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Portrait de Madame Sans
Portrait de Madame Sans
Artiste
Date
1895
Type
Portrait de femme.
Technique
Peinture à l'huile
Dimensions (H × L)
200 × 94 cm
Localisation
Commentaire
Don de Mademoiselle Durand en 1981

Portrait de Madame Sans est une œuvre du peintre Henri Martin réalisée en 1895 et conservée au Musée des Augustins de Toulouse[1],[2].

Historique de l'œuvre

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Il semble qu’une belle jeune femme brune soit la cause directe d’une mélancolie qui s’empare de son cœur. A Toulouse, Henri Martin et son ami Jean Rivière[n 1] fréquentent assidûment le salon de Madame Sans généreusement ouvert aux artistes. L’époux de la maîtresse de maison est Rémy Sans (1847-1909), le puissant et influent directeur du journal La Dépêche de Toulouse, ancêtre de la Dépêche du Midi. Or Madame Sans est « une créature d’une beauté rare, d’une élégance souveraine et d’une grâce frémissante presque aigue ». Mais hélas une maladie implacable la mine et elle meurt en 1895 quelques mois après.

Le tableau a fait l’objet d’une donation à la ville de Toulouse par une Mademoiselle Durand, sous réserve d’usufruit en 1966 et en donation pleine en septembre 1981, date de l’entrée de l’œuvre dans les collections du Musée des Augustins. Les documents détenus par la musée associés à cette donation ne mentionnent pas l’origine de la possession de l’œuvre par Mademoiselle Durand.

Description

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Henri Martin a exécuté un portrait, en pied, de grande dimension, où son sujet est dépeint avec, à la fois, une expression de vie intense et de rêveuse évasion. Il semble qu’un pressentiment de la destinée qui guette son modèle ait suggéré au peintre cette expression étrange « ce geste de la main qui porte haut la fleur fatidique du chardon » Le tableau baigne dans une atmosphère sombre dans laquelle se fond la robe aux reflets vert foncé et d’où seul émerge un profil perdu dans ses mystérieuses pensées. Le chardon fatidique qui apparaît tel un leitmotiv dans beaucoup d'œuvres de ces années là est peut-être le symbole de Madame Sans et de sa destinée trop tôt interrompue

Contexte : la période de création d’inspiration symboliste d’Henri Martin

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En 1890, Henri Martin a 30 ans. Il est marié et il aura bientôt quatre enfants. Sa situation ne s'améliore guère tant il peine à à tirer un revenu décent de la vente de ses œuvres. C'est dans ces années qu'il entame avec les Rose-Croix une éphémère idylle qui alimente une inspiration tournée vers le symbolisme. En 1892 Il participe au salon des Rose-Croix menés par Joséphin Péladan qui demandent à l’art d’opposer le rêve à la réalité et l’idéal au laid. Henri Martin développe des allégories pour illustrer une ambivalence manichéenne de la nature humaine dans Chacun sa chimère (1891), Entre le vice et la vertu (1892). Plus globalement, pour Puvis de Chavannes(1824-1898) qui lança le mouvement symboliste en peinture, en France, « un tableau est la traduction plastique d’une idée ». Dans cette période Henri Martin tente d’illustrer les visions de Poe, Baudelaire (Les Fleurs du Mal), Dante et Musset, il peuple alors ses tableaux de muses, de poétesses éthérées, désincarnées, habitées par l’inspiration poétique, chantant ou dansant dans des paysages arcadiens. La relation avec les Rose-Croix s'achève par une rupture dès 1894-1895 mais le symbolisme s'exprimera à des degrés divers dans ses tableaux pendant encore presque 10 ans.

Analyse

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.... Madame Sans, hiératique égérie des salons toulousains représentée grandeur nature, est a la fois un portrait et une allégorie. Le chardon, fleur maléfique qu’elle brandit, se trouve aussi sur le fond de la toile et également sculpté sur le cadre, personnifiant la destinée cruelle du modèle qui devait mourir prématurément La femme, l'inspiration symbolique Le changement de technique, que l'on peut apercevoir au fur et à mesure de la visite, se traduisant par le passage d'une peinture lisse et grasse et plus sombre à celle de petits traits, s'approchant du pointillisme, plus clairs et aux couleurs chaleureuses, ne va pas de pair avec l'abandon du symbolisme. Celui-ci a plutôt tendance à rejoindre l'allégorie. On le voit particulièrement dans les portraits de femmes, qui semblent d'ailleurs source majeure d'inspiration pour l'artiste. Dans Madame Sans par exemple, l'héroine tient dans sa main un chardon. (ce qui est souvent le cas dans les représentations de femmes d'Henri Martin), « On l'associe de suite au chardon-Marie » rappelle M. Le Bihan, « cela renvoie à la pureté, la protection, c'est l'image de la fidélité aussi. »

