Utilisateur:MatildeMafalda/Brouillon

Biographie modifier

Une enfance difficile modifier

Jane Avril, de son vrai nom Jeanne Louise Beaudon, naît à Paris en Juin 1868, d'une mère parisienne qu'elle décrit comme fort jolie, et d'un père italien étant «le marquis Luigi de Font.» Lui qui était venu s'amuser et fuir une famille très stricte, s'y retrouvera ruiné.[1] Elle décrit sa mère dans ses mémoires comme quelqu'un de profondément malade qui «sous les dehors les plus charmeurs et les plus séduisants, dissimulait une nature de méchanceté cruelle et morbide.» Après la séparation de ses parents due, selon elle, au caractère de sa mère, elle est prise en charge par ses grands-parents à Étampes. Vers cinq ans, elle est envoyée au couvent, où elle vit des moments doux et aimant de sa vie comme elle le dit dans ses mémoires : « J’étais choyée de toutes ainsi qu’une poupée vivante, très aimée et très caressée.»[1] Aux alentours de neuf ans, sa mère décida soudainement de la reprendre auprès d'elle. C'est là que commence ce que Jane nomme « sa lamentable et douloureuse enfance »[1], sa mère la bat avec cruauté, l'insulte et passe la plupart de son temps à interroger ses cartes ou à s'affairer à toutes autres sortes d'occultisme. Personne ne se doute de ce que vit la petite Jeanne puisque sa mère prend soin de ne pas laisser de marque au visage et qu'elle est de présentation noble en public[1]. Jeanne vit alors en silence son martyre de longues années et développe des idées suicidaires.[1] Un ancien amant de sa mère revient alors dans leurs vies au moment où la mère de Jeanne recommence à travailler pour de petits travaux. Il leur paie le loyer ainsi qu'une pension, la pension des demoiselles Désir, où Jeanne se sent bien et aimée au chevet de ses femmes « très bonnes et très pieuses»[1], qui la « gâtaient beaucoup»[1]. Elle s'y épanouit beaucoup mais ne dit pas les malheurs qu'elle subit par sa mère jusqu'au jour où la directrice de l'école découvre les marques sur l'enfant. A ce même moment, sa mère décide de la retirer de la pension par manque d'argent, mais dans un acte de charité chrétienne envers Jeanne, la directrice décide de payer elle même les frais de la pension pour Jeanne. Malgré cela, la mère continue de battre sa fille, et bientôt Jeanne se mit à avoir des séquelles nerveuses de ces maltraitances[1]. De plus, sa mère l'envoie faire l'aumône dans les rues en chantant puisque son amant lui a fait remarquer la belle voix de l'enfant, ce qui ajoute à son martyr.

N'en pouvant plus du martyre qu'elle vivait, Jeanne décide de s'enfuir une première fois de la maison de sa mère et d'aller se jeter dans la Seine.[1] Cependant, elle change d'avis et court finalement se réfugier chez l'ancien amant de sa mère qui avait payé pour sa pension. Avec sa nouvelle femme ils prennent la résolution de protéger l'enfant et de la cacher de sa mère biologique. Malheureusement les mauvais traitements de sa mère eurent sur Jeanne des conséquences nerveuses qui obligent ses bienfaiteurs à la confier aux soins d'un hôpital psychiatrique, la Salpêtrière .[1]

L'internement modifier

Atteinte de la maladie appelée « danse de st Guy » ( ou la chorée), elle est placée à l’hôpital de la Salpêtrière (Paris) dans le service du professeur Charcot où, malgré son jeune âge, elle est placée avec les femmes et non avec les enfants.[1]

Lors de son hospitalisation, sa mère lui rend visite régulièrement, ce qui représente un véritable  calvaire pour l’enfant. Les médecins finissent assez rapidement par n’autoriser ces visites qu’au parloir, prétextant une punition de l’enfant, pour la protéger de l’effet toxique  de sa mère.[1]

 Dans "mes mémoires "elle décrit l'univers psychiatrique de l'époque qu'elle a alors fréquenté. Elle qui avait tant souffert de la maltraitance maternelle déclare avoir gardé de cette époque d’internement « un souvenir mélancolique et doux (…) heureuse et choyée de tous».[1]

 C’est lors de cette hospitalisation, qu’à l’occasion d’un bal masqué elle découvre la danse et se laisse « emporter dans un éblouissant tourbillon, sans plus rien voir ni personne »*(page 22)[1].

