Gérard Cogan
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Biographie
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Nationalité

Gérard Cogan, de son vrai nom Raymond Gérard Baulard, le dans le 14e arrondissement de Paris et mort le à Courcôme[1], est un maquilleur de cinéma spécialisé dans les effets spéciaux, un peintre et un inventeur français.

Spécialiste des prothèses en matière plastique, il vieillit ou transforme les visages des comédiens pour des productions françaises et parfois américaines. Il est connu pour avoir réalisé le masque bleu-vert du criminel Fantômas, dessiné puis porté par Jean Marais dans les adaptations des années 1960.

Biographie modifier

Gérard Baulard, dit Gérard Cogan, est d'abord peintre à Montmartre à partir de l'entre-deux-guerres[2]. Il peint notamment des quartiers parisiens[3]. Selon ses dires, il parvient à vendre ses toiles au même prix — sinon plus cher — que Maurice Utrillo[3]. Malgré la guerre, il vend une soixante de toiles[3]. Il pratique ensuite la photographie et les appareils de cinéma[3].

Après la Seconde Guerre mondiale, il se tourne vers ce qu'il nomme « la sculpture animée », destinée aux effets spéciaux de cinéma[2]. L'accès à cette industrie lui est d'abord difficile[2]. Il travaille brièvement sur des décors[2]. Afin de faire connaître ses talents de truqueurs, il réalise un court-métrage fantastique, intitulé Syncope, en 1951[2],[3]. Il se fait enfin remarquer pour ses automates, en particulier un papillon articulé vu dans Les Belles de nuit[2],[3]. Bien qu'autodidacte, il est capable d'élaborer des mécaniques complexes pour ses automates[3]. Inventeur touche-à-tout, il dépose en 1960 un brevet pour un appareil de massage[4].

 
Gérard Cogan participe aux effets spéciaux du film Trapèze (1956), où il dissimule l'usage d'une acrobate doublure pour Gina Lollobrigida.

En travaillant le latex, il s'établit également comme le spécialiste des prothèses pour les acteurs, que ce soit des faux-nez, des bosses, ou des masques entiers[3]. Pratiquement seul dans ce domaine à l'époque, il ainsi est régulièrement sollicité[3]. Au fur et à mesure de sa carrière, améliorant son latex, il arriver à créer des prothèses de plus en plus fines, renforçant leur réalisme[3]. Il se fait remarquer en appliquant un masque de Gina Lollobrigida sur le visage de l'acrobate doublure de la comédienne pour le film américain Trapèze (1956)[2],[5]. Il crée les prothèses faciales d'Anthony Quinn pour le rôle de Quasimodo dans Notre-Dame de Paris (1956)[3],[6]. Il s'amuse à la première du film en entendant, après la projection, une personnalité donner un avis élogieux sur le film avant d'ajouter « Malheureusement, pour Quasimodo, le maquillage est extraordinaire mais… cette perruque ! » — alors qu'il s'agit de la véritable chevelure du comédien[6]. Il transforme en vieillard bossu Jean Marais dans Le Bossu (1959) d'André Hunebelle[2],[3],[7],[8],[note 1]. Cogan invente un bébé mécanique, automate ultraréaliste, pour les besoins du film Le Chant du monde (1965), campant le nouveau-né du personnage de Catherine Deneuve[3]. De cette création, Cogan entend en créer un jouet[3],[5]. Il dépose plusieurs brevets pour ce poupon animé[12],[13],[14],[15].

 
Gérard Cogan conçoit le masque de Fantomas pour la trilogie d'André Hunebelle. Affiche japonaise de Fantomas contre Scotland Yard (1967).

