Lithopédion
Le lithopédion est un fœtus issu d'une grossesse extra-utérine non arrivée à terme, et qui est mort sans avoir été expulsé, sachant que celui-ci n'a pas été diagnostiqué durant cette période. Il s'ensuit une calcification et une tolérance pouvant dépasser un demi-siècle. Les cas de lithopédion sont très rares et, historiquement, connus et identifiés depuis 1678. Aujourd'hui, ceux-ci surviennent généralement dans un milieu socioculturel défavorisé non suivi médicalement (absence d'échographie).
Description et symptômes
modifierLe lithopédion (« enfant de pierre[1] » ; du grec λίθος (líthos), « pierre », et παιδίον (paidíon), « petit enfant »[2]), forme rare au diagnostic difficile, représente 1,5 à 2 % des grossesses ectopiques. Il est le résultat de l'évolution d'une grossesse extra-utérine ancienne qui a involué puis qui s'est calcifiée au fil du temps[3].
Généralement, la patiente concernée ne se plaint d'aucun signe ou symptôme éventuel susceptible d'indiquer la présence d'un fœtus calcifié dans son abdomen[4].
Il ne faut pas confondre les cas de lithopédion avec les cas de fœtus in fœtu.
Cas historiques
modifierL'enfant pétrifié le plus ancien connu
modifierLe lithopédion le plus ancien connu a été découvert par des archéologues et aurait environ 3 100 ans[5].
L'enfant pétrifié de Sens
modifierUn cas célèbre est celui de l'enfant pétrifié de Sens (1582).
L'enfant pétrifié de Toulouse
modifierUne femme du XVIIe siècle dont l'état de grossesse a perduré 25 ans a livré après sa mort à l'autopsie (en 1678) un lithopédion décrit par des médecins de l'époque[6].
L'enfant pétrifié de Leinzell
modifierL'enfant pétrifié de Leinzell aurait dû naître en 1674[7]. Sa mère, Anna Mullern (ou Müller), subit ses contractions pendant sept semaines sans que l'enfant pût venir au monde. Malgré ce bébé pétrifié qu'elle continua de garder en elle, elle accoucha encore par la suite d'un fils et d'une fille.
Elle chargea le médecin du lieu, le Dr Wohnliche, ainsi que le barbier-chirurgien Knauffen (ou Knaus) de Heubach d'ouvrir son corps après sa mort et d'en extraire l'enfant[8]. Cependant la femme survécut à son médecin et atteignit 91 ans, selon l'Université de Tübingen[7], et 94 selon Bondeson[9], si bien que le barbier-chirurgien l'autopsia sans assistance médicale. C'est seulement après qu'un lithopédion bien conservé se fut montré que l'on appela le médecin, Johann Georg Steigerthal, qui rédigea la première description et fit le dessin de l'enfant pétrifié de Leinzell.
Contrairement à l'enfant pétrifié de Sens celui d'Anna Mullern (ou Müller) a été conservé et se trouve maintenant à Tübingen.
Fœtus de Costebelle
modifierL'hypothèse du lithopédion a pu être évoquée comme la seule alternative au diagnostic de syphilis congénitale précoce du fœtus de Costebelle[10] (Rothschild et al, 1993) malgré quelques invraisemblances (elle n'explique pas les altérations in vivo du fœtus)[11].
Cas modernes dans le Monde
modifierAfrique
modifierEn 2002, une Marocaine de 75 ans[12] qui souffrait de douleurs abdominales découvre qu'elle a en elle un fœtus fossilisé vieux de 46 ans[13], de même pour une Sud-Africaine de 80 ans venue consulter pour une sévère douleur abdominale, et qui portait en fait un lithopédion depuis 40 ans[14].
