Utilisateur:Zorion/brouillon/Abolition des Fors au Pays basque français

Tableau de la Constitution du Royaume de Navarre et de ses rapports avec la France, Étienne Polverel, chargé par les États de Navarre, avec le titre de syndic, de défendre l'indépendance du royaume de Navarre face aux atermoiements de Louis XVI.

L'abolition des fors au Pays basque français marque la fin des institutions publiques locales et du système juridique basque pendant la Révolution française (1789-1795). L'autonomie basque est efficacement abolie avec l'arrivée des troupes françaises dans la région, principalement pendant la guerre de la Convention, tout en propageant la terreur contre les citoyens basques du Labourd. Dans les années 1780, l'augmentation des impôts fiscaux du royaume de France provoque des troubles dans ses territoires de montagne, ainsi que des conflits entre classes. Au Pays basque français ou Pays basque nord, il y a aussi des conflits et des perturbations autour des frontières entre les terres communales et celles de l'État, en particulier à Baïgorry. Par ailleurs, la Basse-Navarre n'est toujours pas formellement une partie du royaume de France.

En raison de la nouvelle administration et politique, le 4 août 1789, à Paris, les gouvernements et organes juridictionnels temporaires de la Soule, de Basse-Navarre et du Labourd sont abolis. Malgré les efforts des représentants basques pour créer un département basque, le département des Pyrénées-Atlantiques est créé en échange (légalement en février 1790), mais les Basques et les Béarnais s'opposent vivement à une administration territoriale commune, intégrée dans le nouveau système départemental français; ce nouveau système persiste jusqu'à aujourd'hui.

Lorsque est établie la constitution civile du clergé, rejetée dans le Pays basque nord, de nombreux citoyens s'enfuient, traversent les Pyrénées vers Guipuscoa et la Haute̠-Navarre et certains y rejoignent la résistance. Le début de la guerre de la Convention (mars 1793) amene sur cette région un changement radicaux et irréversible. L'Armée des Pyrénées occidentales prend le pouvoir au Pays basque nord, sous l'autorité des mandataires de la Convention nationale : Jacques Pinet et Jean-Baptiste Cavaignac qui ordonnent la déportation de milliers de Basques de certaines villes du Labourd (Sare).

Bien que la période la plus sévère de répression coercitive ait pris fin en juillet 1795, les vestiges de l'État-nation français reste, se lançant dans un modèle de "renationalisation" des Basques, axé sur l’éducation et le service militaire. Ce modèle a été abandonné après la défaite de Napoléon en 1815. Le Pays basque nord, quant à lui, adhère à la tendance politique ecclésiastique et conservatrice. Dans le Pays basque sud ou espagnol, l'abolition des fors a été réalisée entre la première guerre carliste (1833-1840) et la troisième guerre carliste (1876-1878).

Arrière-plan

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Évolution historique de l'autogouvernance

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Le château de la Motte, actuelle mairie et ancienne demeure des vicomtes du Labourd et des ducs d'Aquitaine, siège du Biltzar.

À partir des années 1620, malgré une certaine restriction progressive, les Basques soumis au roi de France ont maintenu un statut semi-autonome en raison de leur éloignement du royaume et de leurs liens et relations avec le Pays Basque sud, formant ainsi un système d'autogouvernance similaire. Cependant, ils étaient soumis à trois gouvernements et juridictions légales, représentés notamment par des membres du Parlement de Bordeaux en Gascogne (Labourd) et du du Parlement de Navarre à Pau (la Basse-Navarre et la Soule).

Labourd était la province la plus dynamique du Pays Basque nord, bénéficiant d'une autonomie fiscale importante jusqu'au milieu du XVIIIe siècle. Cependant, son industrie de la pêche a décliné pendant la même période, tandis que les tentatives de commerce vers l'Amérique ont échoué, faute de produits de valeur à échanger. L'organe législatif du Labourd était le Biltzar, une institution démocratique et très participative pour les normes de l'époque, avec une faible influence de la noblesse[1].

La Basse-Navarre a maintenu une distance distincte vis-à-vis du royaume de France, en profitant économiquement des routes commerciales stratégiques à travers les Pyrénées, comme le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle reliant Pampelune à Bayonne. Le document législatif fondamental de la Soule était la Coustume, mais ses prérogatives parlementaires (statut ou décision) les plus importantes sont supprimées en 1733[oh 1]. Les États de Navarre subissent un sort similaire lorsque les autorités de Pau, après des litiges avec les autorités royales, ont vu leurs pouvoirs législatifs sévèrement restreints par décret royal en 1748.