Son travail le plus célèbre demeure la création des masques de la trilogie Fantomas d'André Hunebelle, succès populaire des années 1960[2],[7],[6],[5]. Pour Fantomas (1964), il conçoit le masque bleu-vert du criminel[3], selon la légende dessiné par Jean Marais[2],[16],[17]. Le même modèle est fabriqué sur mesure pour la « doublure » Christian Toma, qui partage l'écran avec Marais lorsque Fantomas et Fandor apparaissent ensemble[18]. Cogan doit aussi élaborer différents masques et postiches pour toutes les identités adoptées par le criminel au cours des films[2],[3]. Ces prothèses sont appliquées par le maquilleur René Daudin[10]. De plus, Cogan applique un faux nez et décolle les oreilles de Louis de Funès pour une scène où Fantomas prend l'apparence de son personnage du commissaire Juve afin de le compromettre[2]. Au fur et à mesure des tournages, Jean Marais est de plus en plus incommodé par la longueur des séances de maquillage requises, et le port des prothèses faciales en latex devient parfois invivable, en particulier sous la chaleur de Rome et du Vésuve dans Fantomas se déchaîne (1965)[2],[16],[18],[note 2]. Christian Toma raconte pour sa part que « la pose du masque vert, d'une matière translucide et fragile, n’était pas évidente et prenait du temps. Les journées étaient donc très longues. De plus, lorsque nous tournions, il n'était pas facile de s'exprimer distinctement sous ce masque, ce qui pouvait poser des problèmes de prise de son »[18]. Également, Cogan met au point le gadget du troisième bras mécanique du commissaire Juve dans Fantomas se déchaîne[5]. Du temps de Fantomas, son appartement et atelier, rempli de machines, se situe rue Raynouard à Paris[5],[19],[20],[3].

Cogan exprime toute sa créativité dans le film de science-fiction Barbarella (1968), livrant des accessoires mécaniques et des prothèses[3]. Le réalisateur Roger Vadim disait d'ailleurs de l'inventeur : « C'est l'un des hommes le plus génial que j'ai rencontré »[3]. Enfin pour Le Viager, dont l'action se déroule des années 1930 aux années 1970, Gérard Cogan fait vieillir plusieurs personnages à différents âges : il transforme notamment les acteurs Michel Serrault (qu'il dote aussi d'un faux nez), Michel Galabru, Odette Laure, Jean-Pierre Darras, Rosy Varte, Yves Robert, Claude Legros et Raoul Curet.

Gérard Cogan se détourne ensuite du cinéma, probablement à cause d'une évolution des techniques ou de l'absence de films français nécessitant les effets spéciaux qu'il savait réaliser[2]. Ce revirement serait dû à une volonté de ne se consacrer à sa carrière d'ingénieur autodidacte, mais il perd toute sa fortune dans ses recherches, la création des prototypes, les brevets déposés, et ne réussit jamais à trouver de financiers pour lancer la fabrication industrielle de ses inventions[3]. Il élabore notamment des prototypes d'engins nautiques qui n'intéressent aucun industriel[3]. Il revient à nouveau à la peinture et meurt le à Courcôme (Charente), à l'âge de soixante-quinze ans[2],[21].

Filmographie modifier

Note : À chaque générique, Gérard Cogan est crédité aux « Effets spéciaux » pour ses maquillages.

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. D'autres sources citent pourtant des artistes différents pour les maquillages de ces deux films[9],[10]. Le maquilleur-posticheur-prothésiste Alain Folgoas, dans un article sur l'histoire du métier, attribue les prothèses de Notre-Dame de Paris et du Bossu à Georges Klein — auquel le journaliste Olivier Pallaruelo d'Allociné adjoint Henri Assola — et leur pose au maquilleur Alexandre Marcus[10],[9]. Revenu d'Hollywood, Georges Klein avait importé les techniques modernes d'emploi de la mousse de latex ; son œuvre emblématique était le masque de Jean Marais dans la La Belle et la Bête de Jean Cocteau[11].
  2. À propos de ses transformations, Marais déclare a posteriori : « Je me donnais un mal fou, avec mon maquilleur, pour qu'on ne me reconnaisse pas. Même quand Fantômas était déguisé en Fandor, il fallait qu'on ait l'impression que ce n'était pas vraiment moi, ce qui demandait deux ou trois heures de maquillage. Et à la sortie du film, les gens me disaient : « Mais qui joue Fantômas ? »[17].