Lorsque , déclarée guérie par les médecins elle sort de l’hôpital, ils mettent alors en garde sa mère contre la maltraitance qu’elle fait subir à sa fille. Au bout de 3 jours, d’après Jane, les sévices maternels reprennent de plus belle. Celle-ci utilise notamment l’enfant pour tenter de soutirer de l’argent à son père. Celui-ci ruiné suite à de  mauvaises affaires financière succombe à une congestion cérébrale. N’en pouvant plus des souffrances infligées par sa mère et désormais loin de l'hôpital qui lui offrait du répit, Jane s’enfuit définitivement .[1]

Elle ne déclarera garder de séquelles nerveuses qu' : «un curieux froncement des narines qui fait frissonner son nez comme un lapin»[2]

La rencontre avec la danse et l'Art modifier

Hébergée quelque temps par un jeune homme amoureux d’elle , elle fait, en toute ignorance de « ces choses là » ses premières expériences sexuelles. [1]

 L’échec de cette relation la pousse au désespoir, elle  évite cependant le suicide, elle désirait se jeter dans la Seine, grâce a la rencontre d’une prostituée qui la fait héberger pour la nuit dans un hôtel.[1]

Jane sera éternellement reconnaissante envers cette dernière qui ne l’entraîna pas dans « son triste milieu ». Une bande de « joyeuses filles » rencontrées dans la rue, l’emmènent le lendemain au bal Bullier, dont Wyzewa parlera d’ailleurs dans son œuvre "Valbert ou les Récits d’un jeune homme"[3]. Jane écrit dans mes mémoires :« de ce fameux soir date ma vocation de danseuse, ma seule raison d’être désormais »[1]. A partir de ce jour elle est confrontée aux réalités de l’existence : elle découvre la valeur de l’argent, la nécessité de payer son logis et sa pension. Elle trouve des amis qui « au nom de l’art»  deviennent ses protecteurs et lui permettent de subsister. Elle ne vit que pour les jours de danse au bal Bullier, ne se souciant  pas, bien que chétive, de sa santé et du quotidien. Elle écrit :« J’appartenais toute à la danse et rien d’autre n’existait pour moi !»[1]Bien que bénéficiant de protections masculines, et repérée de nombreuses fois,  elle ne voulut jamais  dépendre d’un homme ayant trop souffert de la domination de sa mère, elle ne voulut jamais en subir une autre. L'indépendance et la liberté était alors, selon elle, une certitude de ce qu'elle voulait pour son avenir.[1]

Naïve et ingénue, selon elle, elle n’a à cette époque aucune conscience qu’elle mène une vie réprimée par la morale . Multipliant les prétendants, elle fréquente les musées , les cafés où se côtoient de nombreux poètes dont Paul Verlaine, Mallarmé, Théodore de Banville  et d’autres encore(page 35)[1] Elle parvient à se faire engager comme écuyère à l’hippodrome de l’avenue de l’Alma où elle  progresse rapidement et se fait remarquer. Mais c’est la danse qu’elle préfère : « tout cela ne valait pas la danse ! »[1] écrira-t-elle dans mes mémoires . Elle travaille aussi à l'exposition universelle de 1989 qui fut, selon elle, une réelle ouverture du point de vue de la danse puisqu'elle est témoin de chorégraphies de danses venues de partout dans le monde. 

Le Moulin Rouge et les cabarets modifier

 
Charles Zidler

A l’ouverture du Moulin Rouge, en 1889, elle découvre ce nouveau cabaret dirigé par  Charles Zidler « grand vieillard aux favoris blancs, haut en couleur ».[1]

C’est la période où les quadrilles rencontrent un grand succès. Dansant seule, elle fait sensation et est baptisée dans un premier temps «  Jane la folle »[1]. Cette façon qu'elle a de danser elle la décrit ainsi dans ses mémoires : "j’improvisais et voilà tout, selon ce que m’inspirait la musique, comme je la sentais et pour ce qu’elle exprimait à ma sensibilité"[1]

Séduit par sa façon de danser seule au contraire des autres danseuses[2]Charles Zidler lui propose de l’engager, elle refuse une fois encore au nom de son indépendance. Il la prend cependant d’une certaine façon  sous sa protection. On dit alors d'elle que : «De toutes les filles du quadrille, c'est la plus fine et la plus sensible, la plus libre, la plus gaie» [2]

« Entourée d’artistes, de fins d’esprit, d’auteurs célèbres d’hommes distingués et par eux encensée, je commençais de sentir éclore un sentiment de vanité »[1] écrit-elle à ce propos.

