Grande Expédition

campagne militaire d’une coalition de peuples celtes autour d’un noyau de Galates

La Grande Expédition est le nom donné à trois campagnes militaires simultanées entreprises en 280 et 279 av. J.-C., contre les royaumes hellénistiques de Thrace et de Macédoine, par des groupes identifiés comme celtiques par les auteurs anciens et les historiens contemporains. Cette expédition a pour conséquence l'installation d'une partie des survivants sur la rive occidentale de la mer Noire, en un lieu non identifié connu sous le nom de royaume de Tylis, tandis que d'autres passent en Anatolie pour s'installer à partir de 272 av. J.-C. dans une région qui prend alors le nom de Galatie.

Mouvements des groupes celtes de la Grande Expédition.

Le contexte historique

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Selon les sources antiques, ce sont des migrations qui sont à l’origine de l’extension du monde laténien au IVe siècle av. J.-C., vers l’Europe de l’Est jusqu'à la cuvette des Carpates et vers le Nord de l’Italie[1]. Dans la légende rapportée par Tite-Live, ces migrations sont menées par deux neveux d’Ambigatos, roi des Bituriges Cubes[2]. Si certains historiens ou archéologues contemporains ont un temps accordé du crédit à ce récit, son caractère légendaire est quasi unanimement admis par les chercheurs, qui situent aujourd'hui en Europe centrale et de l'Est les groupes celtiques participants à la Grande Expédition[3]. Ce phénomène que les historiens nomment « les migrations historiques du IVe siècle av. J.-C. »[4], entraîne au IIIe siècle av. J.-C. ce « monde celtique » à se confronter brutalement au monde hellénistique.

Profitant du désordre politique et des guerres des diadoques après la mort d'Alexandre le Grand, des groupes celtes entreprennent des pillages en Thrace et en Macédoine, mais ces entreprises sont globalement contenues par les différents souverains, comme en où un groupe armé celtique est défait par Cassandre, roi de Macédoine, sur l'Hæmus. Mais en , Lysimaque roi de Thrace et de Macédoine meurt, et son royaume, dont la puissance avait jusque-là contenu les intrusions celtiques, s’effondre. À la suite de cet affaiblissement considérable, les intrusions celtiques prennent une envergure bien plus importante. Ce qui auparavant n’était que des entreprises de pillage devient dès lors des tentatives de conquête de territoires[5].

Histoire

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Représentation supposée d'un Galate, sur un disque en or trouvé dans un des deux tumulus de Bolu (Turquie), IIIe siècle av. J.-C.

L'invasion de la Grèce

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Trois armées accompagnées de femmes et enfants, que l’on suppose parties des Carpates, pénètrent en Grèce. Une première armée, dirigée par Bolgios, attaque la Macédoine par l’Ouest. Bolgios et ses troupes infligent en une sévère défaite à Ptolémée Kéraunos, le nouveau roi de Macédoine. Blessé et capturé, le souverain est exécuté par les vainqueurs. Pourtant, malgré ce début de campagne prometteur, cette première armée s’arrête à cette victoire et fait demi-tour[6]. À l’est, un second front est ouvert par les troupes conduites par Kérethrios, qui attaque la Thrace[6].

Mais l’avancée la plus marquée est l’œuvre d’une troisième armée, commandée par Brennos et Akichorios, qui attaque par le centre. Cette armée envahit d’abord la Dardanie et la Péonie, puis se dirige vers la Grèce. À ce moment une scission a lieu au sein de l’armée, et 20 000 hommes conduits par Léonorios et Lutorios se replient vers l’est. Du reste de l’armée, une partie reste stationnée dans le nord du pays, tandis qu’une autre emmenée par Brennos, que l’on estime composée de 65 000 hommes[7] descend en direction des Thermopyles, avec pour objectif la prise du sanctuaire de Delphes.

La tradition littéraire, soutenue par des données épigraphiques[8], considère que cette expédition contre le grand sanctuaire panhellénique se solde par un échec[9]. Si les auteurs anciens nous ont rapporté un récit fantastique attribuant à l’épiphanie d’Apollon la victoire sur les troupes de Brennos, les raisons de cette défaite sont plus probablement l’hiver et la maladie[10]. Cette bataille a pour conséquence le repli vers la Thrace de cette armée celtique, et le suicide de Brennos.