Amérique du Sud
modifierEn 2013, lors d'une radiographie abdominale, une Colombienne de 84 ans s'est découverte enceinte depuis 40 ans d'un fœtus présentant un degré d'évolution de 32 semaines[15],[16]. En 2015, des médecins ont trouvé une masse dans l’utérus d'une Chilienne de 91 ans, Estela Meléndez. Cette masse était en vérité un fœtus qui s'y trouvait depuis plus de six décennies[17].
Diagnostic
modifierIl est aujourd'hui repéré par échographie, puis confirmé par la radiographie[18].
Photos et dessins
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Représentation d'un lithopédion en 1899.
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Lithopédion.
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Fœtus lithopédien.
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Représentation d'un lithopédion au XVIIIe siècle.
Le lithopédion au cinéma, à la télévision et dans la littérature
modifierAu cinéma
modifierÀ la télévision
modifier- Nip/Tuck (série américaine), saison 3 : dans l’épisode no 13, Joy Kringle (La femme du Père Noël en français), les chirurgiens trouvent un fœtus décédé dans le corps de Joy, alors qu’ils effectuent une liposuccion.
- New York, section criminelle, saison 4 : dans l’épisode no 6, Pièces détachées, une femme est tourmentée par la mort in utero de sa fille survenue une trentaine d'années auparavant. Le terme « bébé de pierre » est utilisé pour la calcification du fœtus par l'inspecteur Eames.
- Saison 1 de Doc : dans l’épisode no 9 une jeune femme entrant dans les ordres, sœur Cécile, est admise pour des douleurs abdominales, à la suite d'une échographie, les médecins découvrent que ce n’est pas une tumeur mais un « embryon calcifié »
- Stat (série télévisée québécoise) Saison 2 Épisode 68: Une femme se plaint de douleurs abdominales, à la suite d'une échographie abdo, elle entre en salle d’opération pour une fissure de l’estomac. Le chirurgien constate alors le fœtus et le retire. Sous le choc, le femme apprend la présence de cet enfant en salle de réveil.
Dans la littérature
modifier- L'enfant pétrifié, de Valérie Lys, Édition du Palémon
- Roman policier dont la trame tourne autour d'un lithopédion et la vente de celui-ci par un brocanteur, retrouvé assassiné[19].
- Sous d'autres formes nous reviendrons, de Claro, Editions du Seuil, coll. Fiction & Cie
- Le lithopédion de Sens joue un rôle certain dans le chapitre 3.
Dans la musique
modifier- Lithopédion album qui est sorti le sous le label 92i , du rappeur, chanteur, auteur-compositeur belge, Damso.
- « J’aurai aimé vivre et mourir dans le ventre de ma mère comme un lithopédion » paroles extraites de la chanson innenregistrable du rappeur français Despo Rutti.
Notes et références
modifier- Victor Wallich, Éléments d'obstétrique, G. Steinheil, , 2e éd., 718 p. (lire en ligne), p. 241.
- Pierre Larousse et Claude Augé (dir.), Larousse universel en 2 volumes, t. 2, Larousse, , 1292 p. (lire en ligne), p. 72.
- Site du National Center for Biotechnology Information, page sur la grossesse abdominale momifiée.
- Site Vulgaris-médical, page sur les symptômes du foetus.
- (en) BM Rothschild, C Rothschild et LC Bement, « Three-millennium antiquity of the lithokelyphos variety of lithopedion », American journal of obstetrics, vol. 169, no 1, , p. 140-141 (2 ref.) (ISSN 0002-9378, résumé).
- H Stofft, « Un lithopédion en 1678 », Histoire des sciences médicales, vol. 20, no 3, , p. 267-285 (résumé).
- (de) « Steinkind von Leinzell », unimuseum.uni-tuebingen.de.
- Le nom de la mère, comme celui du barbier, nous ont été transmis sous des formes différentes. Bondeson, qui utilise les formes Mullern et Knauffen, a probablement été trompé par l'écriture penchée et la Kurrentschrift. Dans les archives locales de Gmünd et dans un article de presse, on trouve à peu près le nom de Müller ; en outre l'article de presse appelle le barbier Knaus. Sur l'âge de la femme et sur le sexe des deux enfants nés ensuite les indications diffèrent.
