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Affaire Mouvement Raëlien Suisse contre Suisse
Titre Mouvement Raëlien Suisse contre Suisse
Code Arrêt 16354/06 [1]
Organisation Conseil de l'Europe
Tribunal (fr) Cour européenne des droits de l'homme
Grande Chambre
Date
Personnalités
Composition de la cour Président : Nicolas Bratza

Juges : Françoise Tulkens, Josep Casadevall, Corneliu Bîrsan, Egbert Myjer, Mark Villiger, Päivi Hirvelä, András Sajó, Mirjana Lazarova Trajkovska, Ledi Bianku, Ann Power-Forde, Mihai Poalelungi, Nebojša Vučinić, Kristina Pardalos, Ganna Yudkivska, Paulo Pinto de Albuquerque, Helen Keller.

Détails juridiques
Branche Droits de l'homme, Liberté d'expression, Liberté de religion
Problème de droit L’association requérante allègue que les mesures d’interdiction d’affichage prises par les autorités suisses ont porté atteinte à son droit à la liberté d’expression garanti par l’article 10 de la Convention. (§ 28) L’association requérante a également invoqué l’article 9 de la Convention à l’appui de ses allégations, estimant que l’interdiction litigieuse avait porté atteinte à son droit à la liberté de religion. (§ 78)
Solution La Cour conclut que les autorités nationales n’ont pas outrepassé l’ample marge d’appréciation dont elles disposaient en l’espèce, et que les motifs avancés afin de motiver leurs décisions étaient « pertinents et suffisants » et répondaient à un « besoin social impérieux ». (§ 76) (Non violation de l'article 10) et la Cour conclut également à la non violation de l'article 9. (§ 80)
Opinion dissidente Tulkens, Sajó, Lazarova Trajkovska, Bianku, Power-Forde, Vučinić, Yudkivska et Pinto de Albuquerque.
Voir aussi
Mot clef et texte article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme, article 9 de la Convention européenne des droits de l'homme
Lire en ligne Sur le site de la cour : Arrêt [2], Audience [3].

L’arrêt Mouvement Raëlien Suisse contre Suisse de la Grande chambre de la Cour européenne des droits de l'homme a été prononcé en audience publique au Palais des droits de l'homme, à Strasbourg, le . Il s’agissait de déterminer, principalement, si le refus d’autoriser la publication d’une affiche du Mouvement Raëlien Suisse respectait la liberté d’expression et la liberté de religion. Ce refus a été rendu par quatre autorités nationales, le conseil communal de Neuchâtel, le département neuchâtelois de la gestion du territoire, le tribunal administratif et le tribunal fédéral. Ainsi que par une autorité internationale, la Cour européenne des droits de l’Homme dans son arrêt du 13 janvier 2011 [4].

Arrêt de la Cour modifier

En fait modifier

Le 7 mars 2001, l’association du mouvement raëlien demanda à la direction de la police de Neuchâtel l’autorisation de mener une campagne publicitaire au moyen d’affiches exposées dans la ville (aux endroits spécialement conçus à cet effet) pour la période comprise entre les 2 et 13 avril 2001. Les affiches portaient l’inscription centrale : « Le Message donné par les extraterrestres » ; alors qu'au bas de l’affiche se figuraient en caractères gras l’adresse du site Internet du Mouvement raëlien ainsi que la proposition : « La science remplace enfin la religion ». L’affiche comportait également le visage d’extraterrestres et d’une soucoupe volante. (§ 14)

La direction de police de Neuchâtel refusa pour la troisième fois de procéder à l’affichage car un rapport parlementaire français désignait les agissements du mouvement Raëlien comme contraires à l’ordre public et aux bonnes mœurs. Un recours fut introduit devant le conseil communal de Neuchâtel qui rejeta la demande et écarta l’argument tenant à la liberté de religion au motif qu’il ne s’agissait pas d’une question touchant à la liberté de religion, mais plutôt, d’un mouvement sectaire dangereux. Après épuisement des moyens de recours interne, l’affaire arriva devant la Cour européenne des droits de l’homme. (§§ 15 – 21)

En droit modifier

La Cour européenne des droits de l’Homme (Cour) a d’abord analysé le recours basé sur l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’Homme (Convention). (§ 28) L’article 10 de la Convention visant à garantir la liberté d’expression.

«  § 1 Toute personne a droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontière. Le présent article n'empêche pas les Etats de soumettre les entreprises de radiodiffusion, de cinéma ou de télévision à un régime d'autorisations.