Dans l’œuvre d’Henri Martin le portrait ne tient qu’une place secondaire, malgré le talent indéniable qu’il avait pour saisir l’essentiel d’un caractère et pénétrer l’intimité psychologique de ses modèles. Tout au long de sa carrière, il s’est surtout attaché à portraiturer des gens de son entourage qu’il affectionnait. Ce tableau a été peint durant une période difficile tant matériellement que psychologiquement pour l’artiste. Il s’est alors mis à rechercher dans son art un moyen de fuir la réalité quotidienne en donnant à sa peinture un caractère idéalisé puis symboliste. Un de ses symboles favoris pour exprimer son mal d’être était le chardon qui, avec ses piquants et son aspect acéré, suggérait l’attrait fatidique exercé par la femme. Il semble que Madame Sans, ici représentée, une belle mondaine qui ouvrait son salon aux artistes toulousains, ait été l’objet principal de sa mélancolie. Elle apparaît en pied, sa robe se fondant dans une atmosphère sombre où seul son visage est éclairé et son regard semble perdu dans de mystérieuses pensées. Elle porte haut le chardon qui est repris comme un leitmotiv sur le fond de la toile. Il faut y voir là le signe de son attirance pour la belle dame mais également celui de la fatalité car le peintre savait son modèle atteint d’une maladie incurable. Elle disparaîtra en 1895, année de l’exécution de l’œuvre.


Le chardon dans la symbolique de l’œuvre d’Henri Martin

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Le chardon peut avoir plusieurs significations. Pour certains, ses piquants en font le symbole de l’austérité et de l’agressivité ou bien d’un destin tragique (dans le Portrait de Madame Sans, on peut y voir l’annonce de sa mort précoce, elle intervient l’année où le peintre l’a représentée). Si le chardon a ainsi illustré la douleur du Christ et de la Vierge, il a aussi symbolisé, comme la châtaigne, la vertu protégée par ses piquants et, de là, la fidélité, la chance en amour et la réussite dans le mariage[4].

Représentativité du tableau dans le courant artistique

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Voir aussi

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Notes et références

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  1. Jean Rivière, peintre, sculpteur, céramiste, ébéniste (ne pas le confondre avec Théodore Rivière) est un artiste complet et talentueux. Né en 1853 dans une famille d'artisans du meuble, il passe son enfance à Saint-Paul-Cap-de-Joux ( Tarn ). Il part ensuite à Toulouse pour un long cursus à l'école des beaux-arts, section sculpture. Il s'y lie d'amitié avec les artistes de sa génération dont Bourdelle et Labatut et surtout le peintre Henri Martin. Dès 1890, il devient professeur en cours de sculpture ornementale de l'école des beaux-arts de Toulouse. Jean Rivière est certainement l'artiste avec lequel Henri Martin a partagé la plus longue et la plus sincère des amitiés. Tout jeune peintre encore, il en a peint un portrait "d'âme" conservé au Musée de Cahors Henri-Martin[3].

Références

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Bibliographie

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  • ''Catalogue d'exposition : "Henri Martin (1860-1943) : du rêve au quotidien : peintures conservées dans les collections publiques françaises : [exposition, Cahors, Musée Henri-Martin et Saint-Cirq Lapopie, Musée départemental Rignault, 7 juin-6 octobre 2008, Bordeaux, Musée des beaux-arts, 23 octobre 2008-1er février 2009 et Douai, Musée de la Chartreuse, 13 mars-10 juin 2009] / [catalogue par Claude Juskiewenski, Sabine Maggiani, Luce Barlangue, et al.].p.113''
  • Claude JUSKIEWENSKI « Henri Martin paysagiste et décorateur languedocien », thèse de IIIe cycle, Université Toulouse le Mirail, Toulouse, 1974, p. 65, p. 107-108.

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