La question des frontières, du domaine public et des impôts

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Les relations entre la couronne française et les Basques devenaient de plus en plus difficiles : la couronne rassemblait de plus en plus de pouvoirs et exigeait une contribution fiscale croissante. Depuis 1768, les habitants de la vallée de Baïgorry et la maison du vicomte d'Etxauz sont en conflit pour les droits sur les terres sous juridiction royale. Les droits furent acquis par M. Etxautz, mais en 1775 la commune réussit à les récupérer grâce à des protestations.

En 1784, un conflit violent renaît avec la maison d'Etxautz, sur le droit de porter les armes et de chasser. Le traité Elizondo de 1785 sur les frontières ravive la colère des Basques, lorsque les États imposaient leur logique avant les intérêts du peuple.

Au Labourd, la couronne impose un nouvel impôt, et des troubles éclatent parmi les citoyens en 1784[2]. Plus de 2 000 femmes sont descendues dans la rue, certaines avec des armes à la main. Le seigneur de Neville convoque des armées de différentes parties de la monarchie et prépare une intervention militaire à grande échelle. La médiation du prêtre Haranburu calma les esprits[2].

Abolir les fors pendant la Révolution française

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La vue depuis Saint-Jean-Pied-de-Port.
 
L'appel du roi pour que les Labourdins se rendent aux États généraux à Paris, après l'intervention des frères Garat

Agitation en Navarre et dans le royaume de France

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En Navarre, des tensions étaient exacerbées par la pression fiscale exercée par Louis XVI pour centraliser le pouvoir et augmenter les impôts. Cette politique a provoqué une opposition locale croissante, symbolisée par le Parlement de Navarre. Le roi était de plus en plus perçu comme oppressif, et ses tentatives pour supprimer le Parlement ont renforcé l'opposition.

Le 1er mai 1788, Louis XVI émis un édit, abolissant les cours parlementaires locales. Cette décision déclenche une réaction vigoureuse du Parlement de Navarre à Pau, conduisant à une révolte généralisée dans tout le royaume de France. Malgré l'abolition des cours, de nouvelles taxes imposées par le roi finalement pousse le Parlement de Navarre à une résistance finale, déclarant que c'était la dernière fois. En 1789, le Parlement de Navarre et d'autres entités politiques locales refusent d'obéir aux ordres du roi, affirmant leur autonomie et réaffirmant leur souveraineté[1].

Cela a entraîné une opposition généralisée au roi, avec des membres de la noblesse et du clergé cherchant à restaurer leur pouvoir et leur influence traditionnels. Les dirigeants de tiers états, cependant, soutenus par la noblesse et le clergé, cherchaient à élire des représentants du peuple, à mettre en place un syndicat spécial pour les tiers états et à revendiquer une plus grande autonomie pour les villes et provinces sous la domination française.

Dans cette agitation, des mouvements ont commencé à se former pour restaurer le Parlement de Navarre. Face à une opposition croissante et des appels à la restauration du Parlement, l'Intendant du royaume de Navarre a convoqué une réunion à Pau, mais en raison de pressions exercées par les manifestations dans les rues, la réunion a été transférée à Saint-Jean-de-Luz. De plus, une compagnie de chasseurs cantabriques a été envoyée pour assurer le calme lors de la réunion. Pendant la réunion, le nouveau parti patriotique, "Alderdi Abertzale", a appelé non seulement à renforcer les cours locales, mais aussi à réclamer la représentation de la noblesse et du clergé, le suffrage universel pour chaque individu, la formation d'un syndicat spécial pour les tiers états, et un engagement envers les libertés prises dans les villes et provinces du royaume de France[1].

Un appel aux États généraux de Versailles

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Le 8 août 1788, les représentants des états pondérés du royaume de France (Louis V de Navarre) ont lancé un appel à Versailles pour des États généraux, une tradition qui n'avait pas été pratiquée en France depuis 175 ans. Le troisième état de Navarre, représenté par le parti Alderdi Abertzale, a pris part à l'appel à Versailles, mais sans la participation du clergé et de la noblesse, qui étaient en faveur de la protestation. Les labourdins, quant à eux, préparent un cahier de doléances et organisent une manifestation en décembre 1788: lors de l'appel royal, Bayonne, Dax et Saint-Sever sont inclus dans le Labourd. Les frères Garat ont pris l'initiative et ont résolu ce point.

