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Traits spécifiquement humains

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Claudine André et un jeune Bonobo.

Par rapport aux grands singes, l'Homme moderne « civilisé » (celui que l'on découvre au néolithique, maîtrisant l'agriculture et la domestication) est très différent :

Du point de vue de la niche écologique, il part d'un régime frugivore pour conquérir le régime de tubercules, charognard, carnivore et chasseur, il devient maître de chasse et prédateur en chef : de la chasse au jet de pierre, il sait traquer le gibier, passe à la chasse à l'épieu, puis à l'arc, puis... Il adopte le chien comme commensal (et le bacille de la tuberculose). Il domestique des animaux.

Sur le plan anatomique, l'Homme est bipède, peut marcher efficacement et courir en coureur de fond. Il a perdu les canines du mâle hominidé. Le crâne est hypertrophié, les naissances sont prématurées, le développement physique et cérébral est très lent. La femme a une ovulation non apparente et est ménopausée. La pupille étroite et le blanc de l’œil permettent de suivre la direction du regard. Sa pilosité est presque inexistante (singe nu) et ses glandes sudoripares très développées.

La sexualité humaine et la reproduction humaine se distinguent de celle des autres grands singes. La femme humaine n'a pas d'œstrus visible, ce qui implique que le succès reproductif du mâle repose non sur le succès d'un coït ponctuel, mais sur une séquence de monogamie exclusive sufisamment prolongée[1]. Le mâle humain a un pénis long, flexible et épais, se distinguant des pénis de la taille d'un petit crayon et rigidifié par un baculum des autres grands singes[1] —c'est une question de taille— ; la copulation d'un couple humain est beaucoup plus variée et prolongée que celle de ses cousins — plus c'est long, plus c'est bon[1], et la partenaire femelle heureusement stimulée peut atteindre un orgasme clitoridien inconnu de ses cousines[1] ; l'ensemble suggérant que pénis et clitoris ont co-évolué dans un effet de sélection sexuelle comme organe respectivement émetteur et récepteur d'une mesure de valeur sélective mesurée à la capacité à donner du plaisir sexuel[1]. Mais contrairement à ses cousines, la femme « enfante dans la douleur »[2] : la grossesse est pour elle une période de nausées, fatigues, dérèglements de l'équilibre hématique[3], à cause d'une course aux armements entre elle-même et son fœtus visant au contrôle du flux sanguin passant dans le placenta[3],[4], dont un effet secondaire est l'apparition des règles chez la femme[3],[5].

Sur le plan psychomoteur, il devient capable de visualiser et maîtriser le choix d'alternatives dans son action. Il est capable d'intérioriser des séquences complexes de geste pour les reproduire, et de s'exercer jusqu'à ce qu'elles atteignent le résultat escompté (ce qui suppose que ce résultat soit conscient). Il peut faire de la musique et danser en groupe. Il reproduit instinctivement de manière mimétique ce qu'il perçoit enfant (sons, gestes,...) avant même d'en acquérir le sens. Il a acquis un contrôle fin de la mobilité de la langue et du souffle. Les hommes ne disposent pas de sacs vocaux, ont un larynx en position basse[6], permettant de proférer les énoncés nécessaires au langage moderne

Sur le plan technique, il a utilisé des outils et techniques de plus en plus complexes : galet aménagé, biface, outils mésolithiques, outils néolithiques. Il utilise des matériaux variés : bois, pierre, os, peau, ligament,... Il maîtrise le feu et la cuisine. Il sait s'habiller, se parer avec décorations et bijoux. Il invente et utilise galets percuteurs, galets tranchants, épieux, lames coupantes, propulseurs, arcs et flèches, haches, ... Le bois n'a guère laissé de traces par rapport à la pierre, d'où la notion de paléolithique pour décrire son industrie première.

Sur le plan psychologique, il peut rire - "le rire est le propre de l'Homme". Sur le plan cognitif, son "niveau d'abstraction" (théorie de l'esprit) passe de un ou deux (grands singes) jusqu'aux alentours de cinq, autorisant jusqu'à la discussion de systèmes politiques concernant la société elle-même. Il acquiert un proto-language, puis un langage. Il maîtrise les modalités dans le langage. Il pratique des arts décoratifs, art pariétal, sculpture. Il découvre et use de la transe chamanique,... Il construit une société religieuse.

Sur le plan social, il passe d'un régime d'appariement sexuel par proximité à un régime de harem, puis (mais ce n'est pas tout à fait acquis) à un régime monogame. La structure familiale sert à l'éducation des enfants, les enfants sont soutenus (de manière altruiste) par la collectivités. Il invente la division du travail, entre sexes puis entre artisanats. Il peut gérer l'agressivité alors qu'il dispose d'armes létales, découvre la coopération, découvre le conformisme la moralité et la culpabilité, privilégie l'échange d'informations dans le groupe et l'éducation et instruction. Il évolue dans une société complexe, dont les éléments (taille du groupe / proximité) se distribuent d'une manière fractale. L'acquis social s'étend : de la simple imitation des pratiques du groupe, il se complexifie à une instruction verbale ; le langage permet la transmission de règles (comportementales, éthiques), de légendes, d'histoires reliant les communautés les unes aux autres, de faits religieux,...

