Rapport Cass
Le rapport Cass (Independent Review of Gender Identity Services for Children and Young People) est une évaluation indépendante commandée en 2020 par le National Health Service England (en) et le NHS Improvement (en) et établie sous la direction du Dr Hilary Cass.
L'examen porte sur les services publics de soins liés au genre pour les enfants et les jeunes d'Angleterre et du pays de Galles, incluant ceux présentant une dysphorie de genre et ceux s'identifiant comme transgenres. Ces services sont assurés au troisième niveau par le Gender Identity Development Service (GIDS).
Un rapport intermédiaire commandé par le National Health Service England dans sa lettre de mission est publié en et le NHS England (en) annonce fermer le Gender Identity Development Service en juillet de la même année.
Le rapport final est publié le et recommande une approche décentralisée et holistique de la prise en charge des jeunes patients. Il recommande également une grande prudence dans la prescription de bloqueurs de puberté.
Globalement salué par les principaux médias britanniques, le rapport final est critiqué par certaines organisations médicales internationales.
Historique
modifierSaisine et mission
modifierEn Angleterre et au pays de Galles, les soins médicaux publics sont assurées par le National Health Service England (en) un établissement public du Département de la Santé et de la Protection sociale du Royaume-Uni. La Tavistock Clinic, centre de thérapie d’inspiration psychanalytique héberge le Gender Identity Development Service (GIDS) à partir de 1989. Depuis de 2004, le GIDS propose, en s'inspirant du « protocole hollandais », des prescriptions de bloqueurs de puberté. La limite d'âge de ces prescriptions est supprimée à partir de 2014. Si en 2009, le GIDS recense 97 patients référencés, ils augmentent notamment vers 2015 pour atteindre 2 500 en 2020 avec 4 600 patients sur liste d'attente[1]. Ce changement dans les pratiques professionnelles de certains personnels, l'augmentation de la fréquentation du service et le changement dans la typologie des patients adressés conduisent à la publication d'un premier rapport par le Dr Bell[2],[3],[4].
Le GIDS est par ailleurs attaqué en justice devant la Haute Cour de justice, qui est saisie de la question du consentement des enfants de moins de 16 ans.
D'autre procédures judiciaires sont intentées contre la Fiducie « Tavistock and Portman NHS Foundation Trust » relativement aux conditions de travail du personnel, tandis que des associations de patients s'inquiètent notamment des délais de prise en charge[4],[5],[6]. Le débat de société est clivant et national.
Le , le National Health Service England commande au Dr Hillary Cass une évaluation indépendante des soins offerts par le Gender Identity Development Service afin de « formuler des recommandations sur la manière d'améliorer les services destinés aux enfants et aux jeunes rencontrant des problèmes avec leur identité de genre ou une incongruité de genre, et veiller à ce que le(s) meilleur(s) modèle(s) pour des services sûrs et efficaces soient mis en place. »[7],[8],[9]. Les axes d'étude doivent s'appuyer sur des revues systématiques de la littérature scientifique afin d'évaluer l'épidémiologie, la gestion clinique, les modèles de soins et les résultas obtenus ainsi qu'une évaluation des lignes directrices internationales et une enquête internationale sur les clinques de genre dans le cadre d'une médecine basée sur les preuves[10],[8] . Les revues et études sont réalisées par l'Université de York[10]. La lettre de mission recommande une coopération avec le GIDS pendant la review[11],[8].
Compte tenu des affaires pendantes l'aspect relatif au consentements des mineurs de moins de 16 ans est subordonné aux décisions judiciaires[7],[8]. La Cour d'appel juge qu'il appartient aux médecins de décider quand leurs patients mineurs sont aptes à consentir à des traitements hormonaux[12].
Un rapport d'étape est initialement prévu début 2021 et le rapport final pour la fin de la même année.
Si le rapport Cass est commandé dans le cadre du système de santé public d'Angleterre et du pays de Galles, il est scruté tant au niveau national qu'international. Selon le Times, il s'agit de la plus vaste étude consacrée au domaine des soins de santé transgenre[13].
Rapport d'étape
modifierLe rapport d'étape est publié en mars 2022[14].
