Alecton
illustration de Alecton (aviso)
L’Alecton au large de la Guyane française en 1867.

Type Corvette servant d'aviso.
Histoire
Chantier naval « Forges et chantiers de la Méditerranée » à La Seyne-sur-Mer
Quille posée 1859
Lancement 1861
Mise en service La Seyne-sur-Mer - Toulon, 1861
Statut Démembré.
Équipage
Équipage 66 hommes
Caractéristiques techniques
Longueur 60 mètres
Maître-bau 12 mètres
Tirant d'eau 2,7 mètres
Déplacement 570 tonnes
Propulsion mixte voiles et vapeur, machine à roues de deuxième classe, type « étoile modifiée »
Puissance 120 chevaux-vapeur
Vitesse 10 nœuds
Carrière
Armateur Marine nationale (1861)
Affréteur Marine nationale (1861-1883)
Pavillon Drapeau de la France France
Port d'attache La Seyne-sur-Mer jusqu'en 1863, Cayenne durant cinq ans puis, à partir de 1868, Pointe-à-Pitre

La corvette Alecton était un navire colonial de la marine française au XIXe siècle, connue pour avoir été l’un des premiers navires qui, ayant rencontré un calmar géant Architeuthis au large des Canaries, en fit une description précise et scientifique au lieu de donner lieu à des récits plus ou moins mythologiques.

Historique du bâtiment modifier

L’Alecton, du nom d’Alecto, l’une des trois Furies (en grec alekto signifie « implacable »), a été mis en chantier en 1859 à La Seyne-sur-Mer et lancé en 1861. Il avait une longueur de 60 mètres et une largeur de 12 mètres pour un déplacement de 570 tonnes. L’Alecton était doté de roues à aubes mues par une machine à vapeur de 120 chevaux, et d'un gréement de goélette à hunier. Le navire avait un équipage de soixante-six hommes et un armement de deux canons légers. Il est utilisé comme aviso en particulier pour assurer la liaison Toulon-Cayenne. L’Alecton est désarmé le 10 août 1883 et démoli en 1884 à Lorient[1].

Récit de voyage de Frédéric Bouyer modifier

Frédéric Bouyer qui commanda l’Alecton a écrit un récit de voyage, qui a d’abord paru comme article dans Le Tour du Monde en 1866 et plus tard sous forme de livre : La Guyane française : notes et souvenirs d’un voyage effectué en 1862-1863 (publié en 1867)[2].

L’ouvrage était illustré par des artistes d’après les croquis réalisés par les officiers sur l’Alecton, et par Bouyer lui-même. L’illustration représentant le navire a été réalisée par Édouard Riou d’après le croquis de l’enseigne de vaisseau E. Rodolphe[3].

Rencontre avec le calmar géant modifier

 
L’Alecton tente de hisser à bord le calmar géant Architeuthis au large de Tenerife en novembre 1861.

La rencontre avec le calmar géant a eu lieu en novembre 1861 (le 17 ou le 30 selon les sources) alors que le bâtiment était commandé par Frédéric Bouyer.

 
Le calmar géant, grossi par Louis Figuier, 1866.

L’Alecton était en route vers la Guyane, lorsque, dans les parages de Tenerife, la plus grande des sept Canaries, la vigie signala « un grand corps en surface, en partie submergé ». Le capitaine Frédéric Bouyer et ses hommes reconnurent ce qu’ils appelèrent alors « un gigantesque encornet ». Tous avaient déjà entendu parler de calmars géants mais les légendes marines étaient alors si répandues et si exagérées, que la communauté scientifique doutait de leur existence. Pourtant des morceaux de calmar géant mutilés et décomposés avaient fait surface, notamment au large de la Zélande et au Danemark à Skagen Odde, en 1847 et en 1854, mais personne n’avait jamais capturé ni vu un spécimen vivant. Résolu à capturer le « monstre » estimé jusqu’à 5 mètres de long, le capitaine Bouyer ordonna au navire de tirer des mousquets[4], de lancer des harpons et d’essayer de remonter le calmar avec un nœud coulant. Les marins réussirent à passer un lasso autour du calmar blessé mais son poids était si important que lorsqu’ils tentèrent de le hisser à bord, il se déchira et seule l’extrémité de la queue, d’un poids de 14 kilos selon le capitaine, put être récupérée[4].

Vingt mille lieues sous les mers modifier

Le récit du capitaine de l’Alecton a convaincu les scientifiques que les céphalopodes de grande taille étaient réels (et qu’il fallait donc les rechercher). Sur le plan littéraire, il a inspiré Jules Verne qui, dans Vingt mille lieues sous les mers publié neuf ans après la rencontre, en 1870, met en scène des calmars géants attaquant le Nautilus du capitaine Nemo[5],[6]; toutefois, Verne les dépeint si grands, qu'ils prennent le sous-marin pour une proie, ce qui tient plus de la légende du Kraken que de la créature réelle[7].

Références modifier

  1. Alain Clouet, « Avisos à roues de 2e classe » in La Flotte de Napoléon III, 1850 - 1870, 2005-2022, [www.dossiersmarine.fr]
  2. Frédéric Bouyer, La Guyane française: notes et souvenirs d'un voyage exécuté en 1862-1863, 1867.
  3. Frédéric Bouyer, Édouard Charton, illustrations par Édouard Riou, « Voyage dans la Guyane Française », dans Le Tour de Monde, nouveau journal des voyages, Hachette, Paris 1866.
  4. a et b Lee (1884), p. 40.
  5. Hatcher et Battey 2011, p. 44
  6. Arthur Fisher, (en) « He Seeks the Giant Squid » in Popular Science p. 30, 1995.
  7. Fisher, Op. cit.
  • Henry Lee, (en) « The Kraken, Sea Monsters Unmasked », in The Fisheries Exhibition Literature n° 3, ed. Chapman and Hall, 1884, pp. 39–40.
  • Paul Hatcher & Nick Battey, (en) Biological Diversity: Exploiters and Exploited, ed. John Wiley & Sons 2011, (ISBN 9780470979860).
  • Stephen S. Roberts, (en) « Avisos, Special Ships, and Gunboats 1859–1882 » in French Warships in the Age of Steam 1859–1914, chapter 4, Seaforth Publishing, Barnsley, UK 2021, (ISBN 9781526745347).