Ces traits ont été acquis progressivement, par sélection naturelle, en fonction de l'adaptation de tel ou tel ancêtre à une niche écologique ou comportementale. En rendre compte sur le plan évolutif consiste à se demander en quoi ce trait apporte fonctionnellement un avantage sélectif dans le contexte de cette niche, dans quelle mesure des expressions balbutiantes de ce trait présentaient également un avantage adaptatif conduisant à une pression de sélection le développant de manière incrémentale, et quelles étaient les structures et fonctionnalités antérieures qui ont été modifiées pour développer ce trait, constituant une nécessaire pré-adaptation[7].

  • Ce sont ces niches et adaptations successives qu'il faut pouvoir reconstituer pour décrire l'histoire de l'évolution adaptative humaine. C'est l'objet du présent article.
  • Une grande partie de la problématique étant celle des capacités cognitives, verbales ou intellectuelles, une discussion rapide de ces points paraît nécessaire au préalable. C'est l'objet du reste de cette section.

Capacité cognitive de modélisation

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Besoins de sécurité
(environnement stable et prévisible, sans anxiété ni crise)

Besoins physiologiques
(faim, soif, sexualité, respiration, sommeil, élimination)

Pyramide des besoins : Besoins animaux

Une difficulté pour comprendre l'histoire de l'homme (et le comportement animal) est de croire que le fonctionnement du cerveau se traduit par une « prise de conscience » qui permet de décider d'un comportement intelligent. En réalité, un comportement « intelligent » a pu être sélectionné par la sélection naturelle et n'implique pas nécessairement de conscience ; et il faut comprendre que notre capacité cognitive elle-même est très largement inconsciente ou subconsciente.

Par rapport à la pyramide des besoins, tout être vivant doit assurer la satisfaction de ses « besoins physiologiques ». C'est vrai aussi bien pour les animaux que pour les plantes.

Ensuite, à partir d’un certain niveau d’autonomie, tout animal agit sur le monde pour satisfaire ses « besoins de sécurité », que ce soit pour fuir un prédateur, poursuivre une proie, ou retrouver son gîte. Mais la réponse comportementale d’un animal est largement stéréotypée, avec une faible variabilité : quand on a vu un groupe de lions, on les a tous vus.[8] Cette réponse stéréotypée de l'animal est fondamentalement celle qui est adaptée à son environnement, mais elle le lie aussi à ce mode de vie. Tant que l’environnement est stable, c’est l’individu dont le comportement est le plus « intériorisé », celui qui ne se pose pas de question et n’a pas un instant de doute entre la perception et l’action, qui détient un avantage sélectif : sa réaction est à la fois adaptée et plus rapide. Si l’environnement change, le comportement changera sous la pression sélective associée – ou l’espèce perdra sa place si une autre plus adaptative et plus maline le fait avant elle. Inversement, dans un environnement de plus en plus instable, l’adaptabilité devient par elle-même une valeur adaptative.

 
La modélisation du monde par les reptiles n'intègre pas la permanence de l'objet.

Au minimum, le système nerveux d'un animal est donc capable de maintenir une représentation interne homologue au monde extérieur.[9] La boucle cybernétique agissant sur le comportement animal comprend au minimum un certain nombre de rétroactions[10] :

  • Les organes de perception permettent de modifier cette représentation interne en fonction de l'état du monde (extérieur ou intérieur) ; cette représentation n’est pas « verbale », mais est une propriété émergente. Une partie de l'état du monde ainsi représenté reflète l'état somatique : besoins vitaux, stress, état d'humeur..., et de même, le comportement enclenché peut avoir un effet sur cet état somatique.
  • Un système de décision permet d'arbitrer (ce qui représente une attention à un niveau élémentaire) et d'enclencher des actions (comportements élémentaires ou stéréotypés, tropismes) en fonction de cette représentation interne[10].
  • Ces comportements se traduisent par des actions sur le monde (extérieur ou intérieur).

Chaque espèce animale filtre la réalité à travers un ensemble de catégories qui constituent son système de représentation primaire. La sélection naturelle a favorisé l'émergence de systèmes de représentation de plus en plus complexes, non pas parce que les systèmes précédents ne sont pas adéquats, mais dans la mesure où la perception de réalités plus différentiées ou plus complexes donne à celui qui en est capable un avantage sélectif sur ses congénères, malgré le coût énergétique que cette capacité représente[11].

La représentation interne comprend non seulement l'état présent, mais également son avenir possible. Le système de décision évalue ces alternatives en fonction de leur danger potentiel et de leur capacité à satisfaire les exigences et besoins, ou les buts immédiats. Quand un individu lance une balle et la rattrape, tout se passe comme s'il avait pu résoudre un système d'équations différentielles pour prédire la trajectoire de cette balle. Il peut n'avoir jamais entendu parler d'équation différentielle et s'en moquer, le point est que cela n'interfère en rien avec sa capacité à rattraper la balle : à un niveau subconscient, il y a quelque chose qui se réalise, qui équivaut fonctionnellement à ce calcul[12].

 
Permanence de l'objet : les mammifères peuvent continuer à agir en fonction d'objets devenus invisibles, et anticiper sur leur évolution probable.