Il affirme que l'augmentation du nombre de cas référencés a conduit à une surcharge de travail du personnel et recommande la création d'un réseau de pôles régionaux pour fournir des soins et un soutien aux jeunes.
Le rapport note également que l'approche clinique utilisée par le Service de développement de l'identité de genre (GIDS) « n'a pas été soumise à certaines des mesures de contrôle habituelles » généralement appliquées pour les nouveaux traitements, et soulève des inquiétudes quant au manque de données collectées par le GIDS[15],[16].
Il relève également que les médecins généralistes comme les autres personnels non-GIDS se sentent « sous pression pour adopter une approche positive et inconditionnelle » envers les enfants qui ne sont pas sûrs de leur sexe, « éclipsant » d'autres problèmes tels qu'une mauvaise santé mentale. À cet égard, la fiducie Tavistock and Portman NHS Foundation Trust répond que « le respect de l'identité de quelqu'un n'empêche pas l'exploration » tout en convenant que «le soutien doit être holistique, basé sur les meilleures preuves disponibles et qu'aucune hypothèse ne doit être formulée quant au bon résultat pour n'importe quelle jeune personne"[17]
Résultats du rapport final
modifierAugmentation des cas référencés
modifierLe rapport final ne trouve aucune explication claire à l'augmentation du nombre d'enfants et d'adolescents souffrant de dysphorie de genre, mais indique qu'il existe un large consensus pour l'attribuer à un ensemble de facteurs biologiques et psychosociaux.
Les influences suggérées comprennent notamment les effets des réseaux sociaux sur la santé mentale, les abus sur mineurs, l'accès facilité à l'information concernant la dysphorie de genre, les difficultés rencontrée quand émerge l'orientation sexuelle et l'exposition précoce à la pornographie en ligne.
Le rapport considère que la meilleurs acceptation sociale des identités transgenres est insuffisante pour expliquer seule cette augmentation des cas référencés[18],[19],[20],[21].
Transition sociale
modifierLe rapport final classe la transition sociale comme une « intervention active » en déclarant que les enfants ayant effectué une transition sociale sont plus susceptibles de poursuivre leur transition médicale.
Le rapport recommande une approche prudente de la transition sociale et souligne la nécessité d'une participation clinique dans la détermination des risques et des avantages. Il souligne que cet accompagnement ne peut être assuré sans une formation clinique appropriée[21],[22],[23].
Bloqueurs de puberté
modifierLe rapport final indique que les éléments justifiant la suppression précoce de la puberté restent flous, avec des effets inconnus sur le développement cognitif et psychosexuel.
Une revue systématique ayant examiné 50 études sur l'utilisation d'inhibiteurs de la puberté en utilisant une version modifiée de l'échelle de Newcastle-Ottawa n'en considère qu'une seule comme étant de haute qualité, 25 autres étant de qualité modérée les 24 restantes étant de qualité modérée à faible[24].
Cette étude affirme que le manque de preuves significatives implique qu'aucune conclusion ne peut être tirée concernant l'impact des bloqueurs de puberté sur la dysphorie de genre et la santé mentale, mais qu'en revanche elle a trouvé des preuves que la santé des os était compromise pendant le traitement[24].
L'étude s'oppose à l'idée selon laquelle les bloqueurs de puberté donneraient aux jeunes patients un « temps de réflexion », en relevant que la majorité des patients qui ont pris des bloqueurs de puberté ont ensuite décidé de passer à un traitement hormonal.
Pour les femmes transgenres, le rapport final conseille de trouver un équilibre entre la nécessité d'atténuer les effets de la puberté masculine et le besoin de permettre un certain niveau de développement du pénis au cas où la patiente souhaiterait ultérieurement subir une vaginoplastie[18],[24],[25],[26]
Thérapie hormonale
modifierLe rapport final affirme que, malgré une utilisation de longue date chez les adultes transgenres, de nombreuses inconnues subsistent quant à l'utilisation du traitement hormonal chez les moins de 18 ans. Il relève que, concernant ces derniers, les données de suivi à long terme et les informations sur les résultats sont de qualité médiocre.