- (en) J. Bondeson. The earliest known case of a lithopaedion. In: Journal of the Royal Society of Medicine. Volume 89, Numéro 1, janvier 1996, p. 13–18, (ISSN 0141-0768). . PMC 1295635.
- Il s'agit d'un squelette daté du IVe siècle présentant des lésions osseuses d'allure infectieuse. Il est âgé d'environ 7 mois. Il comporte des lésions constructrices et destructrices. Une radiographie a pu être réalisée permettant de voir des bandes claires méthaphysaires et des destructions métaphysaires (ostéochondrite) au niveau des os longs.
- Jean-Pierre Brun, Olivier Dutour et György Pálfi, « L'antiquité des tréponématoses dans l'Ancien Monde: évidences historiques, archéologiques et paléopathologiques », Bulletins et Mémoires de la Société d'Anthropologie de Paris, vol. 10, no 3, , p. 375–409 (lire en ligne, consulté le )
- Elle s'appelait Zahra Aboutalib à en croire un grand nombre de sites comme celui de Doctor's Review.
- « Grossesse la plus longue ».
- (en) N Lachman, KS Satyapal, JM Kalideen et T.R. Moodley, « Lithopedion: a case report », Clin. Anat., no 14, , p. 52–54 (DOI 10.1002/1098-2353(200101)14:1<52::AID-CA1009>3.0.CO;2-H, résumé).
- (es) « Mujer descubrió luego de 40 años que estaba embarazada », sur eltiempo.com, El Tiempo, .
- « Un fœtus de 40 ans retrouvé dans une femme âgée de 84 ans », sur Le Figaro, .
- Site maxisciences, page sur Estela Meléndez.
- (en) Charles J. Fagan, Melvyn H. Schreiber, Eugenio G. Amparo, « LithopedionStone Baby », Arch Surg., vol. 115, no 6, , p. 764-766 (DOI 10.1001/archsurg.1980.01380060062018, résumé).
- Site les lectures de l'oncle Paul, page sur "l'enfant pétrifié, Série commissaire Velcro.
Voir aussi
modifierArticles connexes
modifierLiens externes
modifier- « Un enfant calcifié », sur stethonet.org
- M. Gozlan, « Un fœtus pétrifié découvert dans le ventre d’une femme décédée à 87 ans », sur lemonde.fr, (consulté le )
Bibliographie
modifier- RD N'Gbesso, A Coulibaly, G Quenum, AM N'Goan (1998) « Une étiologie rare de calcifications abdominales : le lithopédion » J Radiol.
- (en) R. Passini, R. Knobel, M. A. Parpinelli, B. G. Pereira, E. Amaral, F. G. de Castro Surita, C. R. de Araújo Lett. « Calcified abdominal pregnancy with eighteen years of evolution: case report » São Paulo medical journal = Revista paulista de medicina. vol. 118, Numéro 6, , p. 192–194, (ISSN 1516-3180). .
- (en) J. A. Perper: Time of Death and Changes after Death. Part 1: Anatomical Considerations. In: W. U. Spitz, D. J. Spitz (Éd.): Spitz and Fisher’s Medicolegal Investigation of Death. Guideline for the Application of Pathology to Crime Investigations. Charles C. Thomas, Springfield, Illinois, 2006, p. 118.
- (de) H.P. Schmitt, W. Rosendahl. Das Heidelberger Lithopädion („Foetus Ossei") – zur Mumifizierung eines menschlichen Fötus in der Bauchhöhle durch Verknöcherung. In: A. Wieczorek, W. Rosendahl, H. Wiegand (Éd.): Mumien und Museen. Mannheimer Geschichtsblätter, Numéro spécial 2, Heidelberg 2009, p. 135-138.