Circinellu
Circinellu, pseudonyme de Domenico Leca, né à Guagno en 1709 et mort à Serra di Fiumorbo en 1771, est un prêtre catholique et une figure du patriotisme du clergé insulaire durant les guerres d'indépendance de la Corse.
Naissance | |
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Décès | |
Nom de naissance |
Domenico Leca |
Surnom |
Circinellu |
Nationalité |
Biographie
modifierDomenico Leca, dit Circinellu[Note 1], fait ses études à l'université de Gênes puis à l'université papale de Rome[Note 2]. Après son ordination il devient prêtre à Guagno, dans la piève de Sorroinsù. Selon la tradition, il est grand de taille et a les cheveux roux[1],[2]. Il vit avec sa sœur Anghjula-Maria Leca, surnommée Ritondella, qui a perdu son mari et trois enfants à la guerre.
Fidèle partisan de Pascal Paoli[3] et de l'indépendance de l'île, il est une figure mythique de la résistance de la Corse[4],[5]. Il est le représentant personnel de Paoli dans les pièves de Sorroinsù et Sorroingiù[6]. Il termine habituellement ses sermons par « Paoli è libertà »[7]. En 1769, il est un chef charismatique[8] qui participe à la bataille de Ponte-Novo avec soixante hommes de Guagno et ses environs ; ils s'en sortent tous. Après la défaite de Ponte-Novo et la fin de l'indépendance de la Corse, il exhorte Jacques Abbatucci de prendre les armes contre l'occupant[4].
Il galvanise ses troupes et organise la résistance ; ils sont appelés les montagnards du Tretorre[9],[10]. Lors d'une grand-messe à Guagno, il prête serment sur son autel de ne pas déposer les armes tant que la patrie reste occupée[11],[Note 3]. Invité par Marbeuf à négocier, il déclare : « ne pouvoir prêter fidélité à la France sans se parjurer car il a déjà prêté serment sur les évangiles de rester fidèle à sa patrie »[12]. Sa tête est mise à prix et ses biens sont dévastés, il prend le maquis pour éviter au village les représailles des troupes françaises qui brûlent cependant son église.
Pour que la répression ne s'abatte sur les siens et sa région, il se déplace dans le Fiumorbo où il poursuit la résistance avec ses hommes. C'est là que Mirabeau le rencontre[Note 4] et le trouve « fort brave et fort intelligent », « homme de cœur et d'esprit »[13],[Note 5]. Homme honorable et honnête[14], jamais il n'attaque les détachements français, mais il sait se défendre avec énergie[15],[16]. « Défendre la patrie et mourir libre (sostenere a patria e morir liberi) », affirme-t-il, « la force ne devant jamais priver le droit »[17].
Il est retrouvé mort en 1771 par des bergers dans une grotte au-dessus du hameau d'Ania (commune de Serra-di-Fiumorbo) avec, selon la légende, un crucifix dans une main et un poignard dans l'autre[18]. Pour les uns, il est mort de privations et de faim, mais pour les autres, il a été empoisonné[16]. Dès sa disparition, U Circinellu devient une figure notable ; admiré par Lucien Bonaparte, il incarne la résistance face à l'étranger[19]. A grotta di Circinellu existe toujours, symbole du patriotisme du clergé insulaire durant les guerres d'indépendance de la Corse. Au XXIe siècle, il est considéré comme un « grand homme de l'histoire insulaire »[20].
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Maison natale de Circinellu à Guagno.
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Église Saint-Nicolas de Guagno.
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Circinellu et les montagnards du Tretorre (par Paul Corizzi).
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Mont Tretorre depuis Guagno.
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Grotte de Circinellu à Serra-di-Fiumorbo.
Hommages
modifier- Une plaque commémorative est apposée sur sa maison natale de Guagno en 1935[21],[22].
- Un monument, œuvre en granite du sculpteur Anthony Bargone, lui est dédié devant la casa comuna de Guagno en 2016[23],[Note 6].
- Deux chansons lui sont consacrées :
- Canzona di Circinellu écrite par Maistrale en 1935 et enregistrée par le groupe I Voci di a Gravona en 1980,
- Circinellu écrite par Francis Pinelli en 1975 et enregistrée par Antoine Ciosi en 1975 puis par le groupe I Chjami Aghjalesi en 2007.
- La nouvelle historique en langue italienne Il curato di Guagno est écrite par Giovan Vito Grimaldi[Note 7] en 1844[24],[25].
- La pièce de théâtre en langue corse Circinellu, drame en deux actes, est écrite par Bartulumeu Dolovici[Note 8] à la fin du XXe siècle[26].
Voir aussi
modifierBibliographie
modifier- Giuseppe Ottaviano Nobili-Savelli, Vir Nemoris, Circinellu ou l'homme du bois sacré, Albiana, , 200 p. (ISBN 978-2-84698-255-9).