§ 2 L'exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l'intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d'autrui, pour empêcher la divulgation d'informations confidentielles ou pour garantir l'autorité et l'impartialité du pouvoir judiciaire.  »

— Article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales

Le Gouvernement Suisse avait sur ce point demandé à la Grande Chambre à déclarer la requête irrecevable, ce que la Cour a refusé, rappelant le paragraphe 22 de l’arrêt et motivant en disant « que la requête n’était pas manifestement mal fondée au sens de l’article 35 §3 de la Convention ». (§§ 29 - 31)

Pour ce qui est de la violation de l’article 10 de la Convention, la Cour précise tout d’abord qu’en vertu de l’article 10, §2 de la Convention, des exceptions à la liberté d’expression sont prévues. La Cour précisant ensuite qu’il faut remarquer que l’on se trouve ici dans l’octroi de l’usage de la voie publique et donc que le fait que les autorités publiques refusent cet octroi en ayant « soigneusement motivé » leur décision ne viole pas l’article 10 de la Convention. (§ 33)

Dans un second temps la Cour va apprécier les thèses des parties et observations du tiers intervenant, ces thèses étant exprimées dans les §§ 34 à 46. Tout d’abord la Cour va rappeler que les principes fondamentaux relatifs à la liberté d’expression sont bien établis dans sa jurisprudence. (§ 48) Ensuite, la Cour va appliquer ce principe au cas d’espèce disant qu’il n’y a pas de contestation quant au fait qu’il y a bien eu une ingérence de la part de l’Etat Suisse mais qu’il convient de vérifier si cette ingérence respecte les conditions posées par l’article 10, §2 de la Convention. (§§ 49 - 51) Il n’est pas non plus contesté que la restriction se fonde sur un règlement de police et que cette restriction poursuive bien un ou des buts légitimes. (§§ 52 - 55) « La question principale à trancher […] est celle de savoir si la mesure litigieuse était nécessaire dans une société démocratique ». (§ 56)

La Cour rappelle que chaque Etat bénéficie « d’une marge d’appréciation pour juger de la nécessité et de l’ampleur d’une ingérence dans la liberté d’expression ». (§ 59) Toutefois cette marge d’appréciation est soumise au contrôle de la Cour, qui sera plus ou moins rigoureux en vertu de différents éléments. (§§ 60 - 61) La Cour va estimer qu’ici on est dans le domaine du discours commercial et donc que la marge d’appréciation de l’Etat est plus large (plus large, par exemple, que si on se trouvait dans un discours politique). (§ 62) Ce trouvant dans une partie laissée à l’appréciation des Etats (§§ 63 - 65) « seules des raisons sérieuses pourraient la conduire à substituer sa propre appréciation à celle des autorités nationales ». (§ 66) Il faut, dès lors, examiner les motifs invoqués par les autorités nationales. (§ 67) « La Cour rappelle le principe général selon lequel il lui faut examiner l’ingérence litigieuse à la lumière de l’ensemble de l’affaire pour déterminer si elle était « proportionnée au but légitime poursuivi » et si les motifs invoqués par les autorités nationales pour la justifier apparaissent « pertinents et suffisants» » (§ 69) et donc qu’il fallait aussi examiner, en plus de l’affiche litigieuse, le site internet du Mouvement Raëlien. (§ 69)

La Cour va confirmer ce que les instances nationales ont dit et ce qu’elle a elle-même expliqué dans son précédent arrêt aux §§ 55 – 57. (§ 72) Et de rajouter que la mesure n’est pas disproportionnée étant donné que la requérante a encore à sa disposition d’autre moyens de communication pour véhiculer ses idées. (§ 73 à 75)

Conclusions de la Cour modifier

« La Cour conclut que les autorités nationales n’ont pas outrepassé l’ample marge d’appréciation dont elles disposaient en l’espèce, et que les motifs avancés afin de motiver leurs décisions étaient « pertinents et suffisants » et répondaient à un « besoin social impérieux ». La Cour ne voit donc aucun motif sérieux de substituer son appréciation à celle du Tribunal fédéral, lequel a examiné la question litigieuse avec soin et dans le respect des principes posés par la jurisprudence de la Cour. Partant, il n’y a pas eu violation de l’article 10 de la Convention. » (§§ 76 - 77) Et la Cour « conclut qu’il ne s’impose pas d’examiner si l’article 9 de la Convention s’applique à l’interdiction litigieuse et, dans l’affirmative, s’il y a eu violation de cette disposition. » (§ 80)

Opinion concordante du juge Bratza modifier

La nature de l’ingérence :

Le rejet de la demande d’autorisation a été confirmé successivement par toutes les instances nationales. (3)

Le grief résulte d’une obligation positive de l’Etat et ne porte pas sur une restriction générale touchant toutes les activités et libertés de diffuser de l’association. Ce grief ne porte que sur le refus par l’autorité d’utiliser les panneaux d’affichage municipaux. Ce grief est justifié car « l’article 10 ne saurait être interprété comme imposant aux autorités nationales l’obligation de permettre un accès inconditionnel et libre aux équipements publics pour la diffusion d’informations ou d’idées. » (4)

L’ingérence dans la liberté d’expression de l’association était limitée. Et il n’y a pas de « contradiction entre le refus d’autoriser l’usage d’équipements publics pour la publicité d’un site internet et l’absence de mesures destinées à fermer le site ou à en restreindre l’accès. » (5)

La nature du discours :

La marge d’appréciation des autorités nationales varie, s’agissant de réglementer le discours commercial et publicitaire, les Etats bénéficient d’une large marge d’appréciation. (6)

Cette affiche n’ayant pour but que de faire de la publicité pour l’association, la marge d’appréciation des autorités nationales était large et l’ingérence justifiée. (7)

Le contenu des affiches :

Il ne faut pas étudier l’affiche isolément, pour justifier l’ingérence, « il est nécessaire d’examiner le contenu du site internet que le public était invité à consulter par le biais de l’affiche. (8)

Les motifs pour lesquels l’autorisation a été refusée :

Tout d’abord, quatre autorités nationales ont refusé d’accorder l’autorisation. Ce qui garantit qu’il n’y a pas eu d’arbitraire, de discrimination ou d’abus de pouvoir. (9)

La "géniocratie" n’est pas une doctrine propre à troubler l’ordre public. (11)

Par contre, de « nombreux membres » ont fait l’objet d’enquêtes et de poursuites pour agression sexuelles sur des mineurs (Cour d’appel de Lyon). Et « certains passages pouvant être téléchargés sur le site peuvent conduire des adultes à se livrer à des abus sexuels sur des enfants ce que l’association elle-même n’a pas contesté ». (12)

Pour ce qui est de la présence sur le site d’un lien vers la société Clonaid, les motifs avancés par les autorités nationales, disposant d’une large marge d’appréciation, étaient tout à la fois pertinents et suffisants. (14)

Opinion dissidente des juges: Tulkens, Sajó, Lazarova Trajkovska, Bianku, Power-Forde, Vučinić et Yudkivska modifier

« Toute restriction à la liberté d’expression doit être strictement justifiée par un besoin social impérieux et étroitement encadré par des motifs pertinents et suffisants. » (1)

Les Motifs de l’interdiction :

L’interdiction est « indirecte » car c’est le renvoi à l’adresse du site internet et le numéro de téléphone du Mouvement Raëlien qui sont visés. Et donc les motifs invoqués par la Cour tiennent aux opinions de l’association sur le clonage humain, la "géniocratie" et la méditation sensuelle (qui peut entrainer des dérives sexuelles). (2)

Pour ce qui est de l’athéisme scientifique, ça ne revêtait pas un caractère particulièrement provoquant. (3)

Pour ce qui est du contrôle que les juridictions suisses ont exercé sur le clonage, c’est d’abord le renvoi au site internet du Mouvement Raëlien dont l’adresse figurait sur l’affiche et un lien proposé dans ce site vers un autre site, celui de la société Clonaid. Le Gouvernement n’a pas, non plus, allégué ici que cette promotion revêtait un caractère particulièrement provoquant.(4)

Pour ce qui est de la "géniocratie", ce n’est qu’une utopie qui ne peut donc pas revêtir un caractère particulièrement provoquant. (5)

En ce qui concerne la médiation sensuelle qui pourrait conduire des membres de l’association à des abus sexuels envers de mineurs. Cela pourrait conduire à l’interdiction de l’affiche, mais, c’est essentiel, « les faits n’ont pas été considérés comme pouvant justifier l’interdiction de l’association requérante ». Si la pratiquer de la médiation sensuelle n’entraine pas l’interdiction de l’association requérante, elle n’est pas un motif pouvant justifier d’un « besoin social impérieux ». (6)

Bien qu’en Suisse, les cantons puissent avoir des législations et politiques différentes,  le fait que d’autres cantons ont autorisé la publication des affiches de l’association «  affaiblit la légitimité du but de l’ingérence ». (7)

La portée de l’interdiction :

Il n’est pas justifié que l’on interdise juste à l’association de publier par voie d’affichage ses idées alors qu’on l’autorise à publier ses idées via internet. (9)

En vertu de l’article 10 de la Convention, les personnes sont libres d’utiliser les moyens d’expression qu’elles souhaitent. (10)

« Il est difficile d’admettre qu’une association légale, qui dispose d’un site non interdit, ne puisse pas utiliser l’espace public pour promouvoir ses idées par des affiches qui ne sont pas illicites en elles-mêmes. » « Cela reviendrait à soutenir que la liberté d’expression dans l’espace public pourrait être restreinte pour la seule raison que les autorités sont en désaccord avec les idées développées. » (11)

Opinion dissidente commune des juges: Sajó, Lazarova Trajkovska, Vučinić modifier

I.
L’interdiction ne satisfait pas à la condition consistant à prouver l’existence d’un besoin social impérieux, pour tenter de ce faire, la majorité s’est appuyée sur l’introduction d’une nouvelle catégorie d’expression, mais cette nouvelle norme va à l’encontre de la jurisprudence de la Cour. Prendre en compte le fait qu’une affiche véhicule des idées que ne prône qu’une minorité et que ces idées ne sont que difficilement compatible avec les idées de la majorité ne respecte pas les objectifs de la Convention.

II.
Le principe, selon lequel « les biens appartenant au domaine public ouverts au public à des fins d’expression, comme les panneaux d’affichage, deviennent des lieux publics ouverts à toutes les personnes voulant s’exprimer, qui ont toutes un droit égal à leur utilisation », n’a pas été appliqué dans l’arrêt du tribunal fédéral Suisse. De plus, de tels lieux existent pour permettre à toutes les opinions de s’exprimer. Pour autant, il existe des motifs permettant de restreindre l’accès aux lieux publics s’ils ne procèdent pas d’un esprit partisan ou de préjugés. La loi suisse reconnaît l’existence d’un espace public destiné à l’affichage et ouvert à tous. Mais les autorités ne disposent pas d’une « certaine latitude » pour la gestion de ces espaces. La gestion des panneaux d’affichage était confiée à une société privée et l’exposition de l’affiche était soumise à une autorisation préalable. La Cour soutient qu’il y a des dangers inhérents aux restrictions préalables, ces dangers tiennent à « l’abus de la censure » et à la « nature spéculative des restrictions appliquées dans tout système de contrôle préalable ». Les mesures préventives restreignant la liberté d’expression peuvent viser des besoins sociaux impérieux, ce qui n’a pas été démontré dans le cas d’espèce.

III.
La Cour reproche au site internet de contenir un lien renvoyant vers le site de Conaid. Il n’existe pas à l’heure actuelle d’hyperlien sur la page d’accueil du site du Mouvement (en date du 15 mai 2012) et il n’y a pas de preuve formelle dans le dossier que ce lien était présent en mars 2001. De plus, nous ne connaissons pas les activités proposées par le site Clonaid en mars 2001. « Or en l’absence de faits, leur appréciation ne saurait être convaincante. » Enfin la police a prononcé son interdiction en 2001 alors que la première annonce faite par Clonaid sur le premier clonage reproductif humain a été faite en décembre 2002. Il y a aussi que la mention d’un hyperlien menant vers le site Clonaid apparait pour la première fois le 27 octobre 2003 et n’était pas présente en 2001. Enfin, «  défendre de manière abstraite un comportement réprimé pénalement en prônant sa législation ne constitue pas une incitation au crime. »

« Dans quelle mesure des informations concernant un tiers lié à l’association requérante par le biais d’un hyperlien constituent-elles un facteur pertinent pour apprécier l’existence d’un besoin social impérieux ? » Bien que l’hyperlien facilite l’accès aux informations, il faut auparavant que l’utilisateur prenne un certain nombre de décisions indépendantes. Le lien de cause à effet est donc très ténu. De plus une référence n’est ni une approbation ni une identification. Et toute forme de diffusion ne donne pas naissance à la responsabilité. Il n’y a nulle démonstration de la nécessité d’une restriction fondée sur des faits pertinents. « En bref, pas de faits, pas d’appréciation – donc pas d’acceptabilité ». Pour qu’il y ait responsabilité, il faut que le contrôle soit établi de façon convaincante. Eu égard à ce qu’il est mis ci-dessus, il n’est pas évident qu’une telle « relation indirecte » fasse naître un besoin social impérieux. « Ces doutes, sont encore plus forts à propos de l’affiche interdite, avec laquelle le lien est encore plus indirect. »

IV.
La Cour n’a pas indiqué quels motifs défendent des idées antidémocratiques, elle a recouru à la « théorie de la mosaïque » (consiste à assembler des informations qui ne sont pas en elles-mêmes pertinentes pour parvenir à la conclusion (voir affaire Der Spiegel (20 BVerfGE 162 (1966))). De plus, l’arrêt mentionne un nouveau critère applicable à l’affichage public dans le cadre de campagnes non strictement politiques (§ 64). Enfin, il faut que les idées soient protégées dans le processus de communication et non pas uniquement dans leur production.

V.
Les Etats parties à la Convention ont jugé nécessaire de créer une juridiction internationale car les autorités nationales peuvent avoir une réalité déformée sur ce qui leur est soumis du fait du contact direct qu’elles peuvent avoir avec cette chose. Le contrôle d’un besoin social impérieux ne saurait désigner une approbation passive des spéculations internes sur la capacité d’une idée à saper l’ordre public. « La théorie de la marge d’appréciation est utile pour définir l’interaction entre les autorités nationales et le mécanisme de mise en œuvre de la Convention. » La marge d’appréciation ne réduit pas la nécessité de disposer d’une explication pertinente et suffisante. De plus, « la Cour doit exiger que les accusations dirigées par les autorités nationales contre les requérants et dictant des restrictions à la liberté d’expression soient prouvées. En outre, la Cour a clairement dit qu’il ne suffit pas d’appliquer une restriction de bonne foi ; le fait que les autorités aient en l’espèce jugé les mesures restrictives indispensables n’est pas pertinent, quel que soit le nombre d’autorités qui sont intervenues. » « L’interdiction et les motifs sur lesquels la Cour s’est fondée reflétaient une position officielle sur les opinions de l’association requérante, ce qui a manifestement ajouté un effet de censure. » La Cour a reconnu que le refus d’accorder une autorisation pouvait avoir un « effet dissuasif » sur les requérants, mais cela pourrait aussi « dissuader d’autres personnes de prendre connaissance de ces idées au motif qu’elles ne bénéficiaient pas d’une autorisation officielle ». Ce qui est un manquement au devoir de neutralité de l’Etat.

Opinion dissidente du juge Pinto de Albuquerque modifier

Le juge Pinto de Albuquerque considère que la Cour aurait dû permettre au mouvement Raëlien d’exposer ses pancartes. Il critique la manière dont la Cour aborde le problème de l’ingérence ainsi que les critères retenus pour son contrôle. Ensuite c’est l’élément de la proportionnalité que le juge analyse et trouve inadapté. (p.47) « L’interdiction de l’affichage n’est pas compatible avec le pluralisme inhérent aux sociétés démocratiques, où les idées sont librement échangées dans l’espace public et où la vérité et l’erreur apparaissent grâce à la libre confrontation des idées »(p.69) de plus le motif que le neutralité de l’état pourrait être mal interprété ne constitue pas un motif suffisant à la censure d’un contenu qui est en lui-même légal et admis sur le territoire suisse et européen, c’est en ce sens que l’exigence de proportionnalité n’a pas été respectée.(p.70).

Références modifier

Voir aussi modifier

Articles connexes modifier

Arrêt(s) de chambre modifier

AFFAIRE MOUVEMENT RAËLIEN SUISSE c. SUISSE [5]

Résumés juridiques modifier

Mouvement raëlien suisse c. Suisse [GC] [6]

Mouvement raëlien suisse c. Suisse [7]

Communiqué(s) de presse modifier

Arrêt de Grande Chambre Mouvement raelien suisse c. Suisse 13.07.2012 [8]

Annonce d'arrêt de Grande Chambre: Mouvement Raelien c. Suisse [9]

Audience de Grande Chambre Mouvement Raelien Suisse c. Suisse 16.11.11 [10]

Annonce d'audiences en novembre 2011 [11]

Renvois devant la Grande Chambre juin 2011 [12]

Arrêt de chambre Mouvement Raelien suisse c. Suisse 13.01.2011 [13]

Annonce arrêts 11-13.01.11 [14]

Bibliographie et webographie conseillée modifier

MUZNY P., " La liberté d’expression des idéaux par voie d’affichage sur le domaine public ne vaut pas pour tous ", in Revue trimestrielle des droits de l'homme, 2013/03, Anthemis, 2013.