Jean de La Ville de Mirmont

poète et romancier français
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Jean de La Ville de Mirmont
Biographie
Naissance
Décès
(à 27 ans)
Verneuil
Nationalité
Activité
Père
Mère
Sophie Malan (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
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Conflit
Distinctions
signature de Jean de La Ville de Mirmont
Signature

Jean de La Ville de Mirmont (Yvon, Alexandre, Jean, pour l'état civil), né à Bordeaux le et mort pour la France le 28 ou [1] à Verneuil sur le Chemin des Dames[2], est un poète et homme de lettres français.

acte de naissance de jean de la ville de mirmont
Acte de naissance de Jean de La Ville de Mirmont.

Biographie modifier

 
Plaque avec citation sur la rive droite de Bordeaux.

Le jeune poète et le fonctionnaire modifier

Jean de La Ville de Mirmont est né dans une famille protestante bordelaise. C’était le fils d'Henri de La Ville de Mirmont et de Sophie Malan, qui eurent six enfants. Son père, enseignant la littérature latine à la faculté des Lettres de Bordeaux reconnu pour ses traductions de Cicéron, fut conseiller municipal, adjoint au maire de Bordeaux.

En 1904, à 18 ans, Jean de La Ville entre à la Faculté des lettres de Bordeaux. Il en ressortira avec une licence. En 1906, il devance d'un an son appel sous les drapeaux. Il s'engage au 57e régiment d'infanterie[3]. Il découvre qu'il a un goût prononcé pour la vie militaire. Deux ans plus tard, il est réformé pour raison de santé[4].

En 1908, à 22 ans, Jean de La Ville monte à Paris ; il y prépare sans passion des concours administratifs. A partir de 1909, il se lie d'amitié dans la capitale avec François Mauriac. Les deux jeunes hommes avaient suivi les mêmes cours à la Faculté de Bordeaux mais étaient restés à distance l'un de l'autre. Trente ans plus tard, dans son livre La rencontre avec Barrès, François Mauriac explique que, dans sa jeunesse, "deux Frances partout s'affrontaient", l'une de gauche, laïque, l'autre de droite (la sienne), catholique. Il constatait, sur les bancs de la Faculté, que Jean n'avait pas grandi dans la même France que lui. Mais Mauriac précise aussitôt dans son texte : "J'étais sensible à sa grâce, à cet air d'enfance qu'il avait gardé ; pourtant je n'osais aller au-delà des poignées de mains et des propos ordinaires. Paris devait nous réunir[5]." En effet, une franche amitié se noue entre les deux jeunes hommes, l'un et l'autre férus de littérature et s'adonnant à l'écriture. C'est Jean de La Ville qui inspire à François Mauriac le titre de son premier recueil de vers Les Mains jointes[6]. "Grand jeune homme svelte et élégant, aux cheveux noirs, au teint mat[7]", Jean de La Ville occupe un emploi de fonctionnaire à la préfecture de la Seine où il est chargé de l'assistance aux vieillards.

Entre 1912 et 1914, la vie parisienne de Jean de La Ville est doublée d'une intense créativité littéraire. Il écrit des poèmes et publie des contes dans des revues d'avant-guerre. Il rédige un court roman, Les dimanches de Jean Dézert, qu'il fait imprimer au début de 1914. Mais les événements, à l'approche de la guerre, vont l'amener à devoir cesser son activité littéraire.

Le sergent à la guerre modifier

Jean de La Ville de Mirmont écrit à ses parents, à la fin du mois de juillet 1914, qu'il est résolu à s'engager s'il ne peut pas rentrer dans la réserve avec son ancien grade. Il se présente devant les bureaux de recrutement[8]. Dans un premier temps, il est refusé pour cause de vue trop basse et de trop grande maigreur. Début septembre, il est finalement mobilisé et il est rattaché, avec le grade de sergent, au 57e régiment d'infanterie de Libourne. Pendant les quelques jours où il est tenu de séjourner dans cette ville, sa mère vient lui rendre visite plusieurs fois[9].

