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Alfred Leroux, né à Elbeuf le 23 février 1855 et mort à Bergerac le 2 décembre 1921, était un archiviste et historien protestant français.

Issu d’une famille de la bourgeoisie commerçante catholique normande, Leroux intègre l’École des Chartes en 1875, où il fait notamment la connaissance de Gabriel Hanotaux, Émile Molinier et surtout Antoine Thomas, avec qui il restera lié d’amitié toute sa vie.

A sa sortie, et après un bref passage à la Bibliothèque nationale, il est nommé archiviste de la Haute-Vienne (1878). Bien qu’y découvrant un milieu très fermé autour de valeurs « résolument réactionnaire[s][1], en d’autres termes catholiques et conservatrices, voire royalistes (Louis Guibert), ce républicain y fera toute sa carrière. Membre de la Société Archéologique et Historique du Limousin « alors haut lieu de l’histoire régionale » (Louis Pérouas), il contribue à son activité par de nombreuses communications et quelques travaux d’envergure, mais n’y trouvera jamais vraiment sa place. En effet, il supporte mal, outre la pente idéologique dominante, les « oisifs encombrants[2]  » qui prennent des libertés avec cette vérité historique que ses études lui ont appris à respecter, et ne cache guère mieux une « supériorité dont il avait une orgueilleuse conscience[3]  ». Il accepte cependant d’en être le Secrétaire général à partir de 1904 et jusqu’à sa retraite en 1908. Son rôle au sein de cette Société « reste inoubliable pour ceux qui ont vu Leroux à l’œuvre[4]  ».

C’est aussi au début de son séjour à Limoges qu’il se décide à franchir le pas et à se convertir au protestantisme, foi qu’il vivra à travers des convictions très tranchées, doublées d’un caractère droit jusqu’à la raideur, ce qui lui vaudra de solides inimitiés dont il acceptera les conséquences professionnelles, en particulier celle de rester confiné à Limoges, devenant ainsi presque malgré lui « le géant de l’érudition limousine[5]  ».

Son œuvre est clairement centrée autour de trois axes : 1. L’histoire du Limousin, qu’il contribue grandement à préciser à travers de nombreuses études et éditions d’archives, mais surtout par ce qui reste « l’œuvre maîtresse de sa vie[6]  », une histoire du Massif central en trois forts volumes (Le massif central. Histoire d’une région de la France, Librairie Émile Bouillon, Paris 1898). 2. L’étude des relations entre la France et l’Empire allemand au Moyen Âge, commencée à travers son mémoire de fin d’étude de l’École des Chartes, poursuivie en 1882 par des Recherches critiques sur les relations de la France avec l’Allemagne, 1292-1378 (Vieweg, 291 pages) et complétée dix ans plus tard par les Nouvelles recherches critiques sur les relations de la France avec l’Allemagne de 1378 à 1461 (368 pages[7]) . 3. L’étude de l’histoire du protestantisme à Bordeaux, ville qu’il rejoint au moment de sa retraite en 1908, à laquelle il consacre une vaste étude d’ensemble (La colonie germanique de Bordeaux. Étude historique, juridique statistique, économique d’après les sources allemandes et françaises, de 1462 à 1914 (deux volumes, 1916 et 1918), puis Les religionnaires de Bordeaux de 1685 à 1802 (1920, 370 pages), et enfin une Étude critique sur le dix-huitième siècle à Bordeaux (1921, 416 pages). L’Académie des Sciences, Belles-Lettres et Arts de Bordeaux le reçoit en 1916.

Retiré dans la maison familiale de Bergerac à la suite du décès de sa femme en 1921, il y meurt lui-même prématurément des suites d’une opération apparemment bénigne le 2 décembre de la même année. Il est enterré au cimetière protestant de Bordeaux dans le caveau familial.

Alfred Leroux avait été nommé en 1882 sous-conservateur au Musée National Adrien-Dubouché de Limoges. Officier d’Académie en 1885, il était correspondant du Ministère de l’Instruction publique (1889), membre non-résidant du Comité des Travaux Historiques (1904), correspondant de l’Institut (Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 1918) et chevalier de la Légion d’honneur (1919). Il est également l’auteur d’une autobiographie manuscrite, non publiée, intitulée Souvenirs d’un provincial.