Le 19 avril 1789, samedi, les 35 paroisses du Labourd sont réunies à Ustaritz pour élire des représentants à envoyer à Versailles. Les délégués des trois ordres, chose totalement inhabituelle, se sont réunis pour prendre des décisions au Labourd car c'était le tiers état qui avait le pouvoir de décision. La réunion a commencé à dix heures du matin à l'église de Saint-Vincent, avec à sa tête Dominique Joachim Urtubiaco, âgé de 16 ans et bailli. Pendant ce temps, des accusations d'achat de voix ont été entendues; en effet, Ithurbide était l'un des autres candidats, en concurrence avec les jeunes Garat, et le second était considéré comme un candidat de basse niveau au Labourd. Les Labourdins, comme en décembre 1788, se sont réunis à Saint-Jean-de-Luz au début d'avril 1789 et ont écrit une déclaration au roi le 4 avril 1789[1]

« Les lettres de convocation adressées à la Navarre violent la constitution du Royaume.

  1. Elles sont adressées au sénéchal ou au représentant, et non aux États [de Navarre].
  2. Elles violent le droit de délibération sur les questions du Royaume en accordant à la Constitution le droit de délibération sur les États généraux de Navarre, car ils sont légitimement les représentants de la nation.
  3. Elles prétendent que la nation navarraise doit obligatoirement envoyer des députés, bien que Louis XIV ait reconnu le droit de le faire ou non.
  4. Elles appellent la Navarre une province du Royaume de France, alors que la Navarre n'a jamais cessé d'être un royaume distinct et unique[3] »

Le 17 juin, les États généraux se sont ouverts à Versailles ; pendant ce temps, dans le Pays basque, les cahiers de doléances sont préparées, dernière des États généraux de Navarre, avec un ton différent de celui du Béarn et du Labourd, qui protégeaient leur propre "constitution" (c'est-à-dire, leur structure institutionnelle et leurs lois). Dans ces cahiers, il est affirmé que la Navarre existe séparément de la France, mais le roi était invité à "visiter" la Navarre, comme c'était la coutume, car il devait rendre justice dans cette région. Les Navarrais parlaient de former une confédération avec le Royaume de France. Finalement, les délégués navarrais ont décidé d'envoyer des mandataires (une députation) à Paris, contre l'avis du roi.

Dans cette députation, Logras, la Marquise d'Olhonce, et Étienne Polverel, le syndic, se sont particulièrement distingués. Les délégués navarrais sont arrivés à Paris fin juillet, "comme des ambassadeurs d'un autre monde", selon Destre. Cependant, à ce moment-là, le roi ordonne le retrait des États généraux, et la prise de la Bastille a eu lieu le 14 juillet. Les délégués ont été présentés à l'Assemblée nationale française, avec des pouvoirs limités, mais ils ont immédiatement déclaré que leurs ordres et pouvoirs étaient inutiles là-bas. Les délégués de Soule, comme ceux de Navarre, n'ont pas participé aux réunions de juin et juillet car ils n'étaient pas présents à Paris. Ils sont arrivés le 4 août.[4]

REPRÉSENTANTS BASQUES AUX ÉTATS GÉNÉRAUX À PARIS (1789)

LAPURDI (Pays des Basques) NAFARROA (Royaume de Navarre)[oh 2] ZUBEROA (Pays de Soule)
Premier état Jean-Louis-Xavier de Saint-Esteven Étienne-Joseph de Pavée de Villevieille Jean-Baptiste-Auguste de Villoutreix de Faye
Second état Anne-Henri-Louis de Caupenne Bertrand-Dominique-Joachim de Logras Jean-Bernard d'Uhart
Tiers état Dominique Garat Hiriarte
Dominique Joseph Garat
Arnaud de Vivié
Jean-Baptiste Franchisteguy
Jean-Pierre d’Arraing
Jean-Pierre d'Escuret-Laborde

Dernière session de l'administration régionale du Pays basque nord

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Un soulagement du Congrès national dans la nuit du 4 août
 
Dominique J. Garat, dernier représentant et haut fonctionnaire de Lapurdi à Paris
 
Tableau de la constitution du royaume de Navarre d'Étienne Polverel... XI de l'essai p. (octobre 1789)

Le 4 août, lors de la session nationale, une agitation importante a eu lieu. Des cris étaient entendus : "Liberté, fraternité, égalité, ou la mort !" La fin des privilèges des états était revendiquée, mais lorsque l'ambiance semble s'apaiser avec l'accord à ce sujet, le représentant breton Le Guen de Kergal a également réclamé la fin des "privilèges collectifs". Les Basques, sous la direction des frères Garat (Dominique Joseph et Dominique Zaharra ), ne pouvaient pas croire en silence la proposition du département, et ils ont protesté contre les discours violents tenus par les députés français à l'assemblée.