 Elle côtoie bien sûr les figures du Moulin Rouge : « La Goulue »,  l’une des reines du quadrille célèbre  pour son final avec « Valentin le désossé ». On la surnomme alors «La Mélinite» pour sa façon explosive de danser et d'être avec ceux qui la rencontre.

Les peintres sont également nombreux au Moulin Rouge. Parmi eux Toulouse Lautrec a fait sa célébrité en en peignant les artistes et les revues. (liste des autres peintres page 57). Elle est pour lui une muse, une égérie.

Elle fréquente Montmartre ; ses cabarets où l’on écoute notamment le chansonnier Aristide Bruant.

Charles Zidler se faisant de plus en plus insistant elle accepte enfin  de faire partie du quadrille  et d’être rémunérée. Elle perd une partie de son plaisir avec ce nouveau statut, mais se « dédommage  aux accords entrainant des valses ».[1]

Bien que très sollicitée par les peintres, photographes, et même le cinéma, elle néglige de se rendre aux invitations. Si Toulouse Lautrec parvint à  faire son portrait c’est parce qu’il venait chez elle , à domicile , la faire poser après l’avoir emmenée manger au restaurant . Elle reconnu d’ailleurs que c’est à Toulouse Lautrec qu’elle  devait sa célébrité  dès la première affiche qu’il réalisa d’elle.[1]

Elle prend également l’habitude de dîner presque tous les soirs au célèbre restaurant « Le Chat Noir ». Elle y improvise « quelques danses «  accompagnée au piano par Ch de Sivry, et au violoncelle par le virtuose Martinetti.

C’est à cette période qu’ Alphonse Allais, l’humoriste, la demanda en mariage, elle s’empressa de décliner.

Elle s’intéresse « assidue et fervente admiratrice »[1] aux ballets de pantomime où excellent Félicia Mallet, Matrat, Fordyce, Mévisto.[1]

Fréquentant théâtres, cabarets, salles de spectacles, elle ne ménage pas sa santé et tombe malade des bronches. C’est son ami Théodor de Wyzéwa , critique et auteur, qui l’aide à se soigner et à entrer à la maison de santé de Villepinte. Mais elle ne supporte pas les « simagrées » des religieuses, qui la considèrent comme une pècheresse  dont il faut racheter l’âme. Elle supplie son ami de l’aider à quitter ce lieu. Il cède et consent à l’amener au Moulin Rouge le soir même, où, de ses propres dires elle dansa « éperdument ce soir là comme jamais »[1], se sentant des ailes ! En convalescence sur la côte d’azur elle y rencontre Auguste Renoir à Toulon.[1]

Fidèle Zigler accueille chaleureusement Jane à son retour au Moulin Rouge après chacune de ses escapades.[1] Elle danse aussi pour le Jardin de Paris, des numéros de danse de cancan, créés par elle-même et qui lui donnent alors des contrats dans le monde entier.[1]

Elle accepte également un engagement aux Folies Bergères où elle crée le rôle de Pierrot dans un ballet pantomime de René Martin : L’Arc-en-Ciel. Les Folies-Bergère étaient alors le music-hall le plus élégant et le plus fréquenté de Paris. Le directeur, Marchand, accueille des vedettes du monde entier qu’il engage à prix d’or.

Charles Zidler passe la main du Moulin Rouge à son acolyte et cofondateur Joseph Oller à cause de soucis de santé.[1] Dans le "Décadents" cabaret dirigé par Jules Lévy, avec Mary Belford, elle joue quelques temps. Puis, c'est au patinage, pendant une saison, qu'elle s'initie lors de l'ouverture du Palais de Glace. [1] 

Puis, Jane tomba enceinte et se consacra quelques temps à sa maternité.[1] Cependant, Cependant, malgré sa bonne volonté et ses bonnes intentions, elle ne s'y découvre aucun talent et décide de confier son enfant à d'autres et de retourner à la danse.[1]

C'est à ce moment là que Oller offre à Jane de créer la danse d'Anitra dans Peer Gynt, qui serait joué à l' Oeuvre, nouvelle salle de Joseph Oller.

