Propriété de Banach-Saks

En analyse fonctionnelle (mathématique), un espace de Banach a la propriété de Banach-Saks si toute suite bornée de cet espace possède une sous-suite dont la moyenne de Cesàro converge. L'étude de cette propriété a été amorcée par Stefan Banach et Stanisław Saks[1].

Définition et motivation modifier

On dit qu'un espace de Banach X a la propriété de Banach-Saks si toute suite bornée (xm)m dans X admet une sous-suite (xmn)n qui converge au sens de Cesàro, c'est-à-dire qu'il existe un vecteur x dans X tel que

 

Beaucoup d'auteurs utilisent pour cette propriété l'abréviation BSP – de l'anglais Banach-Saks property – ou BS.

D'après le lemme de Mazur, toute limite faible d'une suite (xn)n est limite forte (i.e. en norme) d'une suite (yn)n de combinaisons convexes des xn. On peut donc se demander s'il existe même une telle suite (yn)n qui soit la suite des moyennes arithmétiques d'une suite extraite de (xn)n. Puisque l'extraction de sous-suite est inévitable, on peut essayer d'alléger l'hypothèse de convergence faible de la suite (xn)n en la supposant seulement bornée. En effet, au moins dans un espace réflexif, toute suite bornée admet une sous-suite faiblement convergente.

Exemples modifier

On a donc la suite d'implications (strictes) :

super-réflexivité ⇒ propriété de Banach-Saks ⇒ réflexivité,

si bien que la super-propriété de Banach-Saks équivaut à la super-réflexivité.

Transfert modifier

  • Pour tout sous-espace fermé Y d'un espace de Banach X, l'espace X a la propriété de Banach-Saks si et seulement si Y et le quotient X/Y l'ont[7].
  • La propriété de Banach-Saks est conservée par équivalence de norme (contrairement à la convexité uniforme, par exemple).
  • Le dual n'hérite pas de cette propriété.

Notions apparentées modifier

p-propriété de Banach-Saks modifier

On dit qu'un espace de Banach X a la p-propriété de Banach-Saks si, pour toute suite bornée (xm)m dans X, il existe une sous-suite (xmn)n, un vecteur x dans X et une constante C > 0 (qui dépendent de la suite) tels que

 

S'il existe un p > 1 pour lequel X a cette propriété, alors X a la propriété de Banach-Saks ordinaire, car

 

Dans leur article de 1930, Banach et Saks ont essentiellement démontré que pour 1 < p < , Lp([0, 1]) a la p-propriété.

Propriété de Banach-Saks faible modifier

Puisque la propriété de Banach-Sacks entraîne la réflexivité, il est naturel de chercher sous quelle hypothèse supplémentaire on a la réciproque. Un espace de Banach X a la propriété de Banach-Saks faible ou WBS (ou BSR : propriété de Banach-Saks-Rosenthal[6], du nom de Haskell Paul Rosenthal) si toute suite faiblement convergente dans X admet une sous-suite qui converge au sens de Cesàro. Comme toute suite faiblement convergente est bornée, la propriété de Banach-Saks usuelle entraîne cette variante faible, et comme indiqué plus haut, pour un espace réflexif les deux sont équivalentes. Mais beaucoup d'espaces non réflexifs (donc n'ayant pas la propriété usuelle) ont la propriété faible :

  • L'espace L1([0, 1]) a cette propriété faible[8].
  • Pour tout espace métrique compact S, l'espace C(S) a la propriété de Banach-Saks faible si et seulement si l'ensemble dérivé itéré une infinité de fois, S(ω), est vide[9]. Par exemple, C([0, 1]) et = C(βℕ) n'ont pas cette propriété faible, mais l'espace c = C({0, 1, 1/2, 1/3, … }) des suites convergentes l'a.
  • Dans c, l'hyperplan fermé c0 des suites de limite nulle l'a aussi. Plus généralement, cette propriété passe aux sous-espaces fermés (mais pas aux quotients).

On définit de même la p-propriété de Banach-Saks faible.

Propriété de Banach-Saks alternée modifier

On dit qu'un espace de Banach X a la propriété de Banach-Saks alternée (ou ABS) si toute suite bornée (xm)m dans X a une sous-suite (xmn)n dont la suite des « moyennes alternées de Cesàro »

 

converge en norme.

Cette propriété est intermédiaire entre les propriétés de Banach-Saks usuelle et faible[6] et ces implications sont strictes : ℓ1 a la propriété faible (puisqu'il a la propriété de Schur) mais pas l'alternée et c0 a l'alternée[10] mais – comme vu plus haut – pas l'usuelle.

Notes et références modifier

(de) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en allemand intitulé « Banach-Saks-Eigenschaft » (voir la liste des auteurs).
  1. S. Banach et S. Saks, « Sur la convergence forte dans les champs Lp », Studia Mathematica, vol. 2,‎ , p. 51-57 (lire en ligne)
  2. (en) Shizuo Kakutani, « Weak convergence in uniformly convex spaces », Tohoku Math. J., vol. 45,‎ , p. 188-193 (lire en ligne).
  3. a et b (en) Togo Nishiura et Daniel Waterman, « Reflexivity and summability », Studia Mathematica, vol. 23,‎ , p. 53-57 (lire en ligne)
  4. (en) Joseph Diestel, Sequences and Series in Banach Spaces, Springer, coll. « GTM » (no 92), (1re éd. 1984) (ISBN 978-1-4612-9734-5) en donne une autre preuve, reproduite dans (en) Banach-Saks property and reflexivity, sur math.stackexchange.
  5. (en) Albert Baernstein, « On reflexivity and summability », Studia Mathematica, vol. 42, no 1,‎ , p. 91-94 (lire en ligne)
  6. a b et c (en) Bernard Beauzamy, « Banach Saks properties and spreading models », Math. Scand., vol. 44,‎ , p. 357-384 (lire en ligne)
  7. (en) Jesús M. F. Castillo et Manuel González, Three-space Problems in Banach Space Theory, Springer, coll. « Lecture Notes in Mathematics » (no 1667), , 267 p. (ISBN 978-3-540-63344-0, lire en ligne), p. 120, Theorem 4.6.b.
  8. W. Szlenk, « Sur les suites faiblement convergentes dans l'espace L », Studia Mathematica, vol. 25,‎ , p. 337-341 (lire en ligne), contredisant le § 5 de Banach et Saks 1930, p. 55-56
  9. (en) Nicholas R. Farnum, « The Banach-Saks theorem in C(S) », Canad. J. Math., vol. 26,‎ , p. 91-97 (DOI 10.4153/CJM-1974-009-9)
  10. Résultat d'Aleksander Pełczyński cité dans (en) Andrzej Kryczka, « Alternate signs Banach-Saks property and real interpolation of operators », Proc. Amer. Math. Soc., vol. 136,‎ , p. 3529-3537 (DOI 10.1090/S0002-9939-08-09562-2)