Une revue systématique est réalisée évaluant 53 études sur l'hormonothérapie transgenre et utilisant une version modifiée de l'échelle de Newcastle-Ottawa. Elle n'en considère qu'une seule de haute qualité, 33 de qualité moyenne et 19 de faible qualité[27].
Dans l'ensemble, l'analyse relève des preuves de bénéfices psychologiques après selon lesquelles le traitement hormonal améliore les résultats psychologique s12 mois, mais affirme ne recenser que des preuves insuffisantes ou incohérentes concernant les risques et les avantages physiques.
Le rapport relève qu'il devrait y avoir une « justification clinique claire » pour la prescription d'hormones avant l'âge de 18 ans[18],[27],[25],[22].
Parcours cliniques
modifierLe rapport final considère que les cliniciens ne peuvent prévoir avec assez de certitude quels enfants et jeunes auront une identité trans durable à l’âge adulte et affirme que pour la plupart de ces personnes, un parcours médical ne serait pas le plus approprié.
Lorsqu’un parcours médical est cliniquement indiqué, des problèmes plus larges de santé mentale ou psychosociaux doivent également être abordés.
En raison d’un manque de suivi, le nombre effectif de personnes ayant subi une détransition après un traitement hormonal n'a pu être déterminé[18].
Le rapport Cass a tenté de travailler avec le Gender Identity Development Service et les services de genre pour adultes du NHS pour « combler certaines des lacunes dans les données de suivi des quelque 9 000 jeunes qui ont suivi le GIDS afin de développer une base de données probantes plus solide ». Cependant, malgré les encouragements du NHS England, « la coopération nécessaire n’a pas été au rendez-vous »[28].
Lignes directrices internationales
modifierUne revue systématique[29],[30] évalue 23 lignes directrices régionales, nationales et internationales couvrant des domaines de pratique clés, tels que les principes de soins, les méthodes d'évaluation et les interventions médicales.
Cette analyse conclue que la plupart des lignes directrices manquaient d’indépendance éditoriale et de rigueur de développement, et étaient presque toutes influencées par la ligne directrice de l’Endocrine Society de 2009 et la ligne directrice WPATH de 2012, qui étaient elles-mêmes étroitement liées.
Le rapport final questionne la fiabilité des lignes directrices et conclut qu'aucune ligne directrice internationale unique concernant les soins aux transgenres ne pouvait être appliquée dans son intégralité au NHS England (en)[18].
Opinions cliniques contradictoires
modifierLe rapport final identifie des points de vue contradictoires parmi les cliniciens concernant le traitement approprié, les attentes en matière de soins s'écartant parfois des normes cliniques.
Il note que les différends portant sur des termes tels que les approches « exploratoire » et « affirmative » rendaient difficile l'établissement d'une terminologie neutre. Certains cliniciens craignaient de travailler avec des jeunes qui remettent en question leur genre[18].
Le rapport indique que certains professionnels craignent d'être accusés de pratiques de conversion et sont également préoccupés par la législation interdisant les thérapies de conversion. Le rapport final poursuit en affirmant que de nombreux professionnels sont inquiétés « par un débat inutilement polarisé sur les pratiques de conversion »[18],[31].
Recommandations du rapport final
modifier32 recommandations sont formulées et couvrent des domaines tels que l'évaluation des enfants et des jeunes, le diagnostic, les interventions psychologiques, la transition sociale, l'amélioration de la base de données probantes sur laquelle reposent les interventions médicales et non médicales, les bloqueurs de puberté et les traitements hormonaux, l'amélioration des services, l'éducation et la formation, les parcours cliniques, les détransitions et offre privée[32],[33].
Il recommande d'encadrer rigoureusement la transition médicale des jeunes patients en restant dans le cadre d'un protocole expérimental avec un suivi médical systématique. Il conseille de ne pas prescrire d'hormones avant 16 ans et d'être très prudents pour les patients de moins de 18 ans (recommandation 8). Il préconise de fournir « un soutien thérapeutique holistique et sans hâte » aux patients, qu'ils aient accès à des hormones ou pas (section 11 sur la psychothérapie, point 66 de l'introduction, point 10.76). Il précise que « les cliniciens sont incapables de déterminer avec certitude quels enfants et jeunes garderont une identité trans durable ».
