Préexistence

notion philosophique et religieuse

La préexistence est la croyance en une forme d'âme antérieurement à toute incarnation humaine, donc avant même la conception de tout humain.

À l'inverse le traducianisme et le créationnisme soutiennent que l'âme se forme lors de la conception ou à la naissance.

Philosophie grecque

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Platon, favorable à la réincarnation, affirme la préexistence et sa théorie de la réminiscence et sa foi en l'immortalité. Phédon 72e-73a : « Pour nous, l'acquisition d'un savoir se trouve n'être rien d'autre qu'une réminiscence. D'après cette formule, il est nécessaire, je pense, que, dans un temps antérieur, nous ayons appris ce dont nous nous ressouvenons à présent. Ce qui serait impossible si notre âme n'existait pas en quelque façon avant d'être entrée dans cette forme humaine. De sorte que, par cette voie aussi, l'âme semble être quelque chose d'immortel. »

Religion juive

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Des courants juifs admettent la préexistence. Les Esseniens ne la défendent pas[1].

Religion chrétienne

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Le christianisme est généralement hostile à l'idée de préexistence. Grégoire de Nysse s'élève « contre ceux qui tiennent la préexistence des âmes par rapport aux corps ou à l'inverse la formation du corps avant les âmes » et il avance une « réfutation de ces fictions qui concernent le passage des âmes d'un corps dans un autre » (La création de l'homme, chap. XXVIII).[2]

Les gnostiques soutiennent la préexistence[2].

Hindouisme

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La religion indienne affirme l'existence du Soi, l'âtman, éternel. Bhagavad-Gita (II, 12) : « Jamais ne fut le temps où nous n'existions pas, moi, toi et tous ces chefs de peuples. Jamais ne viendra celui où nous ne serons pas »

Manichéisme

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Mani, modifiant un verset de saint Jean (16:8-11), fait une allusion à sa propre préexistence : il soutient que le Paraclet vivant est descendu sur lui afin de lui révéler le mystère[3].

Aborigènes australiens

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"Les Aborigènes du désert et du Kimberley conçoivent les nouveau-nés comme les incarnations d’esprits préexistants appelés « esprits enfants » ou marlinbany en kija. Lorsqu’une femme passe à proximité d’un endroit où réside un tel esprit, celui-ci peut choisir d’entrer dans le corps de la mère pour s’incarner dans le futur enfant à naître. Ce lieu qui peut être un trou d’eau, un arbre creux, une faille ou une grotte, devient alors le site de conception du futur enfant, un endroit hautement signifiant dans le parcours initiatique de l’individu. Chaque esprit enfant est associé à un principe animal, végétal, élémentaire, psychologique qui déterminera une partie de l’affiliation et deviendra le totem (ou Rêve) de l’individu pendant toute sa vie" (A. Morvan, Révélation des morts et création rituelle dans le nord-ouest australien, 2013).

L'inconscient collectif

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Carl Gustav Jung définit ainsi les archétypes : « des systèmes hérités », « des modèles instinctifs qui sont congénitaux et préexistants »[4]. « L'Inconscient collectif représente une instance qui préexiste à l'Inconscient personnel, au Conscient et au Moi. C'est une instance transpersonnelle et individuante tout à la fois. L'Inconscient collectif contient les traces du passé originel et transgénérationnel, ainsi que les archétypes (énergie rayonnante et modèles idéaux). C'est la mémoire de l'humanité acquise et engrammée sous forme de symboles universels. »[5]

Certains psychanalystes postulent, dans le cadre de la psychanalyse transgénérationnelle, que le « sujet préexiste à l'incarnation ». Divers troubles psychologiques remontent à des incidents survenus aux parents, grands-parents qui laissent inconsciemment des traces dans le psychisme des descendants. « L'être humain naît dans une famille qui lui transmet un héritage conscient et inconscient comprenant des missions, des loyautés familiales visibles ou invisibles, des loyautés de clan, culturelles, religieuses, nationales. Tout individu est imprégné, qu'il le veuille ou non, qu'il le sache ou non, de ces liens et habitus de loyautés familiales, des traumas et traumatismes, des deuils non faits de sa famille, etc. »[6]

Notes et références

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  1. Maurice Gilbert, La croyance des esséniens en la vie future : immortalité, résurrection, vie éternelle ?, Gabalda, 1993, p. 285.
  2. Écrits gnostiques, Gallimard, coll. "La Pléiade", 2007, p. 8, 79, 101, 138, 146, 152-155, 157, 165... p. 1803.
  3. Dictionnaire des religions, PUF, 1984, p. 1023.
  4. Jung, Collected Works, vol. 4, § 728).
  5. Tristan Moir, L'Interprétation psychanalytique des rêves, L'Archipel, 2014.
  6. Anne Ancelin Schützenberger, Secrets, secrets de famille et transmissions invisibles, Cahiers critiques de thérapie familiale et de pratique de réseaux, no 33, 2004. [1]

Bibliographie

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  • Platon, Phédon, trad., Garnier-Flammarion.
  • Origène, Des principes, I.7.4, I.8.4, III.6.3, trad., Cerf.

Études

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  • Marguerite Harl, "La préexistence des âmes dans l'œuvre d'Origène", in Origeniana Quarta (1985), 1987.
  • Lodi Nauta, "The Preexistence of the Soul in Medieval Thought", Recherches de théologie ancienne et médiévale, 63 (1996), p. 93-116.

Voir aussi

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Articles connexes

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