Une capacité importante des systèmes cognitifs évolués est la mémoire et l'apprentissage, c'est à dire la capacité à faire évoluer la réponse comportementale en fonction du résultat des expériences passées, acquérant ainsi des compétences qui par nature ne peuvent pas être innées. L'Hippocampe joue un rôle central dans la mémoire et la navigation spatiale. Cette capacité correspond à un deuxième niveau d'autonomie des êtres vivants, le niveau skinnérien, étudié par le behaviourisme[10] L'apprentissage peut être simplement associatif, quand la perception d'un objet ou d'une situation déclenche de manière conditionnée un sentiment (attrait, répulsion) ou un comportement (fuite, attaque). Il peut être plus complexe, et conduire par rapprochements de similitudes à la reconnaissance de nouvelles catégories d'objets (un éléphant), ou de distinguer des individus particuliers (mon rejeton).

La représentation du monde s'appuie sur la perception de sensations, mais également à travers la permanence de l'objet sur la connaissance déjà acquise et une modélisation de son comportement futur. Cette capacité n'apparaît que chez les mammifères (dotés d'un néocortex) et les oiseaux (qui disposent d'une structure analogue, l'hyperstriatum) ; et chez l'homme, n'est acquise qu'entre un an et 18 mois. La représentation coordonne les sensations de différentes origines, et en fait une perception amodale[10].

Activité cognitive et conscience

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La conscience (qui nous permet de juger que ce « cube » est une illusion) ne se confond pas avec la capacité cognitive (dont le traitement inconscient « reconnaît » la présence d'un cube).

Un aspect difficile à apprécier pour un être humain est le caractère très peu conscient et maîtrisé d'un comportement stéréotypé : en réaction à des stimuli l'animal réagit « comme ça », et cette réaction est globale et vécue de manière événementielle, non décomposée. De toute évidence, l'impulsion de base peut s'adapter en fonction des circonstances et de l'environnement (c'est évident, par exemple, pour ce qui est de déféquer) ; mais ce serait un anthropomorphisme de croire que cette adaptation puisse être « réfléchie » ou même « pensée ». De l'autre côté du miroir, pour la vision qu'un homme moderne peut en avoir par introspection, toute l'activité cognitive animale décrite précédemment est essentiellement inconsciente : dans la mesure où l'animal n'a pas de capacité de recul par rapport à cette adaptation, elle est exécutée suivant un mode quasi somnambulique, qui pourrait faire penser à un zombie.

Ce traitement cognitif est à la base entièrement automatique, et suffit généralement pour déclencher des actions stéréotypées, sans qu'il soit nécessaire de faire intervenir une conscience. Et inversement, les capacités cognitives associées pour l'Homme à une manifestation de conscience sont absentes chez l'animal. Les capacités cognitives de l'animal restent évidemment présentes chez l'Homme, mais il peut être difficile pour un lecteur non prévenu de réaliser ce que peut être, pour lui et en lui-même, un comportement stéréotypé essentiellement piloté par l'inconscient, du type que l'on voit chez les autres mammifères et chez les grands singes, voire chez les proto-humains : l'Homme n'est il pas essentiellement un être conscient ?

En réalité, si l'Homme est effectivement capable, la plupart du temps, de prendre conscience d'un comportement donné, en pratique il ne le fait pas constamment - sérieusement, qui peut prétendre qu'il réfléchit toujours avant de parler?... Même pour l'Homme moderne, n'importe quelle illusion d'optique montre que le traitement et la catégorisation des perceptions se fait de manière automatique, sans que la conscience y ait accès : nous n'avons conscience que du résultat final. Aucun processus conscient n'est impliqué quand le mot « éléphant » fait surgir par association l'idée d'un éléphant — l'association est juste une histoire comme ça. Le type de mémoire mise en jeu par le conditionnement n'est pas accessible à la conscience.[10] Au delà, certains comportement échappent à toute analyse rationnelle : qu'est-ce qui déclenche les fou-rires dans un groupe ? qu'est-ce qui fait qu'on trouve les bébés animaux « mignons » ? ces comportements ont une racine très profonde, rejoignant des situations où ils sont des comportements stéréotypés ayant par eux-mêmes une valeur adaptative, et à ce titre génétiquement sélectionnés.

Le système cognitif permet le même niveau de pilotage (subconscient et automatique) que pour celui qui marche « sans y prêter attention » au milieu d’une foule : la fluidité de cette évolution montre que l’articulation entre représentation interne et action n’a pas besoin d’être réfléchie pour être efficace. Le traitement cognitif qui maintient une modélisation interne de notre environnement n'a la plupart du temps pas besoin d'une couche supplémentaire. Il est certainement possible de prendre conscience de son évolution dans la foule, mais ce n'est pas nécessaire, et on peut évoluer en rêvant à tout autre chose, au point de parfois se retrouver à se dire « mais qu'est-ce que je fais ici ? »

Par rapport à la conscience, l'ensemble du traitement préalable (et la gestion des actions machinales) se fait en amont, de manière largement automatique, et échappe à la perception par la conscience. La conscience (quand il y en a une) en découvre le résultat, et peut en faire un examen critique. Cet examen se situe alors en aval du traitement cognitif, au niveau des jugements de valeurs et des arbitrages entre alternatives. Même dans une activité créative, la solution d’un problème ne se construit pas nécessairement par réflexion dirigée ni a fortiori verbalisée, mais par intuition synthétique, inconsciente et automatique ; le plus souvent elle « pops into mind » - arrive tout formée dans la tête, telle Athena (déesse de la sagesse) sortant toute armée de la tête de Jupiter. Ce n'est pas notre conscience qui trouve une solution, mais elle nous permet de juger que ce que nous avons trouvé est satisfaisant, le cas échéant par une analyse critique, qui peut se faire sur un mode verbalisé et argumenté.