 
Henri de Toulouse Lautrec : Troupe de Mlle Eglantine, 1896. Lithographie au pinceau, au crachis et au crayon.

C'est lorsqu'elle est appelée pour exécuter un quadrille au Casino de Paris que sa route croise celle de la célèbre Mistinguett. Elle se rend ensuite à Londres, au Palace Theater afin de danser un quadrille dont Henri de Toulouse-Lautrec fit une affiche accompagné de Églantine, Cléopâtre et la Gazelle.  

À son retour en France, Pierre Decourcelle et Berthe Cerny conseillent à Jane Avril d'essayer de faire du théâtre dans la pièce "Les Deux Gosses" au théâtre de l'Ambigu. Mais finalement cela ne put avoir lieu et ils décident de l'envoyer au théâtre des Bouffes du Nord. Ayant peu de confiance dans cette position d'actrice, Jane décide de laisser tomber le théâtre et retourna encore une fois au Moulin Rouge. C'est alors qu'elle rencontre "Samuel le magnifique" directeur du théâtre des Variétés, qui lui donne un rôle dans l'ouverture de son spectacle au côté d'Eve Lavallière et Brasseur. Elle y interprète l'Amour, portant des ailes d'anges et une couronne de fleurs avec des jeunes danseuses beaucoup plus charnues qu'elle. C'est là qu'elle décide de quitter définitivement ces essais et retourne à ce qu'elle à toujours préféré, le quadrille.

Voyant la fin du siècle emmener avec lui les années de la Belle Époque, les nouveaux aménagements d'Oller qui interdisaient désormais au public de danser et les nouveaux attraits de la vie parisienne, Jane décide de prendre sa carrière en main en créant elle même un spectacle qu'elle tourna dans la France en espérant voyager à l'étranger. [1] Elle finit par rentrer à Paris où elle redanse certains spectacles dans les "caf' conc' ".

 

Elle doit alors refuser beaucoup de contrats à cause d'une épidémie de pneumonie dont elle est l'une des victimes, mais elle  a la chance d'y survivre. Joseph Oller recule même la date de l'ouverture du Jardin, afin que Jane puisse y danser. [1]

Une fois de plus c’est la danse qui ramène Jane à la vie, même si elle se laisse envahir de mélancolie, le Jardin ayant  à ses yeux perdu de son charme ancien, elle s’y sent « désaxée ».

Elle songe par moment à passer la main et s’éloigner de la scène pour laisser la place  « à tous ces agités de la vie nouvelle, aux jeunes et fougueux arrivistes »[1] 

C’est pourquoi elle finit par céder aux avances d’ « un aimable garçon », un jeune artiste praticien de l’art nouveau. Son nouveau compagnon paraissant adorer son fils et multipliant les moyens pour se faire aimer d’elle elle  finit par consentir à s’essayer à la vie familiale et … « à rentrer dans le rang… » [1]

L’essai est de courte durée car les parents du jeune homme l’envoient en Amérique, mais celui-ci parvient à convaincre Jane de l’y rejoindre pour l’épouser. Cependant, dès son arrivée elle a le pressentiment d’avoir fait une erreur et cède au mal du pays.  Compréhensif, son compagnon la laisse alors repartir. Celui qu’elle nomme « Papa Oller » fête son retour  en faisant jouer par l’orchestre « Retour d’avril » et elle retrouve sa place en tête du quadrille « avec une joie sans pareille ». Son fils placé à la campagne, elle se réinstalle « chez elle », au Moulin Rouge.[1]

L’hiver suivant, le Moulin-Rouge transformé en théâtre, ouvre ses portes, dirigé par P. L. Fiers qui se promet d’y faire représenter des revues et opérettes. Jane y est engagée pour la re-vue d’ouverture « Tu marches ? »[1]

Son ami Lugné-Poe la rappelle pour danser à nouveau la danse d’Anitra dans une reprise de Peer Gynt ; il l’a fait danser également quelques soirs aux Bouffes-Parisiens dans Claudine à Paris, de Willy et Colette et lui fait l’honneur de la faire danser devant le Mur d’Orange, dans une tragédie antique en vers de Joachim Gasquet. Elle y joue aux côté de ce qu’elle nomme les « as » de la Comédie-Française. [1] 

