En analyse fonctionnelle, une paire duale ou un système dual désigne un couple d'espaces vectoriels muni d'une forme bilinéaire non dégénérée.

En analyse fonctionnelle, l'étude des espaces vectoriels normés nécessite parfois d'analyser sa relation avec son dual topologique, qui est l'espace vectoriel formé de toutes les applications linéaires continues définies sur l'espace de départ. Une paire duale généralise ce concept, la dualité étant exprimée grâce à une application bilinéaire. À partir de cette application bilinéaire, on peut utiliser des semi-normes pour construire une topologie polaire (en) sur les espaces vectoriels et en former des espaces localement convexes, qui sont la généralisation des espaces vectoriels normés.

Définitions modifier

Soient   et   deux espaces vectoriels sur un même corps commutatif  . Soit   le dual algébrique de   et   celui de   (tout au long du présent article on suppose l'axiome du choix vrai).

Définition (forme bilinéaire non dégénérée) : Soit   une forme bilinéaire. Elle induit deux applications linéaires

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L'application bilinéaire   est dite :

  • non dégénérée à gauche si   est injective,
  • non dégénérée à droite si   est injective,
  • non dégénérée si   est non dégénérée à gauche et à droite.

Définition (paire duale) : Soient   et   deux espaces vectoriels sur un même corps commutatif  . Soit   une forme bilinéaire. On dit alors que X et Y sont mis en dualité par  . Si de plus   est non dégénérée :

  •   et   sont dits être en dualité (ou encore être mis en dualité séparante),
  • on écrit   au lieu de  ,
  • le triplet   est dit être une paire duale[1],
  • l'application bilinéaire   est dit être un appariement dual.

Deux éléments   et   sont orthogonaux si

 .

Deux ensembles   et   sont orthogonaux si toute paire d'éléments de   et   sont orthogonaux.

Paires duales faibles et fortes modifier

Définition (paire duale forte) : Soit   une paire duale. L'appariement dual   induit deux applications

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La paire duale   est dite forte[2] (et l'appariement dual dit fort) lorsque ces deux dernières applications sont surjectives. Une paire duale qui n'est pas forcément forte (c.-à-d. d'appariement dual pas forcément fort) est dite faible.

Remarque : En utilisant le fait que l'injection naturelle   de   dans son bidual algébrique   est surjective si et seulement si   est de dimension finie[3], il est aisé de démontrer qu'une paire duale est forte si et seulement si   et   sont de dimension finie. Selon le contexte, cette dernière (proto-)définition de paire duale forte peut être modifiée (en considérant la surjectivité vers certains sous-espaces de   et  ) pour rendre compte de propriétés plus subtiles d'une paire duale donnée (cf. exemple 3 ci-dessous).

Exemples modifier

Exemple 1 : Soit   un espace vectoriel (ou bien un module sur un anneau) et   son dual algébrique. Considérons l'application bilinéaire

 

correspondant l'accouplement de dualité entre   et  . Il lui correspond deux applications linéaires

 
 

La première application   est l'identité sur   (et est donc injective). La seconde application   est l'injection naturelle de   dans son bidual algébrique  . Cette dernière application est injective car   sépare les points de  , i.e. pour tout   il existe   t.q.   (ceci est dû à l'axiome du choix). Ce faisant,   est non dégénérée et est un appariement dual, dit appariement naturel (ou appariement dual canonique ou encore crochet de dualité), entre   et son dual algébrique  .

Exemple 2 : Soit   une paire duale. Alors le triplet   est une paire duale où  .

Exemple 3 : Soit   un e.v.t. localement convexe sur un corps commutatif   et soit   son dual topologique. Considérons l'application bilinéaire

 

correspondant à l'accouplement de dualité entre   et  . À l'application bilinéaire   correspondent deux applications

 
 

La première est l'inclusion canonique de   en  . Donnons à   la topologie  . Puisqu'à  , l'application linéaire   est  -continue et que la topologie   est plus fine que celle  ,   repose en   le bidual topologique de l'espace localement convexe  . En considérant les co-restrictions

 
 

on voit alors que   est l'identité sur   (i.e. est un isomorphisme) et que   est l'inclusion naturelle de   dans son bidual topologique   (ce qui est injectif par le théorème de Hahn-Banach sur les espaces localement convexes). Il suit que le triple   est une paire duale. En particulier, cette paire duale sera forte si l'injection naturelle   est surjective (i.e. si   est semi-réflexif).

Exemple 4 : Un espace de suites ℓp   et son beta-dual (en)   associés à l'application bilinéaire définie par

 

forme une paire duale.

Exemple 5 : Soit   une variété lisse et réelle de dimension finie  . Soit   l'espace des  -formes différentielles réelles à support compact sur  . Soit

 

Alors le triple   est une paire duale.

Références modifier

(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Dual pair » (voir la liste des auteurs).
  1. (en) Hans Jarchow, Locally convex spaces, Springer, (1re éd. 1981) (lire en ligne), p. 145-146.
  2. (en) R. Abraham, J. E. Marsden et T. Ratiu, Manifolds, Tensor Analysis, and Applications, Springer, , p. 103.
  3. (en) Halmos, Paul R., Finite-Dimensional Vector Spaces (2nd Edition), New York/Heidelberg/Berlin, Princeton, NJ: Van Nostrand, , 199 p. (ISBN 0-387-90093-4), p. 25, 28.

Voir aussi modifier