Évolution du langage

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Système de communication animal

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Singe hurleur en train de « communiquer », c'est-à-dire d'exprimer un état émotionnel.

Les principales raison de pousser des cris sont l’appel sexuel, l’intimidation, la signalisation de nourriture et le cri d’alarme. Seuls ces signaux peuvent améliorer significativement la valeur sélective d’un animal.

Un cri indiquant de la nourriture ou la présence d’un prédateur n’augmente pas directement les chances de survie de l’animal qui pousse ce cri, en fait, il les réduit. Mais il augmente les chances de survie des proches de cet animal, qui pour la plupart sont porteurs des mêmes gènes.[13] D'autre part, se poser en « héro » dans le groupe, en signalant le danger ou la nourriture, peut contribuer à construire une position hiérarchique et/ou induire une préférence sexuelle. De ce fait, il apparaît aussi souvent dans le vocabulaire d'un système de communication animal.

Au-delà de ce que les animaux peuvent communiquer, il y a aussi ce qu'ils peuvent comprendre, et cette capacité est beaucoup plus développée. L'expérience courante montre qu'un chien peut comprendre quelques dizaines de mots dans la bouche de son maître ; des chiens particulièrement bien dressés ont pu comprendre un vocabulaire de l'ordre du millier,[14] et on a pu estimer que le bonobo Kanzi en comprend trois fois plus[15].

Associer un signal auditif à l'évocation mentale d'un objet présente en effet un avantage sélectif évident : c'est ce qui permet de comprendre la signification d'un bruit comme l'indice d'un changement dans l'environnement ; c'est ce qui permet de reconnaître la présence de l'animal émetteur dans le paysage, et parfois même de deviner ses intentions.

Évolution du système phonatoire

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Organes phonatoires humains.

Anatomiquement, par rapport au singe, la position basse du larynx de l'Homme créé une « cavité laryngée » qui forme un premier résonateur, lequel améliore la séparation des voyelles. Cette même position basse permet de faire passer le son non seulement dans la cavité nasale (comme pour le singe) mais également dans la cavité buccale, jouant le rôle d'un second résonateur. La langue peut bloquer l'accès à la cavité buccale, produisant les voyelles nasales, mais le voile du palais peut aussi se relever et bloquer la cavité nasale, produisant les voyelles cardinales (A, I, U) inconnues des singes. Enfin (sauf laryngocele), l'Homme a perdu les sacs vocaux communs à ses cousins primates, ce qui stabilise la hauteur de son émission[16].

Mais surtout, un Sapiens peut sans problème parler sur un rythme allant jusqu'à une quinzaine de phonèmes par secondes, un exploit qui ne lui est possible que parce qu'il dispose d'un contrôle extrêmement précis de ses cordes vocales, de son larynx, de sa langue, de ses lèvres et de son palais[17].

L'origine évolutive de la communication intentionnelle humaine est probablement à rechercher vers le système miroir des primates, qui est actif aussi bien quand l'animal observe une action que quand il l'exécute lui-même. Chez les primates, la composante motrice de ce système se situe dans l'aire F5, homologue de l'aire de Broca qui participe à la production du langage. Chez les primates non humains, cette aire n'est pas activée par les vocalisations des congénères, mais par le son produit par différentes actions, comme la chute d'un bâton sur le sol ou l'ouverture d'une noix. De ce point de vue, il ne s'agit donc pas d'un système simplement « miroir », mais d'un système participant plus généralement à l'apprentissage perceptif et moteur.[18] Cette aire cérébrale commande les mouvements de la bouche et de la face, mais pas du larynx, dont les mouvements sont involontaires et insusceptibles d'apprentissage. Il a fallu l'extension de cette zone à la commande du larynx pour que l'homme puisse également mimer et contrôler son langage oral ; corroborant l'idée d'une origine gestuelle du langage[18].

Sur le plan évolutif, la question centrale est de décrire comment le système phonatoire humain a pu évoluer vers ce qu'il est : si Sapiens n'avait pas eu une morphologie se prêtant à une articulation des phonèmes; et un système neurocérébral lui permettant d'en contrôler l'activité musculaire avec précision, il n'aurait pas pu accéder au langage doublement articulé que nous lui connaissons aujourd'hui. Le langage humain est contraint par une physiologie hautement spécialisée, sans laquelle il ne serait pas envisageable[19].

Cette physiologie hautement spécialisée prouve deux choses : (1) les capacités impliquées dans le langage ont été le fruit de la sélection naturelle, (2) ces capacités ont été sélectionnées parce qu'elles procurent un avantage sélectif.[17] Il ne s'agit cependant pas de se demander si le langage (en tant que tel) procure un avantage adaptatif, mais en quoi les adaptations physiologiques qui permettent aujourd'hui le langage ont pu apporter un avantage adaptatif dans les conditions écologiques où elles ont émergé. Une fonction est initialement une propriété émergente, qui se révèle parce que les contraintes de la physiologie en offrent la possibilité ; la pression sélective initiale porte sur les limitations physiologiques, qui seule peut réaliser une pré-adaptation, non directement sur les fonctions, qui ne peuvent pas avoir de valeur sélective tant qu'elles n'ont pas émergé[19].