Le rapport final recommande en outre que les jeunes adultes en quête de transition entre 17 et 25 ans soient envoyés vers un « service de suivi » plutôt que d'être autorisés à accéder à une clinique pour adultes[34].
Recommandation 1 : Compte tenu de la complexité des situations suivies, ces services doivent fonctionner selon les mêmes normes que les autres services accueillant des enfants et des adolescents présentant des situations complexes et/ou des facteurs de risque supplémentaires. Un médecin (pédiatre/pédopsychiatre) devrait être nommé au sein du service et assurer la responsabilité globale de la sécurité clinique des patients .
Recommandation 2 : Les cliniciens doivent appliquer le cadre d'évaluation développé par le groupe d'experts cliniques de l'audit, pour garantir que les enfants/ les jeunes orientés vers les services de genre du NHS reçoivent une évaluation holistique de leurs besoins apte éclairer un plan de soins individualisé. Cela devrait inclure le dépistage des troubles neurodéveloppementaux, y compris les troubles du spectre autistique, et une évaluation de la santé mentale. Ce cadre devrait être maintenu à l’étude et évoluer pour refléter les nouvelles données probantes.
Recommandation 3 : Une approche standard des pratiques psychologique et psychopharmacologique fondées sur les preuves devrait guider la prise en charge de la détresse associée et des affections concomitantes chez les patients. Cette approche devrait inclure un soutien aux parents ou responsables légaux ainsi qu'aux frères et sœurs.
Recommandation 4 : Lorsque les familles ou responsables légaux prennent des décisions concernant la transition sociale des enfants prépubères, les services doivent veiller à ce qu'ils puissent être rencontrés le plus tôt possible par un professoinnel de santé possédant l'expérience adéquate.
Recommandation 5 : Le NHS England (en), en collaboration avec le Département de la Santé et de la Protection sociale, devrait demander aux cliniques de genre de participer à l'étude de couplage de données pendant la durée de vie de l'instrument réglementaire actuel. Le Research Oversight Board du NHS England devrait se voir confier l’interprétation des résultats de la recherche.
Recommandation 6 : Dans ce domaine clinique, les données probantes sous-jacentes aux pratiques aussi bien médicales que non médicales doivent être améliorées. Dans la poursuite de notre précédente recommandation d’établir un essai sur les bloqueurs de puberté, qui a été endossée par le NHS England, nous recommandons par ailleurs la mise en place d’un programme complet de recherche. Il devrait examiner les caractéristiques, les interventions et les résultats relatifs à chaque jeune se présentant auprès des services de genre du NHS.
- L'essai sur le bloqueur de puberté devrait faire partie d'un programme de recherche plus vaste qui évaluerait également les résultats des interventions psychosociales et la prescription d'hormones masculinisantes ou féminisantes.
- Le consentement doit être systématiquement demandé pour tous les enfants et adolescents souhaitant participer à une étude de recherche avec suivi jusqu'à l'âge adulte.
Recommandation 7 : Une incongruité de genre persistente devrait être une condition préalable essentielle au traitement médical, mais ne constitue qu'un aspect de la décision de savoir si une voie médicale est la bonne option pour un individu.
Recommandation 8 : Le NHS England devrait revoir sa politique en matière d’hormones masculinisantes/féminisantes. Prescrire des hormones masculinisantes/féminisantes à partir de 16 ans reste possible, mais l'évaluation recommande une extrême prudence. Il doit y avoir une justification clinique claire pour prescrire des hormones à ce stade au lieu d’attendre qu’un individu atteigne 18 ans.
Recommandation 9 : Chaque cas envisagé pour un traitement médical doit être discuté au sein d'une équipe multidisciplinaire nationale (EMT) hébergée par le National Provider Collaborative remplaçant le Multi Professional Review Group (MPRG).
Recommandation 10 : Tous les enfants devraient se voir proposer des conseils et une option de préservation de la fertilité avant de s'engager dans une voie médicale.