Sources

Franck Delage : « A. Leroux. La vie – Les idées – Les œuvres 1855-1921 ». Bulletin de la Société archéologique et historique du Limousin, Tome 71, p. 5-37 (suivi d’une bibliographie d’Alfred Leroux collectée par son successeur Auguste Petit).

Robert Chanaud: « Alfred Leroux (1855-1921). Un archiviste sous la Troisième République ». Archives en Limousin n° 35 (2010), p. 67-73.

Robert Chanaud : « Introduction : l’histoire, une passion limousine ? » et « Histoire et politique (Haute-Vienne, Corrèze, Creuse, 1870-1914) » dans : Robert Chanaud (éd.) : Limousin, terre d’historiens (Presses Universitaires de Limoges, Limoges 2012, resp. p. 9-17 et 117-132).

Œuvres principales

Recherches critiques sur les relations de la France avec l’Allemagne, 1292-1378. Vieweg, Paris 1882.

Inventaire sommaire des archives départementales antérieures à 1790. Fonds de l’ancien collège de Limoges. Limoges 1882.

« Mémoire sur la Généralité de Limoges, par Louis De Bernage, 1698 », publié par Alfred Leroux, Bulletin de la SAHL, t. 32, 1885, p. 149-258.

Chartes, chroniques et mémoriaux pour servir à l’histoire de la Marche et du Limousin (avec le concours de feu Aug. Bosvieux), Tulle 1886 (490 pages).

Histoire de la Réforme dans la Marche et le Limousin. Limoges/Paris 1888.

Géographie et histoire du Limousin (Creuse, Haute-Vienne, Corrèze) depuis les origines jusqu'à nos jours. Limoges/Toulouse 1890 (196 pages). La deuxième édition de cet ouvrage porte le titre : Géographie historique du Limousin (1909), et la troisième : Géographie statistique et historique du pays limousin depuis les origines jusqu’à nos jours, Limoges, 1919 (208 pages, 9 cartes).

La généralité de Limoges. Limoges 1891.

Nouvelles recherches critiques sur les relations de la France avec l’Allemagne de 1378 à 1461. Paris 1892.

Les sources de l’histoire du Limousin (Creuse, Haute-Vienne, Corrèze). Limoges 1895.

Le massif central. Histoire d’une région de la France. Tome premier. Librairie Émile Bouillon, Éditeur, Paris 1898 (432 pages).

Le massif central. Histoire d’une région de la France. Tome second. Librairie Émile Bouillon, Éditeur, Paris 1898 (387 pages).

Le massif central. Histoire d’une région de la France. Tome troisième. Librairie Émile Bouillon, Éditeur, Paris 1898 (310 pages).

Histoire de la Porcelaine de Limoges. Bibliographie, chronologie, statistiques. Limoges, 1904.

La colonie germanique de Bordeaux. Étude historique, juridique statistique, économique d’après les sources allemandes et françaises, de 1462 à 1914. Bordeaux, 1916 et 1918 (2 volumes réunis).

Les religionnaires de Bordeaux de 1685 à 1802. Bordeaux, 1920 (370 pages).

Étude critique sur le dix-huitième siècle à Bordeaux. Bordeaux, 1921 (416 pages).



  1. Robert Chanaud, Limousin, terre d’historiens (éd.), Presses Universitaires de Limoges, Limoges 2012, p. 13.
  2. Cité par Franck Delage dans « A. Leroux. La vie – Les idées – Les œuvres 1855-1921 ». Bulletin de la Société archéologique et historique du Limousin, Tome 71, p. 35.
  3. Robert Chanaud, « Alfred Leroux (1855-1921). Un archiviste sous la Troisième République ». Archives en Limousin n° 35 (2010), p. 70.
  4. Franck Delage, op. cit. p. 9.
  5. Robert Chanaud, Limousin, terre d’historiens, p. 120.
  6. Franck Delage, op. cit. p. 32.
  7. Le manuscrit du troisième volume, inachevé, a été déposé par Alfred Leroux à la Bibliothèque de la Sorbonne.