D'autre part, plutôt que de d'analyser ce qui a pu causer une évolution vers le langage à partir du système de communication animal, il semble préférable de modéliser des évolutions successives, comportant plusieurs stades de protolangages. La meilleure preuve en est les longues plages temporelles longues de millions d'années pendant lesquelles Habilis, Erectus ou Heidelberg n'ont pas évolué : si une « pression évolutive vers le langage » avait été à l'œuvre, il n'y aurait pas eu de tels paliers évolutifs. Sur le plan linguistique, il est moins important d'identifier à quel moment ces différents stades ont pu être acquis (Australopithèque, Erectus,...) que de présenter un scénario plausible suivant lequel de nouvelles capacité ont pu évoluer, s'appuyant sur des mécanismes préexistants, en les développant dans une nouvelle direction[20].

Système cognitif associé

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Avant tout il est important de souligner que « le langage » ne se confond pas avec « la parole », il s'agit de deux réalités très différentes. Une communication symbolique formant un langage ne passe pas nécessairement par la voix (comme en témoigne le langage des signes), et une maîtrise et une créativité vocale peut se développer sans référence à un langage (comme le chant des baleines ou celui des oiseaux). Dans l'évolution des hominines, il est de ce fait concevable (et même probable) que langage et parole ont pu se développer à des moments et pour des raisons différentes.

Très souvent, le langage humain est abordé comme un cas particulier de système de communication, une capacité partagée par les animaux et même les plantes. Pour comprendre sa spécificité, le langage doit avant tout être abordé comme un système cognitif, dépendant du fonctionnement neuronal, et qui ne peut se réduire à une simple problématique de communication. Il est exact que le langage est utilisé pour la communication, mais ce n'est pas sa caractéristique première, et l'analyse de son évolution relève avant tout de l'évolution des capacités psychomotrices et cognitives, non de la seule problématique de communication[21].

Le langage n'est pas uniquement un moyen de communication, c'est avant tout la manifestation d'un mode de pensée, la représentation symbolique[7]. Mais cette pensée symbolique n'est pas innée, elle ne se développe qu'en internalisant les processus symboliques qui sous-tendent le langage lui-même.

Avant même de commencer à s'exprimer il faut avoir quelque chose à dire ; et le langage est avant tout une manière de se formuler ce que l'on veut communiquer. L'histoire du langage en tant que tel est donc plus celle des systèmes de représentations et de la conscience, que simplement celle d'un système de communication animal[11].

Globalement, le langage humain ne se réduit pas à un simple système de communication animal[22] :

Cris et signaux Langage
Contrôle de la forme Déterminés génétiquement Conventions culturelles partagées
Émission Émission instinctive et réactive Émission volontaire planifiée
Première articulation Peu de signaux Grand nombre de morphèmes
Double articulation Signaux autosuffisants et invariables (« sort de mon territoire »), combinaisons rares Articulation de composants incomplets par eux-mêmes
Domaine de signification Situation holistique, découlant de perceptions et de sensations Domaine symbolique, représentation abstraite, détachée de l'immédiat
Sujet concerné Sujet implicitement désigné par le contexte Forme prédicative explicitant le sujet
Situation de référence Pas de sens en l'absence du contexte Capacité d'évoquer quelque chose qui n'est pas présent ici et maintenant
Zone exprimable Ici et maintenant uniquement Capacité d'évoquer quelque chose qui échappe à l'expérience

Les formes de communication animales sont très différentes de ce qu'est le langage humain. À titre de comparaison, l'homme dispose également d'un répertoire important d'attitudes et de comportements à travers lesquels nous signalons des attentions ou des dispositions d'esprit : rire et sourire, froncer les sourcils, faire une moue de dégoût, montrer de l'étonnement... Ces signaux peuvent avoir un impact très fort sur celui qui les observe : le rire est facilement contagieux, de même que la nausée d'un vomissement. Mais ces signaux ne forment pas un langage, et il serait généralement impossible d'en faire une analyse lexicale ou grammaticale[7]. Il s'agit d'une forme de communication animale dont l'homme dispose en plus du langage.

La psychologie linguistique permet de dégager un certain nombre de couches successives, qui ont pu n'émerger que progressivement.

Pourquoi communique-t-on ? Sur le plan fonctionnel, dans la fonction de coordination et de communication au sein d'un groupe, il est possible de distinguer trois niveaux de communication proprement dite, se superposant à un simple niveau d'interaction[23],[24] :

  • Le niveau 0 est celui de la praxis. À ce niveau, les membres du groupe peuvent interagir dans leur activité commune, sans avoir besoin de recourir à une communication intentionnelle.
  • Le niveau 1 est celui de la direction. À ce niveau, la coordination des actions n'est plus implicite mais passe par des instructions et demandes explicites, assertions ou désignations dont la signification est claire par rapport à l'activité en cours.
  • Le niveau 2 est celui du partage de la planification. À ce niveau, les membres du groupe discutent entre eux sur l'activité elle-même, pour en construire une vision partagée. À ce niveau il devient nécessaire de désigner clairement des objets ou activités qui ne sont pas encore présents dans le contexte, et l'élaboration de la vision partagée comprend également des jeux de questions et de réponses.
  • Le niveau 3 est celui du partage du sens. À ce niveau, l'explication vise à construire une vision partagée, cette fois ci sur le sens même des mots et symboles, ou sur d'autres éléments employés dans la communication (par exemple syntaxique s'il y a lieu).

