SNR G353.6-00.7

rémanent de supernova

SNR G353.6-00.7
Image illustrative de l’article SNR G353.6-00.7
Cartographie du rémanent de supernova dans les rayons X par le télescope spatial XMM-Newton
Données d’observation
(Époque J2000.0)
Constellation Scorpion
Ascension droite (α) 17h 31m 55,0s
Déclinaison (δ) −34° 42′ 36″

Localisation dans la constellation : Scorpion

(Voir situation dans la constellation : Scorpion)
Astrométrie
Distance environ 3,2 kpc (∼10 400 al)
Caractéristiques physiques
Type d'objet Rémanent de supernova
Découverte
Découvreur(s) George Sinnis
Date 2008
Désignation(s) SNR G353.6-00.7 HESS J1731-347 TeV J1732-347
Liste des rémanents de supernova

SNR G353.6-00.7 (souvent désigné HESS J1731-347 depuis la détection de rayons gamma de haute énergie provenant du rémanent par le High Energy Stereoscopic System) est un rémanent de supernova situé dans la direction de la constellation australe du Scorpion. Il a été découvert par George Sinnis et ses collaborateurs en 2008 lors d'un recensement des rémanents de supernovas avec les données en rayons gamma du High Energy Stereoscopic System[1].

En octobre 2022, une équipe de scientifiques allemands publie un article scientifique concernant le rémanent dans la revue scientifique Nature. Ce dernier évoque une mesure de masse sur le pulsar situé au centre du rémanent et la possibilité que ce pulsar soit une étoile étrange, la première identifiée à ce jour. La mesure de masse effectuée est bien trop faible pour que l'évolution stellaire de son étoile progénitrice la fasse évoluer en étoile à neutrons, mais la masse mesurée devrait produire une naine blanche et l'étoile aurait dû passer par le stade de géante rouge au lieu du stade de supergéante qu'a pris son progéniteur. L'équipe allemande a donc soupçonné que le pulsar observé était une étoile étrange et le problème de masse serait donc expliqué par l'état chimique du cœur de l'étoile[2].

Détection modifier

La découverte du rémanent de supernova a été effectuée avec le détecteur de rayons gamma terrestre High Energy Stereoscopic System dans la gamme du TeV. De telles sources de rayons gamma sont considérées comme des sources de très hautes énergies et plusieurs d'entre elles ont pu être détectées par des télescopes terrestres comme le High Energy Stereoscopic System, Very Energetic Radiation Imaging Telescope Array System et Major Atmospheric Gamma-ray Imaging Cherenkov Telescope.

La présence d'autres télescopes de recensement automatique des astres permet d'identifier la contrepartie des sources de très hautes énergies, mais ce n'est pas toujours le cas (exemple typique de HESS J1702-420). Ici la découverte de SNR G353.6-00.7 correspond étroitement une source de rayons gamma de très hautes énergies HESS J1731 347, dont la contrepartie n'avait pas encore été identifiée. Une détection de rayons gamma au niveau d'un rémanent implique qu'il a une structure en forme de coquille très dense et qu'il contient en son centre un pulsar qui forment tous deux une nébuleuse à vent de pulsar[3].

Formation et morphologie modifier

Une étude de 2008 a permis d'estimer l'âge du rémanent à 27 000 ans. Celui-ci s'est formé à la suite d'un effondrement de cœur au sein d'une étoile supergéante et a laissé à sa place un rémanent de supernova ainsi qu'un astre dense, un pulsar X anormal dans ce cas. Le rémanent a ensuite évolué pour atteindre une taille de quelques années-lumière et une forme de coquille qui réfléchit les rayons de haute énergie.

Le rémanent a une morphologie en forme de coquille et une étendue d'environ 3 minutes d'arc de diamètre. Il est également observé que l'émission de rayons X du rémanent est présente le long de la moitié ouest de la coque de ce dernier et que cette région produit également une émission de rayons gamma plus importante que le reste du rémanent. Une observation du télescope spatial XMM-Newton a permis de révéler que le rémanent est composé d'un certain nombre de sous-structures et que le rémanent s'organise sous la forme d'une coquille. En particulier, un filament d'hydrogène proéminent est présent dans le rémanent et il provient directement du pulsar. Il existe également un anneau, visible uniquement en rayons X, qui a pu être observé avec le XMM-Newton.

