Initiative populaire « pour une durée du travail réduite »

Initiative populaire fédérale
Pour une durée du travail réduite

Déposée le
Déposée par Union syndicale suisse

Contre-projet non
Votée le
Participation 58,26 %
Résultat : rejetée[NB 1]
Par le peuple non (par 74,6 %)
Par les cantons non (par 20 6/2)[NB 2]

L'initiative populaire « pour une durée du travail réduite » est une initiative populaire fédérale suisse, rejetée par le peuple et les cantons le .

Contenu modifier

L'initiative propose d'ajouter un article 34a à la Constitution fédérale pour limiter les durées maximales de travail à 1 872 heures annuellement et 48 heures hebdomadairement ainsi que pour limiter les heures supplémentaires à 100 heures par année.

Le texte complet de l'initiative peut être consulté sur le site de la Chancellerie fédérale[1].

Déroulement modifier

Contexte historique modifier

La première loi européenne visant à limiter le temps de travail est adoptée en 1848 dans le canton de Glaris ; elle limite à 15 heures par jour (incluant la pause de midi) le travail des adultes dans les filatures de coton[2]. Lors de l'instauration de l'État fédéral de 1848, le domaine de la protection des travailleurs reste une prérogative cantonale ; si certains cantons, tels ceux de Bâle-Ville ou du Tessin réduisent progressivement la durée quotidienne de travail à 12 heures, d'autres ne légifèrent pas sur cette question, créant ainsi un déséquilibre concurrentiel que ne parviennent pas à régler différentes tentatives de concordat intercantonal[3].

La Confédération, saisie de cette affaire, édicte alors la loi du sur le travail dans les fabriques qui limite la durée normale du travail pour tous les ouvriers de fabrique à 11 heures par jour[4] ; cette loi est approuvée par le peuple le [5], puis révisée en 1914 pour fixer la limite au travail hebdomadaire à 59 heures[6]. Alors que la semaine de 48 heures s'impose un peu partout en Europe, une nouvelle modification de cette loi (dite « Loi Schulthess ») qui propose d'augmenter la durée maximum du travail à 54 heures par semaine et 10 heures par jour, est refusée en votation le [7].

Après la Seconde Guerre mondiale, l'Alliance des Indépendants dépose une initiative pour réduire le temps de travail hebdomadaire à 44 heures ; Cette initiative est rejetée en votation populaire le [8]. Une année après le rejet de cette initiative, l'union syndicale suisse en lance une autre sur le même thème[9] mais la retire à la suite d'une nouvelle modification de la loi sur le travail qui fixe, en 1964 la limite hebdomadaire à 46 heures[10].

Entre 1964 et 1975, plusieurs motions fédérales vont réduire le temps de travail dans différentes professions. C'est par exemple le cas pour les conducteurs professionnels de véhicules automobiles en 1966, les entreprises de transport publics en 1971 et les entreprises industrielles en 1975 ; dans ce dernier cas, la durée hebdomadaire maximale est descendue à 45 heures. Dans le même temps, les Organisations progressistes de Suisse déposent une initiative visant à généraliser les 40 heures ; cette proposition, tout comme les précédentes, est refusée en votation populaire le [11]. Enfin, en 1984, l'Union syndicale suisse dépose une nouvelle initiative « pour la réduction de la durée du travail » qui demande également la réduction du temps de travail à 40 heures hebdomadaires ; toute comme les précédentes, elle est refusée en votation le [12].

En lançant cette nouvelle initiative, l'Union syndicale suisse vise trois objectifs : l'élimination du chômage en forte progression au milieu des années 1990, une plus juste répartition entre les hommes et les femmes des activités en augmentant le temps libre à consacrer à la famille et l'amélioration générale de la qualité de la vie[13]

Récolte des signatures et dépôt de l'initiative modifier

La récolte des 100 000 signatures débute le . L'initiative est déposée le de l'année suivante à la Chancellerie fédérale, qui constate son aboutissement le [14].

Discussions et recommandations des autorités modifier

Le Parlement[15] et le Conseil fédéral[3] recommandent le rejet de l'initiative. Dans son message aux Chambres fédérales, le gouvernement réitère son avis, déjà exprimé lors des votations précédentes sur le même sujet, que la réduction du temps de travail doit être le résultat d'une négociation entre les différents partenaires sociaux et ne doit pas être inscrite dans la Constitution. Il estime également qu'une telle baisse, loin de diminuer le taux chômage, risque d'être dommageable pour l'économie nationale en général et spécialement pour les PME.

Les recommandations de vote des partis politiques sont les suivantes[16] :

Parti politique Recommandation
Démocrates suisses non
Parti chrétien-social oui
Parti démocrate-chrétien non
Parti évangélique non
Parti libéral non
Parti de la liberté non
Parti radical-démocratique non
Parti socialiste oui
Union démocratique du centre non[NB 3]
Union démocratique fédérale non
Les Verts oui

Votation modifier

Soumise à votation le , l'initiative est refusée par la totalité des 20 6/2 cantons[NB 2] et par 74,6 % des suffrages exprimés[17]. Le tableau ci-dessous détaille les résultats par canton[18] :

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. Selon l'article 139 de la Constitution, une initiative proposée sous la forme d'un projet rédigé doit être acceptée à la fois par la majorité du peuple et par la majorité des cantons. Dans le cas d'une initiative rédigée en termes généraux, seul le vote du peuple est nécessaire.
  2. a et b Le premier chiffre indique le nombre de cantons, le second le nombre de cantons comptant pour moitié. Par exemple, 20 6/2 se lit « 20 cantons et 6 cantons comptant pour moitié ».
  3. La section cantonale de Berne de l'UDC s'est prononcée en faveur de l'initiative.

Références modifier

  1. « Texte de l'initiative populaire fédérale », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  2. Bernard Degen, « Durée du travail » dans le Dictionnaire historique de la Suisse en ligne, version du .
  3. a et b « Message du Conseil fédéral »  (2 août 2000) de la Feuille fédérale référence FF 2000 I 3776
  4. « Loi fédérale concernant le travail dans les fabriques. »  (25 avril 1877) de la Feuille fédérale référence FF 1877 2 113, page 118
  5. « Votation no 17 Tableau récapitulatif », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  6. « Loi sur les fabriques. Revision »  (28 janvier 1914) de la Feuille fédérale référence FF 1914 1 187
  7. « Votation no 98 Tableau récapitulatif », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  8. « Votation no 188 Tableau récapitulatif », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  9. « Initiative populaire 'pour la réduction de la durée du travail' » (consulté le )
  10. « LOI FÉDÉRALE sur le travail dans l'industrie, l'artisanat et le commerce (Loi sur le travail) »  (19 mars 1964) de la Feuille fédérale référence FF 1964 I 567
  11. « Votation no 264 Tableau récapitulatif », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  12. « Votation no 354 Tableau récapitulatif », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  13. Nouveau partage du temps de travail, Union syndicale suisse, , cité dans le message du Conseil fédéral
  14. « Initiative populaire fédérale 'pour la réduction de la durée du travail' », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  15. « Arrêté fédéral »  (3 juillet 2001) de la Feuille fédérale référence FF 2001 I 2737
  16. Consignes de vote des partis actuellement représentés au parlement et des organisations
  17. « Votation no 486 Tableau récapitulatif », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  18. « Votation no 486 - Résultats dans les cantons », sur Chancellerie fédérale (consulté le )