Références modifier

  1. Relevé des fichiers de l'Insee
  2. a b c d e f g h i j k l m n et o Franck et Jérôme Gavard-Perret, « On en sait plus sur… Gérard Cogan (1919-1994) », sur Autour de Louis de Funès, années 2010 (consulté le ).
  3. a b c d e f g h i j k l m n o p q r s t et u Masques et compagnie, documentaire de Claude Girard.
  4. (en) Brevet U.S. 3077878
  5. a b c d et e « Le roi du « truc » a fait un bébé à Catherine Deneuve », Noir et Blanc, no 1099 « Mireille Mathieu fait mieux que B.B. »,‎ 24 au 30 mars 1966.
  6. a b et c « Les masques de Gérard Cogan », reportage de Sélim Sasson pour Le Petit carrousel illustré, RTB, .
  7. a et b Marc Lemonier, Sur la piste de Fantômas, Paris, Hors Collection / Gaumont, , 227 p. (ISBN 2-258-06852-5), p. 23.
  8. Réjane Hamus-Vallée et Caroline Renouard, Les effets spéciaux au cinéma : 120 ans de créations en France et dans le monde, Armand Colin, 2018.
  9. a et b Olivier Pallaruelo, « Mais d'où viennent les masques des grands méchants des films d'horreur ? : Les Yeux sans visage (1959) », sur Allociné, .
  10. a b et c Alain Folgoas, « 1. Le maquillage au cinéma », Le métier, sur alainfolgoas.fr (consulté le ).
  11. Alain Folgoas, « 16. Notes sur Elephant Man », Le métier, sur alainfolgoas.fr, (consulté le ).
  12. (en) Brevet U.S. 3153881
  13. (en) Brevet U.S. 3481070
  14. (en) Brevet U.S. 3881275
  15. (en) Brevet U.S. 3959919
  16. a et b Marc Lemonier, Sur la piste de Fantômas, Paris, Hors Collection / Gaumont, , 227 p. (ISBN 2-258-06852-5), p. 19.
  17. a et b Bertrand Dicale, Louis de Funès, grimace et gloire, Paris, Grasset, , 528 p. (ISBN 978-2-246-63661-8), p. 242.
  18. a b et c Franck et Jérôme Gavard-Perret, « Interview de Christian Toma », sur Autour de Louis de Funès, (consulté le ).
  19. (en) « Gerard Cogan makes special effects and rigs for the cinema here in his studio on Rue Raynouard in Paris with a series of false noses that he made for the film Fantomas on March 2, 1966 », sur bridgemanimages.com, AGIP (consulté le ).
  20. Réjane Hamus-Vallée, Effets spéciaux, crevez l'écran !, Média Diffusion, 192 p. (ISBN 2732485403), p. 37, catalogue de l'exposition du même nom à la Cité des sciences et de l'industrie en 2017-2018.
  21. « M. BAULARD Raymond Gerard (1919-1994) », sur deces-en-france.fr, INSEE (consulté le ).

Voir aussi modifier

Bibliographie modifier

  • Jacques Rouffio, « Créateur d'un mode d'expression plastique, Gérard Cogan, avec ses masques, rend le fabuleux plus vrai que la vie », Qui ? Détective, n° 371, .
  • « Les effets plastiques spéciaux », Le Technicien du film, 1956, p. 10-11.
  • Réjane Hamus-Vallée et Caroline Renouard, Les effets spéciaux au cinéma : 120 ans de créations en France et dans le monde, Armand Colin, coll. « Cinéma / Arts Visuels », (lire en ligne), p. 131-133.

Documentaires modifier

  • « Les masques de Gérard Cogan », reportage de Sélim Sasson, Le Petit carrousel illustré, RTB, .
  • Masques et compagnie, documentaire sur Gérard Cogan de Claude Girard (voir en ligne)

Lien externe modifier