Le XMM-Newton a aussi permis de détecter une source de rayons X durs nommée XMMS J173203–344518. En raison de la position du centre du rémanent et celle de la source, il convient de considérer que l'origine de la source est une nébuleuse de vent de pulsar. Cependant, les spectres de XMMS J173203–344518 montent un indice de photons entre 4 et 5, ce qui est beaucoup plus énergétique que les valeurs typiques observées avec les nébuleuses de vents de pulsars (généralement entre 1,5 et 2,1). De plus, XMMS J173203–344518 n'a pas de contrepartie radio et pas de morphologie étendue. Les spectres de la source montrent qu'elle est bien plus lumineuse sur une observation du satellite Suzaku que dans l'observation du XMM-Newton.

Des calculs excluent que la différence de luminosité soit causée par l'aveuglement des capteurs du satellite Suzaku et cette variabilité du flux de rayons X semble donc bien réelle. Cette variabilité des rayons X est peut-être cohérente avec celle d'une variable cataclysmique. Des observations sur des échelles de temps plus longues (quelques jours) n'ont pu montrer aucune variabilité, même s'il est à noter que la variation des variables cataclysmiques se produit sur des échelles de temps encore plus longues.

D'autre part, il n'est pas invraisemblable que XMMS J173203-344518 soit l'objet compact central associé à SNR G353.6-0.7. Les modèles existants sur les objets centraux des rémanents suggèrent que les pulsars récemment formés émettent des rayons X durs mais XMMS J173203-344518 ne respecte pas ces modèles. Au lieu des conditions prédites, XMMS J173203-344518 émet des rayons X mous, montrant qu'il pourrait s'agir d'un magnétar, car ces derniers ont un spectre X mou, une température de corps noir typique d'environ 0,5 keV (comme observé avec XMMS J173203-344518) et une luminosité typique de 1034 à 1036 erg/s-1. Étant donné une distance de ∼3,2 kpc, si XMMS J173203-344518 est associé au rémanent, il aura une luminosité de 1 à 10 KeV avec une flux de ~1034 erg/s-1. Cela signifie peut-être qu'il ressemble davantage aux pulsars X anormaux, car les magnétars ont généralement des luminosités supérieures à celles des pulsars anormaux, et cette source ne montre jusqu'à présent aucune émission répétée de rayons gamma mous. Les courbes de luminosité de XMMS J173203-344518 ne montrent aucune preuve de pulsations à des fréquences comprises entre 0,05 et 1 Hz, une plage typique des magnétars. Des observations supplémentaires sont nécessaires pour convenir que XMMS J173203-344518 soit un magnétar[4].

Structure centrale modifier

Des observations faites avec le radiotélescope de l'observatoire Parkes et l'observatoire de Molonglo ont permis d'observer qu'un filament de gaz émane du pulsar et traverse la nébuleuse, qui est particulièrement lumineux dans la raie à 21 cm ce qui indique qu'il est majoritairement composé d'hydrogène ionisé. Il existe également des anneaux de gaz au sein de la nébuleuse, et comme le filament, ils sont composés d'hydrogène ionisé. Une structure, semblable à une région HII compacte, est située à proximité du rémanent et elle lui est probablement associée. Le décalage des raies d'hydrogène par effet Doppler permet d'identifier que l'émetteur de cette raie se déplace de 9 à 24 km/s-1 et ces raies permettent d'identifier que le rémanent est distant d'environ 3,2 ± 0,8 kpc (∼10 400 al).

Basé sur le fait qu'un certain nombre de sources de rayons gamma sont détectées où les accélérateurs de particules naturels sont situés, il est suggéré que les émissions de photons de très hautes énergies pourraient provenir de la diffusion Compton inverse de la lumière des étoiles des régions HII voisines. Les sources de rayons gamma telles qu'observées avec SNR G353.45-0.68 sont souvent dues à des nébuleuses de vent de pulsar soit à des PeVatrons, des objets célestes denses et très massifs qui agissent comme des accélérateurs naturels de particules[3].

En mai 2008, une équipe effectua une étude du rémanent à l'aide du télescope spatial à rayons X XMM-Newton. Celle-ci permit d'identifier une source de rayons X non thermiques nommée XMMS J173203–344518, et elle sera associée au pulsar en raison de sa position dans le rémanent. Des observations supplémentaires de HESS ont permis d'identifier une structure nuageuse, se déplaçant à 20 ± 4 km/s-1, majoritairement composée de dioxyde de carbone, et qui est probablement située à la même distance que le rémanent[4].