Le 26 septembre 1914, le régiment part vers le front dans des wagons à bestiaux. Dans cette période, Jean de La Ville tient un carnet de route. Dans le courant du mois d'octobre, sa compagnie est soumise à l'épreuve du feu. Mais Jean, fier de servir sa patrie, affiche dans les lettres qu'il envoie régulièrement à ses parents un excellent moral et une bonne santé. Il y fait part de sa transformation physique : il est "barbu comme un gorille" et se qualifie d'"être sauvage et rude (...), couvert de boue[10]". Jamais il ne se plaint, ce destin ayant pour lui un sens. Mais, à l'instar de tous les soldats qui l'entourent, l'idée de la mort, qu'il semble ne pas redouter, ne le quitte plus. Dans la toute dernière lettre à sa mère, il écrit : "Au fond, je suis le plus heureux de vous tous car, si je suis emporté, j'espère ne pas même m'en apercevoir[11]."

Quatre jours plus tard, le 28 novembre, il meurt, enseveli par un obus sur le Chemin des Dames. On retrouve sur lui un morceau de papier sur lequel il est écrit : "Si je meurs, faire dire à ma mère que ma dernière pensée aura été pour elle[12]." En 1920 son corps est exhumé puis rapatrié de l'Aisne par sa famille; il repose dans le caveau familial H.42 du cimetière protestant de la rue Judaïque à Bordeaux.

Œuvres modifier

Jean de La Ville de Mirmont est un poète post-romantique, influencé par Baudelaire et Laforgue, qui chante la mer et les vaisseaux, l'ennui du port désert de Bordeaux et ses « rêves de grands départs inassouvis ».

Notes et références modifier

  1. La fiche de l'armée mentionne bien le 29 novembre, des autres sources le 28. Voir aussi cette discussion sur la date de décès de Jean de La Ville de Mirmont.
  2. « Fiche individuelle sur "La Mémoire des hommes" », sur La mémoire des hommes, (consulté le ).
  3. Jean de La Ville de Mirmont, Lettres de guerre, préface d'André Le Breton, Imprimerie Gounouilhou, Bordeaux, 1917, p. 6.
  4. Jean de La Ville de Mirmont, Les dimanches de Jean Dézert, préface de Jacques Sargos, L'Horizon Chimérique, Bordeaux, 1989, p. 13.
  5. François Mauriac, La rencontre avec Barrès (1945), La Table ronde, Paris, 1994, p. 47.
  6. François Mauriac, La rencontre avec Barrès, p. 52.
  7. Jean de La Ville de Mirmont, Lettres de guerre, préface, p. 6.
  8. Lettres de guerre, lettre du 28 juillet 1914, p. 10.
  9. Lettres de guerre, p. 62.
  10. Lettres de guerre, lettre du 26 octobre 1914, p. 97.
  11. Lettres de guerre, lettre du 24 novembre 1914, p. 122.
  12. Lettres de guerre, p. 87.
  13. « Julien Clerc chante L'horizon chimérique », (vidéo de 3:39 min de la mise en chanson du 14e poème du recueil), sur youtube.com, (consulté le )
  14. « Paroles de L'horizon Chimérique, chanson de Julien Clerc », sur paroles-musique.com (consulté le )

Voir aussi modifier

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Bibliographie modifier

  • « Jean de la Ville de Mirmont, voyageur de troisième classe », in Patrice Delbourg, Les Désemparés - 53 portraits d'écrivains, Le Castor Astral, 1996
  •  Le jeune homme éternel », article de Jérôme Garcin, Le Nouvel Observateur du , p. 94
  • Mathieu Larnaudie, Strangulation, Gallimard, 2008 Roman qui met en scène un personnage largement inspiré par la vie de Jean de la Ville de Mirmont.
  • Jérôme Garcin, Bleus horizons, Gallimard, 2013 Roman évoquant à travers les souvenirs d'un imaginaire compagnon d'armes, la vie et le destin brisés de Jean de La Ville de Mirmont.
  • « Les départs inassouvis de Jean de La Ville de Mirmont (1886-1914) », article de Jean-Noël Cordier, revue de l'AMOPA, n° 207, janvier, février, , p. 5-8
  • Cyril Piroux, Le Roman de l'employé de bureau ou l'art de faire un livre sur (presque) rien, Éditions universitaires de Dijon, coll. « Écritures », 2015
  • Les illustres de Bordeaux : catalogue, vol. 1, Bordeaux, Dossiers d'Aquitaine, , 80 p. (ISBN 978-2-84622-232-7, présentation en ligne)

Liens externes modifier