Élections législatives monténégrines de 2020

Élections législatives du Monténégro

Élections législatives monténégrines de 2020
81 sièges du Parlement
(Majorité absolue : 41 sièges)
Corps électoral et résultats
Inscrits 540 026
Votants 413 893
76,64 % en augmentation 3,2
Blancs et nuls 4 500
DPS – Milo Đukanović
Voix 143 515
35,06 %
en diminution 6,3
Sièges obtenus 30 en diminution 6
ZBCG – Zdravko Krivokapić
Voix 133 261
32,55 %
en augmentation 12,2
Sièges obtenus 27 en augmentation 6
MNN – Aleksa Bečić
Voix 51 298
12,53 %
en augmentation 2,5
Sièges obtenus 10 en diminution 2
URA – Dritan Abazović
Voix 22 679
5,54 %
Sièges obtenus 4 en augmentation 2
Premier ministre
Sortant Élu
Duško Marković
DPS
Zdravko Krivokapić
ZBCG

Les élections législatives monténégrines de 2020 ont lieu le afin d'élire les 81 députés de la XIe législature du Parlement pour un mandat de quatre ans.

Le scrutin voit la défaite de la coalition au pouvoir menée par le Parti démocratique socialiste (DPS) du Premier ministre Duško Marković. Trois formations d'opposition, les coalitions Pour le futur du Monténégro et La paix est notre nation ainsi que le parti Action réformée unie remportent ensemble la majorité absolue des sièges, et annoncent vouloir former un gouvernement de coalition. Il s'agit de la première alternance politique au Monténégro, le DPS ayant toujours été à la tête du gouvernement depuis la chute du système communiste et l’avènement du multipartisme en 1990, ainsi que depuis l'indépendance du pays en 2006.

Contexte modifier

 
Le Premier ministre sortant Duško Marković.

Les élections législatives d'octobre 2016 voient la victoire du Parti démocratique socialiste (DPS), au pouvoir, qui arrive en tête avec un peu plus de 40 % des voix et décroche 36 sièges sur 81. Le DPS forme un gouvernement de coalition avec quatre partis mineurs : le Parti bosniaque (BS), les Sociaux-démocrates (SD), Albanais décisifs (AO) et l'Initiative civique croate (HGI). Le Premier ministre Milo Đukanović est remplacé par Duško Marković, tous deux membres du Parti démocratique socialiste.

À la suite des événements liés à la tentative de coup d'État par des éléments pro-russes découverte avant sa mise en œuvre le jour des élections, l'opposition boycotte les sessions parlementaires. Trente-neuf des quatre-vingt-un députés refusent ainsi de siéger, exigeant des élections anticipées avant 2019. Faute d'une majorité absolue nécessaire au vote d'une motion de censure, l'opposition ne parvient cependant pas à faire chuter le gouvernement[1]. En , le procès des personnes inculpées dans le complot débute devant la Haute Cour de Podgorica. La liste des inculpés comporte notamment les dirigeants de l'opposition monténégrine et deux ressortissants russes, Eduard Shishmakov et Vladimir Moïssev. Le gouvernement russe nie toute implication[2].

 
Slogan des manifestants : Résiste !.

Des manifestations de grande ampleur ont par ailleurs lieu dans le pays à partir de à l'encontre du gouvernement, accusé de corruption à la suite de fuites de documents et de vidéos laissant soupçonner que des personnalités haut placées du Parti démocratique socialiste s'échangent illégalement d'importantes sommes d'argent pour financer leurs campagnes ainsi que pour corrompre des fonctionnaires[3],[4]. Les manifestations liées à ces révélations sont exacerbées par la tentative de meurtre à l'encontre de la journaliste d'investigation Olivera Lakić le . Celle ci, agressée devant son appartement à Podgorica par un inconnu qui la blesse par balle à la jambe et au ventre avant de prendre la fuite, est spécialisée dans la lutte contre le crime organisé au Monténégro[5].

Les manifestants réclament le départ du gouvernement de Duško Marković et son remplacement par un gouvernement technique en attendant l'organisation de nouvelles élections libres et équitables. Le mouvement finit cependant par s'essouffler, et prend fin en .

Système électoral modifier

Le Parlement du Monténégro est un parlement unicaméral doté de 81 sièges pourvus pour quatre ans au scrutin proportionnel plurinominal avec listes bloquées dans une unique circonscription électorale nationale. Les sièges sont répartis selon la méthode d'Hondt à tous les partis ayant franchi le seuil électoral de 3 % des suffrages exprimés. Les partis représentant une minorité ethnique dont les membres totalisent au moins 15 % de la population d'un district sont cependant en partie affranchis de ce seuil, celui ci étant alors abaissé à 0,7 %, pour un maximum de trois sièges. Pour les partis représentant la minorité croate, il descend à 0,35 % et donne droit à un siège[6].

Forces en présences modifier

Principales forces politiques
Parti
Nom en monténégrin
Idéologie Chef de file Résultat en 2016
Parti démocratique socialiste
Demokratska Partija Socijalista Crne Gore (DPS)
Centre gauche
Social-démocratie, nationalisme, europhilie
Milo Đukanović 41,41 % des voix
36 députés
Pour le futur du Monténégro
Za budućnost Crne Gore (ZBCG)
Attrape-tout
Conservatisme, populisme, europhilie
Zdravko Krivokapić 20,32 % des voix
18 députés
La paix est notre nation
Mir je naša nacija (MNN)
Centre
Europhilie
Aleksa Bečić 10,01 % des voix
8 députés
Parti social-démocrate
Socijaldemokratska partija (SDP)
Centre gauche
Social-démocratie, progressisme, europhilie, nationalisme civique
Draginja Vuksanović 5,23 % des voix
4 députés
Sociaux-démocrates
Socijaldemokrate (SD)
Centre à centre gauche
Social-démocratie, europhilie, atlantisme, social-libéralisme
Ivan Brajović 3,26 % des voix
2 députés
Parti bosniaque
Bošnjačka stranka (BS)
Centre droit
Europhilie, conservatisme social, défense des intérêts bosniaques
Rafet Husović 3,16 % des voix
2 députés
Initiative civique croate
Hrvatska građanska inicijativa (HGI)
Centre droit
Europhilie, conservatisme, défense des intérêts croates
Adrian Vuksanović 0,47 % des voix
1 député

Sondages modifier

 

Résultats modifier

Résultats des législatives monténégrines de 2020[7],[8],[9]
 
Partis Voix % +/- Sièges +/-
Parti démocratique socialiste (DPS) 143 515 35,06   6,35 30   6
Front démocratique (DF) 133 261 32,55 N/a[a] 20   2
Parti socialiste populaire (SNP) 4   1
Mouvement populaire (NP) 3   3
Pour le futur du Monténégro (ZBCG) 27   6
Monténégro démocratique (DCG) 51 298 12,53 N/a[a] 9   1
Alliance démocratique (DEMOS) 1   3
Nouvelle gauche (NL) 0  
Parti des retraités et handicapés unis (PUPI) 0  
La paix est notre nation (MNN) 10   2
Action réformée unie (URA) 22 679 5,54 N/a[b] 4   2
Sociaux-démocrates (SD) 16 761 4,09   0,83 3   1
Parti bosniaque (BS) 16 279 3,98   0,82 3   1
Parti social-démocrate (SDP) 12 835 3,14   2,09 2   2
Liste albanaise[c] (AL) 6 488 1,58   0,31 1  
Coalition albanaise (KS) 4 675 1,14   0,25 1   1
Initiative civique croate (HGI) 1 106 0,27   0,20 0   1
Parti réformateur croate (PCG) 496 0,13 Nv. 0  
Votes valides 409 393 98,91
Votes blancs et invalides 4 500 1,09
Total 413 893 100 81  
Abstentions 126 133 23,36
Inscrits / participation 540 026 76,64

Conséquences modifier

 
Parti ou coalition arrivé en tête par municipalité.

Le Parti démocratique socialiste (DPS), au pouvoir sans discontinuer depuis la fin du régime socialiste en , vire de nouveau en tête, mais obtient son plus mauvais résultat depuis l'indépendance du pays en , tandis que trois partis d'opposition détiennent ensemble l'exacte majorité absolue des sièges. Cet échec est la conséquence de la fatigue des citoyens envers un parti accusé de corruption et de détournement de fonds publics, ainsi que d'une loi adoptée en permettant la nationalisation des biens de l'Église orthodoxe serbe[10].