Les rayons X non thermiques émis par le pulsar peuvent être reliés au concept selon lequel les ondes de choc astrophysiques sont des accélérateurs efficaces des rayons cosmiques. En raison de l'énergétique et des taux de supernova, il semble raisonnable que la plupart des rayons cosmiques galactiques, atteignant des énergies de plusieurs KeV, proviennent de chocs de matière au sein de rémanent de supernova, accélérant les particules (majoritairement des protons et électrons) dans le milieu interstellaire.

Récemment, des observations en rayons X et γ des rémanents de supernovas, par exemple Messier 1, RX J1713.7-3946 et Vela Junior ont révélé que les ondes de choc sont capables d'accélérer les particules à des énergies de l'ordre du TeV. Les particules de haute énergie responsables de l'émission de photons de très hautes énergies peuvent être des hadrons ou des leptons, qui sont produits dans les accélérateurs astrophysiques, comme dans les rémanents de supernovas[4].

Étoile à neutrons modifier

Les observations d'étoiles à neutrons exceptionnellement lourdes ou légères sont particulièrement intéressantes, car elles étendent la gamme des densités centrales sondées par les observations et permettent ainsi de tester les prédictions de la physique nucléaire sur un espace paramétrique plus large.

La mesure de masse apportée par l'équipe allemande a permis de réduire les caractéristiques de l'étoile à neutrons à une masse de 0,77+0,20
−0,17
 M et un rayon de 10,4+0,86
−0,78
 km, respectivement, sur la base d'une modélisation du spectre de rayons X et d'une estimation de distance précise à partir des observations du satellite Gaia. Cette estimation implique que cet objet est soit l'étoile à neutrons la plus légère connue, soit une "étoile étrange", et un état de la matière plus exotique. Cette découverte serait la preuve la plus importante pour prouver l'existence des étoiles étranges, mais la méthode utilisée pour déterminer la masse de l'étoile est assez inédite et d'autres mesures sont nécessaires pour confirmer les caractéristiques précisent de l'étoile[2].

Si ce pulsar est une étoile étrange ou une étoile à quarks, cela implique une étoile à neutrons de forte densité, composée de quarks déconfinés, la plupart d'entre eux étant des quarks étranges. Ces quarks s (pour Strange) constituent les particules ayant un nombre quantique « d'étrangeté » non nul (la matière ordinaire en est dépourvue). Une telle étoile devrait être très petite, plus petite encore que les étoiles à neutrons, mais extrêmement dense et pourrait atteindre de très fortes températures[5].

Par ailleurs, le pulsar présent au centre du rémanent ne montre pas de pulsation. Des recherches avec des instruments très précis n'ont pas permis de mesurer une pulsation, même jusqu'à des échelles de temps de 0,2 milliseconde. Cette découverte confirme en outre l'hypothèse selon laquelle la région d'émission de rayons X est la surface entière de l'étoile à neutrons, et que ces rayons sont dus à la forte température de la matière neutronique de l'objet. Cette étoile à neutron peut être considérée comme le corps noir du modèle des pulsars à atmosphères de carbone. Après le pulsar du rémanent de Cassiopeiae A, l'étoile à neutron de SNR G353.6−0.7 est la deuxième étoile à neutrons de cette classe pour lequel un modèle d'atmosphère carbone fournit une description cohérente de l'émission de rayons X observée.

Généralement, une étoile à neutrons isolée est censée être recouverte d'une atmosphère mince (à l'échelle centimétrique) composée de carbone qui, en fonction de sa composition chimique, modifie considérablement le spectre du rayonnement thermique émis par le rémanent. Jusqu'à présent, aucune contrainte observationnelle fiable sur la composition atmosphérique des étoiles à neutrons isolées n'a été obtenue. Récemment, Ho Heinke, un astrophysicien américain, a appliqué avec succès un modèle d'atmosphère de carbone aux données obtenues sur l'étoile à neutrons du rémanent Cassiopeiae A et notre étoile à neutrons est le deuxième cas qui correspond à ce modèle.

Bien que le fait que cette étoile soit une étoile à neutrons carbonée soit majoritairement accepté, une étude récente émet l'hypothèse que celle-ci pourrait être une étoile à neutrons d'hydrogène ayant des taches stellaires à sa surface. Comme la luminosité d'une étoile à neutrons, à émission non uniforme, dépend de la distribution angulaire du rayonnement sortant de l'atmosphère, un modèle d'atmosphère d'hydrogène pur tenant compte de la diffusion Compton permet d'identifier l'absence de pulsation comme la présence de taches stellaires à la surface de l'étoile et d'une luminosité répartie de manière non symétrique sur une distribution angulaire[6].