Le déclin de sa carrière modifier

Mais celui qu’elle nomme son « pauvre amoureux, revient alors en France et n’a pas abandonné son projet de l’épouser.[1]

Ils reprennent la vie commune avec le fils de Jane loin de la vie parisienne, avec « bien des heurts parfois »[1]. Elle regrette souvent son indépendance. Elle déclare à propos de cette période  « Je n’avais plus ma chère danse pour m’aider à supporter les difficultés de l’existence, du temps passait… »[1]

Elle s’engage alors au Bal Tabarin que dirige le maestro Auguste Bosc mais n’y retrouve pas son plaisir d’antan, ni son public habituel. Elle n’y danse qu’un hiver et retourne à la vie de famille pour laquelle elle sent cependant  bien qu’elle n’est pas faite.Il lui est proposé de danser au théâtre Sarah-Bernhardt et elle joue dans une pièce mise en scène par Victorien Sardou avant de repartir à nouveau avec un quadrille pour Madrid.

À son retour, elle danse seule pendant quelques soirs chez la chanteuse Nini Buffet qui tient le cabaret de la Nouvelle Athènes, place Pigalle. Elle n’y reste pas car les horaires tardifs la fatiguent et elle n’y trouve guère de plaisir. C’est en raison de sa santé fragile qu’ elle est obligée de refuser de danser toutes les nuits chez Maxim’s, où on lui propose pourtant des conditions avantageuses. Elle regagne « triste et désabusée, le foyer »[1] mais cela ne dure pas et « Un jour, dans un sursaut de courage… »[1] Elle reprend une fois encore sa liberté. Après avoir placé son fils dans un collège, elle se réfugie dans des bras accueillants qui, écrit-elle  « se tendaient vers moi depuis quelques années. » Elle vit alors avec cet homme  dans ce qu’elle décrit comme « une opulence dorée (…) entourée d’une tendresse quasi paternelle, dansant encore pour mon plaisir… et pour le sien ! »[1] Mais ce compagnon « si bon »[1] décède  et Jane retrouve alors son  « inconsolable amant »[1] qui lui propose à nouveau de se marier. Elle finit par accepter et son  fils porte désormais le nom de cet homme.[1]

La fin de sa vie modifier

Elle finit ses jours seule, son mari étant mort et son fils parcourant la planète.[1] À la fin de ses mémoires, en décrivant cette fin de vie, Jane, ne pouvant plus danser, écrit : « [...] je ne suis pas devenue une grave dame patronnesse. Plus simplement une petite vieille rentière, qui tricote les soirs, en mesure aux sons langoureux, allègres, caressants, passionnés ou tendres – douloureux aussi parfois – des vieilles valses périmées que dé-bite mon poste de T.S.F. »[1] Jane Avril décède durant l'Occupation allemande en 1943.[2] Dans ses mémoires elle finit en disant : « Il m’arrive en dormant de rêver que je danse encore. Posant à peine et rarement la pointe de mon orteil sur le sol, je m’envole légère et tous ceux que j’ai aimés me sourient d’en bas.

J’aurais aimé jadis de mourir en dansant… Si dans l’autre monde existent des « dancings » il n’y a rien d’impossible à ce que j’y sois conviée pour interpréter la Danse macabre ! »[1]