Les délégués d'Uhart et Escuret-Laborde ont également pris la parole contre cela, défendant les privilèges régionaux. Les frères Garat, ont vu leur propre rôle compromis dans cette agitation révolutionnaire et ont voté en faveur de l'abandon de leurs privilèges et pouvoirs spéciaux dans le domaine juridique et fiscal[5]. De cette manière, non seulement les privilèges et les pouvoirs des deux états ont été abolis (et dans cela, les délégués navarrais étaient d'accord), mais également ceux des "provinces, principautés, territoires, cantons, villes et communautés de citoyens" pour l'ensemble du royaume de France. Cette déclaration a été ajoutée à la Constitution française de 1791[5].

Les frères Garat étaient les seuls mandataires du Biltzar des Labourdins selon la volonté du roi, et ils ont entendu ce qui s'était passé lors de l'attaque, lors de l'assemblée tenue le 1er septembre, Piarres Ithurbide a adressé un discours accusateur aux représentants Labourdins contre les frères Garat, et certains membres ont exprimé leur indignation unanime. [6] Les Navarrais maintinrent leur statut. Ils ont exprimé au roi que les fors de Navarre seraient appelés à se prononcer sur le décret de l'Assemblée nationale française. Le roi a accepté cela, ordonna également au marquis de Longo de convoquer cette session, prévue pour le 19 septembre. À ce moment-là, la liberté des fors de Navarre était plus fictionnelle que réelle. Le marquis de Longo a reçu une lettre de l'office du secrétaire d'État du roi, l'informant que la convocation serait annulée si elle ne soutenait que partiellement le décret de l'Assemblée nationale française par son intermédiaire. Cependant, avant que cette lettre ne lui parvienne, le marquis de Longo avait déjà annulé la convocation[7].

Le premier et le deuxième état de la Navarre s'étaient totalement opposés à ce décret ; quant au tiers état, il était partagé. Comme il n'y avait pas d'accord unanime, le marquis de Longo abandonne les délibérations le 22 septembre. Il avait été dit aux représentants navarrais lors de leur réunion après celle de l'État de Béarn qu'ils seraient suivis par une clause; Les délégués navarrais ont protesté. Cependant, le Parlement de Navarre s'est à nouveau réuni du 17 au 22 octobre, pour la dernière fois[7]. Pendant ce temps, le 8 octobre, l'Assemblée nationale française débattait de la question de désigner le roi "roi des Français" plutôt que "roi de France et de Navarre". Les Labourdins (Dominique Joseph et Dominique Zaharra), cependant, ont répondu à cette tentative attaquante. Ils ont argué que cela jouerait en faveur de l'Espagne et constituerait un déni des droits du roi sur la Haute et Basse-Navarre [7].

Le 12 octobre, l'Assemblée nationale française a tenu sa prochaine réunion. Là-bas, elle a reçu une lettre de Polverel et, en suivant l'explication donnée par Garat, il prévient que la Navarre n'est pas une province française mais un royaume, et que le titre de "roi des Français" empiéterait sur les droits du roi sur la Haute et Basse Navarre. Au nom de la liberté, Garat a d'abord demandé l'approbation des États de Navarre. Bien que dans un premier temps l'Assemblée nationale française semble prête à approuver, immédiatement les autres territoires dotés d'États commencèrent à exiger la même chose, même s'ils n'étaient pas des royaumes. L'Assemblée a donc décidé que "rien ne sera ajouté à l'expression Roi des Français". Entre-temps, les tribunaux de Navarre font un autre effort, en imprimant et en présentant la Table de la Constitution du Royaume de Navarre et de ses relations avec la France, un document historique très influent[8]. Cependant, cela n'a pas réussi. Peu à peu, se voyant impuissants, plusieurs municipalités navarraises ont commencé à accepter un nouveau régime : La Bastide-Clairence le 8 décembre, Saint-Jean-Pied-de-Port le 13 de ce mois[7].