Recommandation 11 : Le NHS England et les prestataires de services devraient travailler au développement des réseaux de services régionaux multi-sites dès que possible. Cela pourrait être fondé sur un modèle de fournisseur principal, dans lequel le NHS England délègue la responsabilité de la mise en service aux services régionaux pour qu'ils sous-traitent localement aux fournisseurs de leur région.
Recommandation 12 : Le National Provider Collaborative devrait être créé sans délai.
Recommandation 13 : Pour accroitre la main-d’œuvre disponible et maintenir une vision clinique élargie, des contrats conjoints devraient être utilisés pour aider le personnel à travailler au sein du réseau et dans différents services.
Recommandation 14 : Le NHS England, par sa fonction de formation et d'éducation de la main-d'œuvre, doit garantir que les exigences pour ce domaine de service soient intégrées dans la planification globale de la main-d'œuvre pour les services aux adolescents.
Recommandation 15 : Le NHS England devrait charger une organisation cheffe de file d’établir un consortium d’organismes professionnels concernés pour :
- développer un référentiel de compétences
- identifier les lacunes dans les programmes de formation professionnelle
- développer une série de matériels de formation pour compléter les compétences professionnelles, adaptés à leur domaine et niveau cliniques. Cela devrait inclure un module sur le cadre d'évaluation holistique et l'approche de la formulation et de la planification des soins.
Recommandation 16 : Le National Provider Collaborative devrait coordonner le développement d’informations et de ressources fondées sur des preuves pour les jeunes, les parents et les responsables légaux. Il convient de se demander s’il doit s’agir d’une ressource en ligne du NHS hébergée de manière centralisée.
Recommandation 17 : Un requis minimal de données nationales devrait être défini pour les services spécialisés et les services spécialisés locaux désignés.
Recommandation 18 : Une infrastructure nationale devrait être mise en place pour gérer la collecte et l'audit des données et elle devrait être utilisée pour stimuler l'amélioration continue de la qualité ainsi que la recherche dans un environnement d'apprentissage actif.
Recommandation 19 : Le NHS England et le National Institute for Health and Care Research (en) (NIHR) devraient veiller à ce que l'infrastructure académique et administrative nécessaire à l'appui d'un programme de recherche clinique soit intégrée aux centres régionaux.
Recommandation 20 : Une stratégie de recherche unifiée devrait être établie dans les centres régionaux, coordonnée par le biais du National Provider Collaborative et du Research Oversight Group, afin que toutes les données collectées soient utilisées de manière optimale et pour qu'un nombre suffisant de données soient utilisés .
Recommandation 21 : Pour garantir que les services fonctionnent selon les normes de preuve les plus élevées, l'Institut national de recherche sur la santé et les soins (NIHR) devrait commander une revue systématique pour éclairer l'approche clinique en évolution.
Recommandation 22 : Au sein de chaque réseau régional, un parcours distinct devrait être établi pour les enfants prépubères et leurs familles. Les fournisseurs devraient garantir que les enfants prépubères et leurs parents ou responsables légaux soient prioritaires pour une discussion précoce avec un professionnel ayant l'expérience adéquate.
Recommandation 23 : Le NHS England devrait établir des services de suivi pour les 17-25 ans dans chacun des centres régionaux, soit en élargissant la gamme des services régionaux destinés aux enfants et aux jeunes, soit par le biais de services liés, afin d'assurer la continuité des soins et du soutien lors de cette période de vulnérabilité potentielle dans leur démarche. Cela permettra également de collecter des données cliniques et de suivi pour la recherche.
Recommandation 24 : Étant donné que l'évolution démographique des services destinés aux enfants et aux jeunes se reflète dans le changement de des situations enregistrées dans les services pour adultes, le NHS England devrait envisager d'avancer toute mise à jour en cours des spécifications des services pour adultes et de revoir le modèle de soins et les procédures opérationnelles.
Recommandation 25 : Le NHS England devrait veiller à ce que des dispositions soient prises pour les personnes envisageant une détransition, en reconnaissant qu'elles ne souhaiteront éventuellement pas réintégrer les services dont elles étaient auparavant les patientes.
Recommandation 26 : Le ministère de la Santé et des Affaires sociales et le NHS England devraient considérer les implications de soins de santé privés sur toute demande future adressée au NHS pour un traitement, une surveillance et/ou une participation dans la recherche. Cela doit être clairement communiqué aux patients et aux prestataires privés.