Apports à la danse modifier

Jane Avril est témoin lors de l'exposition de 1889 de styles de danse en provenance de pays tel que le Maroc, l'Algérie et d'autres pays du monde entier.[1] Elle note, entre autres, dans ses mémoires, celle des Aïssaouas et de leurs contorsions. Eugène Melchior de Vogüé[4] en parle d'ailleurs dans son ouvrage «À travers l'exposition» en faisant un lien avec les malades victimes de crises d’épilepsie de la Salpêtrière dans des propos rapportés par Rae Beth Gordon[5] dans son article «Les rythmes contagieux d’une danse noire : le cake-walk» : «lors de l’Exposition universelle de 1889, les danseurs algériens en transe, les Aïssaouas, font dire à Eugène Melchior de Vogüé qu’ils « accomplissent leurs momeries sans se douter que nous avons bien mieux à la Salpêtrière».» Jane Avril a fréquenté cet hôpital et rapporte elle même dans ses mémoires sa fascination pour ces femmes prises de crises, qui selon elle simulaient pour attirer l'attention des médecins. Le quadrille de style cancan qu'elle dansa toute sa vie est en vogue dans les années où elle pratiqua ses danses dans les "caf' conc'". Ce lien entre maladie mentale, transe et danse, Rae Beth Gordon le développe aussi en parlant des chanteuses épileptiques : «De fait apparaît un nouveau personnage au café-concert en 1875 : celui de la chanteuse épileptique. Le style se répand au moment même où les cas d’hystéro-épilepsie se multiplient de façon spectaculaire, le genre épileptique exploitant la médiatisation de ce phénomène de société qu’est l’hystérie [note de l'auteur :L’hystérie est confondue avec l’épilepsie dans l’imaginaire populaire, et le terme d’hystéro-épilepsie est utilisé dans les milieux médicaux jusqu’au 20e siècle.] En effet, les numéros de « caf’conc’ » sont très influencés par le discours médical ambiant sur les pathologies nerveuses et par les descriptions qu’on peut lire dans les journaux et revues de l’époque. En 1900, Mistinguett chante « La Parisienne épileptique » qui commence ainsi : « Quand j’entends la musique, je deviens épileptique. » La chanteuse épileptique la plus célèbre était la grande amie de Colette, Polaire, qui chantait avec « des gestes cassés… qui s’arrêtaient aux limites de l’épilepsie[6] ». En effet, « pour une bonne moitié, la chanson à succès de ce temps-ci relève du trémoussoir de feu Charcot. Elle trépide. Elle a l’hystérie gesticulatoire.[7] ».»[5] Jane sera elle-même comparée à ces épileptique au point qu'on la surnomme "Jane la folle" quand elle danse. Elle décrit sa façon de danser dans ses mémoires : «j’improvisais et voilà tout, selon ce que m’inspirait la musique, comme je la sentais et pour ce qu’elle exprimait à ma sensibilité.»[1] On décrit d'elle qu'elle danse avec une gestuelle élégante et avec beaucoup de souplesse sans jamais pourtant être vulgaire.[1] Des études neuroscientifiques de la fin du 19e siècle démontre la posibilité d'imitation du public lors d'une prestation frénétique de danse en transe tel que celles faites par les Aïssaouas auxquelles a assisté Jane Avril.[5]

 
"Primrose & West's Big Minstrels. Our great champion cake walk, open to all comers."

L'époque contemporaine à Jane Avril est aussi celle de la récupération française du Cake-Walk principalement lors de concours comme le note Jane dans ses mémoires où elle gagne un corset lors d'un de ces concours.[1] Elle précise qu'elle savait qu'elle aurait de la facilité puisqu'elle en avait vu danser aux États-Unis. Cette danse sous forme de marche, provient des esclaves noirs américains qui imitaient leurs maîtres danser dans les bals.[8] Lorsque ce style de danse arrive à Paris, le public est électrisé d'assister à ces numéros. L'une des premières blanches à développer ce style en France, Polaire, exprime son sentiment lors de ses prestations ainsi dans ses mémoires : « Mon instinct m’a fait faire des gestes follement excités. […] Je chantais […] avec mes poings crispés. […] Je laissais au vent ma toison sauvage [et] chantais avec des mouvements nerveux, exaspérés[9]. » Jane Avril utilisera des termes similaires dans ses propres mémoires afin de décrire elle aussi l'effet qu'à sur elle sa danse : «Le charme de la musique opérant, j'ai dansé, sans en avoir conscience, un sourire figé aux lèvres, que le son du canon n’aurait pu interrompre... et mon cœur qui battait! battait!»[1]

 
Poster Folies Bergère La Loïe Fuller

Jane Avril est aussi comparée à Loïe Fuller, sa contemporaine, grande créatrice de la danse serpentine, pour sa capacité à danser seule, à concevoir elle-même ses costumes, à danser organiquement ses danses en suivant son instinct par improvisation. Francis Jourdain disait alors d'elle qu': «Elle vivait cet instinct grâce à quoi la danse perd son caractère abstrait pour devenir un langage, cesse d'être un art décoratif pour prendre un accent humain.»[3]