Ces quatre niveaux fonctionnent de manière hiérarchique. Quand le groupe rencontre un échec dans la communication à un niveau donné, le déroulement à ce niveau est suspendu, et le groupe ouvre une discussion en incise au niveau immédiatement supérieur. Quand le problème est résolu, les participants manifestent leur accord et retournent au niveau inférieur.

En outre, de quoi parle-t-on ? L'abstraction croissante du langage conduit à distinguer trois zones[25] :

  • une de coïncidence, la zone identitaire (concepts relevant de ici et maintenant) ;
  • une d’adjacence, la zone proximale (concepts dont une expérience directe est possible) ;
  • une d’étrangeté, la zone distale (concepts abstraits, par nature non expérimentale).

Le système de communication animal ne peut traiter que de la première zone - « out of sight, out of mind ». Un des enjeux de la communication humaine est d'acquérir la capacité cognitive permettant de gérer les deux autres zones.

Ces différences doivent être explicables par les évolutions successives des conditions d'utilisation de la communication par les ancêtres de l'Homme.

Théorie de l'esprit

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Test du miroir. Voir Neurone miroir

La théorie de l'esprit consiste à pouvoir se représenter mentalement l'état mental de tel ou tel individu, en reconnaissant qu'il est comparable à celui que l'on perçoit en soi-même. C'est donc au minimum une modélisation de deuxième niveau : au sein de la représentation du monde, une partie consiste à modéliser ce qu'est la modélisation de l'autre.

Des comportements qui demandent une théorie de l'esprit sont par exemple[26] :

  • Communiquer intentionnellement avec un interlocuteur - non pas pour influer son comportement, comme dans un système de communication animal, mais dans le but de lui fournir de l'information.
  • Corriger des incompréhensions, ce qui suppose de comprendre que le message a pu ne pas être compris et qu'il faut le transmettre d'une autre manière.
  • Enseigner quelque chose, que l'on veuille changer la connaissance de son interlocuteur suppose qu'on puisse se la représenter comme différente de la sienne propre.
  • Avoir une stratégie de persuasion, ce qui revient à communiquer pour modifier la manière dont son interlocuteur voit les choses.
  • Tromper intentionnellement quelqu'un,
  • Partager des plans et des buts : chaque membre du groupe doit comprendre les intentions des autres, et coordonner les actions en conséquences. Une chasse en meute n'est qu'une superposition de comportements individuels.
  • Partager l'objet de son attention, c'est à dire non seulement être attentif à l'objet, mais être conscient que l'autre l'est également.
  • Faire semblant, agir comme si un objet en était un autre, ou avait des propriétés différentes, ce qui suppose de pouvoir faire l'aller-retour entre la réalité et le monde supposé.

Les singes hominoïdes atteignent un niveau d'abstraction de deux, alors que l'homme moderne atteint couramment un cinquième niveau, ce qui est particulièrement évident dans des situations d'espionnage ou de diplomatie (si je réagis comme ça, je vais l'induire à croire que je ne sais pas quelles avaient été ses intentions vis-à-vis de X, parce que lui ne sait pas que par ailleurs...). Toutes choses égales par ailleurs, un niveau d'abstraction supplémentaire demande une capacité supplémentaire de modéliser le monde, donc est coûteuse en neurones. Et, toutes choses égales par ailleurs, des comportements sociaux de plus en plus sophistiqués impliquent des situations de communication de complexité croissante, et donc des niveaux d'abstractions de plus en plus élevés.

Pour Robin Dunbar, le niveau d'abstraction pouvant être atteint dépend directement du volume du lobe frontal. Ce volume étant lui-même biologiquement coûteux, tant en énergie de fonctionnement qu'en temps de développement, la sélection naturelle maintient le niveau d'abstraction de l'espèce au « juste besoin » par rapport à sa niche écologique. Si l'on considère que le niveau d'abstraction est dans l'ensemble proportionnel au volume du cortex frontal, cela impliquerait (selon lui) que les hommes primitifs auraient une capacité d'abstraction de quatrième niveau, et les proto-hommes du troisième niveau[27].

En réalité, cependant, toutes les choses ne sont pas « égales par ailleurs », et de toute évidence, le niveau d'abstraction susceptible d'être atteint dépend aussi du fonctionnement cognitif qualitatif. Lorsqu'un singe montre une certaine maîtrise d'une théorie de l'esprit, il le fait à travers des situations qu'il peut évoquer et imaginer, mais que de toute évidence il ne peut pas verbaliser, parce qu'il ne dispose pas de cette fonction cognitive. Lorsqu'un Sapiens réfléchit « à un niveau cinq », ce peut être complexe, mais sa représentation de la situation porte sur l'évocation d'assertions verbalisées, qui se présentent donc successivement, non sur des situations imaginées perçues de manière holistique - il n'est pas du tout certain que son intuition utilisée isolément aboutirait à une même performance. Sa performance est avant tout due à un mode cognitif différent, pas à une différence dans la puissance intellectuelle brute. Les différents développements cérébraux des hominines ont certainement conduit à des comportements différents et novateurs, qui en ont constitué l'avantage sélectif, mais la différence n'est donc pas nécessairement directement liée à une simple question de niveau d'abstraction.

Ancêtres de l'Homme et Anthropomorphisme

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Quelle conscience pour nos ancêtres ?

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Cerveau humain et cerveau de chimpanzé. Que se passe-t-il dans la tête d'un chimpanzé?