Recommandation 27 : Le ministère de la Santé et des Affaires sociales devrait travailler avec le Conseil Pharmaceutique Général (en) pour définir les responsabilités des pharmaciens en matière de délivrance d'ordonnances privées et envisager d'autres solutions statutaires qui empêcheraient les prescriptions inappropriées à l'étranger.
Recommandation 28 : Le NHS et le ministère de la Santé et des Affaires sociales doivent examiner le processus et les circonstances de la modification des identifiants du NHS et trouver des solutions pour répondre aux implications cliniques et sur la recherche.
Recommandation 29 : Le NHS England devrait élaborer un plan de mise en œuvre comportant des étapes claires vers le futur modèle clinique et de service. Cela devrait être supervisé au niveau du conseil d'administration et être développé en collaboration avec les responsables de la santé des enfants et des jeunes de manière plus générale, afin de soutenir une plus grande intégration et de répondre aux besoins variés des adolescents aux profils complexes.
Recommandation 30 : Le NHS England devrait établir des processus et des exigences robustes et complètes en matière de gestion des contrats et d’audit autour de la collecte de données pour la fourniture de ces services. Celles-ci doivent être respectées par les prestataires chargés de fournir ces services aux enfants et aux jeunes.
Recommandation 31 : Les organismes professionnels doivent se rassembler pour fournir un leadership et des conseils sur la prise en charge clinique de cette population en tenant compte des conclusions de ce rapport.
Recommandation 32 : Des orientations plus larges applicables à tous les services du NHS devraient être élaborées pour aider les prestataires et les commissaires à garantir que l'innovation est encouragée mais qu'il existe un contrôle et une gouvernance clinique appropriés pour éviter une dérive progressive de la pratique en l'absence de preuves probantes.
Réception et conséquences
modifierRapport d'étape
modifierCertaines critiques du fonctionnement du GIDS que l'Association des psychologues cliniciens du Royaume-Uni (ACP-Royaume-Uni) tire du rapport intérimaire de Cass sont les suivantes:
Le GIDS a adopté une approche qui était principalement affirmative plutôt qu'exploratoire; l'évaluation n'était pas standardisée; les évaluations de la santé mentale et du développement neurologique n'ont pas été menées de manière exhaustive, ce qui a conduit à une « éclipse du diagnostic » dans laquelle la dysphorie de genre a été prise en compte sans prendre en compte les diagnostics coexistants; les processus de sauvegarde faisaient défaut[35].
En réponse, une lettre ouverte signée par plus de quarante psychologues cliniciens qualifie la déclaration de l'ACP de « trompeuse » et déclare qu'elle « perpétue des discours préjudiciables sur le travail et les identités de genre en général ». Environ la moitié des signataires sont des cadres supérieurs actuels ou anciens du GIDS[36].
En novembre 2022, l'Association professionnelle mondiale pour la santé des personnes transgenres (WPATH), ainsi que l’ASIAPATH, l’EPATH, la PATHA et l’USPATH, publient une déclaration critiquant les spécifications de service provisoires du NHS England sur la base du rapport intermédiaire.
Elle expose plusieurs points de désaccords avec le rapport, lui reprochant notamment une pathologisation de la diversité des genres, l'élaboration d'hypothèses «dépassées» concernant la nature des personnes transgenres ainsi que d'«ignorer» les preuves les plus récentes sur ces questions.
Cette tribune affirme également que « le refus d'un traitement d'affirmation du genre sous couvert de « thérapie exploratoire » équivaut à une de «thérapie conversion » ou de « thérapie réparatrice » sous un autre nom. »[37].
Le NHS England décide d'appliquer les recommandations de décentralisations des soins et de prudence dans la prescription de traitements hormonaux. Il annonce la fermeture progressive du GIDS en juillet 2022[5].
Rapport final
modifierImpact sur les parcours de soins au Royaume-Uni
modifierLe 12 mars 2024, avant la publication officielle du rapport final, le NHS England (en) annonce exclure les bloqueurs de puberté pour les mineurs de moins de 16 ans orientés vers des parcours de soins relatifs au genre, excepté dans le cadre d'essais cliniques[38],[39].
