Carlina gummifera

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Chamaeleon gummifer (nouveau nom accepté de Carlina gummifera), le chardon à glu ou carline à gomme, est une espèce de plantes à fleurs dicotylédones de la famille des Asteraceae, sous-famille des Carduoideae, originaire du bassin méditerranéen. Ce sont des plantes herbacées vivaces, épineuses, acaules, aux capitules de 30 à 70 mm de diamètre, à fleurs tubulées. Elles exsudent à maturité un latex blanc jaunâtre. Les propriétés médicinales et toxiques de cette plante sont connues depuis l'Antiquité.

Description modifier

Appareil végétatif modifier

C'est une plante herbacée, vivace, de 5 à 20 cm de haut, épineuse, à grosse racine lui permettant de se maintenir pendant de nombreuses années. Elle est acaule, c'est-à-dire que sa tige est réduite ou nulle ou non-apparente. Les feuilles forment une rosette à ras du sol. Les feuilles sèches et épineuses forment un tapis protecteur défensif. Elles sont prostrées à la base de la plante, oblongues, pennatipartites à pennatiséquées, à segments terminés en épine et à pétiole engainant à la base.

La racine est pivotante, volumineuse, qui classe cette plante dans les géophytes à rhizome.

Appareil reproducteur modifier

Les fleurs sont de couleur rose, pourpre mauves ou rosâtres, hermaphrodites. Ce sont des fleurons tous tubulés, subsistant assez longtemps après que les feuilles se sont desséchées Elles sont réunies en inflorescences ou capitules solitaires ou doubles 30 à 70 mm de diamètre. Elles apparaissent en été, entre les mois de juin et juillet. Les bractées de l’involucre du capitule sont étalées, foliacées, les médianes à 3 pointes apicales, les internes à une seule épine brune.

L'ovaire est infère. Il devient, après fécondation, un akène surmonté d’une aigrette ou pappus de poils blancs.

Les fleurs sont entomogames. Elles sécrètent avec la racine une sorte de glu. Selon les pays, elles fleurissent de juillet à octobre. La diffusion des fruits peut se faire par le vent ou les insectes.

Confusions possibles modifier

L'appellation de « Carline » peut la faire confondre avec une Carline non toxique. En Crète, on consomme les jeunes feuilles en salade[2]. On cite des cas en Espagne de confusion avec Centaurea ornata Willd[3]

Écologie et répartition modifier

Cette plante vit dans les friches arides (plante xérophile) des régions méditerranéennes, telles que les zones de broussailles ou les pâturages secs de plaine ou de basse montagne. On la trouve notamment au bord des chemins ou dans les cultures abandonnées. Elle se retrouve fréquemment dans la nature à l’état sauvage, sauf dans les régions trop sèches, entre 0 et 700 m d’altitude[4].

Le Chardon à glu se rencontre en Afrique du Nord (Maroc, Algérie et Tunisie), en Asie mineure et dans le sud de l'Europe (Espagne, Portugal, Italie, Grèce) et en Corse pour la France.

Témoin de la perte de biodiversité en France, cette espèce est éteinte en France métropolitaine[5].

Propriétés modifier

 
Carlina gummifera : capitule (inflorescence) et feuilles.

C'est une plante toxique, la racine est potentiellement mortelle[6]. Cette toxicité est notamment due à des substances inhibitrices de la respiration cellulaire, dont l'atractyloside (et la carboxyatractyloside).

L'ingestion du chardon à glu, à la suite de méprises ou d'ignorance, détermine des accidents graves qui conduisent à une issue fatale dans un grand nombre de cas. C'est dans ce cadre que des médecins marocains de Rabat, Meknés et Nantes ont décidé de faire le point et d'analyser cette intoxication à partir d'un cas clinique, recueilli dans le service d'anesthésie-réanimation polyvalente de l'hôpital d'enfants de Rabat, CHU Ibn Sina, afin de mieux préciser ses caractéristiques cliniques et, par conséquent, sa prise en charge thérapeutique.

Une revue des cas survenu au Maroc de 1992 à 2008 a été présentée au congrès de toxicologie de FES en 2010 [7].

