Justification (théologie)

concept dans la théologie chrétienne

Dans la théologie chrétienne, la justification est la transformation du pécheur en serviteur juste de Dieu. La doctrine de la justification de l'homme par Dieu exprime en même temps l'exigence radicale que Dieu a envers l'homme et le salut radical que Dieu donne à l'homme qui ne répond pas à cette exigence. La justification annonce le retournement de la condamnation en une grâce, quand Jésus-Christ meurt en tant que rédempteur pour racheter les péchés de l'homme. Le thème de la justification est au cœur de la sotériologie issue de la Bible chrétienne[1].

Andrés de Vega, De iustificatione doctrina universa, 1572

La doctrine de la justification par la foi a joué un grand rôle au moment de la Réforme protestante, lorsque Martin Luther, préoccupé par son salut et insatisfait des réponses de l'Église, a réévalué l'importance de l'Écriture en lisant l'épître de Paul aux Romains.

Le Nouveau Testament modifier

L'apôtre Paul de Tarse définit les hommes comme étant « justifiés par sa grâce » (Romains 3,24)[2]. Dans la pensée de l'apôtre, la justification est imméritée. La justification est le processus par lequel Dieu décide de sauver un pécheur (un transgresseur de sa Loi) en dehors de tout mérite de sa part. L'Écriture déclare qu'il n'y a pas de juste, pas même un seul (Romains 3,10), et donc l’autojustification est une impossibilité absolue.

Dieu seul pouvant justifier un pécheur, c'est Lui aussi qui a dû en fournir le moyen. Il l'a fait, continue l'apôtre Paul « par le sang versé par le Christ ». La justification n'est pas une simple amnistie. Elle repose sur un acte de justice de Dieu qui, en Jésus-Christ, assume lui-même la peine et la condamnation liée au péché.

« Lorsque Dieu justifie des pécheurs, il ne déclare pas que des pécheurs coupables sont de braves gens, ni qu'ils sont exempts de péché ; Il les proclame juridiquement justes, c'est-à-dire libres de toute condamnation à l'égard de la loi transgressée, parce qu'il a lui-même, en son Fils, subi la sanction que méritaient leurs transgressions de la loi » (John Stott).

La foi comme justification modifier

 
La Loi et la Grâce, par Lucas Cranach l'Ancien (v. 1529), Musée ducal de Gotha.

Le chrétien est justifié par la foi et non par les œuvres, selon l'apôtre Paul[2]. L'opposition entre ces deux termes (fides et acta), flagrante depuis le concile de Trente, s'est estompée avec les travaux de Joseph Ratzinger, en tant que théologien, qui s'inscrivent dans la lignée de Vatican II[3] : dans sa conception de la justification, les chrétiens sont certes justifiés par la foi, mais aussi par les œuvres. Sous le pontificat de Jean-Paul II et de Benoît XVI, catholiques et protestants ont fini par trouver un terrain d'entente qu'ils ont officialisé par des accords écrits en 1999 et 2006[4].

Catholicisme modifier

John Henry Newman a donné une réponse nuancée[5]. Dans ses Lectures on Justification (1838), il considère que la justification est le fruit de la foi mais aussi de la grâce : la grâce de Dieu contribue à nous faire vivre avec Dieu, nos actes, nos actions révèlent alors la présence de Dieu. La foi conduit à agir conformément à la volonté de Dieu. Ainsi, pour Newman, la justification est le résultat de la grâce de Dieu, qui nous permet d'agir par la foi conformément à la volonté de Dieu, permettant la justification des personnes par les actes mais surtout par l'action de la grâce en nous.

L'Eglise catholique enseigne, dans son Catéchisme, que la justification provient de la grâce de l'Esprit Saint qui nous communique, par la foi et par le baptême, la justice même de Dieu (§1987). La justification a été « méritée par la Passion du Christ » (§1992). Elle est l'oeuvre de Dieu, à laquelle le chrétien répond en s'y associant ; c'est pourquoi

Le mérite de l’homme auprès de Dieu dans la vie chrétienne provient de ce que Dieu a librement disposé d’associer l’homme à l’œuvre de sa grâce. L’action paternelle de Dieu est première par son impulsion, et le libre agir de l’homme est second en sa collaboration, de sorte que les mérites des œuvres bonnes doivent être attribués à la grâce de Dieu d’abord, au fidèle ensuite. Le mérite de l’homme revient, d’ailleurs, lui-même à Dieu, car ses bonnes actions procèdent dans le Christ, des prévenances et des secours de l’Esprit Saint. (§2008)

Le mérite est ainsi la fructification des dons du Seigneur. La grâce est à l'origine du processus de justificiation, elle est présente à chaque étape du processus. Dieu seul est l'auteur de la Grâce.

Protestantisme modifier

 
La doctrine de la justification, de Luther, corrigé par P. Blickle.

Dans le protestantisme, dont le christianisme évangélique, la grâce et la foi sont intimement liées, car la foi a pour seul but de s'emparer (s'approprier) de ce que la grâce offre gratuitement[6]. La grâce de Dieu est la source de la justification, le sang versé par le Christ en est le fondement, et la foi le moyen qui nous unit au Christ et nous donne d'être justifiés. Dieu justifie celui qui croit, non en raison de la valeur de sa foi, mais en raison de la valeur de celui sur qui elle repose[7].

Notes et références modifier

  1. André Dumas (théologien), article « Justification », Encyclopædia Universalis, DVD, 2007.
  2. a et b (en) John Henry Blunt, Dictionary of Doctrinal and Historical Theology, UK, Rivingtons, , p. 388.
  3. La foi et les œuvres
  4. Déclaration commune de 1999 entre le Vatican et l'Église luthérienne.
  5. Jean Honoré, La Pensée de John Henry Newman, Mayenne, Éditions Ad Solem, 2010, p. 124.
  6. Gerald R. McDermott, The Oxford Handbook of Evangelical Theology, Oxford University Press, UK, 2013, p. 224
  7. Tyron Inbody, The Faith of the Christian Church: An Introduction to Theology, Wm. B. Eerdmans Publishing, USA, 2005, p. 236

Annexes modifier

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Notions modifier

Histoire modifier

Bibliographie modifier

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