnétique et installation d'un attelage Willison permettant la circulation en jumelage (un conducteur par autorail)[12].

Aménagements intérieurs modifier

L'aménagement intérieur des autorails de série de l'AL est identique à celui du prototype : les sièges (brevet Épéda) sont confortables voire luxueux avec un revêtement en cuir[11] mais les dossiers des banquettes ne sont plus individuels[8]. Parmi tous les engins livrés, ceux destinés à ce réseau sont les seuls dont le pupitre de conduite soit disposé à droite[7].

La Compagnie des chemins de fer de l'Est choisit deux types d'aménagement ; l'un favorise le service « banlieue » avec plus de sièges répartis en deux classes et des accès facilités ; l'autre est orienté vers le service « grandes lignes » avec moins de places mais en classe unique et avec un local à bagages agrandi[15].

Les autorails de l'État sont aménagés avec deux compartiments en classe unique et un local à bagages agrandi, des strapontins et des banquettes rabattables[16].

Le PO-Midi retient pour ses autorails un aménagement intérieur voisin de celui des « grandes lignes » de l'Est, avec toutefois des portes plus larges pour le local à bagages[16].

Aménagements intérieurs des autorails De Dietrich 210 ch de la SNCF[9].
Réseau Nombre d'exemplaires N° réseau origine N° SNCF final Places assises Strapontins Aménagements
particuliers
AL 1 ZZr 11 puis 12 XD 1001 à 1011 69 6
10 ZZr 13 à 22
Est 2 ZZ ABCEt 90001 et 90002 XD 1021 et 1022 69 6 Banlieue
(deux portes latérales)
6 ZZ ABsCEty 70001 à 70006 XD 1031 à 1036 59 6 Grandes lignes
(une porte latérale)
État 6 ZZy 24801 à 25806 XD 1101 à 1106 48 12 Fourgon agrandi
PO-Midi 10 ZZ PEty 23921 à 23930 XD 1201 à 1210 59 6

Carrière et services modifier

 
Lignes européennes parcourues par les XD 1000-1200 vers 1935[17].

Tous les autorails sont livrés aux différents réseaux entre 1933 et 1935. Les exemplaires de l'AL, arrivés les premiers, sont affectés à Strasbourg et Mulhouse d'où ils quadrillent les lignes d'Alsace et de Lorraine, de Sarreguemines au nord à Belfort au sud et jusqu'à Bâle. Ceux de l'Est, affectés à Vitry-le-François, rayonnent notamment vers Reims ou Troyes. Les autorails de l'État sont basés à Rennes et assurent des services sur un large périmètre allant de Saint-Malo au Mans. Les unités du PO-Midi, dépendant du dépôt d'Agen, circulent vers Auch ou Tarbes[18].

Après la Seconde Guerre mondiale, et alors que quatre unités ont été détruites par faits de guerre, toutes les autres sont regroupées dans la région Est de la SNCF[N 2] et affectées à Mohon, Vitry-le-François puis Châlons-sur-Marne puis Langres, Strasbourg et Mulhouse-Île Napoléon ; ils assurent des dessertes omnibus autour de ces villes, les autorails de Mulhouse conservant leur tournée vers Bâle[16].

Au milieu des années 1950, l'arrivée des X 3800 restreint leur activité à des navettes de service à Chaumont, Mohon, Mulhouse et Strasbourg[N 3]. Les dernières unités sont radiées en  : aucun de ces autorails ne bénéficie de la renumérotation dans la série des X 41000 qui devait leur échoir deux ans plus tard[12].

Les De Dietrich 210 ch en-dehors de la SNCF modifier

Houillères du bassin de Lorraine modifier

Image externe
  Navette De Dietrich des HBL sur le site du Républicain lorrain.

L'un des autorails (ex État) est gravement endommagé dans un incendie en 1939. Racheté par De Dietrich mais resté inemployé par cette entreprise après la Seconde Guerre mondiale, il est vendu en 1952 aux Houillères du bassin de Lorraine (HBL). Débarrassé de la plus grande partie de ses aménagements intérieurs pour accroître sa capacité et équipé de portes coulissantes à commande pneumatique, il sert, pendant de nombreuses années, de navette transportant les ouvriers entre les différents sites, dont le siège de Merlebach. Remotorisé en 1964 avec deux moteurs Diesel Poyaud, il reste en service jusqu'en 1980, date à laquelle il est remplacé par un X 3800[12],[20].