Une question récurrente lorsqu'on se penche sur l'évolution entre « animal » et « humain » est de savoir à quel point l'ancêtre de l'Homme acquiert une conscience humaine, et en quelque sorte devient « vraiment humain ». En pratique, les structures mentales semblent avoir émergé suivant un certain ordre évolutif, et ont un lien direct avec certaines structures cérébrales spécialisées[28].

Un premier point à noter est que de toute évidence, le degré de conscience ne se fossilise pas, et que même pour des animaux vivants il est difficile de déterminer si une telle conscience existe - la difficulté est d'autant plus grande pour évaluer celle de nos ancêtres.

Un second point est que si le système nerveux assure une capacité cognitive, permettant de réaliser des fonctions variées, il le fait toujours de manière minimaliste : le tissu nerveux est très consommateur d'énergie, bien que le cerveau ne représente que 2% du poids du corps, il consomme pas moins de 20% de l'énergie nécessaire à notre métabolisme (qu'il soit ou non au repos).

S'il devient nécessaire, pour la survie de l'animal dans tel environnement et tel comportement, de disposer a minima d'une certaine capacité cognitive, la sélection naturelle finira par éliminer ceux qui disposent d'une capacité insuffisante. Mais disposer de trop de capacité cognitive par rapport à ce minimum vital signifie un besoin alimentaire plus important que nécessaire, et la sélection naturelle éliminera tout autant ceux dont la capacité cognitive est trop performante, parce que leur fringale perpétuelle par rapport à leurs congénères les condamnera en temps de disette. La nature n'a que faire de petits génies, sa seule pierre de touche est le succès reproductif. Lorsqu'on cherche à évaluer et décrire la capacité cognitive de l'un de nos ancêtres, la « règle du jeu » est donc qu'il faut strictement ne lui accorder que les capacités nécessaires à réaliser la performance constatée, et ne pas aller au-delà.

En même temps, il n'y a pas de réelle solution de continuité entre niveau, et l'atteinte d'un niveau donné donne peut-être accès à un embryon de capacité relevant du niveau suivant : c'est ce que l'on voit lorsque le chimpanzé sort de son somnambulisme quotidien pour dans un éclair de lucidité résoudre le problème que lui soumet le chercheur.

Le point est que la masse cérébrale disponible joue le rôle d'un plafond de verre sur les capacités cognitives ou conscientes, ce qui se situe « au-dessus » n'étant accessible que comme l'esquisse des choses à venir, et non leur substance même. Les variations statistiques feront que certains individus mieux dotés peuvent de temps à autre avoir des étincelles de perception d'un niveau supérieur (et le cas échéant, en transmettre quelques éléments à leurs congénères, si une transmission de connaissance est possible), mais ce n'est pas pour autant que le niveau de conscience correspondant constitue le quotidien de l'espèce. En réalité, même aujourd'hui, il serait irréaliste de prétendre que le niveau courant de conscience humaine correspond à celui atteint par ses représentants d'exceptions, que l'on décore par exemple de la médaille Fields ou du prix Nobel.

À quoi ressemble une capacité cognitive limitée ?

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Le « pilotage automatique » qui reste actif pendant le somnambulisme est suffisant pour évoluer dans l'environnement, même si ce comportement est par ailleurs limité faute d'un contrôle conscient.

Un troisième point est qu'il est difficile de comprendre à quoi correspond réellement de tels états de conscience, parce que notre tendance naturelle est de projeter sur les tiers nos propres modes de pensée, y compris sur des animaux par anthropomorphisme, et donc de leur attribuer implicitement des capacités cognitives ou conscientes injustifiées.

Pour prendre la mesure de l'erreur que cela représente, il suffit de considérer les comportements complexes qu'un dormeur peut réaliser en état de somnambulisme : le « pilotage automatique » que peut réaliser le traitement cognitif inconscient conduit à un comportement raisonnablement adapté à son environnement, même lorsqu'aucune conscience réflexive n'est aux commandes.

À travers ses réactions holistiques et ses réponses comportementales stéréotypées, c'est ce même « pilotage automatique » que le traitement cognitif réalise au quotidien chez le chimpanzé. Lui attribuer une conscience réflexive est donc injustifié, parce que pour vivre au quotidien il n'a besoin que de ce « pilotage automatique » et rien de plus.

Fonctions cognitives « supérieures »

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Il n'y a jamais de « manque ». La capacité cognitive d'un chimpanzé est celle qui le rend adapté à son environnement.

Un quatrième point, enfin, est que quel que soit le niveau cognitif « primitif » qu'utilise au quotidien l'animal (ou l'hominidé), ce niveau est nécessairement celui qui est adapté à ses besoins environnementaux et comportementaux — si ce n'était pas le cas, la sélection naturelle aurait tôt fait d'y remédier en éliminant les inadaptés.

Pour l'hominidé qui fonctionne à ce niveau, cette capacité cognitive est autonome, elle ne peut être qu'adaptée à fonctionner seule - elle ne se confond pas avec celle dont nous avons l'expérience. De ce fait, ce que l'on peut comprendre comme une « limitation » des capacités cognitives, par rapport à celles dont nous avons l'expérience, n'est aucunement un manque pour cet hominidé : c'est son mode cognitif quotidien et il est parfaitement heureux et adapté avec ça. Lorsqu'on indique à titre de comparaison que la capacité intellectuelle de telle ou telle espèce est « comparable à celle d'un enfant de deux ans », il faut garder en tête qu'une telle comparaison peut être très facilement une source de confusion. Physiquement, un « grand singe » adulte est avant tout un adulte, qui peut se battre et tuer, être en rut et copuler,... choses que l'on n'attend évidemment pas d'un enfant de deux ans.