D'une manière générale, toute la plante est toxique à des degrés divers, la racine concentre le poison. C'est une plante à éviter, ses aiguillons foliaires la rendent, heureusement, très malaisée à manipuler sans équipement adéquat.

Utilisations modifier

Cette plante est mal connue ; elle passe, à tort, pour une panacée. Au Maroc on la trouve chez des herboristes traditionnels qui semblent ignorer sa toxicité. Les jeunes bergers utilisent le latex visqueux comme glu pour capturer les oiseaux. Les victimes de l'intoxication sont souvent des fratries. Les jeunes enfants, généralement des fils de fermiers, affectés à la garde des troupeaux, mâchent la racine, croyant apaiser leur faim ou par jeu.

Des cas d'empoisonnements criminels sont possibles[réf. nécessaire]. Ils sont mis en évidence par les analyses qui montrent la présence de l’atractyloside.

Nomenclature et systématique modifier

Cette espèce a été décrite en premier par Linné et publiée en 1753 dans son Species plantarum 2: 829 sous le nom de Atractylis gummifera L. (basionyme)[8], nom encore souvent utilisé dans de nouvelles publications. Le botaniste français Henri Cassini l'a séparé du genre Atractylis en 1827 pour la reclasser dans le genre Chamaeleon sous le nom de Chamaeleon gummifer (L.) Cass[9]. Le botaniste allemand, Christian Friedrich Lessing, a ensuite reclassé, en 1832, le genre Chamaeleon comme sous-genre de Carlina et a renommé le chardon à glu, Carlina gummifera (L.) Less[10]. Cette classification systématique est étayée par les résultats d'études de génétique moléculaire[11].

Noms vernaculaires modifier

  • berbère : Addâd (ou Leddâd)
  • arabe: choûk el-eulk (chardon à glu à masticatoire), chouk el alk (Algérie).
  • français : atractyle[12], carline à gomme[12], chardon à glu[13].
  • grec : Αγκαθομάστικο — Αγριομαστιχιά — Ατρακλίδα — Ατρακτυλίς η κομμιοφόρος — αλάγγουρας — Καρλίνα — Κωλιά — Μαστιχάγκαθο — Φόνος.
  • anglais : Pine Thistle, Stemless Atractylis.
  • allemand : Gummi-Spindelkraut — Mastixdistel.
  • italien : Masticogna laticifera.

Synonymes botaniques modifier

  • Acarna gummifera (L.) Willd[1].
  • Acarna macrocephala Willd[1].
  • Atractylis acaulis Pers[1].
  • Atractylis gummifera var. gummifera
  • Atractylis gummifera var. macrocephala (Desf.) Pott.-Alap.
  • Atractylis gummifera L.[1] basionyme
  • Atractylis gummifera Salzm. ex L.
  • Atractylis macrocephala Desf[1].
  • Atractylis nemotoiana Arènes[1]
  • Carlina fontanesii DC.[1]
  • Carlina gummifera (L.) Less[1].
  • Carlina ixia Garsault
  • Carlina macrocephala Less[1].
  • Carthamus gummiferus (L.) Lam[1].
  • Chamaeleon gummifer (L.) Cass.
  • Chamaeleon megacephalus Cass.
  • Cirsellium gummiferum (L.) Brot[1].