« "les privilèges particuliers dont les Navarrais jouissaient à la patrie leur constitution antique que leur était précieuse et qui, malgré les atteintes du gouvernement, rendait dans sa pauvreté le peuple navarrais moins malheureux que celui de beaucoup d'autres provinces..." .[7] »

Nouvelle organisation politique française

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Changements dans les noms des villes basques (octobre 1793 - avril 1795)
ville nouveau nom
LABOURD Ahurti Liberté
Ainhoa Mendiarte
Arbonne Constante
Bayonne Port-de-la-Montagne
Beskoitze Hiriberry
Saint-Jean-de-Luz Chauvin-Dragon
Hiriburu Tricolore
Itsasu Union
Kanbo La Montagne
Luhuso Montagne-sur-Mer
Sara La Palombière
Senpere Beaugard
Urketa Laurier
Uztaritze Marat-sur-Nive
Zuraide Mendialde
BASSE-NAVARRE Arrosa Grand-Pont
Baigorri Thermopyles
Donamartiri Nive-Montaigne
Donapaleu Mont Bidouze
Donazaharre Franche
Donibane Garazi Nive-Franche

Rapport sur la nécessité et les moyens d’anéantir les patois et d’universaliser l’usage de la langue française (Wikisource) Il est donc proposé de créer un département regroupant Bayonne, les territoires basques et Biarritz. Les représentants basques, faisant référence aux différences linguistiques et culturelles avec Biarno, ont proposé de créer une conception administrative alternative qui unirait les trois territoires basques en un seul département. Tout au long de cette période, le basque était la langue quotidienne dans trois territoires, composés d'une majorité monolingue et d'une petite partie de basco-gascons bilingues, et les représentants basques ont souligné la réalité linguistique différente du peuple basque à l'Assemblée nationale française.

En janvier 1790, la nouvelle Assemblée nationale de France, entame un autre débat. Au nom de l'égalité des droits, ils souhaitaient abolir les identités provinciales et régionales pour éliminer les divisions. À Paris, l'Assemblée nationale délibère et a décide d'adopter un nouveau plan administratif, mettant fin à toutes les relations traditionnelles entre les communautés dans l'administration[oh 3].

Ainsi, il a été proposé de créer un département réunissant Bayonne, les provinces basques et le Béarn. Les représentants basques, mettant en avant les différences linguistiques et culturelles avec la Béarn, ont proposé un plan alternatif pour regrouper les trois provinces basques dans un seul département administratif[9].

Pendant cette période, le basque était la langue quotidienne dans les trois provinces, principalement utilisée par la majorité des locuteurs monolingues avec une petite partie des bascophones mixtes. Les représentants basques ont souligné la réalité linguistique différente des bascophones dans l'Assemblée nationale française[oh 4].

Au début de février, les paroisses et les vallées du Pays basque nord se sont réunies à Donapaleu, désireuses de soutenir la création d'un département basque. Le 26 février, un nouveau département des Pyrénées-Atlantiques a été créé, regroupant la Béarn et les provinces basques en une seule unité administrative[4], selon le plan de Jacques Guillaume Thouret[7]. Cependant, les Basques étaient minoritaires dans cette unité territoriale. La répression et l'intimidation se sont répandues semant le désespoir et la tristesse parmi le peuple basque, et, selon Manex Goyhenetche, a posé un jalon dans l'ère de la Révolution au Pays Basque Nord[1],[4].

En février 1790, le décret pour créer le système départemental français a été suivi par la création du département des Pyrénées-Atlantiques. Le Biltzar du Labourd accueille défavorablement cette décision française et même, destitue les frères Garat qui finalement soutiennent le nouveau système départemental français. En même temps, des réorganisations des institutions locales plus petites réformées, regroupant par exemple Ustaritz et Bayonne, qui étaient nouvellement séparées dans les années 1780, comme demandé par le Biltzar. Cependant, les décisions françaises rapidement posent des problèmes[oh 5]. Selon le récit historique du livre Garat pastorala Pagolan, à ce moment-là, de nouveaux citoyens actifs étaient inscrits en politique : il n'y aurait pas de suffrage universel ; en effet, désormais, moins de 15% des Basques auront le droit de vote, et moins de 1% seront candidats, contrairement au principe d'une voix par foyer qui était jusqu'alors utilisé dans les congrès locaux[4].

