Génitron

instrument de mesure du temps, destiné à décompter les secondes restant avant le {{Date|1er janvier 2000}}

Le Génitron est un instrument de mesure du temps, destiné à décompter les secondes restant avant le . Il est inauguré en France, devant le Centre national d'art et de culture Georges-Pompidou le , par le Président de la République française François Mitterrand. Déplacé sur la place de la Bastille après 1997, il est laissé à l'abandon après sa date de fin de fonctionnement.

Génitron
Artiste
« Nemo »
Date
31 janvier 1987
Type
Chronomètre
Dimensions (H × L)
600 × 1200 cm
Propriétaire
« Nemo »
Localisation
Centre national d'art et de culture Georges-Pompidou (jusqu'en 1997), Place Georges-Pompidou (jusqu'en 1997)
Boulevard Richard Lenoir (à partir de 1997), Paris (France)

"Monument commémoratif d'un événement futur" modifier

Des précurseurs modifier

D'autres chronomètres de même nature avaient déjà été mis en place dans les années 1990[1] :

La création du Génitron modifier

Destiné par ses inventeurs, François Scali et Alain Domingo (rassemblés sous le pseudonyme de « Nemo »[2],[3]), à décompter le temps restant avant l'an 2000, seconde par seconde, l'instrument est baptisé « Génitron » en hommage au Génitron, hebdomadaire fictif imaginé par Louis-Ferdinand Céline dans Mort à crédit (1936) : « périodique favori (vingt-cinq pages) des petits inventeurs-artisans de la région parisienne »[1]. Il est financé en totalité par le mécénat de la Fondation Rémy Cointreau[4] pour l'art contemporain, qui s'en désengage après la mise en application de la Loi Évin en 1991, laissant sa gestion à « Nemo »[5].

Le Génitron se présente sous la forme d'un décompte numérique, à l'affichage lumineux, décomptant les secondes jusqu'au passage à l'an 2000. Il capte un code horaire émis par l'émetteur radio de France Inter, lié au calcul du temps universel fait par l'horloge atomique de l'observatoire de Paris[5]. Haut de six mètres et large de douze[6], munis de neuf cadrans noirs et bleus, il est mis en fonction devant le Centre Georges-Pompidou, le [Note 1],[7], par le président de la République François Mitterrand, 400 000 000 secondes et quelques[Note 2] donc avant le [2]. La cérémonie a lieu en présence du ministre des Finances, Édouard Balladur, et du précédent ministre de la Culture, Jack Lang[8], et fêtant en même temps les 10 ans du centre Pompidou, dirigé par Jean Maheu. Pour l'occasion, Mitterrand se fait accompagner d'un enfant tiré au sort parmi ceux du personnel du Centre qui auront 20 ans en l'an 2000[3],[9].

Le Génitron permet notamment d'imprimer un reçu intitulé « certificat espace-temps », carte permettant de coucher sur le papier l'état exact du compte-à-rebours au moment de l'impression, coûtant 10 francs l'année de son inauguration. Les sommes récoltées doivent permettre la maintenance de l'instrument, principalement des afficheurs et imprimantes - le système en lui-même étant capable de reprendre son cours en cas de coupure de courant[1].

Un démontage prématuré modifier

Neuf ans après sa mise en service, le dispositif est démonté le [2] pour cause de rénovation du centre Pompidou, mais n'est pas réinstallé une fois les travaux finis en janvier 1997. Ce déplacement / démontage imprévu est l'occasion d'échanges vifs, par presse interposée, entre « Nemo » et Jean-Jacques Aillagon, nouveau président du Centre[5], le Génitron ne devant pas retrouver son emplacement précédent, « gelé pour des questions de sécurité » selon Aillagon. Il est alors remisé dans un hangar du côté du quartier de la Villette, et sa réinstallation est annoncée tout d'abord près de la cité des sciences et de l'industrie[10], puis devant le chantier de l'ambassade de France à Berlin, sur la Pariser Platz[11].

D'autres compteurs sont installés, dont celui de la Tour Eiffel, inauguré par le maire de Paris Jean Tiberi[2], qui ravit la vedette au Génitron à la date fatidique[6]. Selon « Nemo », le fait qu'Aillagon préside la mission pour la célébration de l'an 2000 depuis 1996[12], et soit donc impliqué dans la mise en place du compteur de la Tour Eiffel, démontre que le démontage du Génitron n'était pas absolument fortuit[11].

Scali et Domingo finissent par saisir le tribunal de grande instance de Paris en septembre 1997, pour obtenir la réinstallation du dispositif devant le centre Georges-Pompidou[13]. Le 8 octobre, le tribunal se déclare incompétent pour trancher la question[12]. Finalement, le Génitron est déplacé sur la place de la Bastille, sur demande de la mairie de Paris, malgré l'opposition du maire de du XIe arrondissement, Georges Sarre[6].

Et après l'an 2000 ? modifier

Une fois le décompte effectué, le Génitron reste en place, mais ne fonctionne plus, ayant rempli son office. Appartenant toujours à son créateur François Scali, et la mairie de Paris ne souhaitant pas s'en porter acquéreur, le Génitron est d'abord proposé aux enchères à Monaco, mais ne trouve aucun repreneur[6].

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. Toutes les sources parlent du 31 janvier 1987, y compris le reportage en direct hébergé sur le site de l'INA. Seules les archives du Monde parlent du 31 janvier 1993[1].
  2. Le nombre exact varie en fonction des sources. 407 567 789 selon ses concepteurs[3], 407 655 400 selon Sonia Feertchak[2], 437 568 200 selon les archives du Monde[1].

Références modifier

  1. a b c d et e « HEURE : La dernière seconde du siècle », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  2. a b c d et e Sonia Feertchak, L'an 2000, autopsie d'un rêve, (JC Lattès) réédition numérique FeniXX, (ISBN 979-10-376-0047-9, lire en ligne)
  3. a b et c Bayon, « Le mystère de l'horloge de Beaubourg : Premier épisode: A la recherche de l'an 2000 », Libération,‎ (lire en ligne)
  4. Bernard Stiegler, La technique et le temps: 1. La Faute d Épiméthée. 2. La Désorientation 3. Le Temps du cinéma et la question du mal-être, Fayard, (ISBN 978-2-213-70420-3, lire en ligne)
  5. a b et c Bayon, « Le mystère de l'horloge de Beaubourg : 3e épisode: Emission. Réception? », Libération,‎ (lire en ligne)
  6. a b c et d Laure Pelé, « Qui veut du mur de la Paix et du Génitron ? », Le Parisien,‎ (lire en ligne)
  7. Bayon, « Génitron pressé », Libération,‎ (lire en ligne)
  8. « Le Génitron, un compte à rebours », L'Est républicain,‎ (lire en ligne)
  9. Journal de 20h, Antenne 2 / INA, 31 janvier 1987 [présentation en ligne]
  10. Bayon, « Le mystère de l'horloge de Beaubourg : 2e épisode: Les oubliettes du Génitron », Libération,‎ (lire en ligne)
  11. a et b Bayon, « Le mystère de l'horloge de Beaubourg, dernier épisode : La machination de la Tour Eiffel », Libération,‎ (lire en ligne)
  12. a et b Geneviève Jurgensen, « L'histoire », La Croix,‎ (ISSN 0242-6056, lire en ligne, consulté le )
  13. Emmanuel de Roux, « Les horlogers de Beaubourg devant les tribunaux », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )