François-Louis Suleau

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François-Louis Suleau, né le à Grandvilliers et mort massacré par la foule le à Paris, est un pamphlétaire monarchiste français.

François-Louis Suleau
Biographie
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Décès
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Enfant

Biographie modifier

Il est le fils de Nicolas Antoine Victoire Suleau, négociant à Grandvilliers, et de Marie Jeanne Fortin. Après avoir fait ses études à Amiens et au collège Louis-le-Grand où il eut Desmoulins, Robespierre et Fréron fils pour condisciples, Suleau prend le grade de maître ès-arts. Il sert ensuite dans les hussards.

En 1784 il renonce à une carrière militaire et devient avocat aux conseils du roi. En 1787, il vend cette charge. Il part pour un voyage aux îles du Vent et à Saint-Domingue.

Il recueille la démission du sénéchal de la Guadeloupe mais, ne pouvant le remplacer sans avoir l’agrément du roi, il revient en France, après avoir visité les différents États de l’Amérique du Nord, et arrive à Paris le .

Suleau prend position dans les débats. Les principes nouveaux ne lui semblent pas d’abord incompatibles avec la monarchie. Mais les journées d’octobre le ramènent du côté royaliste.

Il se rend en Picardie, dans sa famille, et entreprend de convertir la municipalité d’Amiens à ses idées. Invité à quitter la ville, il n’en fait rien, et est enfermé dans la citadelle.

Dans le plan du « marquis » de Favras consistant à emmener le roi dans une ville du nord, Suleau est considéré par les révolutionnaires comme l’émissaire chargé de soulever la Picardie. Ces bruits prennent une telle consistance que le Châtelet de Paris évoque l’affaire de Suleau, et le fait transférer à la Conciergerie. Une commission est nommée, mais le prisonnier est relâché le au bout de quatre mois de captivité sans avoir été entendu.

Dès ce moment, la verve du pamphlétaire s’épanche dans les journaux hostiles à la Révolution. C’est surtout dans les Actes des Apôtres (à dater du no 102), que sa collaboration a laissé les traces les plus durables. Il pourfend les pamphlets offensants pour la majesté royale ; ses menaces s’adressent même au duc d’Orléans, accusé de pactiser avec le mouvement révolutionnaire. Il provoque aussi les députés du côté gauche.

Il fréquente Mirabeau et le garde des sceaux Duport du Tertre ; on le voit même chez La Fayette.

Persuadé que l’appui de Mirabeau sauverait le trône, il s’employa d’un côté à persuader au roi qu’il fallait satisfaire sans marchander la déplorable avidité du « père conscrit », de l’autre à inculquer à Mirabeau les plans qu’il croyait les plus propres à rétablir l’ordre dans l’État. Les lettres et les plans de Suleau faisaient partie des papiers que l’orateur mourant confia à son exécuteur testamentaire, le comte de La Marck, et n’ont pas été publiés. On sait pourtant qu’il conseillait de commencer la guerre civile dans le Midi et de corrompre les députés : ainsi, il avait calculé qu’avec moins de deux millions de livres on enlèverait cent dix voix au côté gauche, de manière à assurer au gouvernement une énorme majorité.

Lorsque les ministres d’alors écartent ce plan, Suleau considère leur répugnance comme la preuve flagrante de leur impéritie. Le Journal de M. Suleau, qui paraît le , ne répond pas à l’attente générale ; mais on le consultera avec intérêt pour les renseignements qu’il renferme sur la cour de Coblence et les plans de l’émigration. En novembre 1791, Suleau se trouvait à Neuwied sur le Rhin. Il ne met aucun espoir dans l’armée de Condé, et cherche, dès lors, leur salut dans l’établissement d’une monarchie représentative.

On le voit, en 1792, s’efforcer de convertir Danton et Robespierre à la constitution anglaise. Il publie un nouveau journal qui n'a qu’un seul numéro, daté avec vraisemblance du .

Le 30 mai 1792, il épouse à Oncy-sur-École une artiste peintre, Adélaïde Victoire Hall, fille du peintre suédois Pierre-Adolphe Hall et de Marie Adélaïde Gobin. Le mariage est célébré par son frère, René Suleau, chanoine de l'abbaye de St-Victor de Paris et prieur curé d'Oncy[1]. M. et Mme Suleau auront un fils né post mortem en 1793, Élysée de Suleau[2].

Dans la matinée du 10 août 1792, le directoire du département de Paris lui ayant confié, dans la nuit du 9 au 10 août, la mission de vérifier l’état des choses et d’en faire son rapport au procureur général syndic, il s'adjoint quelques jeunes gens et se rend aux Tuileries en uniforme de garde national. Il y aurait trouvé la mort après un ex-garde du corps, de Selminiac, et l’abbé Bouyon, "auteur dramatique" identifié comme Victor Auguste de Bouyon (1758-1792), arrêtés comme lui[3].

Meurtre modifier

Le 10 août 1792, Suleau meurt assassiné une heure avant l’assaut du palais des Tuileries. Ce meurtre fait suite à la rixe du 30 juillet 1792 : cet affrontement avait opposé, dans les jardins des Champs-Elysées, une délégation des Marseillais à des membres royalistes du bataillon des Filles Saint-Thomas. Un patriote marseillais avait été gravement blessé et un royaliste tué. Par esprit de vengeance, dans la nuit du 9 au 10 août suivant, on fait circuler des listes de proscription identifiant plusieurs de ces royalistes constitutionnels, parmi lesquels le journaliste et ancien député Regnaud de Saint-Jean d’Angély. Suleau est confondu avec lui, et tué à sa place[4].

Le journaliste royaliste Jean-Gabriel Peltier a prétendu que Anne-Josèphe Théroigne de Méricourt avait lynché le pamphlétaire royaliste François-Louis Suleau, en raison des quolibets dont il l'affublait dans les Actes des apôtres. Cette calomnie fut désastreuse pour Théroigne de Méricourt[4].

Écrits modifier

  • Lettre d’un citoyen à MM. les présidents et commissaires de son district, Paris, sept., 1789, in-8° ;
  • Un petit mot à Louis XVI, sur les crimes de ses vertus, par un ami des trois ordres, Paris, oct. 1789, in-8° ;
  • Projet d’adresse à l’Assemblée nationale, Amiens, novembre 1789, in-8° ;
  • Fidelissimse Picardorum genti, ou Tu dors, Picard, et Louis est dans les fers, Amiens, décembre 1789, in-8° ;
    C’est la brochure incriminée par le Châtelet ; malgré les dénégations de Suleau, on peut hardiment la lui attribuer.
  • Premiers interrogatoires de M. Suleau, Paris, janvier 1790, in-8° ;
    La suite parut dans le même mois.
  • Lettre à M. l’évêque d’A… (Autun ) et compagnie, Paris, шагs 1790, in-8° ;
  • Les Pâques de M. Suleau, Paris, avril 1790, in-8°; réimpression du no 5 de l’Apocalypse, publication périodique ;
  • Nouvelle conspiration de M. Suleau, mai 1790 ;
  • Le Réveil de M. Suleau, suivi du prospectus du journal politique que le public lui demande, 1er mars 1791: en ligne;
  • Voyage en l’air, second réveil ; à Ballomanie, 15 mars 1791, in-8° de 160 p. ;
  • Journal de M. Suleau, 12 n(os) du 26 avril 1791 à mars 1792 ; le 1er n° du deuxième abonnement est unique, en ligne ; autre numéro de 1791, en ligne;
  • Plusieurs brochures, extraites des Actes des Apôtres.

Suleau avait, dit-on, préparé une Histoire de la chute de la monarchie, mais cet ouvrage fut perdu.

Notes et références modifier

  1. Archives départementales de l'Essonne, 4E/2237, registre d'Oncy-sur Ecole, vues 69-70/160, mariage Suleau-Hall en présence de François Pierre Gillet de La Renommière, lieutenant colonel d'infanterie, premier lieutenant de la réserve du roi, Henri Petit, avocat honoraire au Grand Conseil, Philippe Charles Elysée de Baussancourt, capitaine au régiment de Franche-Comté chasseurs [qui sera condamné à mort dans l'affaire des chemises rouges], et François Pierre Nicolas Gillet de Laumont, inspecteur général des mines de France, et des frères et sœurs des deux mariés. Numérisé.
  2. Archives départementales Hauts-de-Seine, E_NUM_SCL9, registre d'état-civil de Saint-Cloud 1793, vue 10/64, 11 mars 1793, naissance d'Antoine Louis Ange Elysée Suleau.
  3. Jean Gabriel Peltier, Dernier tableau de Paris ou récit historique de la Révolution du 10 août 1792, Paris, 1797, tome I, p. 97. Ouvrage numérisé.
  4. a et b Olivier Blanc, « Anne Théroigne de Méricourt, violente ou humaniste ? », Féministes en tous genres,‎ (lire en ligne)

Bibliographie modifier

  : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • Régine de Plinval de Guillebon, « La singulière destinée d’une Parisienne : Adèle Hall, épouse de F. Suleau, puis du marquis de la Grange », Bulletin de la Société d'Histoire de Paris, 2001, p. 49-103 (sur Suleau, p. 63 et suivantes). Numérisé sur gallica.
  • Louis Meister, « Un champion de la royauté au début de la Révolution. François Louis Suleau (1758-1792) », Mémoires de la Société Académique d'archéologie, sciences et arts du département de l'Oise, 1921, p; 209-308 (généalogie p. 284-291). Numérisé sur gallica.
  • Marcel Frager, Le fulgurant Monsieur Suleau, Paris, Calmann-Lévy, 1945. Ouvrage numérisé sur gallica.
  • Yves Avril, L'Affaire Suleau, épisode de la Contre-révolution en Picardie, Amiens, Université de Picardie, 1979.
  • Ferdinand Hoefer, Nouvelle Biographie générale, t. 7, Paris, Firmin-Didot, 1857, p. 644.

Liens externes modifier