En 1791, la constitution a été approuvée en France, réaffirmant l'organisation administrative votée en 1790[10]. Dominique Garat refuse distribuer des exemplaires de cette constitution, affirmant qu'il n'existait pas de version basque[5]. Les délégués de Navarre (Franxistegi, Polverel) décidnt de ne pas participer aux élections, car le roi Louis XVI s'était lui-même nommé "Roi des Français" le 4 septembre 1791, au lieu de "Roi de France et de Navarre", arguant qu'ils ne faisaient pas partie de la France et ont proposé de créer une entité territoriale séparée. La France était alors un royaume et, par conséquent, le régime politique précédent est maintenu. Cependant, les affaires politiques ont lentement basculé vers une révolution imminente. En septembre 1792, la Première République française est proclamée, et les jacobins ainsi que la Convention nationale prennent le contrôle. Peu de temps après, en janvier 1793, Louis XVI, roi de France, est arrêté et exécuté, et une alliance internationale a été formée contre la France révolutionnaire[1].

Guerre de la Convention

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Batailles et événements de la Guerre de la Convention dans les Pyrénées au Pays basque
 
Plaque d'entrée de l'église Jondoni Martine en l'honneur de Maialen Larralde, à Sare.

L'armée française au Pays basque nord

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En 1793, la Révolution française a provoqué l'arrivée d'un nouveau régime dans les territoires du Pays Basque nord, qui sont restés sous contrôle militaire avec l'arrivée de l'Armée des Pyrénées occidentales. Les tensions ont continué à monter jusqu'à l'exécution de Louis XVI en janvier 1793, lorsque le clergé fut tenu de prêter serment à la Constitution civile de l'Église française. La plupart des prêtres basques refusèrent et, en échange, on donna l'ordre d'installer des prêtres « constitutionnels ». Dans certains endroits, les églises furent transformées en temples de la raison. Cela a suscité des tensions entre les autorités révolutionnaires françaises et les citoyens basques.

Au début de l'année 1793, lorsque la Guerre de la Convention s'intensifiait, un appel fut lancé aux Basques pour rejoindre l'armée française. Cependant, peu répondirent, et les Basques se tournèrent contre la République française. Pour intimider les Basques, les autorités républicaines locales envisagèrent de répandre la terreur, ce qui les conduisit à observer avec inquiétude le départ de dizaines de jeunes de Sare et d'Ainhoa, abandonnant leurs postes et fuyant vers Bera.

Au début de la révolution du Ventôse (fin février 1794), quelques jeunes ont chanté des vers contre les prêtres constitutionnels à Espelette. Cela a profondément irrité les autorités révolutionnaires ; le maire Duhalde et le juge Gorostarzu furent arrêtés, jugés et exécutés à Bayonne le 24 du Ventôse (11 mars)[11].

la panique

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Première page du rapport.

Les autorités de la République, dirigées par Jean-Baptiste Cavaignac et Jacques Pinet, décident de mettre en œuvre une vaste répression dans le sud du Labourd. Le basque est interdit dans la vie publique, affirmant que « le fanatisme parle basque[12] ». Trois mois plus tard encore, à Paris, le « Rapport sur la nécessité et les moyens d'anéantir les patois et d'universaliser l'usage de la langue française, ou Rapport Grégoire » est adopté le 16 mai (4 juin), déclarant explicitement le français « langue de la liberté ».

Au printemps 1794, des milliers de citoyens ont été forcés hors de chez eux, regroupés selon leur âge et leur sexe, puis poussés dans une longue colonne vers une distance d'au moins 80 kilomètres de leur domicile, passant par Saint-Jean-de-Luz et la plupart atteignant difficilement les environs de Capbreton[oh 6] Des centaines de personnes sont mortes, [oh 7] et leurs biens ont été incendiés ou confisqués.

Quelques mois plus tard, après la chute de la Convention nationale jacobine, un grand nombre de déportés ont été autorisés à revenir, mais à ce moment-là, leurs propriétés étaient entre les mains des "francophiles" français. Un procès a eu lieu à la Convention de Berolisko pour clarifier les responsabilités, mais aucun haut fonctionnaire n'a été sérieusement jugé. Les habitants du sud du Labourd ont commencé à être attaqués par des bandits et des brigands pour qu'ils puissent tirer profit de la situation. Par exemple, un groupe a tué

Après quelques mois, de nombreux déportés cherchèrent à revenir lorsque la Convention nationale jacobine échoua, mais leurs propriétés étaient alors entre les mains des « patriotes » français. [13] Un procès a eu lieu pour clarifier les responsabilités lors de la Convention de Berolis, mais aucun haut fonctionnaire n'a été reconnu coupable. Les citoyens étaient agités dans le sud du Labourd, avides de vengeance et de retour à la normale. Par exemple, un groupe a tué M. Mundutegi d'Uztaritz, car il avait protégé le groupe de déportation. Beaucoup de victimes et de dissidents du nouveau régime ont été contraints de s'exiler.[14]