 
Isadora Duncan at Theatre of Dionysus, Athens

Jane Avril auto-référence Isadora Duncan, en disant qu'avant même que celle-ci défasse les corps de leurs carcans de danse classique et retourne vers l'art grec, elle-même, dans une prestation de Lugné-Poe, une tragédie Antique en vers de Joachim Gasquet, elle danse : «À peine vêtue, en bacchante, les pieds nues ( avant que paraisse Isadora Duncan), j'ai dansé et mimé sur la musique des vers, aux sons muets d'une lyre dont semblait jouer une belle fille qui représentait une déesse.» [1]

Artistes inspirés par Jane Avril modifier

Peintres modifier

Henri De Toulouse Lautrec

Renoir

Chéret

Francis Jourdain

Auteurs modifier

Théodor de Wyzéwa : "Valbert ou les Récits d’un jeune homme"[3], où l'histoire de la "petite Marie" est en réalité inspirée complètement de la vie de Jane Avril, on y retrouve une mère violente, un amour de la danse, un esprit indépendant et passionné pour la vie, des enfantillages tirés de leur vie commune. Ce fut d'ailleurs avec les profits de cette œuvre que Wyzéwa envoya Jane en convalescence sur la côte d'Azur où elle rencontra Renoir.

Pierre Charron : À Madame Jane Avril, En souvenir de la danse d'Anitra

Oscar Wilde

Robert Sherard de qui viendra son surnom Jane Avril

Aymeris de Jacques-Emile Blanche

Aimienne de Jean de Tinan

Références modifier

  1. a b c d e f g h i j k l m n o p q r s t u v w x y z aa ab ac ad ae af ag ah ai aj ak al am an ao ap aq ar as at au av aw ax ay az ba bb bc bd be bf bg bh bi bj et bk « Mes mémoires - Jane Avril », sur ebooks.com, (consulté le )
  2. a b c et d Caradec, François., Jane Avril au Moulin Rouge avec Toulouse-Lautrec, Fayard, (ISBN 2213608881, OCLC 52980497, lire en ligne)
  3. a b et c Teodor de Wyzewa, Valbert, ou, Les récits d'un jeune homme, Perrin et cie., (lire en ligne)
  4. Eugène Melchior, À travers l'exposition, Paris, Revue des Deux-Mondes, , p. 454
  5. a b et c « Les rythmes contagieux d’une danse noire : le cake-walk », sur erudit.org, (consulté le )
  6. Robert Dieudonné, « « Du café-concert à la Renaissance », », Femina,‎ , dans BnF Dossier Ico Per 21238
  7. Georges Montorgueil et al, Les demi-cabots : le café-concert, le cirque, les forains, Paris, G. Charpentier et E. Fasquelle,,
  8. « Cake-walk », Wikipédia,‎ (lire en ligne, consulté le )
  9. Polaire (Émilie-Marie Bouchaud), Polaire par elle-même, Paris, Eugène Figuière, , p. 93

Bibliographie modifier

  • Avril, J, Brécourt-Villars, C. et Morel, J. P. (2005). Mes mémoires : suivi de Erastène Ramiro, cours de danse fin-de-siècle. Paris : Phébus.
  • Melchior de Vogüé Eugène, « À travers l’exposition », Revue des Deux-Mondes, 15 septembre 1889, p. 454.
  • Bonduelle, M. et Gelfand, T. (1999) Hysteria Behind the Scenes: Jane Avril at the Salpêtrière : Journal of the History of the Neurosciences, 8(1), 35-42. http://dx.doi.org/10.1076/jhin.8.1.35.1778.
  • Caradec, F. (2001). Jane Avril : au Moulin Rouge avec Toulouse-Lautrec. Paris : Fayard. 
  • Gorgon, R. (2010). Les rythmes contagieux d'une danse noire : le cake-walk. Intermédialités, 16. 57-81.
  • Ireson, N. (2011). Toulouse-Lautrec and Jane Avril : beyond the Moulin Rouge. London : Paul Holberton, The Courtauld Gallery.
  • Pedley-Hindson, C. (2005). Jane Avril and the Entertainment Lithograph: The Female Celebrity and fin-de-siècle Questions of Corporeality and Performance. Theatre Research International, 30(2), 107–123.