Si les décisions du NHS England n'ont pas de portée règlementaire hors d'Angleterre et du Pays de Galles, le NHS Greater Glasgow and Clyde (NHSGGC) et le NHS Lothian suspendent mi-mars 2024 la prescription de traitements hormonaux pour les nouveaux patients. La Dr Emilia Crighton, directrice de la santé publique du NHSGCC, relève l'importance des résultats exposés par le rapport final et prévoit « de travailler avec le gouvernement écossais et les partenaires universitaires pour générer des preuves qui nous permettent de prodiguer des soins sûrs à nos patients. »[40],[41].
En réponse au rapport final, le directeur des mises en service spécialisées du NHS England, John Stewart, envoie un courrier au Dr Cass déclarant que l'utilisation de l'hormonothérapie d'affirmation de genre chez les adultes serait réétudiée en suivant la méthodologie appliquée dans le rapport au sujet des bloqueurs de puberté[42],[43],[44].
Sur demande de la Secrétaire d'État à la Santé, Victoria Atkins, les six fiducies du NHS England qui avaient intialement refusé de divulguer leurs données lors de l'élaboration du rapport indiquent accepter de les communiquer[45],[46].
Réactions publiques au Royaume Uni
modifierLe Premier Ministre déclare « Nous ne connaissons tout simplement pas les impacts à long terme du traitement médical ou de la transition sociale sur eux, et nous devons donc faire preuve d’une extrême prudence. »[47]
Le travailliste Wes Streeting, Secrétaire d'État à la Santé du cabinet fantôme, salue le rapport final en affirmant qu'il « doit constituer un moment décisif pour les services d'identité de genre du NHS » et que la « Cass Review fournit un cadre fondé sur des preuves pour y parvenir ». Dans une interview au Sun, il déclare que les politiciens ont la « responsabilité collective » d'agir en réponse au « Cass review »[48],[49].
En Écosse, le Premier ministre d'Écosse indique que la compassion envers les jeunes patients des cliniques de genre doit systématiquement guider l'action publique et qu'un processus de révision des parcours de soins en est en cours[40] .
La British Psychological Society salue le rapport final comme étant « approfondi et sensible », à la lumière de la nature complexe et controversée du sujet[50].
Sallie Baxendale, professeur de neuropsychologie clinique à l'University College de Londres, déclare au Guardian que le rapport « met à nu l'absence inquiétante de preuves justifiant les traitements prescrits par les cliniciens du NHS aux enfants souffrant de détresse sexuelle depuis plus d'une décennie »[49].
Le psychologue clinicien Aiden Kelly, qui travaillait au Service de développement de l'identité de genre, a déclaré que "le rapport Cass contenait un niveau de prudence injustifiable". Et cela, faisant référence à la décision de se débarrasser du GIDS, "il semble vraiment que nous reculions au lieu d'avancer"[51].
L'association de défense des jeunes trans Mermaids (en) ainsi que l'association LGBTQIA+ Stonewall s'inquiètent de recommandations pouvant entraîner des obstacles pour les jeunes transgenres dans l’accès aux soins[52]. Mermaids salue cependant « les appels à une recherche plus transparente et de haute qualité qui aide les enfants et les jeunes trans à recevoir des soins opportuns, holistiques, de soutien et personnalisés »[43]. Tout en remerciant le Dr Cass pour son soucis de traiter les mineurs trans et leurs famille avec bienveillance et respect, Mermaids rappelle ses craintes de voir le « qu'une partie du langage utilisé dans le rapport soit sujet à des interprétations erronées et puisse être utilisé pour justifier des obstacles supplémentaires à l'accès aux soins pour certains jeunes trans, de la même manière que le rapport d'étape l'a été »[53].
À la suite de cette publication, le Dr Cass reçoit des menaces et il lui est déconseillé de prendre les transports en commun pour des raisons de sécurité[54],[55].