Après que les Basques aient perdu leurs fors

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" Les Basques français n'ont pas adopté les coutumes françaises, ni leur langue, et les Basques espagnols n'ont pas non plus adopté les usages, ni la langue espagnoles. Tous deux sont restés Basques (...) Les Basques espagnols et les Basques français pensent que tout le monde est un membre de la noblesse, et ils ont développé cette idée dans leurs propres lois. C'est vraiment étonnant, car tous les individus des sept provinces sont d'accord sur cette idée.
Dominique Joseph Garat, Rapport à Napoléon Bonaparte, 1803 [15]

Coercition de l’État-nation français

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Bien que la période la plus difficile de la Première République française soit terminée, la répression a laissé des conséquences néfastes et inoubliables dans l'esprit collectif basque. [oh 8] C'était la première tentative d'extermination des Basques dans la nouvelle structure nationale française. L'idée selon laquelle la modernité était liée à l’État-nation français excluait les Basques d'une identité culturelle et politique unique[13]. Au Pays basque, la centralisation s'est établie à trois niveaux : l'abolition provinciale, l'unité territoriale et l'uniformité linguistique, qui ébranlent de haut en bas les trois aspects les plus singuliers d'une communauté historique : la politique, la géographie et la langue.

Pendant ce temps, Louis XVIII de Bourbon régne avec le titre de roi de Navarre de 1815 à 1824, mais ce n'était que symbolique, car il n'avait aucune réelle signification juridique ou politique : le royaume de Navarre n'existait plus. Les terres d'Amikuze, Baigorri, Oztibarre, Garazi et de Zuberoa sont restées ; En 1838, des commissions syndicales furent officiellement acceptées pour gérer ces zones, et l'accord sur les limites de décembre 1856 réglementa le consortium des vallées des Pyrénées depuis Añellar jusqu'à la baie de Txingudi.

En Basse-Navarre, à l'exception de la région des Aldudes, le tiers état s'est prononcé en faveur du nouveau système français, estimant qu'il était contraire à la noblesse locale. Les citoyens de Baigorri soutiennent Jean Isidore Harispe, formant une armée de 1 800 Xazurs (ou chasseurs) basques et combattant pour la République française. Cependant, au cours des décennies suivantes, les Basques quittèrent en grand nombre l'armée française, accusés d'exclusion et d'abus. [oh 9]

La proposition du département basque

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Pays basque nord dans le nouveau département des Basses-Pyrénées : les communes de Bayonne et Mauléon.

Cependant, vers 1800, Dominique Joseph Garat, qui était l'un des fonctionnaires de Bonaparte, proposa la possibilité de créer une principauté basque sous la France. Bien que certaines parties de cette proposition aient commencé à être mises en œuvre au Pays basque espagnol après 1810[16], la solution de Bonaparte incluait également les territoires d'Aragon et de Catalogne, la zone située au nord de l'Èbre, et Bonaparte n'a pas considéré ce plan pour le Pays Basque Nord. Pays.

En 1804, le Code civil de Napoléon est décrété, qui rompt avec la conception traditionnelle de l'héritage et de la propriété, conduisant au partage des exploitations familiales et à la réduction de l'utilisation des terres publiques (l'État exige certains impôts), favorisant une nouvelle vague d'émigration. [17] Parallèlement à ces événements juridiques et institutionnels, diverses expéditions militaires ont imposé des exigences, des recrutements et des obligations aux citoyens, par exemple pendant la guerre de la péninsule ibérique. [18]

Contre la République française

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Un demi-siècle plus tard, le préfet de Pirinio Apaleta déplorait qu'il y ait 80 000 habitants de moins sur le territoire sous sa juridiction à cause de l'impôt et du service militaire ; Fermin Lasala de Donostia a souligné ce commentaire pour défendre la singularité institutionnelle d'Alaba, de Gipuzkoa et de Biscaye, juste avant la suspension des chartes de ces territoires basques (1876) . [19] La majorité des Basques du Pays Basque Nord a continué à s'opposer à l'idée de la République française pendant plus d'un siècle, dans l'espoir de restaurer l'Ancien Régime et ses institutions.