Dès le lendemain du scrutin, les forces d'opposition Pour le futur du Monténégro, La paix est notre nation et Action réformée unie s'accordent pour mettre en place un « gouvernements d'experts » qui poursuivra la procédure d'adhésion du Monténégro à l'Union européenne, respectera la participation du pays à l'OTAN et révisera les législations controversées, notamment celles sur le patrimoine de l'Église orthodoxe[11]. Le , ces trois forces signent un accord sur la ligne politique du futur exécutif, qui confirme une orientation diplomatique pro-européenne et pro-occidentale ; exclut toute modification des symboles nationaux, renoncement à la reconnaissance du Kosovo comme État indépendant ou revanchisme politique ; prévoit une dépolitisation de plusieurs institutions, un renforcement de la lutte contre la corruption et le crime organisé, et l'abrogation de la loi sur la liberté religieuse qui touchait aux propriétés de l'Église orthodoxe[12].

Lors de la séance d'installation de la nouvelle législature le , le chef de file de La paix est notre nation Aleksa Bečić est élu président du Parlement par 45 voix favorables sur 81 députés, les députés issus du DPS faisant le choix de l'abstention. Par la suite, les 41 députés de la nouvelle majorité parlementaire font parvenir une lettre au président du Monténégro Milo Đukanović lui demandant de charger Zdravko Krivokapić, chef de file de Pour le futur du Monténégro, de constituer le nouvel exécutif[13]. Le chef de l'État accède à leur requête deux semaines plus tard, après avoir reçu les dirigeants de la future coalition au pouvoir. Zdravko Krivokapić bénéficie alors d'un mois pour présenter son programme et le nouvel exécutif aux députés[14]. C'est finalement le que le gouvernement Krivokapić reçoit la confiance des députés par 41 voix favorables[15].

Notes et références modifier

Notes modifier

  1. a et b Comparaison impossible : coalition de partis membres de coalitions différentes au précédent scrutin.
  2. Membre de la Coalition clé aux précédentes élections
  3. Concourait sous le nom de Albanais décisifs aux précédentes élections

Références modifier

  1. (hr) « Novi izbori kao uslov opozicije za povratak u Parlament », sur www.slobodnaevropa.org (consulté le ).
  2. « Espionnage : les déboires des services secrets militaires russes », sur FIGARO, (consulté le )
  3. (hr) Sourcefabric, « Čitajte u Vijestima: Novi snimak Kneževića - transkript razgovora sa Miloševićem », sur Vijesti.me, (consulté le ).
  4. (sr) antenam.net, « Objavljen snimak: Knežević uručio kovertu Stijepoviću », sur Antena M (consulté le ).
  5. (en) Staff and agencies in Podgorica, « Investigative journalist shot and injured in Montenegro », sur the Guardian, (consulté le ).
  6. Inter-Parliamentary Union, « IPU PARLINE database: MONTENEGRO (Skupstina), Texte intégral », sur archive.ipu.org (consulté le ).
  7. (en) « Državna izborna komisija - Crna Gora », sur dik.co.me (consulté le ).
  8. (sl) « Rezultati DIK-a na 100 odsto prebrojanih glasova: DPS 35.06, "Za budućnost Crne Gore" 32.55 odsto glasova », sur vijesti.me, vijesti.me (consulté le ).
  9. (hr) « Državna izborna komisija - Crna Gora : Ukupni rezultati izbora za poslanike u Skupštinu Crne Gore », sur dik.co.me (consulté le ).
  10. « Elections au Monténégro: l'opposition fait trembler le parti au pouvoir », Le Point,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  11. (en) « Montenegrin opposition agrees on expert government, revision of disputed laws », N1 Info,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  12. (en) « Montenegro Coalition Leaders Agree on ‘Pro-European’ Course », Balkan Insight,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  13. (en) Antonela Stjepčević, « Aleksa Becic Elected the New President of Montenegrin Parliament », Total Montenegro News,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  14. (en) Antonela Stjepčević, « Krivokapic Proposed to Form New Government », Total Montenegro News,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  15. (en) Talha Ozturk, « New Montenegro government wins confidence vote », Agence Anadolu,‎ (lire en ligne, consulté le ).

Voir aussi modifier