Selon une légende connue sous le nom d’Or de Toulouse (aurum Tolosanum), Delphes est pillée et dépouillée de son trésor que les Volques Tectosages rapportent dans l’actuelle région de Toulouse. Mais cette version de l'histoire ne résiste ni à l'étude historique et épigraphique[8] ni à l'étude archéométrique. Des études menées sur les torques de Fenouillet, que l'on a un temps assimilés à cette légende de l'Or de Toulouse, ont en effet montré que ces torques étaient composés d'or presque pur. Or, l'or tiré des mines grecques était lui composé en part importante d'électrum.

La fin de la Grande Expédition

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Après l’invasion de l’est de l’Étolie, le groupe celte parti envahir la Grèce met à sac Kallion (Callium). Il finit par être expulsé par Antigone II Gonatas, futur roi Macédoine, victorieux à la bataille de Lysimacheia en 277 av. J.-C. Par la suite, la tradition de la recherche considère que les rescapés s’installent au confluent de la Save et du Danube en se mêlant aux populations autochtones. Cette installation aurait entraîné la création de la fédération des Scordiques[11].

Une partie de l’armée emmenée par Léonoros et Lutorios ayant pénétré en Thrace, prend la direction de la mer Noire sous le commandement de Commontorios. Ce groupe fonde en 277, aux portes de Byzance, le royaume de Tylis qui sera conquis par les Thraces vers 212[12].

Un dernier groupe de Celtes, le plus important, passe au service de Nicomède Ier, roi de Bithynie, qui l'installe en Anatolie. Mais ils attaquent et soumettent au tribut un certain nombre de cités, poussant Antiochos Ier, roi séleucide, à intervenir vers 269[13]. L'armée séleucide défait ces Celtes d'Anatolie à l'issue de la bataille dite « des éléphants » (Antiochos y utilise 16 éléphants de guerre). Les Celtes, appelés Galates par les Grecs, sont dès lors fixés au centre de l'Anatolie et fondent la Galatie.

Notes et références

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  1. Venceslas Kruta, Les celtes, Histoire et dictionnaire, des origines à la romanisation et au christianisme, Paris, Robert Laffont, , 1003 p.
  2. Tite-Live, histoire romaine, V.
  3. Anne-Marie Adam, Stephan Fichtl et Couvenhes, J.-C., Crouzet, S., Péré-Noguès, S. (dir.), « Les Celtes dans les guerres hellénistiques : le cas de la Méditerranée orientale », Pratiques et identités culturelles des armées hellénistiques du monde méditerranéen, Actes du colloque de Tours, 23-24 mars 2007 (IIIrd Hellenistic Warfare),‎ , p. 117-128.
  4. Miklós Szabó, Les Celtes de l’Est. Le second âge du fer dans la cuvette des Carpates, Paris, errance, , 206 p., p. 105.
  5. Venceslas Kruta, Loc. Sit.
  6. a et b Pausanias, Description de la Grèce, X, 19.
  7. Trogue Pompée, Prologues, XXIV, 6.
  8. a et b Salomon Reinach, « L'attaque de Delphes par les Gaulois », Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, no 2,‎ , p. 158-164.
  9. Pausanias, Description de la Grèce, I, 3, 4, X, 19.
  10. Venceslas Kruta, Loc. Sit., p. 493.
  11. Henri Hubert, Les Celtes et l'expansion celtique jusqu'à l'époque de La Tène, Albin Michel à Paris, collection « Évolution de l'humanité », 1989 (ISBN 2-226-00077-1).
  12. Julij Emilnov, « Ancient Texts on the Galatian Royal Residence of Tylis and the Context of La Tène Finds in Southern Thrace. A Reappraisal », Search of Celtic Tylis in Thrace (III c. BC) Proceedings of the Interdisciplinary Colloquim arranged by the National Archaeological Institute and Museum at Sofia and the Welsh department,‎ , p. 67-88.
  13. Will 2003, tome 1, p. 143-144. La datation reste sujette à caution.

Annexes

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Bibliographie

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Articles connexes

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