Remarques

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  1. a b c d e et f Manex Goyhenetche, Histoire générale du Pays basque IV : Révolution de 1789, t. 4, Donostia / Bayonne, Elkarlanean, , 432 p. (ISBN 2913156460 et 9782913156463, OCLC 492295167)
  2. a et b Lapurdi. Historia - Auñamendi Eusko Entziklopedia, 2019-07-03
  3. Baionako apezpikua, représentant de l'Église. Elizagarai, Grand Prêtre, représentant de l'Église. Marquise de Lograsque, représentante de la Noblesse. Marquise d'Esquille, représentante de la Noblesse. Polverel, représentant de la Noblesse. Fargues, représentant du Tiers État. Martixe, représentant du Tiers État. Baihaut, représentant du Tiers État. la France.
  4. a b c et d Frantxoa Caset, Domingo Garat pastorala, Oskaxe Zola, 2019, 126-14, La Révolution, les Basques et les frères Garat /Iraultza, Euskaldunak eta Garat anaiak Iraultza, Euskaldunak eta Garat anaiak
  5. a b et c Bolinaga, I. 2012, 30-36. or.
  6. Martinez Garate, L.M. 2019, p. 48-67
  7. a b c d e et f Martínez de Muniain, Emilio V. 1993, p. 173-188
  8. Tableau de la Constitution du Royaume de Navarre et de ses rapports avec la France de Polverel
  9. Bolinaga, I. 2012, p. 61-66
  10. Bolinaga, I. 2012, p. 62-66
  11. Zabala, A. 1989, p. 85-88
  12. Bolinaga, I. 2012, p. 87
  13. a et b Watson, C. 2003, p. 58
  14. Watson, C. 2003, p. 130
  15. Espartza, Jose Mari. 2012, 52. or.
  16. Bolinaga, I. 2012, p. 201-211
  17. Douglass 2005, p. 133-134.
  18. Douglass 2005, p. 130.
  19. Mina 1990, p. 307-308.
  1. Le tiers état était considérablement limité et, désormais, les décisions importantes restaient entre les mains de la noblesse et de l'Église.
  2. Les représentants navarrais refusèrent de participer aux réunions des États. Cependant, à partir du mois d’août, ils ont commencé à participer au Congrès national, en tant qu’« observateurs ».
  3. Auñamendi Entziklopedia. Lapurdi, Edad Contemporanea
  4. Bolinaga, p. 61-66. Comparez avec les données de 1866 : à cette époque, 95 % de la population utilisait le basque comme langue principale, alors que le nationalisme français n'était pas pleinement entrée en vigueur ; voir Watson, p. 87. À cette époque, Biarritz, Bayonne et [[Bidache]] étaient majoritairement de langue gasconne.
  5. Le nouveau district municipal s'est heurté à l'opinion des citoyens d'Uztaritz et à la langue des deux municipalités. Une première réunion a failli être annulée, car la plupart des représentants de Bayonne ne parlaient pas le basque.; Auñamendi Entziklopedia. Lapurdi, Edad Contemporanea.
  6. Différents décomptes ont été réalisés, de 3 000 à 10 000 personnes.
  7. Les estimations vont de quelques centaines à 1 600.
  8. Selon Watson, la base philosophique de la nouvelle République française était les Lumières et sa vision dichotomique et exclusive de la réalité ; voir Watson, p. 58.
  9. Cette question a été discutée par Dominique Joseph Garat avec Napoléon Bonaparte.

Notes et références

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Bibliographie

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  • Bolinaga, I. (2012), Le Garat alternatif. Le projet napoléonien de création d'un État basque, Donostia, Txertoa . (ISBN 978-84-7148-530-4)
  • Espartza, José Mari (2012), Le Pays Basque en cartographie et témoignages historiques, Andoain, Berria, (ISBN 978-84-936037-9-3)
  • Mina, María Cruz. (1990). Historia y Política: Las Vicisitudes de una Ley 150 Años del Convenio de Bergara y la Ley del 25 -X - 1939 (Eusko Legebiltzarra/Parlamento Vasco) (ISBN 84-87122-14-0)
  • Martinez Garate, Luis Maria. (2019). Ustaritz 1789; Lapurdi en la Revolución francesa. Nabarralde (ISBN 978-84-09-10179-5)
  • Watson, Cameron. (2003). Modern Basque History: Eighteenth Century to the Present. University of Nevada, Center for Basque Studies (ISBN 1-877802-16-6)
  • Zavala, Antonio. (1989). Frantziako Iraultza eta Konbentzioko Gerra bertsotan. Donostia: Etor (ISBN 84-85527-62-3)

Voir aussi

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Liens externes

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[[Catégorie:Fors]] [[Catégorie:Révolution française]]