Pour notre part, nous disposons à la fois de ces fonctionnalités cognitives primitives, et d'autres développées depuis ; et clairement, si nous étions limités à ces seules capacités primitives (dans leur état actuel), nous serions gravement handicapés. C'est parce que pour nous, ces capacités primitives ont été transformées et adaptées à un pilotage par des fonctions cognitives ultérieures, et ne sont donc plus autonomes.

Le grand singe est parfaitement adapté à maîtriser ces activités au niveau pour lui suffisant, et il ne faut attendre aucune maladresse de sa part. En relation avec son environnement, le « grand singe » est tout à fait au point sur le plan perceptif ; ce n'est pas sur sa capacité d'attention que son développement peut paraître insuffisant. Si le chimpanzé fonctionne au quotidien avec un niveau de performance cognitive qui serait pour nous celui d'un somnambulisme, il est de son côté parfaitement éveillé, perceptif et réactif à son environnement, d'une manière optimisée par rapport à son mode de vie.

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Cet avertissement long mais nécessaire étant donné, il devient possible de se pencher sur l'évolution cognitive des hominidés en évitant —autant que faire se peut— de verser dans l'anthropomorphisme.

  1. a b c d et e « Bodies of Evidence », in The mating mind, Geoffrey Miller (chap. 7).
  2. Genèse 3:16
  3. a b et c How And Why Did Women Evolve Periods?, Quora, May 6, 2016.
  4. Genetic conflicts in human pregnancy, Haig D, Q Rev Biol. 1993 Dec;68(4):495-532.
  5. The evolution of menstruation: A new model for genetic assimilation, D. Emera, R. Romero,and G. Wagner, Bioessays. 2012 Jan; 34(1): 26–35. Published online 2011 Nov 7. doi: 10.1002/bies.201100099.
  6. Origine et évolution du langage et de la parole, Didier Demolin, 2010.
  7. a b et c Terrence W. Deacon, « The Human Paradox », in The symbolic species: the co-evolution of language and the brain ; Chap. 1. (ISBN 0-393-03838-6). W. W. Norton & Company, Inc., 1997.
  8. Preconditions for the evolution of protolanguages, Merlin Donald, in The Descent of Mind: Psychological Perspectives on Hominid Evolution,Oxford University Press, 1999. (ISBN 978-0198524199).
  9. Voir notamment sur ce sujet les travaux de Donald D. Hoffman - Professor of Cognitive Science, University of California, Irvine.
  10. a b c d et e How Homo Became Sapiens: On the Evolution of Thinking. Peter Gärdenfors, Oxford University Press, 2006. (ISBN 0 19 8528 5 1 5)
  11. a et b Leap of Faith, A review of Derek Bickerton's Language and Species. Michael Studdert-Kennedy, Applied Psycholinguistics.
  12. Le Gène égoïste, Richard Dawkins.
  13. Derek Bickerton, La Langue d’Adam, Dunod, 2010.
  14. Border collie comprehends object names as verbal referents. Pilley, J. W., & Reid, A.K.. Behavioural Processes, 86, 184-195 (2011).
  15. Speaking bonobo, P. Raffaele. Smithsonian Magazine, November 2006.
  16. Air sacs and vocal fold vibrations: Implications for evolution. Bart De Boer, Theoria et Historia Scientiarum, 2012-9, pp. 13-28.
  17. a et b Erreur de référence : Balise <ref> incorrecte : aucun texte n’a été fourni pour les références nommées JLDessalles2000
  18. a et b The Gradual Evolution of Language, Michael C. Corballis, in Humana.Mente Journal of Philosophical Studies, 2014, Vol. 27, 39-60.
  19. a et b Residuals of Intelligent Design in Contemporary Theories about Language Nature and Origins. Antonino Pennisi, Alessandra Falzone. Humana.Mente Journal of Philosophical Studies, 2014, Vol. 27, 161-180.
  20. The evolution of syntax : an exaptationist perspective. W. Tecumseh Fitch, Front. Evol. Neurosci., 23 December 2011.
  21. How Could Language Have Evolved?, Johan J. Bolhuis, Ian Tattersall, Noam Chomsky, Robert C. Berwick, PLOS Biology, August 26, 2014.
  22. Language evolution: A brief guide for linguists. Derek Bickerton, / Lingua 117 (2007) 510–526
  23. http://simonwinter.se/avhandling/
  24. The Evolution of Sentential Structure, Peter Gärdenfors, in Humana.Mente – Issue 27 – December 2014.
  25. Sémiotique et communication: état des lieux et perspectives d'un dialogue, Driss Ablali, 2007.
  26. Baron-Cohen, S. (1999). Evolution of a theory of mind? In The Descent of Mind: Psychological Perspectives on Hominid Evolution. Oxford University Press, Oxford.
  27. Human Evolution, Robin Dunbar — Pelican books 2014, (ISBN 978-0-141-97531-3).
  28. Hominid Enculturation and Cognitive Evolution, Merlin Donald, in "Cognition and Material Culture: the Archaeology of Symbolic Storage", Edited by Colin Renfrew and Chris Scarre, The McDonald Institute for Archaeological Research, Cambridge, U.K. 1998.