Ce genre étoiles ont généralement des températures de surface très élevées, de l'ordre de 2,3  millions de K pour notre cas, et elles produisent les champs magnétiques les plus puissants de l'univers, mesurés à 8,5 × 1019 T. Ces conditions sont si extrêmes qu'elles peuvent changer les structures internes des ions de carbone[7]. L'étoile à neutrons de notre rémanent est d'ailleurs exceptionnellement chaude pour son âge caractéristique important (estimé à 27 000 ans) et comprendre comment une telle température effective a été conservée au cours du temps est important pour la recherche astrophysique[8].

L'étoile à neutrons de notre rémanent est aussi un sujet d'étude puisque son état de matière, si elle était effectivement une étoile étrange, est qualifié de matière ultra-dense et il s'agit d'une partie très méconnue du l'univers et de ses lois. Une étude visant à étudier cet état a permis d'identifier un halo compact de poussière, particulièrement lumineux en rayons X, qui est supposé être présent autour de l'étoile à neutrons, sur la base d'observations du télescope spatial Chandra. Les rayons X émis par le halo suggèrent qu'il est très chaud, suffisamment pour émettre des rayons de hautes énergies, et que la distribution de la poussière circumstellaire dans ce dernier est uniforme[9].

Notes et références modifier

Références modifier

  1. (en) F Aharonian, J Buckley, T Kifune et G Sinnis, « High energy astrophysics with ground-based gamma ray detectors », Reports on Progress in Physics, vol. 71, no 9,‎ , p. 096901 (ISSN 0034-4885 et 1361-6633, DOI 10.1088/0034-4885/71/9/096901, lire en ligne, consulté le )
  2. a et b (en) Victor Doroshenko, Valery Suleimanov, Gerd Pühlhofer et Andrea Santangelo, « A strangely light neutron star within a supernova remnant », Nature Astronomy,‎ , p. 1–8 (ISSN 2397-3366, DOI 10.1038/s41550-022-01800-1, lire en ligne, consulté le )
  3. a et b (en) W. W. Tian, D. A. Leahy, M. Haverkorn et B. Jiang, « Discovery of the Radio and X-Ray Counterpart of TeV γ-Ray Source HESS J1731–347 », The Astrophysical Journal, vol. 679, no 2,‎ , p. L85 (ISSN 0004-637X, DOI 10.1086/589506, lire en ligne, consulté le )
  4. a b et c (en) W. W. Tian, Z. Li, D. A. Leahy et J. Yang, « X-RAY EMISSION FROM HESS J1731-347/SNR G353.6-0.7 AND CENTRAL COMPACT SOURCE XMMS J173203-344518 », The Astrophysical Journal, vol. 712, no 2,‎ , p. 790–796 (ISSN 0004-637X et 1538-4357, DOI 10.1088/0004-637x/712/2/790, lire en ligne, consulté le )
  5. Dmitri D. Ivanenko et D. F. Kurdgelaidze, « Hypothesis concerning quark stars », Astrophysics, vol. 1, no 4,‎ , p. 251-252 (DOI 10.1007/BF01042830)
  6. (en) V. F. Suleimanov, D. Klochkov, J. Poutanen et K. Werner, « Probing the possibility of hotspots on the central neutron star in HESS J1731−347 », Astronomy & Astrophysics, vol. 600,‎ , A43 (ISSN 0004-6361 et 1432-0746, DOI 10.1051/0004-6361/201630028, lire en ligne, consulté le )
  7. (en) D. Klochkov, G. Pühlhofer, V. Suleimanov et S. Simon, « A non-pulsating neutron star in the supernova remnant HESS J1731−347/G353.6−0.7 with a carbon atmosphere », Astronomy & Astrophysics, vol. 556,‎ , A41 (ISSN 0004-6361 et 1432-0746, DOI 10.1051/0004-6361/201321740, lire en ligne, consulté le )
  8. (en) D. Klochkov, V. Suleimanov, G. Pühlhofer et D. G. Yakovlev, « The neutron star in HESS J1731−347: Central compact objects as laboratories to study the equation of state of superdense matter », Astronomy & Astrophysics, vol. 573,‎ , A53 (ISSN 0004-6361 et 1432-0746, DOI 10.1051/0004-6361/201424683, lire en ligne, consulté le )
  9. (en) A. Landstorfer, V. Doroshenko et G. Pühlhofer, « Dust scattering halo around the CCO in HESS J1731–347: A detailed analysis », Astronomy & Astrophysics, vol. 659,‎ , A82 (ISSN 0004-6361 et 1432-0746, DOI 10.1051/0004-6361/202142334, lire en ligne, consulté le )

Liens externes modifier