Controverse sur les normes de preuves médicales
modifierL'endocrinologue Ada Cheung, directrice du groupe de recherche sur la santé des transgenres de l'université de Melbourne, conteste les conclusions relatives aux bloqueurs de puberté, affirmant que des études jugées de haute qualité montraient déjà que les personnes traitées avec des bloqueurs de puberté souffraient moins de dépression et d'anxiété, le traitements réduisant les tendances suicidaires et les difficultés d’interaction avec les pairs[56].
Portia Predny, vice-présidente de l'Association professionnelle australienne pour la santé des transgenres, conteste également la conclusion du rapport selon laquelle la qualité des preuves en faveur des soins d'affirmation de genre est faible. Elle considère que la norme de preuve exigée (essais contrôlés randomisés) n'est ni pratiquement réalisable, ni éthique[56].
Dans le British Medical Journal, le rédacteur en chef répond aux critiques selon lesquelles les normes de preuve recommandées par le rapport seraient irréalisables, affirmant: « En fait, la réalité est différente : les études sur la médecine du genre manquent terriblement de rigueur méthodologique ; la barre méthodologique pour les études sur la médecine du genre était placée trop bas »[28].
Réactions hors du Royaume-Uni.
modifierAmnesty International fustige « la couverture sensationnaliste » du rapport et déclare « Cette étude est utilisée comme une arme par des personnes qui se délectent de la diffusion de désinformations et de mythes sur les soins de santé pour les jeunes trans »[57].
L'Association professionnelle mondiale pour la santé des personnes transgenres déclare que le rapport « est enraciné dans la fausse prémisse selon laquelle les alternatives non médicales aux soins entraîneront moins de détresse chez les adolescents ». Pour la WPATH, les « politiques qui restreignent sévèrement l'accès aux soins de santé physiques et se concentrent presque exclusivement sur les soins de santé mentale pour une population que l'Organisation mondiale de la santé ne considère pas comme une maladie mentale intrinsèque, sont nocives »[58]. L'Association professionnelle européenne pour la santé des personnes transgenres exprime que « en attendant des résultats de recherche, ne pas fournir les soins réservé aux adolescents transgenres pouvant inclure des bloqueurs de puberté et des hormones aux adolescents expérimentant une incongruence de genre n'est pas un acte neutre qui pourrait avoir des effets néfastes immédiats et à long terme pour une jeune personne transgenre »[59].
L'Association professionnelle pour la santé des transgenres Aotearoa, une organisation professionnelle néo-zélandaise, affirme que le rapport propose des « recommandations préjudiciables » et « ignore le consensus des principaux organismes médicaux du monde ». Le communiqué affirme qu'« un certain nombre de personnes impliquées dans l'examen et le groupe consultatif ont précédemment plaidé en faveur de l'interdiction des soins d'affirmation du genre aux États-Unis et ont promu une « thérapie exploratoire de genre » non affirmative, qui est considérée comme une pratique de conversion »[60].
L'Endocrine Society observe que le rapport « ne contient pas de nouvelles recherches permettant de contredire les recommandations faites par notre Guide Clinique Pratique » et déclare que « bannir des soins médicaux basés sur des preuves à partir de désinformation enlève la capacité aux parents et aux patients de prendre des décisions informées »[61].
Notes et références
modifier- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Cass Review » (voir la liste des auteurs).
- (en) Hadley Freeman, « How the Tavistock gender clinic ran out of control », The Times, (ISSN 0140-0460, lire en ligne [archive] , consulté le )
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- « Tavistock and Portman NHS Foundation Trust - Care Quality Commission », sur cqc.org.uk (consulté le ).
- (en-GB) Jamie Doward, « Gender identity clinic accused of fast-tracking young adults », The Observer, (ISSN 0029-7712, lire en ligne, consulté le )
- (en-GB) « NHS to close Tavistock child gender identity clinic », BBC, (lire en ligne, consulté le )
- (en-GB) David Connett, « NHS gender identity clinic whistleblower wins damages », The Observer, (ISSN 0029-7712, lire en ligne, consulté le )
- (en) Clare Dyer, « Services for children with gender dysphoria need fundamental reform, says interim review », BMJ, vol. 376, , o589 (ISSN 1756-1833, PMID 35273016, DOI 10.1136/bmj.o589, lire en ligne, consulté le )
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Voir aussi
modifierBibliographie
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