Notes et références modifier

  1. a b c d e f g h i j k et l « Chamaeleon gummifer (L.) Cass. », sur powo.science.kew.org, Plants of the world (consulté en ).
  2. Carlina gummifera cf. Atractylis gummifera
  3. Confusion d'espèces en Espagne
  4. Prof. Giorgio Venturini (Trad.:Claude Leray), « Carlina gummifera », sur Monaco Nature Encyclopedia, .
  5. Emeline Férard, « Flore : plus de 700 espèces de plantes présentent un risque de disparition en France métropolitaine », sur geo.fr, .
  6. http://www.pathexo.fr/documents/articles-bull/T95-4-2395.pdf Maroc : cas clinique
  7. Abdelmajid SOULAYMANI Laboratoire de Génétique et Biométrie. Université Ibn Tofail Intoxication par Atractylis gummifera-L au Maroc (1992-2008)
  8. (en) « Atractylis gummifera L. », Sp. Pl. 2: 829 (1753), sur International Plant Names Index (IPNI) (consulté en ).
  9. (en) « Chamaeleon gummifer Cass. », Dict. Sci. Nat., ed. 2. [F. Cuvier] 47: 509 (1827), sur International Plant Names Index (IPNI) (consulté en ).
  10. (en) « Carlina gummifera Less. », Syn. Gen. Compos. 12 (1832), sur International Plant Names Index (IPNI) (consulté le ).
  11. (en) Núria Garcia-Jacas, Teresa Garnatje, Alfonso Susanna et Roser Vilatersana, « Tribal and Subtribal Delimitation and Phylogeny of the Cardueae (Asteraceae): A Combined Nuclear and Chloroplast DNA Analysis », Molecular Phylogenetics and Evolution, vol. 22, no 1,‎ , p. 51-64 (DOI 10.1006/mpev.2001.1038, lire en ligne).
  12. a et b « Carlina gummifera (L.) Less., 1832 », sur Inventaire National du Patrimoine Naturel (INPN) (consulté le ).
  13. Vincent Danel, Université Grenoble Alpes, « Atractylis gummifera L. », sur Société française de médecine d'urgence (SFMU), (consulté le ).

Voir aussi modifier

Articles connexes modifier

Bibliographie modifier

  • (en) Davis, P. H., ed. 1965–1988. Flora of Turkey and the east Aegean islands. [accepts].
  • Pottier-Alapetite, G. 1979–1981. Flore de la Tunisie: Angiospermes-Dicotyledones. [accepts].
  • Quézel, P. & S. Santa. 1962–1963. Nouvelle flore de l'Algerie. [accepts].
  • Tutin, T. G. et al., eds. 1964–1980. Flora europaea. [accepts].
  • Benito Valdés, Catalogue des plantes vasculaires du nord du Maroc, incluant des clés d'identification, Madrid, CSIC, coll. « Biblioteca de ciencias », , 1040 p. (ISBN 978-84-00-08071-6).
  • Edmond Lefranc, « Étude botanique, chimique et toxicologique sur l'Atractylis gummifera », Bulletin de la Société Botanique de France - Comptes rendus des séances, Société botanique de France, vol. 13, no 1,‎ , p. 146-157 (DOI 10.1080/00378941.1866.10825102, lire en ligne).
  • Edmond Lefranc, « Sur Les plantes connues des Grecs sous les noms de Chaméléon noir et de Chaméléon blanc (Atractylis Gummifera Cardopatium Orientale et C. Boryi Sp.) », Bulletin de la Société Botanique de France - Comptes rendus des séances, Société botanique de France, vol. 14, no 2,‎ , p. 48-55 (DOI 10.1080/00378941.1867.10827476, lire en ligne).
  • Edmond Lefranc, « De l'acide atractylique ou sulfoatractylique (S4O12, C60H52O20.3HO) », Bulletin de la Société Botanique de France - Comptes rendus des séances, Société botanique de France, vol. 15, no 8,‎ , p. 141-143 (DOI 10.1080/00378941.1868.10825206, lire en ligne).
  • (en) C. Daniele, S. Dahamna, O. Firuzi, N. Sekfali, L. Saso, G. Mazzanti, « Atractylis gummifera L. poisoning: an ethnopharmacological review », Journal of Ethnopharmacology, Elsevier, vol. 97,‎ , p. 175–181 (lire en ligne).
  • Islam Amine Larabi, Mohamed Azzouz, Rania Abtroun, Mohamed Reggabi, Bachra Alamir, « Déterminations des teneurs en atractyloside dans les racines d’Atractylis gummifera L. provenant de six régions d’Algérie », Annales de toxicologie analytique, EDP Sciences, vol. 24, no 2,‎ , p. 81-86 (DOI 10.1051/ata/2012009, lire en ligne).

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Références taxinomiques modifier

Sous le nom Carlina gummifera

Sous le nom Atractylis gummifera

Sous le nom Chamaeleon gummifer

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