Il est conservé au musée du carreau Wendel à Petite-Rosselle[12].

Proche-Orient modifier

En 1934, quatre exemplaires de ce type d'autorail circulent en Syrie sur le Chemin de fer de Damas à Alep. Deux d'entre eux sont longs de 18,120 m, les deux autres de 19,520 m. Ils sont modifiés pour répondre aux contraintes du climat local : refroidissement des moteurs amélioré, ventilation des compartiments renforcée par la pose de prises d'air orientables en toiture, installation de distributeurs de boissons fraîches pour les passagers. Dépourvus d'attelage, ils ne peuvent opérer qu'en solo. Ils circulent entre Alep, Rayak et Tripoli, allant même jusqu'à Beyrouth[15],[21].

Après l'indépendance du Liban (1943) et de la Syrie (1946), ils sont versés en 1956 au parc des Chemins de fer syriens mais continuent d'assurer les mêmes services jusque vers 1980[15].

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. Le PLM commande à De Dietrich un modèle à la motorisation renforcée (221 kW) dont les huit exemplaires lui sont livrés en 1935-1936[6].
  2. Dès la fin du conflit, la SNCF met en place un plan de rationalisation de son parc d'autorails en regroupant les séries par région SNCF en fonction des constructeurs[16].
  3. Dans le langage ferroviaire, une « navette de service » ou « navette ouvrière » désigne un court train, reliant généralement une grande gare à un centre de triage ou un dépôt voisin, destiné au transport exclusif des agents du chemin de fer entre ces deux points. Plusieurs séries d'automotrices ou d'autorails finissent leur carrière dans ce rôle[19].

Références modifier

  1. Didelot 2019, p. 36.
  2. a et b Broncard 1986, p. 10.
  3. Didelot 2019, p. 37-38.
  4. a b c d et e Didelot 2019, p. 41.
  5. Broncard 1986, p. 11.
  6. Didelot 2019, p. 47.
  7. a et b Broncard 1986, p. 12.
  8. a et b Didelot 2019, p. 42.
  9. a et b Didelot 2019, p. 43.
  10. Clive Lamming, « De Dietrich : un nom prestigieux lié au chemin de fer », sur trainconsultant.com (consulté le ).
  11. a et b Fabienne Klinguer, De l'autorail à la voiture Corail : le matériel roulant De Dietrich, 1933-1978., , 89 p., p. 11.
  12. a b c d et e Didelot 2019, p. 46.
  13. Didelot 2019, p. 40.
  14. Jehan-Hubert Lavie, « Remorquer ou pas ? », Correspondances ferroviaires, no 2 (hors série) « L'art de composer les trains d'autorails »,‎ , p. 11-12 (ISSN 1634-8206).
  15. a b et c Didelot 2019, p. 44.
  16. a b c et d Didelot 2019, p. 45.
  17. M. Henon, « L'exploitation par De Dietrich », Traction nouvelle, no 3,‎ , planche hors-texte.
  18. Broncard 1986, p. 11-12.
  19. Loïc Fieux, « Z 4000, Z 4100 et Z 4400 : l'armada du PO », Correspondances ferroviaires, no 3 hors-série « L'art de composer les trains : les automotrices »,‎ , p. 24.
  20. « État autorail « X-41106 » – Petite-Rosselle », sur Patrimoine ferroviaire français (consulté le ).
  21. Pascal Bejui, « Autorails De Dietrich : de l'Est à l'Orient et autres lieux », Le Train Nostalgie, no 19,‎ , p. 58-60 (ISSN 2496-204X).

Voir aussi modifier

Sur les autres projets Wikimedia :

Bibliographie modifier

  • Yves Broncard, « De Dietrich : autorails pour tous usages », La Vie du rail, no 2071,‎ , p. 9-14.
  • Frédéric Didelot, « De Dietrich : le 2e grand constructeur français d'autorails », Ferrovissime, no 100,‎ , p. 34-66 (ISSN 1961-5035).

Articles connexes modifier