- Pierre Lepidi, Héros de la révolution de Corse (1729-1769), Albiana, , 137 p. (ISBN 978-2-84698-196-5).
- Jean-Pierre Poli, 1769-1789 : vingt ans de résistance corse, Alain Piazzola, , 464 p. (ISBN 978-2-36479-102-2).
- Thierry Ottaviani et Philippe Lorin, Les Corses qui ont fait la Corse, Maïa, , 135 p. (ISBN 978-2-37916-133-9).
Liens externes
modifierNotes
modifier- Son pseudonyme peut provenir de la couleur de ses cheveux roux.
- Sa maison s’appele a casa romanaghja en référence aux années passées à Rome.
- Sur son autel il jure « Paoli è Libertà » et refuse de se soumettre aux Français (« i tradimentosi »).
- Mirabeau, alors jeune sous-lieutenant de vingt ans, parvient à lui rendre visite dans son camp retranché du Fiumorbo.
- Dans une de ses Lettres à Sophie, Mirabeau écrit avoir rencontré le « légendaire curé de Guagno, Circinellu », dans une cabane du Fiumorbo.
- Le monument à Circinellu, œuvre en granite du sculpteur Anthony Bargone, est inauguré le 3 décembre 2016 à Guagno ; il est l'aboutissement d'un projet porté par l'association Pà u ricordu di Circinellu.
- Giovan Vito Grimaldi (1804-1863) est un écrivain corse qui a été médecin et enseignant.
- Bartulumeu Dolovici (1915-2009) est un poète corse ayant participé au mouvement de pensée des années du Riacquistu.
Références
modifier- Thierry Ottaviani, La Corse des écrivains, Éditions Alexandrines, 2014.
- Circinellu aura bientôt sa statue à Guagno, Corse-Matin, 27 juillet 2016.
- Antoine-Marie Graziani, Pascal Paoli, père de la patrie corse, Éditions Tallandier, 2017.
- Pierre Lepidi, Héros de la révolution de Corse (1729-1769), Éditions Albiana, 2008.
- Paul Arrighi, La vie quotidienne en Corse au XVIIIe siècle, Éditions Hachette, 1970.
- Étienne Leca, Les lunettes de Colomba, Éditions La Marge, 1990.
- Antoine-Baptiste Filippi, La Corse, terre de droit : essai sur le libéralisme latin et la révolution philosophique corse (1729-1804), Éditions Mimesis, Milan, 2020.
- Ange-Toussaint Pietrera, Imaginaires nationaux et mythes fondateurs ; la construction des multiples socles identitaires de la Corse française à la geste nationaliste, Université Pascal Paoli, 2015.
- Petru Antoni, Par forza o par amore : da Pax Rumana à Ponte Novu, Éditions Albiana, 2007.
- Présentation de Guagno sur le site de l'office de tourisme intercommunal Ouest Corsica.
- Jean-Pierre Poli, 1769-1789 : vingt ans de résistance corse, Éditions Alain Piazzola, 2019.
- Michel Casta, La religion dans les constructions identitaires en Corse (XVIIIe siècle-XXe siècle), L'identité entre ineffable et effroyable, Éditions Armand Colin, 2011.
- Jacques Simon Timotei, Personnages célèbres : Gabriel-Honoré Riquetti, comte de Pierre Buffière, dit Mirabeau (1749-1791), Site Corsica Mea, 2007.
- Abbé de Germanes, Histoire des révolutions de Corse, Éditions Hérissant, 1776.
- Francesco Ottavio Renucci, Storia di Corsica, Éditions Fabiani, 1833.
- François J. Casta, Le diocèse d'Ajaccio, Histoire des diocèses de France, Éditions Beauchesne, 1974.
- Simon Grimaldi, La Corse et le monde, histoire chronologique comparée de 1769 à 1914, Éditions Édisud, 1997.
- Giuseppe Ottaviano Nobili-Savelli, Vir Nemoris, Circinellu ou l'homme du bois sacré, Centre d'études Salvatore-Viale, Éditions Albiana, 2008.
- Marie Courtemanche, Napoléon et le sacré : une vie spirituelle, une politique religieuse, Éditions du Cerf, 2019.
- Thierry Ottaviani et Philippe Lorin, Les Corses qui ont fait la Corse, Éditions Maïa, 2019.
- Corsica antica e moderna, Rivista del pensiero Corso, Numero 3, Livorno, 1936.
- Pascal Marchetti, La corsophonie : un idiome à la mer, Éditions Albatros, 1989.
- Circinellu : une statue pour l'éternité, In Piazza Magazine, numéro 178, 28 septembre 2016.
- Giovan Vito Grimaldi, Il curato di Guagno, Éditions Crescini, 1844.
- Niccolo Tommaseo, Lettres de Pasquale Paoli, Éditions Albiana, 2020.
- La pièce de théâtre Circinellu de Bartulumeu Dolovici sur le site de la Médiathèque culturelle de la Corse et des Corses.